II. LES PRINCIPALES TENDANCES DE LA FISCALITÉ LOCALE

A. LA FISCALITÉ DIRECTE LOCALE

L'évolution de la fiscalité directe locale, qui constitue la principale ressource des collectivités locales françaises, peut être analysée sous trois angles :

- Du point de vue du contribuable, la charge est constituée par le montant des produits votés par les collectivités locales et les organismes consulaires auxquels s'ajoutent les frais de gestion et autres cotisations prélevées par l'État (frais d'assiette et de recouvrement, frais de dégrèvement 2 ( * ) et d'admission en non-valeur, majoration de la cotisation de péréquation de taxe professionnelle, prélèvement sur la valeur locative en matière de taxe d'habitation). L'ensemble ainsi obtenu est diminué des dégrèvements financés par le budget de l'État (1).

- Du point de vue des collectivités locales, il importe d'ajouter au montant du produit voté (qui inclut, par définition, le montant des dégrèvements) le montant des compensations d'exonérations versées par l'État (2) .

- Enfin, du point de vue de l'État, le coût net de la fiscalité locale est représenté par le solde du montant des compensations d'exonérations et de dégrèvements diminué des sommes perçues au titre des frais de dégrèvement et d'admission en non-valeur ainsi que de différents prélèvements et cotisations (majoration de la cotisation de péréquation de la taxe professionnelle et prélèvement sur la valeur locative en matière de taxe d'habitation : la première a vocation à couvrir une partie du coût du plafonnement de la cotisation de taxe professionnelle par rapport à la valeur ajoutée, la seconde allège le coût pour l'État de l'ancien dégrèvement, devenu exonération, de taxe d'habitation accordée sous condition de ressources)

Au-delà de ces données permanentes, la seconde partie du projet de loi de finances pour 1997 contient deux dispositions qui imposent une contrainte non négligeable sur le cadre d'action des collectivités locales dans la gestion de leur fiscalité directe. Celle-ci réclame pourtant, au contraire, un cadre plus souple, compte tenu des difficultés traversées ; par exemple un "déverrouillage" partiel ou total des taux des "quatre vieilles". D'autant plus que le Gouvernement pourrait déposer, en 1998 un projet de loi portant incorporation dans les bases d'imposition locales des nouvelles évaluations issues de la loi du 30 juillet 1990 (4).

1. L'approche du contribuable: le poids sans cesse croissant de la fiscalité directe locale

Sous l'angle du contribuable, les montants de chacune des quatre taxes directes locales ont évolué comme suit depuis 1986 :

Charge supportée par les redevables

(en millions de francs)

Taxe professionnelle

Taxe d'habitation

Taxe sur le foncier bâti

Taxe sur le foncier non bâti

TOTAL

1986

67.104

32.266

41.381

9.388

150.139

1987

68.149

33.584

45.061

9.355

156.149

1988

73.482

34.841

48.890

9.768

166.981

1989

80.581

37.443

52.235

9.622

179.881

1990

91.160

36.574

56.712

9.125

193.571

1991

98.521

40.868

62.404

8.460

210.253

1992

102.879

44.104

68.212

9.007

224.202

1993

109.484

47.462

76.784

8.141

241.871

1994

112.484

51.157

84.033

7.908

255.582

1995

115.026

53.838

89.847

7.582

266.293

1996(1)

125.152

57.240

96.420

6.975

285.787

(1) Prévisions

Les taux d'évolution des impôts directs locaux réellement supportés par les redevables atteignent donc, pour 1996, par rapport à 1995 :

+ 8,80% pour la taxe professionnelle,

+ 6,32% pour la taxe d'habitation,

+ 7,32% pour la taxe sur le foncier bâti,

- 8,01 % pour le foncier non bâti.

La progression pondérée des quatre taxes directes locales s'élève ainsi, du point de vue du redevable, à 7,32%.

Il convient enfin de rappeler que la pression fiscale supportée par le contribuable local intègre les taxes additionnelles aux impôts locaux dont les collectivités locales ne sont pas responsables, à l'exception toutefois de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères. Ces taxes additionnelles, déjà prises en compte dans les chiffres qui précèdent, sont récapitulées dans le tableau ci-après. Elles comprennent notamment les taxes perçues par les organismes consulaires et les frais d'assiette et de dégrèvements pour le compte de l'État.

Sur ce point, il convient de rappeler que le gouvernement, pour financer le coût des opérations de révision des bases, avait institué dans la loi du 30 juillet 1990 une majoration de 0,4 point sur deux ans des prélèvements pour frais d'assiette et de recouvrement des impôts locaux. Cette majoration a tout d'abord été reconduite en 1993, puis en 1994 et 1995. L'article 19 de la loi de finances pour 1996 a pérennisé la majoration de 0,4 point.

Impositions additionnelles aux quatre taxes locales

1993

1994

1995

1996(1)

Taxes additionnelles au foncier bâti

. Taxe d'enlèvement ordures ménagères

. TEOM La Poste et France Télécom

. Frais d'assiette (4,4 %) et de dégrèvements (3,6 %)

Total

11.710

5.796

17.506

12.992

39

6.360

19.391

14.127

40

7.010

21.177

14.986

44

7.315

22.345

Taxes additionnelles au foncier non bâti

. Taxe pour frais de chambres d'agriculture

. Taxe perçue au profit du BAPSA

. Cotisation pour la caisse d'assurance

accidents agricoles

. Frais d'assiette et de dégrèvements (7,6 %)

Total

1.374

51

74

653

2.152

1.395

49

75

615

2.134

1.430

49

74

590

2.143

1.460

46

74

540

2.120

Taxes additionnelles à la taxe professionnelle

. Taxes chambres de commerce

. Taxe chambres de métiers

. Cotisation de péréquation (2)

. Frais d'assiette et de dégrèvements (7,6 %)

Total

5.237

955

2.899

10.219

19.310

5.494

1.002

3.088

11.174

20.758

5.718

1.043

3.287

11.667

21.715

5.900

1.080

3.500

12.372

22.852

Taxe additionnelle à la taxe d'habitation

. Frais d'assiette (4 %) et frais de dégrèvements (résidences secondaires)

.Taxe additionnelle (3)

Total

2.564

163

2.727

2.751

180

2.931

2.887

197

3.084

3.070

210

3.280

Frais d'assiette et de dégrèvement de La Poste et France Télécom (F.B., F.N.B. et T.P.)

84

92

103

Taxe spéciale d'équipement (Basse-Seine, Métropole lorraine, Nord-Pas-de-Calais et Puy-de-Dôme)

109

108

109

Total général

41.804

45.406

48.320

50.700

(1) Prévisions

(2) Dont versés à l'État : 1.098 millions de francs en 1993, 1.149 millions de francs en 1994, 1.240 millions de francs en 1995 et 1.320 millions de francs en 1996.

(3) Prélèvement sur la valeur locative au profit de l'État, en contrepartie des allégements de taxe d'habitation.

2. Le point de vue des collectivités locales: un faible "effet base" en 1996 compensé par un fort" effet taux"

Sous l'angle des collectivités locales, les produits et les compensations correspondant à chacune des quatre taxes directes locales ont évolué comme suit depuis 1986 :

Produit perçu par les collectivités locales et les organismes consulaires

(en millions de francs)

Taxe professionnelle

Taxe d'habitation

Taxe sur le foncier bâti

Taxe sur le foncier non bâti

TOTAL

1986

79.566

36.858

43.616

8.809

168.849

1987

86.689

39.576

47.117

8.988

182.370

1988

93.923

41.507

50.616

9.024

195.070

1989

101.620

44.206

53.127

8.918

207.871

1990

113.696

47.681

57.678

8.995

228.050

1991

125.738

51.612

62.775

9.202

249.327

1992

135.492

54.814

67.372

9.322

267.000

1993

146.836

59.260

74.868

9.334

290.298

1994

153.033

63.462

81.675

8.885

307.055

1995

160.032

66.863

87.073

8.921

322.889

1996 (1)

168.085

70.927

93.313

8.930

341.255

(1) Prévisions

Les taux d'évolution du produit perçu par les collectivités locales et organismes consulaires atteint donc, pour 1996, + 5,69 % par rapport à 1995, soit :

+ 5,03% pour la taxe professionnelle,

+ 6,08 % pour la taxe d'habitation,

+ 7,17% pour la taxe sur le foncier bâti,

+ 0,10 % pour le foncier non bâti.

a) La fiscalité directe locale connaît une croissance sensiblement plus vive en 1996 qu'en 1995, sans pour autant retrouver les taux de progression du début de la décennie.

Selon les analyses effectuées par la direction générale des collectivités locales sur un échantillon de 4.740 communes (dont toutes celles de plus de 5.000 habitants), ainsi que sur la totalité des régions, des départements et des groupements de communes à fiscalité propre créés avant le 1er janvier 1995, les collectivités territoriales percevront 281 milliards de francs au titre des quatre taxes directes locales (non comprises les allocations compensatrices), soit une progression de 7% par rapport à l'année 1995 (+ 5 % environ en francs constants).

Ces données sont corroborées par l'analyse du Crédit local de France dans son étude précitée parue au mois de juillet dernier.

Cet accroissement de la fiscalité directe n'est pas imputable à un "effet base".

La direction générale des collectivités locales note, en effet, que la croissance des bases d'imposition des collectivités territoriales est très faible en 1996 pour l'ensemble des quatre taxes. Pour la taxe professionnelle, elle est semblable à celle de 1995, plus faible que celle connue tout au long des années 80 et au début des années 90 : 3,2 % pour les bases d'imposition communales, soit 1 % environ en francs constants. Cette évolution est d'autant plus préjudiciable aux collectivités que la taxe professionnelle représente leur ressource fiscale principale -49,3 % du produit voté des quatre taxes-, et constituait jusqu'à ces deux dernières années le moteur essentiel de la croissance de leur produit. Cette maigre croissance trouve sa source dans la situation économique enregistrée en 1994, année servant de support à l'établissement des bases d'imposition pour cette taxe en 1996.

La croissance des bases du foncier bâti et surtout de la taxe d'habitation est également très faible cette année: respectivement 1,8% et 0,3 % environ en francs constants, pour les bases d'imposition communales.

b) La hausse de la fiscalité locale est donc essentiellement due à un "effet taux".

L'évolution constatée de ce point de vue est plus sensible pour les communes et leurs groupements.

Les taux d'imposition augmentent plus rapidement qu'en 1995 à chaque échelon territorial, mais ce ressaut de la pression fiscale est, en effet, plus particulièrement prononcé dans les communes.

En effet, la première année de mandat se traduit généralement dans les budgets communaux par une sollicitation accrue des contribuables, après une année de pause marquée par les élections municipales. En outre, la fiscalité communale continue d'être tirée par le développement de l'intercommunalité.

La direction générale des collectivité locales observe ainsi que les communes et les groupements de communes à fiscalité propre 3 ( * ) percevront un produit en hausse de 7,2 % par rapport à 1995, soit 5 % environ en francs constants. Après une année 1995 marquée par l'échéance municipale et par une faible augmentation de la fiscalité (4,4 %, soit 2,7 % en francs constants), celle-ci retrouve une croissance plus proche de celle connue entre 1990 et 1994.

La croissance est de 6,5 % (4,5 % environ en francs constants) pour les seules communes.

Cette évolution est caractérisée par une faible croissance des bases à laquelle se surajoute une évolution des taux de 3,6 % pour la taxe professionnelle à 4,5 % pour la taxe d'habitation (3,1 % à 3,9% pour les seules communes).

Le processus d'intégration intercommunale se poursuit. La part du produit voté par les groupements de communes à fiscalité propre dans le produit prélevé par l'ensemble des communes et des groupements à fiscalité propre passe de 11,8% en 1995 à 12,4% en 1996. Le produit de ces groupements a augmenté de 11,8 % (près de 10 % en francs constants), dont 3,6 points (714 millions de francs) dus à la création de nouveaux groupements. Les communautés de communes et les districts existant déjà en 1995, qui ont beaucoup développé leurs activités récemment, ont augmenté leur produit de 12,7 %.

S'agissant des départements, la croissance de leur produit est restée modérée en 1996, comparée à celle des années précédentes : +6,3%, soit + 4,1 % en francs constants.

Cette modération apparente reflète toutefois l'arrivée à son terme du processus devant conduire, en 1996, à l'exonération complète de la part départementale de la taxe foncière perçue sur les propriétés non bâties à usage agricole. En effet, l'exonération ne portait encore, en 1995, que sur les sept neuvièmes des bases.

Les pertes de recettes correspondantes devraient donner lieu à un versement de l'État à hauteur de 485 millions de francs. Un calcul "à législation constante" tenant compte de cette compensation aboutit à une augmentation du produit des quatre taxes de 4,8 % en francs constants, soit un niveau proche de celui constaté pour les communes.

Près d'un département sur quatre a reconduit les taux qu'il avait votés en 1995.

La chute du taux moyen du foncier non bâti provient d'un effet statistique dû au changement de la structure des bases occasionné par l'exonération des terres agricoles, comme on vient de le voir. A "structure des bases constante" (en pondérant par la structure des bases de 1995), la variation du taux moyen est de + 2,7 %.

Enfin, pour la deuxième année consécutive, la croissance des produits votés par les régions a été limitée en 1996 : + 7,5 %, soit 5,2 % en francs constants. A législation constante, la croissance enregistrée depuis deux ans est la plus faible de ces 15 dernières années. Cette évolution est quasi-généralisée : 13 régions sur 26 ont maintenu leurs taux de 1995.

Le tableau et le graphique suivants résument l'analyse qui précède.

1. Évolution du produit voté des quatre taxes directes locales (métropole) A législation constante et en francs constants

(en pourcentage)

Communes et groupements

Départements

Régions

Toutes collectivités

1989

+ 2,3

+ 3,1

+ 24,8

+ 3,7

1990

+ 5,9

+ 5,9

+ 16,2

+ 6,5

1991

+ 5,4

+ 6,2

+ 9,8

+ 5,9

1992

+ 6,5

+ 6,3

+ 6,7

+ 6,5

1993

+ 7,1

+ 9,3

+ 21,0

+ 8,7

1994

+ 6,0

+ 7,6

+ 14,8

+ 6,9

1995

+ 2,7

+ 5,3

+ 5,2

+ 3,6

1996

+ 5.0

+ 4,8

+ 5,3

+ 5,0

Source : Direction générale des collectivités locales

2. Taxe professionnelle des communes :
Effet base / Effet taux (en %)

Source : Crédit local de France

3. La charge des compensations d'allégements d'impôts locaux pour l'État: un coup d'arrêt incontestable en 1996

Ce coût a, ces dernières années, évolué comme suit :

Coût des allégements d'impôts pour le budget de l'État (1)

Taxe professionnelle

Taxe d'habitation

Taxe sur le foncier bâti

Taxe sur le foncier non bâti

TOTAL

1986

(2)

16.929

22,41 %

6.066

16,47%

3.687

8,36%

26.682

77,05%

1987

(2)

22.665

27,53 %

7.575

19,15%

3.877

8,19%

34.117

20,16%

1988

(2)

24.825

27,81 %

8.326

20,07%

3.316

65,57%

36.467

20,12%

1989

(2)

25.690

26,58 %

8.533

79,5/ %

2.643

5,03%

36.866

19,06%

1990

(2)

27.749

25,60%

13.127

27,54%

3.159

5,57%

313

4,07%

44.348

20,84 %

1991

(2)

33.552

27,92%

13.015

25,25 %

3.012

4,93%

1.230

15,70%

50.809

27,52 %

1992

(2)

39.448

30,44%

12.864

23,48%

2.046

3,16%

805

10,17%

55.163

22,75%

1993

(2)

44.799

31,87%

14.149

25,59%

1.272

7,79%

1.627

20,58%

61.847

22,83 %,

1994

(2)

48.637

55,20 %

14.827

23,37%

1.139

1,50%

1.391

18,70 %

65.994

23,08%

1995

(2)

53.488

34,91%

15.677

25,45 %

978

1,22%

1.731

23,27%

71.874

23,93 %

1996

(Prévisions)

51.947

52,24%

16.507

23,27%

912

1,06%

2.329

31,37%

71.695

22,56%

1996/1995

- 2,88%

+ 5,29%

- 6,75%

+ 34,55%

- 0,25%

(1) Ces chiffres intègrent à la fois les dégrèvements "législatifs" et les dégrèvements ordinaires ainsi que les autres compensations. Le montant perçu par l'État au titre des frais de dégrèvement en est soustrait ce qui explique la différence constatée avec le tableau de la page suivante relatif au coût pour l'État des exonérations et dégrèvements de taxe professionnelle.

(2) En proportion des produits toutes collectivités confondues (produits : taxes principales + compensations).


• Ces chiffres révèlent, pour la première fois, une décroissance (- 0,25%) de la charge représentée, pour l'État, par la fiscalité directe locale. L'impact des compensations à verser est, en effet, passé de 24,3 milliards de francs à 71,9 milliards de francs entre 1984 et 1995, soit une multiplication par un coefficient de près de 3, pour redescendre à 71,7 milliards de francs en 1996. La prise en charge par l'État d'abattements, d'exonérations et de dégrèvements divers s'élève ainsi, en net, à 22,6% du produit théorique que les collectivités locales devraient percevoir au titre de leur fiscalité directe, au lieu de 23,9% en 1995. Jamais la participation de l'État n'avait été aussi élevée que l'année dernière puisqu'elle était passée de 12,23 % en 1984 à 20,16 % en 1987 pour redescendre un peu en 1988 et 1989 et ne plus cesser d'augmenter depuis.


• L'impôt le plus coûteux pour l'État demeure la taxe professionnelle. C'est toutefois l'effort imposé aux collectivités compensées ainsi qu'aux contribuables à ce prélèvement qui permet d'amorcer le reflux constaté dans le tableau de la page précédente.

La répartition de la charge occasionnée par cet impôt s'est établie comme suit au cours des dernières années :

(en millions de francs)

1992

1993

1994

1995

1996 (Prévisions)

- Dotation de compensation de la taxe professionnelle

. Plafonnement taux TP 1983

. Réduction salaires

. Réduction embauche et investissement (1)

. Abattement général 16 % bases TP (2)

23.451

586

3.195

4.248

15.422

22.773

575

3.136

3.925

15.137

18.257

535

2.918

3.498

11.306

18.257

545

3.019

2.999

11.694

17.456

515

2.857

3.026

11.058

- Statut fiscal de Corse (Loi du 27/12/94)

307

323

- Zones de revitalisation rurale et de redynamisation urbaine (L. du 04/02/95)

6

- Dégrèvements prononcés

Dont dégrèvement de cotisation pour la fraction > 3,5 % de la valeur ajoutée (3)

21.169

14.988

27.697

18.579

36.554

27.013

41.396

31.242

41.020

29.552

TOTAL

44.620

50.470

54.811

59.960

58.799

(1) À compter de 1992, cette compensation a subi une réfaction se traduisant par un ticket modérateur de 2 % produit des quatre taxes directes locales (art. 46-LFI 1992).

(2) À compter de 1994, une ponction a été opérée sur cette dotation en fonction du taux de progression du produit de taxe professionnelle perçu par les collectivités locales; à compter de 1996: application du "pacte de stabilité

(3) À compter de 1995, taux relevé à 3,8% ou 4% en fonction du chiffre d'affaires de l'entreprise.

Le ralentissement sensible de la progression du coût à structure constante des compensations d'exonérations et de dégrèvements de taxe professionnelle a été obtenu par une double action, sur la dotation de compensation de la taxe professionnelle (DCTP) et le dégrèvement de cotisation en fonction de la valeur ajoutée.

La dotation de compensation de la taxe professionnelle :

- À compter de 1992, la compensation de la réduction pour embauche et investissement a subi une réfaction se traduisant par un ticket modérateur de 2 % du produit des quatre taxes directes locales. L'intention initiale du Gouvernement était d'ailleurs de poursuivre le mouvement d'extinction de la compensation de la REI, dans le projet de loi de finances initiale pour 1997, en supprimant tout remboursement des pertes pour les collectivités dont les bases progressent à un taux supérieur à la moyenne nationale et en écrêtant la compensation versée aux autres (voir infra, seconde partie du présent rapport).

- À compter de 1994, la compensation versée aux collectivités locales au titre de l'abattement de 16 % des bases de taxe professionnelle a fait l'objet d'une ponction calculée, pour chaque collectivité concernée, en fonction de l'évolution de son produit de taxe professionnelle entre 1987 et l'année précédant celle du versement de la DCTP (article 54 de la loi de finances initiale pour 1994, pérennisé par l'article 20 de la loi de finances pour 1995).

Le dégrèvement au titre du plafonnement de taxe professionnelle par rapport à la valeur ajoutée

L'article 17 de la loi de finances initiale pour 1995 comporte :

- d'une part, une limitation à 500 millions de francs au lieu de 1 milliard de francs, du montant du dégrèvement susceptible d'être obtenu par une même entreprise au titre du plafonnement par rapport à la valeur ajoutée ;

- d'autre part, un relèvement de 3,5 % à 3,8 % ou 4 % du taux du plafonnement, pour les entreprises réalisant un chiffre d'affaires excédant respectivement 140 millions de francs et 500 millions de francs.

La loi de finances pour 1996 a prévu une consolidation, voire une accentuation, de cet effort de stabilisation des dépenses de l'État :

- par la transformation de la DCTP en "variable d'ajustement" permettant de limiter l'évolution de l'ensemble des concours indexes verses aux collectivités locales au rythme de progression des prix ;

- par la pérennisation 4 ( * ) des dispositions de l'article 17 de la loi de finances initiale pour 1995 complétées par le principe d'un gel du taux de taxe professionnelle retenu pour calculer la cotisation faisant l'objet du dégrèvement.

En 1996, les économies induites par cet article sont de 925 millions de francs au titre du plafonnement du montant du dégrèvement à 500 millions de francs, 3.268 millions de francs au titre du relèvement à 3,8% ou 4% du taux du plafonnement et 36 millions de francs (1.700 millions de francs en 1997) au titre du gel du taux de la compensation au niveau atteint en 1995.

Toutefois, il est sans doute encore trop tôt pour affirmer que le coup d'arrêt porté à la progression continue de la charge pour l'État des exonérations et dégrèvements de taxe professionnelle est durable. En effet, le coût des exonérations, en particulier, doit connaître une hausse conjoncturelle, liée à la montée en régime de deux mécanismes:

- Celui de la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire et de la loi relative à la mise en oeuvre du pacte de relance pour la ville, même si une partie de la charge doit être imputée sur les ressources du Fonds national de péréquation de la taxe professionnelle.

- Celui de la loi portant statut fiscal de la Corse, qui doit être complété, en loi de finances rectificative pour 1996, par la mise en place d'un régime de zone franche (300 millions de francs sont provisionnés à ce titre pour 1997 dans le prélèvement sur les recettes de l'État au titre de la compensation d'exonérations relatives à la fiscalité locale).

Enfin, la dotation de compensation de la taxe professionnelle, hors réduction pour embauche et investissement, progressera de 2% en 1997, en application des dispositions du pacte de stabilité, grâce à une croissance très faible de la DGF l'an prochain.


• La chute constante du coût pour l'État des compensations pour pertes de produit de taxe foncière sur les propriétés bâties revêt un aspect moins volontariste.

Elle a certes puisé son origine dans la suppression des remboursements accordés aux collectivités locales au titre de l'exonération de deux ans pour les constructions nouvelles ainsi que dans la substitution du prêt à taux zéro aux anciens PAP.

Mais elle est également mécaniquement activée par des sorties d'exonérations, correspondant aux constructions sociales des années 1970 supérieures en nombre aux entrées des années 1990, marquées par un reflux du logement social.


• Le poids grandissant de la taxe d'habitation dans le coût des allégements d'impôts pour le budget de l'État a marqué un premier temps d'arrêt en 1992 grâce à la transformation de certains dégrèvements en exonérations compensées aux collectivités locales en appliquant aux bases concernées le taux de l'impôt gelé à son niveau de 1991.

Cependant, la charge induite pour l'État a atteint 15,7 milliards de francs selon les données pour 1995, et a progressé de 5,7% par rapport à 1994.

En réponse à cette situation, l'article 18 de la loi de finances initiale pour 1996 a réduit et gelé, à compter de l'année en cours, à 13.300 francs le plafond de la cotisation d'impôt sur le revenu pris en compte pour le calcul du plafonnement de la cotisation de taxe d'habitation institué par l'article 1414 C du code général des impôts (exonération de taxe d'habitation à concurrence de la fraction de cet impôt excédant 3,4% du revenu, dans la limite de 50% de la fraction de taxe d'habitation excédant 1951 francs).

Pour autant, le coût pour l'État des compensations de taxe d'habitation aurait continué de progresser, passant à 16,5 milliards de francs en 1996, en augmentation de 5,3% par rapport à 1995.

Les éléments fournis par le Service de la législation fiscale montrent que cette tendance s'explique par une forte progression des cotisations de taxe d'habitation pour 1996 (+ 6,4%) et par une moindre progression de l'impôt sur le revenu pour 1996 (+ 2,3%) faisant référence au revenu de 1995 (+ 1,4%).

La mesure contenue dans l'article 18 de la loi de finances pour 1996 a tout de même engendré une économie budgétaire de 426 millions de francs, puisque le dégrèvement résultant du plafonnement de la taxe d'habitation en fonction du revenu atteindrait pour l'année en cours 3.230 millions de francs au lieu de 3.656 millions de francs à structure constante.

De ce point de vue, le projet de loi de finances pour 1997 se contente de proposer une mesure que l'on pourrait qualifier de "prophylactique": afin d'éviter la contagion sur la taxe d'habitation de la diminution globale du barème de l'impôt sur le revenu, l'article 8 déconnecte les exonérations et dégrèvements de taxe d'habitation du montant des cotisations à l'impôt sur le revenu et les soumet directement à des conditions de revenu.


• Enfin, même si sa part relative dans les charges assurées par l'État reste très faible avec un peu plus de 2,3 milliards de francs, la compensation des dégrèvements et exonérations de taxe foncière sur les propriétés non bâties progresse de 34,5 % en 1996 par rapport à 1995.

Ce fort indice d'évolution est, pour une large part, le reflet des dispositions de la loi de finances rectificative pour 1993 qui prévoient l'exonération complète progressive de la part départementale de la taxe sur le foncier non bâti appliqué aux terres à usage agricole (3/9 pour 1993, 5/9 pour 1994, 7/9 pour 1995 et la totalité en 1996).

4. La seconde partie du projet de loi de finances pour 1997: des mesures contraignantes pour la gestion fiscale des collectivités locales, a contrecourant de la souplesse qu'exigent les difficultés traversées

Les articles 74 et 75 du projet de loi de finances pour 1997 prévoient respectivement la fixation des coefficients de majoration des valeurs locatives servant de base aux impôts directs locaux en 1997 et le plafonnement du taux de taxe professionnelle voté par les conseils généraux et les conseils régionaux.

a) La fixation des coefficients de majoration des valeurs locatives servant de base aux impôts directs locaux en 1997

Le gouvernement propose d'appliquer un coefficient de majoration égal à 1, au titre de 1997, aux valeurs locatives des propriétés non bâties et des immeubles industriels figurant à l'actif d'une entreprise soumise au régime de l'imposition d'après le bénéfice réel. Cette absence de revalorisation des bases est pratiquée sans interruption depuis 1990 pour les propriétés non bâties et depuis 1992 pour les immeubles industriels figurant à l'actif d'une entreprise soumise au régime de l'imposition d'après le bénéfice réel.

Pour la première fois, le gouvernement proposait en outre la reconduction pure et simple des valeurs locatives des autres propriétés bâties qui se voyaient ainsi appliquer un coefficient de revalorisation égal à 1, alors qu'il avait été de 1,01 en 1996, 1,02 en 1995 et 1,03 en 1994.

L'Assemblée nationale, sur proposition de sa commission des finances, a cependant contesté ce gel généralisé des bases et imposé un coefficient de 1,01 (soit + 1 %) pour l'ensemble des propriétés bâties autres que les immeubles industriels ne relevant pas de l'article 1500 du code général des impôts.

Par ailleurs, au cours de la séance du 17 septembre 1996 du comité des finances locales, M. Alain Lamassoure, ministre délégué au Budget a indiqué que le gouvernement procédait à une nouvelle rédaction du projet de loi portant incorporation dans les rôles d'imposition des nouvelles évaluations cadastrales issues de la loi du 30 juillet 1990, afin de tenir compte des observations émises par les membres du comité 5 ( * ) .

Quatre demandes émanant du comité des finances locales ont été expressément reprises par M. Lamassoure dans son intervention :

- la suppression d'un groupe spécifique de tarification pour les logements à caractère social ;

- l'application d'un taux de revalorisation de 1,61, au lieu de 1,37 initialement proposé par le gouvernement, pour les évaluations cadastrales des locaux industriels et commerciaux ;

- l'allongement de trois à quatre ans de la période d'intégration des nouvelles bases d'imposition ;

- l'abaissement à 15 % et 300 francs d'accroissement des cotisations d'une année sur l'autre (au lieu de 50 % et 500 francs) des seuils d'écrêtement.

La date possible d'examen du projet de loi -soit le premier semestre de 1997- rend toutefois plus incertaine la détermination de la première année de mise en oeuvre de la réforme -1998 ou 1999-, les services du ministère du Budget estimant qu'une année pleine est nécessaire entre le vote du texte et son application pour procéder aux derniers ajustements techniques.

b) Le durcissement des règles de plafonnement du taux de taxe professionnelle voté par les collectivités territoriales

Le gouvernement a proposé d'étendre aux départements et aux régions le principe applicable aux communes selon lequel le taux de taxe professionnelle voté par une collectivité ne peut excéder deux fois le taux moyen constaté l'année précédente au niveau national pour l'ensemble des collectivités de même nature.

Le taux moyen départemental de taxe professionnelle s'établissait à 6,44 % en 1995 et le taux moyen régional à 1,83 %. Appliqués dès 1996, les plafonds de taux de taxe professionnelle auraient ainsi été de 12,88 % pour les départements et 3,66 % pour les régions.

La portée pratique de ce dispositif était toutefois nulle dans l'immédiat, aucun département ni aucune région ne présentant des taux proches du plafond proposé.

Le gouvernement avait lui-même présenté ce dispositif comme un geste symbolique de bonne volonté à l'égard des entreprises.

L'Assemblée nationale l'a doublement durci :

- en imposant un plafond égal à 1,9 fois la moyenne nationale, y compris pour les communes, sans majoration de la compensation instituée en 1983 ;

- en gelant la base de comparaison à la moyenne constatée en 1996, alors que dans le régime aujourd'hui en vigueur pour les communes, cette base est constituée par la moyenne de l'année précédente.

Votre rapporteur spécial estime pour sa part que ce gage donné aux entreprises est inopportun alors que l'environnement qui avait présidé à l'instauration du plafonnement de la taxe professionnelle et à son corollaire, le "verrouillage" des taux des quatre "vieilles", s'est modifié du tout au tout.

Loin d'être soumis au bon vouloir des collectivités locales, ce sont les contribuables à la taxe professionnelle qui, aujourd'hui, exercent un "chantage" permanent à la délocalisation des activités économiques.

Cette remarque devrait d'ailleurs conduire votre commission des finances à vous proposer, dans le cadre de l'examen des articles non rattachés de la deuxième partie du projet de loi de finances, outre une amodiation substantielle, voire la suppression de l'article 68, un processus d'assouplissement des règles de liaison entre les taux des quatre impôts directs locaux fixées par l'article 1636 B sexies du code général des impôts.

* 2 Il s'agit des dégrèvements accordés par le Trésor et non des dégrèvements législatifs.

* 3 Les chiffres concernant les contributions fiscalisées aux syndicats intercommunaux sans fiscalité propre ne sont pas encore disponibles.

* 4 Le Parlement, suivant la position du Sénat, n'a toutefois voté que le prolongement jusqu'en 1998 de ces dispositions et n'a pas suivi le gouvernement dans son souhait d'une pérennisation.

* 5 Propos confirmés par le ministre de l'Économie et des finances, M. Jean Arthuis, devant le récent Congrès des Maires de France.

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