ARTICLE 6

Modalités de souscription d'un plan d'épargne retraite

Commentaire : le présent article définit les modalités de souscription d'un plan d'épargne retraite.

I. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le Sénat, en première lecture, a réécrit cet article afin d'en clarifier la portée.

Les plans d'épargne retraite peuvent être souscrits par un ou plusieurs employeurs ou par un groupement d'employeurs au profit de leurs salariés.

La souscription peut tout d'abord résulter d'un accord collectif conclu au sein de l'entreprise ou à un échelon professionnel ou interprofessionnel, local, régional ou national. Compte tenu du caractère facultatif de l'épargne retraite, les dispositions du code du travail relatives à l'extension et à l'élargissement ne sont pas applicables à ces accords. De même, sont écartées les dispositions qui interdisent à un accord conclu à un échelon inférieur toute dérogation moins favorable à un accord conclu à un échelon supérieur.

Indépendamment de tout accord collectif, un employeur ou un groupement d'employeur peut décider de souscrire un plan d'épargne retraite au profit de ses salariés.

Dans les deux cas, les plans d'épargne retraite doivent être proposés à l'ensemble des salariés.

Toutefois, lorsque la souscription d'un plan d'épargne retraite résulte d'un accord collectif, les conditions d'adhésion des salariés peuvent être définies selon des catégories homogènes. Dans le cas contraire, les conditions d'adhésion des salariés de l'entreprise doivent être identiques.

Outre quelques modifications formelles, l'Assemblée nationale a modifié le texte adopté par le Sénat sur deux points importants.

En premier lieu, les députés ont souhaité n'autoriser la souscription de plans d'épargne retraite par voie de décision unilatérale qu'en cas " d'impossibilité de conclure un accord, ou à défaut de conclusion d'un accord dans un délai fixé par décret ".

En second lieu, ils ont réintroduit à cet endroit du texte la possibilité, ouverte par le Sénat à l'article premier, pour un salarié appartenant à une entreprise ou à un secteur n'ayant pas pu ou pas souhaité mettre en place un plan d'épargne retraite d'adhérer à un plan existant.

Toutefois, ils ont substantiellement modifié cette possibilité en prévoyant qu'une telle faculté ne serait ouverte qu'à défaut de l'intervention, dans un délai de deux ans à compter de la promulgation de la présente loi, d'un accord interprofessionnel national ou d'une décision unilatérale couvrant l'ensemble des salariés compris dans le champ d'application de la loi.

En outre, les députés ont prévu qu'un salarié ayant adhéré à un plan d'épargne retraite existant à un moment où son entreprise n'aurait pas institué un tel plan, puissent le jour où cette entreprise mettra en place un plan d'épargne retraite, transférer, sans pénalité, leurs droits acquis vers ce plan.

II. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

La position adoptée par le Sénat en première lecture constituait un équilibre entre la volonté de favoriser la négociation collective et celle de ne pas entraver l'essor souhaité des fonds d'épargne retraite : les employeurs ont la possibilité de souscrire par décision unilatérale ; mais comme ils doivent alors prévoir des conditions identiques, notamment en termes d'abondement, pour l'ensemble de leurs salariés, ils auront tout intérêt à engager une négociation collective.

La modification apportée par l'Assemblée nationale a pour objectif affiché de privilégier la négociation collective. Toutefois, elle risque de produire des effets pervers contre les salariés eux-mêmes.

En effet, hormis les cas où un accord collectif aura été conclu, l'épargne retraite ne pourra que très difficilement être mis en oeuvre.

En particulier, dans les PME, il semble que s'il n'y a pas d'acord d'entreprise, ce qui sera très souvent le cas lorsqu'il n'y a pas de représentation du personnel, ce sera l'accord de branche, s'il existe, qui s'appliquera à toutes les entreprises, privant les chefs d'entreprises de toute possibilité de décision unilatérale et les salariés de toute possibilité de choix individuel.

En outre, le renvoi à un décret pour fixer le délai permettant de vérifier l'impossibilité de conclure un accord n'est pas satisfaisant. Pendant tout ce délai, inconnu du législateur au moment de l'examen du texte, l'application de la réforme sera bloquée, ce qui empêchera les salariés de bénéficier de l'épargne retraite.

Pour ces raisons, il serait souhaitable de revenir à la rédaction du Sénat, plus simple, plus souple et aussi plus conforme au code de la Sécurité sociale qui met sur le même pied les deux modalités de création des régimes complémentaires de retraite et de prévoyance qui sont l'accord collectif et la décision de l'employeur (article L. 911-1).

Néanmoins, dans un souci de conciliation des points de vue, votre commission des finances vous propose de fixer, dans la loi, un délai d'un an, imposant à l'employeur d'entreprendre une négociation collective en préalable à toute décision unilatérale. Ce n'est que dans le cas où une telle négociation serait impossible, notamment du fait de l'absence de représentants du personnel au sein de l'entreprise, que l'employeur pourrait décider de souscrire un fonds d'épargne retraite, sans délai ni condition, par voie de décision unilatérale.

Par ailleurs, la disposition subordonnant la possibilité pour des salariés n'ayant pas la possibilité d'adhérer à des plans d'épargne retraite de s'affilier à un plan existant, à l'intervention d'un accord interprofessionnel national ou d'une " décision unilatérale couvrant l'ensemble des salariés " compris dans le champ d'application de la présente loi laisse pour le moins perplexe. Elle subordonne en effet l'adhésion de plans d'épargne retraite, pour une large fraction de la population active, au bon vouloir des organisations syndicales, dont les événements récents ont montré le peu d'enthousiasme qu'elles manifestaient à l'égard de l'épargne retraite.

On notera également la contradiction existant entre, d'une part, la volonté très nette de circonscrire les plans d'épargne retraite au cadre de l'entreprise ou du groupement d'entreprise et, d'autre part, l'incitation à une sorte de mise en place de fonds d'épargne retraite national. Autant prévoir dans ce cas là la possibilité pour des associations de souscrire des plans d'épargne retraite, hypothèse envisagée par votre rapporteur dans son rapport de première lecture.

Par ailleurs, votre rapporteur a du mal à envisager ce que pourrait être une décision unilatérale couvrant l'ensemble des salariés. S'agit-il de mettre en place une sorte de Caisse nationale d'assurance vieillesse bis, qui réunirait l'ensemble des partenaires sociaux ?

Enfin, force est de constater que cette disposition a trait à l'adhésion des salariés et non aux modalités de souscription.

En revanche, votre commission des finances considère tout à fait opportune, la modification opérée par l'Assemblée nationale concernant la possibilité pour un salarié ayant adhéré à un plan extérieur à son entreprise de rapatrier, le moment venu, ses droits acquis sur ce plan vers le plan d'épargne retraite de son entreprise.

De même, votre commission accepte l'idée que cette possibilité ne soit ouverte qu'à partir d'un certain délai de mise en place mais souhaite ramener ce délai, fixé à deux ans par l'Assemblée nationale, à un an.

Au bénéfice de ces observations, votre commission vous demande de revenir au texte adopté par le Sénat en première lecture.

Décision de la commission : votre commission vous demande de rétablir, en partie, le texte adopté par le Sénat en première lecture.

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