III. LES PROPOSITIONS DE VOTRE COMMISSION DES LOIS : L'EXIGENCE D'UN DÉVELOPPEMENT ÉQUILIBRÉ DE LA POLYNÉSIE FRANÇAISE

Les deux projets de loi ont surtout pour objet de clarifier en les précisant, les nombreux apports successifs qui ont marqué le texte actuellement en vigueur. De plus, certaines modifications proposées ne sont pas sans importance sur le caractère et le principe de l'autonomie, ni sur l'exigence d'un développement équilibré de la Polynésie française.

Cela justifie-t-il la réécriture complète du statut ? La commission des Lois a en effet constaté que de nombreuses dispositions de la loi organique relevaient davantage du domaine réglementaire.

Soucieuse cependant de ne pas retarder l'évolution institutionnelle vers une autonomie pleine et entière, elle a adopté les deux projets de loi, sous réserve de quarante-quatre amendements dont trente-huit portant sur le projet de loi organique.

Votre commission a observé que la réforme statutaire offrait peu de place aux communes qui constituent pourtant un cadre naturel du développement économique, social et culturel, en particulier dans un environnement caractérisé par l'éparpillement des îles et l'isolement des archipels. Elle a estimé que la réalisation d'un développement équilibré impliquait une meilleure association des quarante-huit communes.

Elle propose donc d'insérer, parmi les premiers articles du projet de loi organique qui constituent une sorte de préambule, une disposition appelant l'État et le territoire à veiller au développement équilibré de la Polynésie française en apportant leur concours aux communes.

En l'absence de conseils d'archipels qui n'ont jamais vu le jour et auxquels la présente réforme statutaire a renoncé, votre commission propose d'instituer une commission paritaire de concertation chargée d'examiner toute question dont le règlement requiert une coordination des actions et des décisions de l'État, du territoire et des communes. Cette commission paritaire se réunirait une fois par an. Cela vient compléter le dispositif résultant de l'article 94 aux termes duquel « en vue de favoriser le développement économique et social, l'État et le territoire peuvent apporter leur concours financier et technique aux communes ou à leurs groupements ».

Avec cette même préoccupation de garantir le respect des équilibres et des spécificités dans l'ensemble polynésien, elle souhaite tenir compte de la diversité linguistique tout en reconnaissant que le français est la langue officielle, conformément à l'article 2 de la Constitution qui en fait la langue de la République. Est ainsi consacrée dans le statut l'utilisation, non seulement du tahitien mais aussi des autres langues polynésiennes telles que le marquisien, le tuamotu ou le mangarénien (Gambier).

Autre modification importante proposée par votre commission des Lois : la substitution au terme de « député territorial » celui de « conseiller territorial », alors que dans le statut actuel il n'est question que des « membres de l'assemblée territoriale ». Tout en reconnaissant la nécessité de doter la Polynésie française d'une autonomie renforcée, elle a cependant estimé que l'appellation « député territorial » était inopportune et source de confusion avec le mandat de député national. Elle a considéré que, tout en étant un territoire d'outre-mer autonome, la Polynésie française restait partie intégrante de la République et que le titre de député devait être réservé aux représentants nationaux.

Votre commission des Lois propose, en revanche, de consacrer la spécificité des actes pris par l'assemblée de la Polynésie française en leur appliquant un régime contentieux dérogatoire.

L'assemblée de la Polynésie française intervient en effet, par ses délibérations, à la fois dans des matières relevant du domaine réglementaire et dans des matières relevant du domaine de la loi, ce qui justifie un traitement différencié par rapport aux actes pris par d'autres collectivités territoriales qui ne peuvent intervenir en matière législative. Retenant le dispositif contentieux résultant du projet de loi organique initial tendant à ce que le Conseil d'État soit compétent pour connaître en premier et dernier ressort des recours pour excès de pouvoir formés contre ces délibérations, elle a considéré que ce recours direct devant le Conseil d'État offrait l'avantage de réduire les délais de jugement et contribuait à améliorer la stabilité juridique des actes pris par l'assemblée de la Polynésie française.

L'Assemblée nationale avait préféré laisser au tribunal administratif de Papeete la compétence de premier ressort tout en l'obligeant, chaque fois qu'un recours l'aurait conduit à apprécier s'il était fait une exacte application de la répartition des compétences entre l'État, le territoire et les communes a l'occasion d'une requête dirigée contre une délibération de l'assemblée de la Polynésie française, à surseoir à statuer et à saisir pour avis le Conseil d'État. Certes, cet avis est de nature purement consultative mais le tribunal administratif ne serait-il pas de fait lié ?

Afin de conforter le contrôle des comptes territoriaux, votre commission des Lois propose enfin d'instituer une chambre territoriale des comptes compétente pour la seule Polynésie française et dont le siège serait a Papeete alors qu'actuellement les chambres territoriales des comptes de a Polynésie française et de la Nouvelle-Calédonie se confondent en une seule formation située géographiquement à Nouméa.

Sous le bénéfice de ces observations et des amendements qu'elle vous soumet et sous la réserve de la position qu'elle adoptera sur le nombre des ministres lors de sa réunion sur les amendements extérieurs, votre commission des Lois vous propose d'adopter le projet de loi organique portant statut d'autonomie de la Polynésie française et le projet de loi ordinaire le complétant.

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