V. INDUSTRIE ÉLECTRIQUE ET ÉLECTRONIQUE

En 1995, le chiffre d'affaires des industries électriques, électroniques et informatiques a progressé de 5 % par rapport à 1994 pour atteindre 310 milliards de francs. Fait remarquable, pour la première fois depuis 1987, le secteur a retrouvé un solde des échanges positif, de 7,3 milliards de francs (contre un déficit de 2 milliards en 1994). En effet, les exportations de l'an passé ont progressé de 14 % par rapport à 1994 et ont atteint 200 milliards de francs. Les importations, quant à elles, n'ont crû que de 8,6 % à 192,7 milliards de francs. A noter que l'Union européenne a absorbé 60 % des exportations (120 milliards de francs) et a fourni 48% des importations (92 milliards). L'an passé, l'Asie a, pour sa part, représenté 14 % des exportations (28 milliards de francs) mais surtout 26,5 % des importations (51 milliards dont 19,6 milliards en provenance du Japon). Néanmoins, depuis 1987, la part des exportations vers l'Asie a plus que doublé. Enfin, 6,7 % des exportations (13 milliards de francs) et 19,2% des importations ont été effectuées avec les États-Unis. Cependant il faut souligner le rôle néfaste, pour les entreprises françaises, de la sous-évaluation du dollar.

C'est grâce à la croissance des exportations que le secteur des biens de consommation -produits bruns, terminaux télécoms, tec, représentant 12 % du total des facturations des industries électriques, électroniques et informatiques- a pu, en 1995, croître de 6 %, à 38 milliards de francs. Les biens intermédiaires (composants électroniques, constituants électriques...), quant à eux (10 % des facturations totales), ont, en 1995, progressé de 13 % à 30 milliards de francs. Cette croissance s'explique par celle des composants électroniques (représentant 4/5 des facturations des biens intermédiaires).

Enfin, les biens d'équipements (78 % du chiffre d'affaires des industries électriques, électroniques et informatiques) ont enregistré, en 1995, une croissance de 4,6 %, à 242 milliards de francs. Ce malgré une baisse de la demande nationale, elle-même conséquence des ralentissements des grands programmes d'équipement publics nationaux et européens, et de la baisse des crédits d'équipements prévue dans la loi de programmation militaire.

Pour 1996, les prévisions étaient très mesurées s'agissant du premier semestre ou des réactions de prudence étaient attendues des consommateurs.

A. L'ÉLECTRONIQUE

Le ministère de l'industrie, des postes et des télécommunications a commandé un rapport sur la recherche-développement en micro-électronique en France. Les enjeux sont de taille : il s'agit de préparer les techniques nécessaires à la fabrication des semi-conducteurs de l'an 2000 (utilisation de tranches de silicium de 300 millimètres de diamètre, gravure sur les circuits intégrés de traits de 0.18 micron d'épaisseur). Des travaux qui exigeront des investissements très lourds. Ce qui pose, selon les commentateurs, la question de l'engagement des différents partenaires, et notamment celui de France Télécom.

Dans le même temps, les négociations ont été poursuivies, dans le cadre de la Commission de l'Union européenne, pour le nouvel accord commercial à conclure avec les États-Unis et le Japon en matière de marché des semi-conducteurs. L'accord de 1991 expirait, en effet, au 31 juillet 1996.

Enfin, les fabricants de semi-conducteurs ont fait savoir, en avril 1996, que la taxe professionnelle risquait de faire fuir les investisseurs vers des pays plus attractifs. Selon eux, cet impôt constitue un frein sérieux aux investissements, dans une industrie en plein essor et forte consommatrice de capitaux.

Alors que la moyenne nationale est de 10.000 à 15.000 francs par employé, cette industrie débourse 4 fois ce montant en raison du niveau élevé des investissements industriels. Et, dès 1997, celle-ci pourrait avoisiner les 100.000 francs par employé.

Pour finir, il convient de souligner qu'en 1995, la croissance en France du secteur des logiciels et services informatiques n'a pas excédé 4 % à 5 %, guère plus qu'en 1994, le marché s'établissant à environ 105 milliards de francs. Considérée il y a peu encore comme l'une des plus belles réussites françaises, l'industrie des services informatiques est ainsi entrée dans une phase de restructuration dont ses voisines européennes ont déjà fait l'expérience. Les principales entreprises du secteur se trouvent au coeur de ce mouvement et voient leurs actionnaires historiques chercher à se désengager ou à s'associer le concours de nouveaux partenaires. Certains sont déjà passés dans le giron américain. La crise économique, dont le secteur n'est toujours pas sorti, et les évolutions technologiques ont profondément modifié les attentes des entreprises et révélé les faiblesses des sociétés de services informatiques françaises. L'industrialisation des prestations, mais aussi l'abandon d'une offre généraliste pour une spécialisation plus poussée deviennent de plus en plus une nécessité.

* Bull : un objectif fédérateur de l'industrie européenne

Après une perte nette de 1,9 milliard de francs en 1994, Bull a connu le retour des bénéfices en 1995 (306 millions de francs pour 26,6 milliards de chiffre d'affaires (en recul de 3 %).

Le processus de privatisation a été engagé. Le groupe reste majoritairement contrôlé par l'État (36,4 %) mais d'ici à 1997, la part de l'État pourrait se situer entre 10 et 20 % et celle des actionnaires entre 10 et 15 %. Rappelons que NEC possède désormais 17 % de Bull, de même que Motorola.

L'endettement du groupe atteignait 2,14 milliards de francs pour 1995 et le bénéfice (1,1 % du chiffre d'affaires) reste loin de la rentabilité.

Enfin, le chiffre d'affaires de la branche « grands ordinateurs » du groupe a chuté sensiblement, à son tour, en 1995.

En 1996, l'objectif que s'assigne Bull est de fédérer l'industrie de l'informatique européenne. Un plan à cinq ans, « Bull 2000 » est élaboré pour détailler la stratégie du groupe. Il s'agit principalement de le doter de plus d'efficacité commerciale.

L'organisation du groupe a été profondément remaniée en février 1996 et un accord salarial conclu en mars. Le chiffre d'affaires du premier trimestre de 1996 était en hausse de

3 % par rapport à 1995, grâce à l'activité « intégration de systèmes ».

Tirant les conséquences de son échec dans la micro-informatique, Bull a revendu sa filiale américaine 2DS en février 1996, acquise en 1989, en contrepartie d'obligations convertibles de l'américain Packard-Bell.

Les commentateurs s'interrogent sur deux points : d'une part, faut-il s'attendre à des cessions répétées des actifs de Bull ? d'autre part, le report sur 1996 de certaines dépenses de 1995 ne menace-t-il pas les résultats du groupe cette année ?

* Thomson : le difficile choix d'un repreneur

Thomson-CSF a enregistré une perte nette, part du groupe, de 712 millions de francs pour 1995.

La perte consolidée (non part de groupe) est légèrement inférieure à 800 millions de francs.

Le prix de cession minimum des titres du Crédit Lyonnais détenus par Thomson-CSF a été fixé à 2,859 milliards de francs. De ce montant sera déduit la somme due par Thomson-CSF au titre du transfert de garantie sur les actifs immobiliers du Crédit Lyonnais (447 millions de francs), déjà provisionnée dans les comptes.

Quant à Thomson multimédia, filiale électronique grand public du groupe, elle a connu une mauvaise année avec une perte nette de 1,09 milliard de francs l'an dernier contre une perte de 596 millions de francs en 1994. Il s'agit du plus mauvais résultat enregistré depuis 1993 (973 millions de francs de pertes). Le résultat d'exploitation a reculé (352 millions de francs contre 604 millions de francs). Le chiffre d'affaires est également en baisse de 4,2 %, à 36,5 milliards contre 38,1 milliards de francs.

Le choix a été opéré par décret, en février 1996, de céder les titres détenus par l'État dans Thomson SA, maison-mère du groupe privatisé en 1982, sans opérer de partition de celui-ci. Un nouveau président a été nommé à cette occasion.

Thomson multimédia, contrôlée à 100 % par Thomson SA, pourrait rapporter 3 à 4 milliards. Enfin, les 20 % de Thomson CSF dans SGS-Thomson sont évalués à 4 à 5 milliards de francs.

Le décret instituant une action spécifique de l'État au capital de Thomson SA, le groupe français d'électronique en voie de privatisation a été publié fin juillet 1996. Cette action spécifique ou « golden share » vise à « protéger les intérêts nationaux », précise le décret. Le gouvernement a fixé les règles du jeu de la privatisation de Thomson SA. La vente se fera de gré à gré, sans appels d'offres. La « golden share » autorise notamment l'État à s'opposer à toute décision de cession de l'actif qui concentre les activités de défense du groupe, à savoir Thomson CSF et certaines de ses filiales.

Le choix du repreneur s'est, en définitive, porté sur Matra-Hachette en octobre 1996.

L'État ne retirera de cette privatisation aucun gain financier, Thomson S.A. étant cédé pour le franc symbolique, en raison de son endettement de 25 milliards de francs. 11 milliards de francs seront nécessaires pour recapitaliser Thomson S.A. L'État conservera comme prévu une action spécifique dans le capital de Thomson S.A. afin de préserver les intérêts de la défense nationale.

Le nouveau groupe cédera l'activité d'électronique grand public Thomson Multimédia, endettée de 14 milliards (pour un chiffre d'affaires de 36,5 milliards de francs), au sud-coréen Daewoo et ne conserver que la branche électronique de défense Thomson-CSF.

Recentré sur la défense, Thomson-CSF s'appellera Thomson-Matra. Le repreneur a proposé de reprendre les parts des minoritaires dans Thomson-CSF cotée en bourse pour 7,8 milliards de francs (156 francs/action) et précisé qu'il comptait ensuite conserver au moins 60 % des actions dans la perspective d'une ouverture du capital et de sa cotation en bourse.

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