AVIS n° 87 Tome VI - PROJET DE FINANCES POUR 1998 ADOPTE PAR L'ASSEMBLEE NATIONALE - ENERGIE


M. Jean BESSON, Sénateur


Commission des Affaires économiques et du Plan - Avis n° 87 Tome VI - 1997/1998

Table des matières






N° 87

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1997-1998

Annexe au procès-verbal de la séance du 20 novembre 1997.

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des Affaires économiques et du Plan (1) sur le projet de loi de finances pour 1998 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

TOME VI

ÉNERGIE

Par M. Jean BESSON,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : MM. Jean François-Poncet, président ; Philippe François, Henri Revol, Jean Huchon, Fernand Tardy, Gérard César, Louis Minetti, vice-présidents ; Georges Berchet, William Chervy, Jean-Paul Émin, Louis Moinard, secrétaires ; Louis Althapé, Alphonse Arzel, Mme Janine Bardou, MM. Michel Barnier, Bernard Barraux, Michel Bécot, Jean Besson, Jean Bizet, Marcel Bony, Jean Boyer, Jacques Braconnier, Gérard Braun, Dominique Braye, Michel Charzat, Marcel-Pierre Cleach, Roland Courteau, Désiré Debavelaere, Gérard Delfau, Fernand Demilly, Marcel Deneux, Rodolphe Désiré, Michel Doublet, Mme Josette Durrieu, MM. Bernard Dussaut , Jean-Paul Emorine, Léon Fatous, Hilaire Flandre, Aubert Garcia, François Gerbaud, Charles Ginésy, Jean Grandon, Francis Grignon, Georges Gruillot, Mme Anne Heinis, MM. Pierre Hérisson, Rémi Herment, Bernard Hugo, Bernard Joly, Gérard Larcher, Edmond Lauret, Pierre Lefebvre, Jean-François Le Grand, Kléber Malécot, Jacques de Menou, Louis Mercier, Jean-Baptiste Motroni, Jean-Marc Pastor, Jean Pépin, Daniel Percheron, Jean Peyrafitte, Bernard Piras, Alain Pluchet, Jean Pourchet, Jean Puech, Jean-Pierre Raffarin, Paul Raoult, Jean-Marie Rausch, Charles Revet, Roger Rigaudière, Roger Rinchet, Jean-Jacques Robert, Jacques Rocca Serra, Josselin de Rohan, Raymond Soucaret, Michel Souplet, Mme Odette Terrade, M. Henri Weber.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 11 ème législ.) : 230 , 305 à 310 et T.A. 24 .

Sénat : 84 et 85 (annexe n° 11 ) (1997-1998).

Lois de finances.

Mesdames, Messieurs,

L'énergie est un bien indispensable pour l'exercice de l'ensemble des activités économiques et sociales. C'est pourquoi la politique énergétique est fondamentale et doit constituer une priorité, à l'échelon européen comme au niveau français.

Il appartient au Gouvernement de faire prendre conscience à nos partenaires européens que, l'énergie n'étant pas une marchandise comme les autres, on ne peut laisser le fonctionnement de ce secteur au soin du seul marché. En effet, dans ce domaine plus que dans d'autres, les investissements s'inscrivent dans le long terme.

En outre, il nous faut anticiper les conséquences d'une inéluctable croissance de la dépendance énergétique de l'Europe, en particulier pour les hydrocarbures et le gaz naturel. Notre situation en ce domaine reste, en effet, fragile eu égard aux aléas géopolitiques, aux incertitudes pesant sur l'évolution des prix, aux spécificités d'un marché dominé par des monopoles ou des oligopoles et à la nécessaire prise en compte de l'effet de serre. Ce dernier point doit retenir toute notre attention, alors que la Conférence de Kyoto, qui se tiendra du 1er au 10 décembre prochain, réunira 150 pays dans le but d'obtenir une réduction de leurs émissions de gaz à effet de serre, qui contribuent à un inquiétant réchauffement de notre planète.

A l'échelle hexagonale, la politique énergétique doit tendre à garantir la sécurité d'approvisionnement à long terme et, pour ce faire, répondre à trois préoccupations : offrir une énergie très compétitive, affirmer les missions de service public et garantir la sûreté des installations et des processus de traitement des déchets nucléaires.

CHAPITRE IER -

LA POLITIQUE EUROPÉENNE DE L'ÉNERGIE

I. LE MARCHÉ INTÉRIEUR DE L'ÉLECTRICITÉ ET DU GAZ NATUREL

A. LA DIRECTIVE DU 19 DÉCEMBRE 1996 : UNE OUVERTURE LIMITÉE ET MAÎTRISÉE DU MARCHÉ DE L'ÉLECTRICITÉ

Après avoir fait l'objet de nombreuses années de négociations difficiles, la directive sur le marché intérieur de l'électricité a été adoptée par le Conseil des ministres de l'énergie le 19 décembre 1996 prenant en compte un certain nombre de thèses défendues par la France . On peut, en particulier, se féliciter que ce texte permette la coexistence en Europe, de plusieurs modes d'organisation des systèmes électriques des Etats membres, conduisant à des niveaux d'ouverture des marchés équivalents, tout en respectant les principes d'organisation choisis par les Etats, le maintien d'obligations de service public étant notamment expressément prévu par la directive.

1. L'économie générale de la directive

L'existence d'un secteur soumis à la concurrence résulte du fait que des clients dits " éligibles " peuvent contracter librement avec le producteur de leur choix. Un niveau évolutif d'ouverture des marchés nationaux est, à cet égard, fixé par la directive, les Etats membres étant libres quant à la définition des clients éligibles.

La production d'électricité est ouverte à la concurrence , soit par le biais de l'octroi d'autorisations à de nouveaux producteurs, soit par le lancement d'appels d'offres pour approvisionner le système électrique intégré. Ces deux systèmes de l'autorisation et de l'appel d'offres doivent comporter les mêmes garanties en termes de transparence.

Les relations entre producteurs indépendants et clients éligibles s'effectuent sur la base d'accords commerciaux et par le moyen de l'accès des tiers aux réseaux existants (réglementé ou négocié), ou par l'intermédiaire de lignes directes (restant à construire).

Cela suppose une séparation comptable des activités qui impose aux entreprises verticalement intégrées la tenue de comptes séparés pour leurs activités de production, de transport et de distribution d'électricité.

On l'a dit, la possibilité est donnée aux Etats membres d'imposer aux entreprises du secteur électrique des missions d'intérêt économique général ou obligations de service public , sous réserve qu'elles soient clairement définies, publiées, transparentes, non discriminatoires et contrôlables.

La possibilité leur est également offerte d'introduire la mise en oeuvre d'une planification de long terme des investissements de production .

Par ailleurs, la possibilité d'organiser ou de maintenir un monopole pour la distribution et le transport d'électricité subsiste. En effet, en vertu du principe de subsidiarité, qui prévoit que la décision est prise au niveau le plus efficace sous la forme la plus adaptée, c'est aux Etats membres qu'il appartient d'arrêter les dispositions utiles concernant la distribution. Enfin, pour le transport, ceux-ci peuvent désigner un gestionnaire unique du réseau.

2. Quelles conséquences pour la France ?

L'adoption de la directive devrait permettre à la France de conserver une maîtrise de la programmation à long terme des investissements , placée sous le contrôle de la puissance publique, afin de conforter ses choix en matière de politique et d'indépendance énergétique.

Les principes figurant dans cette directive devraient également permettre également de préserver le coeur du service public en maintenant à Electricité de France (EDF) et aux distributeurs non nationalisés la responsabilité du service des vingt-neuf millions de consommateurs domestiques dans les mêmes conditions d'égalité de traitement tarifaire. Les monopoles du transport et de la distribution de l'électricité pourront être maintenus.

L'adoption de la directive entraînera une ouverture limitée et maîtrisée du marché . Le libre accès aux producteurs sera réservé aux gros consommateurs d'électricité, essentiellement des entreprises industrielles, pour qui le prix de l'énergie est un important élément de leur prix de revient (environ 400 clients éligibles d'ici le 1er janvier 1999, 800 à partir du 1er janvier 2000 et 2.500 à compter du 1er janvier 2003, soit le tiers du marché à cette date). Pour ces consommateurs, l'électricité est un facteur de compétitivité, donc de localisation, et un enjeu important en termes d'emplois.

Les missions de service public dont EDF et les distributeurs non nationalisés ont la charge pourront être confirmées et explicitées .

EDF pourra demeurer une entreprise publique et conserver son caractère intégré , sous réserve d'appliquer une séparation comptable de ses activités de production, de transport et de distribution d'électricité, conformément aux dispositions de la directive.

La directive prescrit que les Etats membres disposeront d'un délai de deux ans après son entrée en vigueur pour en assurer la transposition en droit interne, c'est-à-dire au plus tard le 19 février 1999.

Cette transposition devra faire l'objet d'une loi qui apportera les modifications nécessaires aux dispositions de la loi du 8 avril 1946 et votre rapporteur pour avis demandera au ministre d'en préciser le calendrier législatif.

B. DES NÉGOCIATIONS PLUS DIFFICILES POUR LE PROJET DE DIRECTIVE SUR LE MARCHÉ INTÉRIEUR DU GAZ NATUREL

Après cinq années de négociations communautaires, la proposition de directive concernant des règles communes pour le marché intérieur du gaz naturel a fait l'objet d'un nouvel examen lors du Conseil extraordinaire des ministres européens de l'énergie du 27 octobre 1997 .

Si des avancées significatives ont été réalisées au cours des derniers mois, deux points majeurs de la proposition continuent cependant de poser de sérieux problèmes à la France.

1. Des avancées significatives

Le Conseil du 27 octobre dernier a travaillé sur la base d'une proposition de compromis de la présidence luxembourgeoise qui emportait trois motifs de satisfaction pour la France :

- les missions de service public sont désormais prises en compte de façon satisfaisante et votre commission s'en félicite ;

- le respect de la confidentialité des informations commerciales sensibles est mieux assuré dans le cadre de la séparation comptable des activités de production, de transport, de distribution et de stockage du gaz naturel qu'impose la proposition de directive aux entreprises gazières intégrées. Ceci est essentiel dans le contexte de cartellisation du marché gazier ;

- la faculté d'obtenir certaines dérogations aux règles de l'accès au réseau pour les contrats d'approvisionnement à long terme assortis de clauses " take or pay " est acquise. Elle permettra aux entreprises gazières concernées -dont Gaz de France- d'honorer les contrats de ce type qu'elles ont conclus dans le passé ou qu'elles pourront conclure à l'avenir.

Sur ce point, des progrès importants ont été enregistrés lors du dernier Conseil, puisque les Quinze se sont entendus sur la procédure à suivre et sur les prérogatives respectives de la Commission européenne et des Etats membres concernant la délivrance de telles dérogations.

En vertu de cet accord politique, les contrats existants seront maintenus. Pour ceux à venir, l'instance régulatrice désignée par chaque pays décidera si une entreprise peut ou non refuser, en dérogation à la directive, l'accès à son réseau de transport en raison de ces contrats. Elle disposera d'une semaine pour notifier sa décision à Bruxelles, qui se prononcera à son tour dans les quatre semaines suivantes.

Il semble cependant que, sur ce point, certaines divergences d'interprétation subsistent, que votre commission demandera au ministre de clarifier . En effet, selon le Gouvernement, la décision de l'Etat membre serait directement applicable. Il semble, en revanche, que pour le président luxembourgeois, c'est la Commission qui aurait le dernier mot, l'Etat membre contestant son verdict ayant alors à faire appel à la Cour de Justice européenne 1( * ) .

2. Des points de blocage non négligeables

Deux points de blocage majeurs subsistent, qui rendent la proposition de directive inacceptable en l'état par notre pays. Il s'agit de l'organisation de la distribution de gaz et du degré d'ouverture du marché gazier.

a) L'organisation de la distribution de gaz

En l'état actuel, la proposition de directive entraînerait, purement et simplement, la suppression du quasi-monopole de distribution confié à Gaz de France, ce qui est inacceptable.

Or, sur ce point, M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'Industrie, a déclaré n'avoir reçu aucune réponse claire, au cours du dernier Conseil, sur le caractère subsidiaire de la distribution.

Rappelons qu'en application de l'article 88-4 de la Constitution, votre Commission des Affaires économiques a adopté -le 22 octobre dernier- une résolution, devenue résolution du Sénat 2( * ) , sur cette proposition de directive et a demandé au Gouvernement " d'obtenir que, conformément au principe de subsidiarité , l'organisation de la distribution du gaz relève de la compétence de chaque Etat membre ".

b) Le degré d'ouverture du marché gazier

Le second point de blocage concerne le degré d'ouverture du marché gazier. Il a été exposé dans l'excellent rapport présenté par M. Henri Revol, au nom de la Commission des Affaires économiques, sur la résolution précitée 3( * ) .

On rappellera seulement que l'application immédiate du double seuil prévu : une ouverture minimum du marché de 28 % de la consommation annuelle totale de gaz et un seuil d'éligibilité de 25 millions de mètres cubes de gaz par an par site de consommation, aboutirait à une ouverture brutale du marché gazier français. Eu égard aux spécificités de notre marché, l'objectif de mise en place progressive du marché intérieur du gaz naturel -pourtant affirmé dans les considérants de la proposition de directive- ne serait donc pas respecté.

En outre, le principe de réciprocité se trouverait bafoué.


En effet, comme le relève le rapport précité :

" Une telle situation est inacceptable car elle serait profondément inique et risquerait de déstabiliser brutalement le marché français du gaz. Ceci d'autant plus que la France serait le seul pays 4( * ) où de nombreux clients industriels seraient considérés comme éligibles dès la première phase d'ouverture du marché . Nos partenaires européens, dont les structures de marché sont très différentes, auront -dans un premier temps- pour clients éligibles les producteurs d'électricité à partir de gaz (il s'agit là d'un marché très spécifique) et les plus gros consommateurs industriels " .

C'est pourquoi, dans la résolution qu'elle a adopté, votre Commission des Affaires économiques demande au Gouvernement de veiller à ce que l'adoption de la directive conduise à une ouverture maîtrisée et progressive du marché français du gaz à la concurrence et de s'opposer en conséquence aux propositions formulées par la présidence de l'Union européenne sur ce point.

Cette proposition de directive devrait être de nouveau examinée par le Conseil Energie du 8 décembre prochain . La France doit rester fermement sur ses positions . La partie n'est cependant pas gagnée, car elle se trouve assez isolée sur ce terrain. Toutefois, la Belgique et l'Autriche lui ont apporté un soutien fidèle jusqu'ici et l'Italie et le Danemark, un soutien plus fluctuant.

Votre commission souhaite que le Gouvernement l'informe, le moment venu, de l'évolution de cet important dossier .

C. LE MONOPOLE D'IMPORTATION ET D'EXPORTATION D'ÉLECTRICITÉ ET DE GAZ : UN ARRÊT FAVORABLE DE LA COUR DE JUSTICE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

C'est dans ce contexte de libéralisation des marchés européens de l'énergie qu'est intervenu, le 23 octobre 1997 , un arrêt de la Cour de Justice des Communautés européennes (CJCE) très favorable à la France.

Dans cet arrêt, sans cependant se prononcer sur le fond, la Cour a rejeté un recours introduit par la Commission européenne, qui demandait la condamnation de la France pour les droits exclusifs d'importation et d'exportation dont bénéficient ses opérateurs publics. Elle a prononcé trois autres arrêts similaires concernant les monopoles d'électricité aux Pays-Bas, en Espagne et en Italie.

Dans son recours, la Commission européenne avait mis en cause la loi française de 1946 qui a nationalisé toutes les activités de production, transport, distribution, importation et exportation de gaz et d'électricité en les confiant à des entreprises nationalisées gérées par les établissements publics EDF et GDF. Selon elle, ce monopole d'importation et d'exportation empêcherait les producteurs des autres Etats membres de vendre l'électricité et le gaz sur le territoire français, entraverait la libre circulation et affecterait les conditions de débouchés et d'approvisionnement des opérateurs des autres Etats membres.

Le gouvernement français a soutenu à l'audience que la suppression des droits exclusifs d'EDF et de GDF compromettrait le bon accomplissement des obligations de service public de ces opérateurs et rendrait difficile leur contribution à la protection et à l'aménagement du territoire.

La Cour de justice a estimé que la Commission n'avait pas tenu compte de ces particularités et s'était bornée à des considérations purement juridiques, sans pour autant fournir le fondement de ses arguments. Selon la Cour, Bruxelles n'a pas pu démontrer que la réglementation sur les droits exclusifs d'EDF et de GDF avait des répercussions négatives sur le développement des échanges communautaires .

D'ailleurs, une telle assertion de la Commission ne se heurte-t-elle pas aux faits ? Il faut rappeler, à cet égard, qu'EDF est le premier exportateur mondial d'électricité, tandis que GDF figure parmi les premiers importateurs de gaz.

On peut, dans ces conditions, se féliciter de cet arrêt qui, comme l'a souligné M. Christian Pierret, Secrétaire d'Etat à l'Industrie, montre " l'évolution positive de la perception du service public par les institutions communautaires ".

Cette évolution ne peut que conforter la position de la France dans le cadre des négociations concernant le marché intérieur du gaz, même si -rappelons-le- la question de la licéité du monopole d'importation et d'exportation reste posée, la Cour ne s'étant pas prononcée sur le fond.

II. VERS UNE TAXATION DES PRODUITS ÉNERGÉTIQUES ?

Rappelons que le projet de directive instaurant une taxe sur les émissions de dioxyde de carbone et sur l'énergie présenté en mai 1992 par la Commission, puis amendé en 1995, n'ayant pas permis d'obtenir un accord au sein de l'Union européenne, n'est plus à l'ordre des travaux de l'Union depuis le début de l'année 1996.

Cependant, pour répondre à l'obligation de révision du dispositif communautaire d'imposition des huiles minérales créé en 1992 -instaurant des taux minima d'accises qui s'avèrent être désormais très inférieurs aux niveaux de taxation pratiqués par les Etats membres-, et pour palier l'échec de sa proposition de taxe mixte CO2/énergie visant à lutter contre l'effet de serre, la Commission européenne a été amenée à proposer, en mars 1997, une proposition de directive relative à la taxation des produits énergétiques .

A. LES OBJECTIFS ET LE CONTENU DE LA PROPOSITION DE DIRECTIVE

Cette proposition de directive propose l'instauration d'un régime unique de taxation des produits énergétiques pour satisfaire aux objectifs suivants :

- assurer la cohérence des différentes politiques communautaires, notamment dans le domaine de l'énergie, de l'environnement et des transports ;

- permettre la mise en place par les Etats membres de politiques adaptées à leurs enjeux nationaux, l'expérience des directives sur les accises ayant montré la nécessité de flexibilité et de souplesse qu'imposent les diversités nationales ;

- favoriser une meilleure efficacité énergétique.

La proposition de directive s'appuie largement sur les directives régissant la soumission à accises des huiles minérales. Elle vise à élargir à l'ensemble des consommations énergétiques les minima existants sur les huiles minérales de façon à harmoniser les taux nationaux de taxation des produits énergétiques, réduire les distorsions fiscales et tendre à une plus grande neutralité fiscale entre les différentes énergies.

Elle prévoit de taxer les produits en fonction de leur usage : combustibles ou carburants, le montant de la taxation dans chaque Etat membre devant être au moins égal aux minima d'accises de chacun des produits.

Elle prévoit, par ailleurs, des possibilités de dérogations limitées :

- les Etats membres pourraient accorder des exonérations ou des réductions sur les énergies renouvelables, les biocarburants, la petite hydroélectricité, le transport par rail et la chaleur produite par cogénération ;

- ils pourraient recourir à un mécanisme de réduction totale ou partielle de la taxe à l'égard des entreprises grosses consommatrices d'énergie.

B. LES DIFFICULTÉS SOULEVÉES PAR LA PROPOSITION

1. Une perte de la souveraineté fiscale des Etats membres

Au motif d'améliorer le fonctionnement du marché intérieur et de lutter contre les distorsions de concurrence fiscale, la Commission crée un cadre communautaire de taxation de l'ensemble des produits énergétiques, qui a pour conséquence de limiter la souveraineté fiscale des Etats membres. Aux termes de la proposition, la France devrait appliquer, à compter de 1998, une taxation sur le GPL, le charbon, le gaz et l'électricité .

2. Une taxe sur l'énergie et non sur les émissions de CO2

La France a toujours privilégié une approche " taxation des émissions de CO2 " qui présente l'avantage de répondre efficacement au principal but recherché, à savoir la lutte contre l'effet de serre, ce qui lui conférerait un avantage compétitif certain. Rappelons, en effet, que la France émet deux fois moins de CO2 par unité de PIB que la moyenne des autres Etats membres.

3. Une taxation de l'électricité

La taxation de l'électricité proposée par la Commission serait imposée au stade de la production et non sur les combustibles utilisés pour la production de l'électricité, ce qui est contraire aux intérêts de la France dont les émissions de CO2 liées à la production d'électricité sont très faibles en raison de son parc nucléaire.

4. Une compétitivité de l'industrie communautaire insuffisamment préservée

Le projet introduit des minima communautaires sur les combustibles sans distinction des utilisateurs (industriels ou domestiques). Il prévoit cependant -on l'a vu- la possibilité de recourir à un mécanisme de réduction totale ou partielle de taxe pour les entreprises grosses consommatrices d'énergie. Ces dispositions semblent cependant difficilement applicables et insuffisantes pour préserver la compétitivité des entreprises soumises à la concurrence internationale.

CHAPITRE II -

LE BILAN ÉNERGÉTIQUE FRANÇAIS

I. UNE LÉGÈRE PROGRESSION DE LA PRODUCTION NATIONALE D'ÉNERGIE ET DE LA CONSOMMATION

La production nationale d'énergie primaire a légèrement progressé en 1996, atteignant 118 Mtep 5( * ) , contre 116 Mtep en 1995, soit + 1,7 %. Elle se répartit en charbon (5 Mtep, soit 4,3 %), pétrole (2,7 Mtep, soit 2,3 %), gaz (2,4 Mtep, soit 2 %), énergies renouvelables (4,2 Mtep, soit 3,6 %) et surtout électricité primaire : hydraulique (15,5 Mtep, soit 13,1 %) et nucléaire (88,2 Mtep, soit 74,7 %).

Notons que le taux de disponibilité du parc électronucléaire s'est encore amélioré : il a été en moyenne de 82,7 % en 1996, contre 81 % en 1995 et 81,2 % en 1994.

La consommation totale d'énergie primaire s'est établie, en 1996, à 234,5 Mtep, après correction climatique, en progression de 1,8 % par rapport à 1995.

Elle se répartit en :

- pétrole : 40,5 %

- électricité : 37,5 %

- gaz : 13,6 %

- charbon : 6,6 %

- énergies renouvelables : 1,8 %.

Au sein de la consommation finale énergétique, qui représente 82,3 % de la consommation totale d'énergie, le résidentiel-tertiaire consomme près de la moitié (soit 36,5 % de la consommation totale), suivi de l'industrie (23,3 %) et des transports (21,1 %).

L'intensité énergétique 6( * ) a légèrement augmenté en 1996, après deux années de baisse successives : la croissance de la consommation d'énergie (1,8 %) a été plus élevée que la croissance économique (1,4 % pour le PIB marchand).

Cependant, une récente étude réalisée par l'instance d'évaluation de la politique de maîtrise de l'énergie mise en place dans le cadre du dispositif interministériel d'évaluation des politiques publiques confirme que la France est , avec le Japon, l'un des pays industrialisés qui dispose de la meilleure efficacité énergétique.

Globalement, les prix de l'énergie sont restés historiquement bas et ont continué à dissuader les efforts de maîtrise de l'énergie.

II. UNE DÉGRADATION DU TAUX D'INDÉPENDANCE ÉNERGÉTIQUE ET, SURTOUT, DE LA FACTURE ÉNERGÉTIQUE

Pour la quatrième année consécutive, plus de la moitié de l'énergie consommée en France a été produite nationalement mais le taux d'indépendance énergétique a légèrement diminué et s'est établi à 50,1 % en 1996, contre 51 % en 1995 et 51,2 % en 1994.

La facture énergétique -solde entre les importations et les exportations de produits énergétiques- s'est élevée à 77 milliards de francs en 1996, en hausse de 30,9 % par rapport à 1995. Il faut cependant garder à l'esprit qu'en onze ans, elle a été divisée par plus de deux en valeur (hors effets de l'inflation).

CHAPITRE III -

LES AXES MAJEURS DE LA POLITIQUE ÉNERGÉTIQUE FRANÇAISE

I. L'ENGAGEMENT DE LA FRANCE DANS LA FILIÈRE NUCLÉAIRE EST RÉAFFIRMÉ

A. L'ÉNERGIE NUCLÉAIRE : UNE NÉCESSITÉ POUR ASSURER UN DÉVELOPPEMENT DURABLE

Dans son 25e rapport annuel, l'Agence de l'OCDE pour l'énergie nucléaire (AEN) indique que plusieurs pays de l'OCDE estiment que l'ouverture croissante des marchés de l'électricité à la concurrence a réduit encore davantage les perspectives d'investissement dans les centrales nucléaires, car il faut attendre plus longtemps pour en recueillir les bénéfices que dans le cas des centrales à combustible fossile. Toutefois, il relève que des baisses sensibles des coûts de l'électricité d'origine nucléaire ont été obtenues ces dernières années, en grande partie grâce à une augmentation des taux de disponibilité.

Surtout, un certain nombre de pays membres estiment qu'à long terme, et peut-être à moyen terme, il faudra réinvestir dans l'électronucléaire ne serait-ce que pour respecter les objectifs stratégiques et les engagements pris en matière de changement climatique.

En effet, le défi de la fourniture d'énergie au cours des cinquante prochaines années est de fournir au moins deux fois plus d'énergie tout en limitant les émissions de gaz à effet de serre, en particulier le dioxyde de carbone (CO2).

En réalité, il existe aujourd'hui un panel de solutions énergétiques pour répondre à divers types de contraintes (économiques, géographiques, environnementales...).

Dans ce contexte, le mixte énergétique sera nécessaire à long terme dans la perspective d'un développement durable et pour garantir la sécurité d'approvisionnement. Il apparaît donc nécessaire de maintenir ouvertes toutes les options en matière nucléaire.

C'est dans ce cadre que s'inscrit la politique tracée par le Gouvernement.

B. LA POURSUITE DU PROGRAMME NUCLÉAIRE FRANÇAIS...

Le secrétaire d'Etat à l'industrie a récemment réaffirmé l'engagement nucléaire de la France. Une série de mesures vient d'ailleurs de concrétiser la poursuite du programme nucléaire , en particulier :

- l'autorisation donnée à la mise en fonctionnement de la première tranche nucléaire à Civaux ;

- la poursuite de la production de mox dans quatre tranches supplémentaires à Chinon ;

- la diversification de la production de mox à Marcoule, pour adapter une " ligne " aux besoins de l'étranger ;

- la continuation des contrats de retraitement par la COGEMA à la Hague, de nouveaux contrats ayant été récemment signés.

S'agissant de l'avenir du programme électronucléaire , rappelons que le problème du renouvellement du parc ne se posera pas avant 2010, date à laquelle commencera le déclassement des centrales actuelles.

Mais un éclairage intéressant est fourni par l'étude sur les " coûts de référence de la production d'électricité " conduite, en 1997, par un groupe animé par la direction du Gaz, de l'Electricité et du Charbon du ministère, comprenant de nombreux experts indépendants, des producteurs d'électricité et de représentants de l'administration. Pour la production en " base ", c'est-à-dire pour des centrales fonctionnant toute l'année, qui fournissent l'essentiel de notre électricité, la filière nucléaire demeure a priori la filière de production d'électricité la plus compétitive en base, dans la plupart des hypothèses.

Mais le secteur nucléaire, de manière à rester durablement un atout pour la France, doit aussi gérer la question de l'aval du cycle nucléaire , dont le financement est déjà pris en compte. Cette question devra avoir trouvé des réponses industrielles au moment du choix de renouvellement des centrales de manière à assurer la compétitivité globale du nucléaire à cette date.

Elle a aussi amené le Gouvernement à fixer certaines orientations en ce domaine.

C. ... DONT LE CADRE A ÉTÉ PARTIELLEMENT REPRÉCISÉ

1. Répondre aux questions posées par l'aval du cycle

A cet égard, le Gouvernement estime que si les deux premières voies, c'est-à-dire le stockage en couches profondes et la séparation-transmutation ont été bien explorées, il conviendrait en revanche de rééquilibrer la recherche en faveur de la troisième voie : le stockage en surface et sub-surface.

Rappelons que la loi n° 91-1381 du 30 décembre 1991 relative aux recherches sur la gestion des déchets radioactifs fixe le principe d'une diversification des voies de recherche avant qu'une décision sur un éventuel stockage en profondeur de ces déchets ne soit soumise dans un délai de 15 ans au législateur, si cette option est validée par le résultat des recherches.

Ainsi, elle prévoit les études suivantes :

- aptitude des formations géologiques profondes à stocker, dans des conditions de sûreté optimales, les déchets fortement radioactifs et à longue durée de vie ;

- possibilité de réduire la nocivité de ces déchets, en séparant certains des éléments les plus toxiques pour les transformer en éléments radioactifs à vie plus courte (retraitement poussé et transmutation) ;

- procédés de conditionnement et d'entreposage de ces déchets.

S'agissant de la première de ces voies, la loi prévoit la création de laboratoires souterrains.

Le Gouvernement a décidé d'autoriser l'ANDRA à déposer les demandes d'autorisation d'installation et d'exploitation de laboratoires souterrains pour les trois sites identifiés. L'ANDRA a déposé les dossiers correspondants au deuxième trimestre 1996. Les pouvoirs publics ont reçu tous les rapports des commissions d'enquête avec avis favorable. En outre, la plupart des collectivités locales consultées se sont prononcées pour la construction d'un laboratoire souterrrain.

Le Gouvernement attend maintenant le rapport de l'autorité de sûreté, la Direction de la sûreté des installations nucléaires (DSIN) pour prendre une décision, qui devrait être annoncée dans le courant de l'année 1998.

2. L'abandon de Superphénix

C'est dans ce contexte qu'est intervenue la décision, annoncée par le Premier ministre devant l'Assemblée nationale, le 19 juin 1997, d'abandonner Superphénix.

Il faut, tout d'abord, rappeler que le redémarrage du surgénérateur avait été contesté. En effet, à la suite d'une plainte déposée par le canton de Genève et diverses associations antinucléaires, le Conseil d'Etat a annulée, le 28 février 1997, le décret du 11 juillet 1994 autorisant le démarrage de Superphénix, en se fondant sur une modification des finalités assignées par ce texte à l'installation au regard de celles indiquées dans le dossier soumis à l'enquête publique : en effet, le décret de 1994 stipulait que l'objectif de Superphénix étant la recherche et la démonstration, la production d'électricité n'était pas une priorité, alors que le dossier mis à l'enquête publique en 1993 indiquait que l'objectif de Superphénix était la production d'électricité et l'acquisition de connaissances.

Mais, c'est pour des raisons économiques que cet abandon a été décidé. En effet, Superphénix a été construit à une époque où l'on s'attendait à des tensions sur le marché de l'uranium naturel ; or, ces tensions ne se sont pas concrétisées et ne semblent pas devoir survenir à court ou moyen terme. En tout état de cause, le surgénérateur n'est pas arrêté pour des raisons de sûreté.

Le Gouvernement a également indiqué qu'il se donnait le temps de la réflexion pour arrêter les modalités de fermeture de Superphénix. En effet, l'abandon soulève un certain nombre de difficultés qui concernent essentiellement les partenaires étrangers d'EDF dans Superphénix, l'impact sur le budget de l'Etat, sur l'emploi, sur les collectivités locales et les implications en termes de recherche sur les déchets nucléaires.

C'est pour tenir compte de ces difficultés que le Gouvernement a nommé un médiateur chargé de proposer des solutions au plan local et régional, les modalités de l'abandon de Superphénix devant être arrêtées d'ici fin 1997.

3. L'adaptation de la filière de construction de réacteurs : quel avenir pour Framatome ?

L'adaptation de la filière de construction de réacteurs, qui reste un des points forts de l'industrie française, constitue un autre problème délicat à résoudre et pose la question de l'avenir de Framatome . L'évolution des besoins français en électricité ne nécessite aucune commande nouvelle de tranche nucléaire avant 2010. Par ailleurs, avec le gel des programmes nucléaires dans le monde, les possibilités d'exportation sont très réduites, pratiquement à la Chine -où la concurrence des Etats-Unis sera désormais très vive- et peut être l'Europe de l'Est. Westinghouse vient, de plus, d'annoncer qu'elle renonçait, au moins provisoirement, à vendre ses centrales nucléaires que Framatome convoitait.

Ces perspectives ne permettent pas à Framatome d'avoir le plan de charge nécessaire pour être en mesure, en 2010, de construire à nouveau des centrales sur le territoire français. L'entreprise dispose cependant de moyens financiers très importants lui permettant une certaine mobilité dans son portefeuille d'activités, et surtout, elle dispose de l'atout technologique accumulé depuis de nombreuses années grâce au savoir-faire de ses salariés.

Pour les années à venir, la question de la stratégie et du devenir de Framatome reste posée. Le Gouvernement a notamment pris acte de la précarité de l'équilibre de l'actionnariat actuel. Son souci à ce stade est d'asseoir une réflexion en la matière sur une stratégie industrielle de long terme clairement définie pour l'entreprise.

4. Une priorité : la sûreté nucléaire

Le maintien d'une filière nucléaire doit avoir comme condition indispensable une politique irréprochable en matière de sûreté nucléaire, c'est-à-dire transparente et efficace.

Comme l'a souligné le Premier ministre dans son discours de politique générale, le Gouvernement est conscient que des améliorations sont possibles afin d'améliorer la cohérence d'ensemble, la lisibilité politique et la transparence de l'organisation française du contrôle et de l'expertise dans le domaine nucléaire, bien que celle-ci soit globalement satisfaisante.

Le secrétaire d'Etat à l'industrie à d'ailleurs proposé, en accord avec les ministres de l'environnement, du travail et de la santé, la mise en place d'une mission " afin de recueillir l'avis du Parlement sur ce sujet ".

Il considère, en particulier, que des réponses doivent être apportées dans les meilleurs délais à un certain nombre de questions : liens entre culture médicale de la radioprotecton et culture scientifique de la sûreté nucléaire, organisation et inspection du travail pour l'ensemble des personnels travaillant sur les sites.

D. LES DOTATIONS BUDGÉTAIRES EN FAVEUR DU CEA

A la mi-1997, l'exécution du contrat d'objectifs signé en l'Etat et le CEA s'avérait satisfaisante. Le projet de loi de finances pour 1998 prévoit une rebudgétisation des crédits destinés aux investissements de recherche du CEA.

Dans ces conditions, les crédits qui lui sont affectés au titre du budget de l'industrie représentent 5,5 fois la dotation pour 1997. Ils s'élèvent à 325,5 millions de francs , tant en autorisations de programmes qu'en crédits de paiement.

Il faut cependant rappeler à cet égard, que le CEA a bénéficié, en 1997, d'une enveloppe de 200 millions de francs inscrite au budget de la défense, au titre de la recherche duale -qui ne sera pas reconduite- et d'une dotation en capital de 350 millions de francs prélevée sur le compte d'affectation spéciale des produits des privatisation. Il n'est pas prévu de renouveler une telle opération en 1998.

Si les préoccupations en termes d'environnement ne sont pas étrangères à la politique menée par la France dans le domaine nucléaire, elles se traduisent également dans d'autres aspects de sa politique énergétique.

II. LA PRIORITÉ EST DONNÉE À UNE POLITIQUE RESPECTUEUSE DE L'ENVIRONNEMENT

Le Gouvernement ambitionne de refaire de la maîtrise de l'énergie une priorité et d'encourager la production d'énergies renouvelables.

A. ENCOURAGER L'UTILISATION RATIONNELLE DE L'ÉNERGIE

1. Un nouveau cadre juridique : la loi sur l'air

Rappelons que la loi sur l'air et l'utilisation rationnelle de l'énergie a été promulguée le 30 décembre 1996. Elle vise à doter notre pays des moyens de lutter plus efficacement contre la pollution atmosphérique et, notamment, contre les pointes de pollution que connaissent périodiquement certaines grandes agglomérations.

Elle procède également à une profonde réforme des bases juridiques sur lesquelles repose la politique d'utilisation rationnelle de l'énergie. Ainsi, son titre VII étend le champ d'intervention des pouvoirs publics en divers domaines :

- fixation de seuils de performance énergétique des biens mobiliers et immobiliers ;

- spécifications techniques des carburants et combustibles ;

- affichage des performances énergétiques des appareils électriques et des automobiles ainsi que des consommations énergétiques des logements ;

- encadrement de la publicité relative à l'énergie ;

- soutien aux véhicules électriques, GNV et GPL ;

- classement des réseaux de chaleur alimentés par énergies renouvelables ou énergies de récupération.

2. Les mesures concernant le secteur des transports

On évoquera ici les mesures récentes concernant le secteur des transports.

En effet, en application de la loi sur l'air précitée, les gestionnaires de " flottes publiques " de plus de 20 véhicules ont l'obligation d'intégrer au moins 20 % de véhicules alternatifs propres lors des renouvellements de parcs.

Cette disposition devrait encourager le développement du véhicule électrique, du véhicule au gaz de pétrole liquéfié (GPL) et du véhicule du gaz naturel (GNV), tous trois présentant des avantages certains en termes de respect de l'environnement.

a) Le véhicule électrique

Le véhicule électrique est adapté pour les trajets individuels urbains. Aujourd'hui, les aides cumulées de l'Etat, d'EDF et des constructeurs (environ 20.000 francs) ramènent ce véhicule à des prix comparables au modèle thermique équivalent. Au-delà de ce mécanisme, qui n'a pas encore le succès attendu, le Gouvernement a demandé à EDF d'intensifier son action dans ce domaine, notamment en dégageant des moyens financiers nouveaux. En effet, à ce jour, moins de 4.000 véhicules électriques sont en circulation en France et plusieurs années seront encore nécessaires pour disposer de véhicules d'une nouvelle génération à l'autonomie largement étendue.

b) Le véhicule au gaz de pétrole liquéfié

La réduction, le 11 janvier 1996, de un franc par litre de la taxe intérieure sur les produits pétroliers (TIPP) sur le gaz de pétrole liquéfié, utilisé comme carburant, a eu un effet très rapide sur l'évolution de sa consommation, puisque celle-ci a augmenté d'environ 60 % au cours de l'année 1996. Les secteurs de la distribution et de l'équipement qui lui sont liés ont également réalisé un bond en avant ; c'est ainsi que le parc de véhicules pouvant utiliser du GPL carburant a pratiquement doublé en 1996 par rapport à 1995.

Les nouvelles mesures fiscales prises dans le cadre de la loi sur l'air devraient encore accentuer cette tendance. Citons, notamment, le remboursement aux exploitants de réseaux de transports publics de la TIPP jusqu'à 12.000 litres par véhicule et par an et la possibilité d'amortissement accéléré pour l'équipement des véhicules au GPL carburant (comme pour l'achat de matériels de stockage, de compression et de distribution de ce carburant).

c) Le véhicule au gaz naturel

Le véhicule au GNV est, quant à lui, en phase de démarrage et constitue une alternative compétitive par rapport aux autres carburants, en particulier dans le domaine des véhicules lourds urbains tels que bus, bennes à ordures ménagères ou véhicules de nettoiement urbain.

Son développement est souhaitable pour trois raisons essentielles :

- le GNV apporte une contribution efficace à la réduction des émissions atmosphériques polluantes ;

- il peut constituer une diversification de notre approvisionnement en carburant ;

- enfin, il y a là un enjeu important pour l'industrie française. Les constructeurs et les équipementiers français doivent être au rendez-vous de ce marché émergent, qui connaît déjà un substantiel développement en Amérique du Nord et qui, en Europe, est promis à un avenir dans de nombreux pays.

Tous les partenaires ont bien perçu cette éclosion de la filière et sont aujourd'hui mobilisés.

Les constructeurs français ont investi dans la recherche et sont désormais en mesure de proposer des autobus conçus pour la carburation au gaz naturel.

Gaz de France s'est fixé des objectifs ambitieux dans le cadre du " contrat de plan " qu'il a conclu avec l'Etat : l'entreprise publique se propose de contribuer, avec l'ensemble des partenaires de la filière, à la mise en service d'un parc de 2.500 véhicules utilitaires légers et de 300 autobus à fin 1999, en développant notamment, pour les gestionnaires de flotte, un service complet de mise à disposition de carburant.

Cet objectif n'a cependant de chance d'être réalisé qu'avec le concours des collectivités locales.

B. DÉVELOPPER LA PRODUCTION D'ÉNERGIES RENOUVELABLES

La France est aujourd'hui le premier pays producteur européen d'énergies renouvelables, grâce notamment au bois combustible et à l'hydroélectricité ; elle en tire 24 % de sa production d'énergie primaire et 13 % de sa consommation énergétique.

Mais, elle doit s'attacher à développer davantage encore son potentiel en ce domaine car les enjeux sont d'importance.

1. Des enjeux importants

Ces enjeux se situent à un triple niveau : économique, environnemental et en termes d'indépendance énergétique.

a) L'enjeu économique

En termes de balance des paiements , 30 millions de tonnes d'équivalent-pétrole produites par énergies renouvelables représentent environ 20 milliards de francs d'importations évitées.

Sur le plan industriel , les pays en voie de développement non électrifiés, ouvrent des marchés considérables aux énergies renouvelables pour l'électrification hors réseau (photovoltaïque, petites éoliennes, microhydraulique) et, par conséquent, favorisent le développement de l'activité du secteur et son positionnement à l'export.

En matière d'emploi, les énergies renouvelables repésentent d'ores et déjà 40 à 50.000 emplois : 18.000 pour la production et la distribution d'électricité d'origine hydraulique et au moins 25.000 équivalents plein-temps pour le bois combustible.

Par ailleurs, le lancement du plan " Eole 2005 " en février 1996, d'une puissance de 250 à 500 Mw à cette date, représente à terme la création de 1.000 emplois (construction, installation, exploitation et maintenance).

b) La protection de l'environnement

Si l'on admet que le bois combustible se substitue au fioul et l'hydroélectricité à de l'électricité thermique produite dans des centrales au charbon, on peut évaluer les émissions annuelles de gaz carbonique évitées grâce aux énergies renouvelables à plus de 100 millions de tonnes, soit plus du quart du total de nos émissions.

Ces énergies permettent ainsi d'éviter les pollutions liées à l'utilisation de combustibles fossiles dont les réserves ne sont pas infinies. Elles contribueront également au respect de nos engagements internationaux contractés notamment dans le cadre de la convention de Rio sur le climat.

c) L'indépendance énergétique

La contribution des énergies renouvelables est loin d'être négligeable : elle représente le tiers de notre production d'électricité nucléaire ou encore le double de notre production totale de charbon, de pétrole et de gaz naturel. Elle contribue de façon appréciable à l'indépendance énergétique du pays.

Dans la conjoncture énergétique actuelle, caractérisée par une offre d'énergie fossile supérieure à la demande et un bas niveau de prix -même s'il a récemment augmenté-, la notion d'indépendance énergétique est certes moins vitale qu'il y a 25 ans. Néanmoins, la situation est susceptible de changer d'ici une dizaine d'années :

- au regard de deux scénarios envisagés par l'Agence internationale de l'énergie (AIE) sur le prix des énergies pour 2005 : dans l'un, le baril reste à 18 dollars mais, dans l'autre, il passe à 28 dollars ;

- à ceci pourrait éventuellement s'ajouter une taxation des produits énergétiques préconisée par la Commission européenne, dont on a évoqué précédemment le projet de directive de mars 1997 ;

- enfin, il faut rester conscient du fait que la grande majorité de nos approvisionnements gaziers proviennent de Russie et d'Algérie, dont les situations respectives sont imprévisibles pour les dix années à venir.

2. Des interventions concentrées

Les interventions en ce domaine sont concentrées sur un nombre limité de programmes aux objectifs et aux modalités bien précisés et concernant :

- les biocarburants ;

- le plan " bois-énergie et développement local " ;

- le développement de la petite hydraulique ;

- l'électrification par énergies renouvelables de sites isolés ;

- la procédure IPEEFI destinée à favoriser nos entreprises à l'export sur des marchés émergents et à mieux bénéficier des grands programmes internationaux dans le domaine des énergies renouvelables ;

- le programme de 20.000 chauffe-eau solaires d'ici l'an 2000 aux Antilles et à la Réunion ;

- le plan de développement éolien de 250 à 500 Mw à l'horizon 2005 : EOLE 2005.

3. Des perspectives d'avenir certaines

a) Valoriser notre potentiel dans des conditions économiquement acceptables

Le potentiel des énergies renouvelables techniquement exploitable en France est encore considérable. Encore faut-il qu'il soit valorisé dans des conditions économiquement acceptables. Il ne s'agit pas de soutenir ce type d'énergie à grands renforts d'aides publiques, au risque de nuire à la compétitivité nationale, mais :

- d'y recourir dans toutes les niches d'utilisation où elles sont d'ores et déjà rentables : électrification des sites isolés, chauffage individuel au bois... ;

- de donner les impulsions nécessaires pour rendre compétitives les filières au seuil de la rentabilité : grand éolien relié au réseau, chauffage collectif au bois... ;

- d'encourager la recherche dans les filières dont la rentabilité n'est espérée qu'à moyen terme : biocarburants, photovoltaïque raccordé au réseau...

C'est dans cette perspective que tant le précédent que l'actuel Gouvernement ont décidé d'améliorer les conditions d'achat par EDF de l'électricité produite par énergies renouvelables, en particulier par l'énergie éolienne et par les petites installation hydrauliques. En outre, de nouvelles mesures sectorielles sont envisagées.

b) Les nouvelles mesures envisagées

Les mesures nouvelles envisagées dans le domaine des énergies renouvelables concernent la valorisation du biogaz de décharges et la promotion du solaire thermique.

Pour ce qui concerne la valorisation du biogaz de décharges, les premiers travaux menés conjointement par l'ADEME et GDF devraient conduire, dans un premier temps, à une meilleure connaissance technique et économique des méthodes et techniques de valorisation du biogaz de décharges, et, dans un deuxième temps, à rechercher un partenariat avec EDF pour encourager la valorisation électrique et/ou thermique.

S'agissant de la proposition du solaire thermique, le développement de cette filière se heurte à deux obstacles principaux : le manque de confiance des investisseurs et les coûts encore élevés des produits. Pour franchir ces obstacles, deux outils doivent être mis en oeuvre : la garantie de résultat solaire pour instaurer un climat de confiance avec les investisseurs et une aide à la structuration du marché en vue de réduire les coûts de mise sur le marché.

Les segments de marché identifiés pouvant contribuer au développement de cette filière sont les parcs HLM et les bâtiments publics. Un tel programme d'action devrait prendre la forme d'un appel à proposition auprès de régions volontaires avec la participation, en relais, des grandes entreprises publiques EDF et GDF.

4. L'évolution des crédits destinés à l'ADEME

Si les crédits destinés à l'agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) enregistrent, pour 1998, une augmentation de 5,1 % pour ce qui concerne la subvention de fonctionnement (186,7 millions de francs). Ils connaissent une stabilisation à hauteur de 75 millions de francs en autorisations de programmes, les crédits de paiement étant ajustés en fonction du rythme de réalisation des opérations.

III. CONFORTER LA COMPÉTITIVITÉ DES GRANDS OPÉRATEURS FRANÇAIS EST UN AXE MAJEUR DE LA POLITIQUE ÉNERGÉTIQUE

A. L'ÉLECTRICITÉ

1. L'évolution des résultats d'EDF

a) 1996 : une évolution favorable

Le chiffre d'affaires d'EDF a progressé de 1,3 % en 1996 (à 191,1 milliards de francs) sous l'effet d'un mouvement de sens opposé : une progression de 4,2 % en volume et de 2,2 % en valeur des ventes en France et un recul de 1,6 % en volume et de 5,4 % en valeur des exportations.

En 1996, les investissements se sont établis à 36,1 milliards de francs, en progression de 1,7 % par rapport à 1995. Il convient de relever, en particulier, la hausse des participations financières des filiales (notamment EDF-International).

L'objectif de désendettement du contrat de plan 1993-1996 a été largement atteint, la dette s'élevant à 132,9 milliards de francs fin 1996.

Cette situation peut s'expliquer par quatre facteurs essentiels :

- des investissements inférieurs aux prévisions, du fait du report d'investissement de production nucléaire et de moyens de pointe, ainsi que de retards dans les procédures administratives de lignes de transport ;

- un niveau d'exportation qui reste soutenu ;

- des économies de combustibles, dues à l'hydraulicité favorable et à la bonne disponibilité du parc nucléaire ;

- des charges financières plus faibles, en raison de l'accélération du désendettement et de la baisse des taux.

Ces facteurs ont toutefois été partiellement compensés par une fiscalité plus lourde et par des dépenses consacrées au retraitement des combustibles et aux travaux de gros entretien du parc nucléaire.

A l'horizon 2000, l'objectif est d'atteindre un niveau d'endettement de l'ordre de 100 milliards de francs.

Les comptes de l'exercice 1996 se sont soldés par un bénéfice de 5.874 millions de francs (contre 2.731 millions de francs en 1995). Après un prélèvement de l'Etat de 4 milliards de francs, le résultat net s'est établi à 1,872 milliard de francs, au lieu de 1,231 milliard de francs au cours de l'exercice précédent ( + 52 % ).

Par comparaison avec ce résultat très favorable, les perspectives pour 1997 apparaissent moins favorables.

b) 1997 : des perspectives moins favorables

Bien que les évaluations en la matière restent sujettes à variations, notamment sous l'effet du climat d'ici la fin de l'année, EDF estime que son résultat net devrait presque diminuer de moitié en 1997 et passer de 1,9 à 1 milliard de francs environ.

Ce recul du résultat net résulterait de deux facteurs :

- d'une part, la baisse de 4,6 % des tarifs intervenus en avril dernier ;

- d'autre part et surtout, d'une forte augmentation du prélèvement de l'Etat qui atteindrait 5,5 milliards de francs de francs (contre, rappelons-le, 4 milliards en 1995).

Ces évolutions résultent de l'application du contrat d'entreprise signé au printemps dernier entre EDF et l'Etat.

2. Le contrat d'entreprise 1997-2000

Le contrat d'entreprise entre l'Etat et Electricité de France pour la période 1997-2000 a été signé mardi 8 avril 1997. Dans un cadre de relations clarifiées avec l'Etat - que votre commission avait appelé de ses voeux - ce nouveau contrat d'entreprise donne à EDF les moyens de son ambition : devenir un service public de référence en Europe et s'affirmer comme un groupe industriel et de services, leader du secteur électrique en France et sur les marchés internationaux.

Il précise les relations entre l'Etat et l'entreprise ainsi que les principales orientations qu'EDF donnera à son action à moyen terme. Trois chapitres abordent successivement les missions de service public, l'avenir de l'entreprise et les relations avec l'Etat.

LE CONTRAT D'ENTREPRISE D'EDF POUR LA PÉRIODE 1997-2000

Le contrat renouvelle et renforce les missions fondamentales de service public de l'entreprise : mettre en oeuvre la politique énergétique définie par l'Etat, assurer la sécurité d'approvisionnement en électricité, apporter à tout consommateur une alimentation électrique de qualité, développer une offre de services adaptée aux nouvelles attentes des clients. Dans le cadre de l'ouverture du secteur électrique à la concurrence, début 1999 au plus tard, EDF restera l'opérateur responsable du fonctionnement équilibré et optimisé du système électrique français. Elle pourra proposer, comme ses concurrents, des services au clients en complément de la fourniture de kwh. Par ailleurs, le contrat réaffirme la volonté de l'Etat de maintenir le statut actuel de l'entreprise et celui de son personnel. En matière d'environnement, EDF prend de nouveaux engagements et poursuivra ses actions en les inscrivant dans la logique du développement durable.

Le contrat s'attache également à préparer l'avenir de l'entreprise. Il ouvre à EDF des perspectives nouvelles de développement en France et sur les marchés internationaux . Ce développement s'appuiera sur l'amélioration des performances de l'entreprise. Les tarifs de l'électricité baisseront en moyenne de 14 % en francs constants d'ici l'an 2000, faisant ainsi des clients d'EDF les principaux bénéficiaires des efforts de l'entreprise. L'effet cumulé de cette baisse des tarifs sur l'économie française pour les quatre ans du contrat, à la fois en termes d'accroissement du pouvoir d'achat des consommateurs et de réduction des coûts pour les entreprises, est de près de 60 milliards de francs, en francs constants. La première baisse est intervenue le 15 avril dernier : 6 % en francs constants, soit en moyenne 4,5 % en francs courants. A ce développement, est associée une politique sociale conciliant l'amélioration de la compétitivité globale de l'entreprise, la garantie de l'emploi, la cohésion interne et le développement de l'emploi, notamment celui des jeunes. C'est le sens de l'accord social " 15.000 embauches : un projet pour tous ", signé le 31 janvier 1997.

Le contrat clarifie les relations, notamment financières, entre l'Etat et EDF. Dans ce cadre, le bilan d'EDF a être récemment restructuré pour donner à l'entreprise une structure financière plus en rapport avec sa situation économique réelle. Par ailleurs, les règles des rémunération de l'Etat sont désormais stabilisées : une rémunération des dotations en capital avec un taux d'intérêt de 3 % et une rémunération complémentaire, égale à 40 % du résultat comptable net de l'entreprise. Pour honorer ses engagements, EDF devra poursuivre les gains de productivité, qui permettront d'accroître de 70 milliards de francs les ressources consacrées au développement, au désendettement et à la préparation de l'avenir. EDF consacrera, en particulier, 14 à 15 milliards de francs sur quatre ans à des investissements de développement, notamment à l'international.

B. LE GAZ

1. L'évolution des résultats de GDF

a) 1996 : un très bon exercice

Le développement des ventes en France s'est heurté au ralentissement de l'activité économique et au renforcement de la compétitivité des autres énergies. Des conditions climatiques exceptionnelles (froid rigoureux en décembre 1996) ont toutefois permis un très bon exercice pour 1996.

Le chiffre d'affaires pour 1996 a progressé de 10 % par rapport à 1995. Il a atteint 54,2 milliards de francs.

Le résultat net s'est élevé à 2,5 milliards de francs (+ 31,6 %) après versement de 1,696 milliard de francs au titre de l'impôt sur les sociétés. Le prélèvement de l'Etat s'est élevé à 3,5 milliards de francs et l'objectif de désendettement de 8,4 milliards de francs sur la période couverte par le deuxième contrat d'objectif (1994-1996) a été atteint.

b) 1997 : une détérioration de la situation

L'amplification de la concurrence des autres énergies (le fioul principalement, mais aussi l'électricité dont la baisse des tarifs a été ressentie) combinée avec des conditions climatiques devenues défavorables (dès janvier, l'hiver est devenu doux et pluvieux) ont entraîné un net fléchissement des ventes de gaz. Le résultat du premier semestre 1997 est, par conséquent, en retrait par rapport à celui de la même période de l'année précédente.

Les coûts d'approvisionnement ont connu une augmentation de près de 25 % en raison de l'accroissement des prix du brut et de la montée du dollar américain.

L'ensemble de ces éléments conduit à une situation détériorée qui devrait conduire à une révision en baisse des prévisions budgétaires, lesquelles devront également tenir compte des nouvelles dispositions fiscales relative à l'impôt sur les sociétés.

Le chiffre d'affaires prévisionnel pour 1997 s'établit à 56,9 milliards de francs, avec un résultat après impôts et dividendes de 2,6 milliards de francs dans une hypothèse de climat moyen, et la dette devrait s'élever à 13,1 milliards de francs.

2. Des perspectives d'avenir favorables

a) De bonnes perspectives de développement

Energie propre, peu polluante et bon marché, le gaz a aujourd'hui le vent en poupe. En dépit des hausses intervenues cette année, son prix demeure attractif (les tarifs domestiques restent, en effet, inférieurs à leur niveau de 1992 en francs constants). Il est d'ailleurs permis de penser qu'il le restera. En effet, les réserves sont abondantes et proches. En Europe, elles ont doublé en quinze ans, tandis que les coûts de production ont diminué de 30 à 40 %. En outre, l'introduction progressive de la concurrence sous l'effet de la future directive exercera une pression à la baisse des prix.

Dans ce contexte, GDF mène une politique commerciale dynamique qui l'amène à gagner des parts de marché. A cet égard, il faut relever que, depuis septembre 1997, les équipes commerciales de GDF et d'EDF, bien qu'appartenant à la même entité commerciale : EDF-GDF Services, ont été séparées.

b) La promotion de la cogénération

La cogénération représente d'ores et déjà, pour GDF, 1/5 de l'accroissement de ses ventes de gaz naturel et l'entreprise publique poursuit une forte action de promotion dans ce domaine.

Rappelons que la cogénération consiste à produire et valoriser simultanément de l'énergie mécanique (transformée le plus souvent en électricité) et de l'énergie thermique. Cette technique permet d'atteindre des rendements de 80 à 90 %, soit plus du double des centrales électriques classiques.

En 1994, il existait en France 570 équipements de cogénération d'une puissance électrique de 3.100 MW et d'une puissance thermique de 12.000 MW.

On assiste actuellement à un accroissement sensible du parc de cogénération. Les nouveaux équipements se distinguent des installations anciennes par leur taille généralement plus modeste, leur technique (moteurs thermiques et quelques turbines à combustion) et l'utilisation du gaz naturel.

Soucieux de promouvoir l'utilisation rationnelle de l'énergie, et par voie de conséquence, les techniques de cogénération, les pouvoirs publics ont pris plusieurs mesures en leur faveur, notamment fiscales , telles que l'amortissement exceptionnel sur un an et l'exonération des taxes intérieures de consommation (TIPP et TICGN). Ces mesures, qui datent du début des années 1990, ont été récemment complétées par l'amélioration des conditions d'achat de l'électricité produite.

En novembre 1996, de nouvelles conditions d'achat de l'électricité , comportant des améliorations importantes par rapport au système des tarifs d'achat appliqué jusqu'à cette date, a, en effet, été défini pour les installations de cogénération . Ces nouvelles conditions de rémunération répondent aux attentes exprimées par les cogénérateurs, en leur donnant la visibilité à long terme dont ils ont besoin pour leurs décisions d'investissement et en limitant les risques pesant sur les projets de cogénération. Elles visent également à inciter à un fonctionnement des cogénérations mieux calé sur les besoins thermiques.

c) La poursuite de l'extension de la desserte du territoire

Le réseau de gaz naturel couvre aujourd'hui environ 70 % du territoire français.

Quatre principaux facteurs ont et vont y contribuer :

En premier lieu, les démarches entreprises par les centres EDF-GDF Services qui ont élaboré des schémas de développement du gaz à l'échelle du département. Ceux-ci permettent d'avoir une vision à moyen et long terme sur les possibilités de développement de concessions nouvelles et de donner accès au gaz naturel à un plus grand nombre de communes, grâce à la démarche consistant à globaliser les résultats.

En second lieu, la réalisation de grands projets, comme l'artère du Midi et l'artère des Hauts de France, qui favorisent la desserte dans les territoires traversés.

En troisième lieu, les nouvelles dispositions réglementaires, conduisant à allonger à 25 ans l'horizon des calculs économiques.

Enfin, la loi du 12 avril 1996, qui élargit le champ d'action des régies, devrait permettre d'accroître le nombre de communes raccordées, dans une complémentarité qui devra être harmonieuse entre les autorités concédantes, les régies et Gaz de France.

C. LE PÉTROLE

1. Les résultats du secteur pétrolier : la poursuite de l'embellie

Accroissement des marges de raffinage, hausse des résultats dans la distribution et forte croissance des résultats affichés par les sociétés pétrolières européennes : le marché en 1996 et 1997 semble contredire les prévisions les plus pessimistes sur l'évolution de l'aval pétrolier européen.

Dans le même temps, le dollar s'est apprécié d'environ 10 % par rapport à la plupart des devises européennes, à l'exception de la livre sterling. On peut considérer que cette évolution était, elle aussi, assez prévisible : elle était attendue depuis longtemps par les analystes, même s'il était néanmoins difficile d'en préciser la date. Or, une grande partie des coûts des raffineurs européens étant établis en monnaies nationales, toute hausse du dollar représente un avantage significatif. Pour un opérateur basé en France, la croissance moyenne de la marge de raffinage a donc été de 30 % en francs français entre le premier semestre 1996 et le premier semestre 1997. Au niveau de la distribution, l'évolution des marges a également été positive. La hausse moyenne, tous produits confondus, a été de 9 % dans les pays de l'Union européenne avec des écarts très significatifs d'un pays et d'un produit à l'autre.

Dans ce contexte, les résultats affichés par les compagnies pétrolières françaises sont positifs.

C'est ainsi que le chiffre d'affaires consolidé du groupe Total pour les trois premiers trimestres de 1997 s'établit à 143,3 milliards de francs, en croissance de 14,3 % par rapport aux trois premiers trimestres de 1996.

Dans les secteurs du pétrole et du gaz (amont et aval), cette croissance s'explique :

- pour 70 % environ par l'effet combiné de la variation des taux de change et des prix des hydrocarbures et des produits raffinés ;

- pour 25 % environ par la progression de la production d'hydrocarbures et l'augmentation des ventes de produits raffinés ;

- pour le solde, par la progression du chiffre d'affaires de l'activité " trading ".

Sur la même période, le chiffre d'affaires du groupe Elf Aquitaine enregistre une croissance de 14 %, pour s'établir à 190,9 milliards de francs.

2. La situation structurelle du raffinage reste cependant préoccupante

a) Le raffinage doit rétablir sa compétitivité propre

Depuis 15 ans, en dehors de quelques années exceptionnelles (contre choc pétrolier en 1986, guerre du Golfe en 1990...), les résultats économiques nets du secteur raffinage-distribution ont été nuls ou négatifs du fait de marges de raffinage très insuffisantes.

En 1995 et 1996, elles se sont avérées bien inférieures aux seuils nécessaires pour couvrir les coûts d'exploitation et plus encore pour financer les investissements à long terme. L'embellie très conjoncturelle du quatrième trimestre 1996 ne s'est pas maintenue au premier trimestre 1997.

Aussi observe-t-on une réduction notable des budgets d'investissement du secteur raffinage : 3 milliards de francs en 1993 ; 2,3 milliards en 1995 ; 2,2 milliards en 1996 ; 1,2 milliard prévu en 1999. Pourtant, l'adaptation aux évolutions de la demande (moins d'essences et de fiouls lourds, plus de gazole) et aux futures spécifications sur les carburants (moindres teneurs en aromatiques et en soufre notamment) vont requérir des investissements qui se chiffreront à plusieurs milliards de francs pour chacune des raffineries, nécessitant leur conversion profonde.

Or, du fait du développement du marché spot du brut et dans le souci d'améliorer leur gestion, les grands groupes pétroliers ont séparé leurs activités d'exploration/production, de transport, de raffinage/distribution et de pétrochimie et les ont constituées en centres de profits autonomes, chaque segment devant faire preuve de sa propre rentabilité.

b) Un problème européen...

L'industrie européenne de raffinage traverse actuellement une période difficile, principalement due à des surcapacités de l'ordre de 10 %.

Il en résulte des excédents de production, particulièrement d'essences, qui tendent à maintenir structurellement les marges de raffinage à un niveau faible. Ce phénomène est encore aggravé par des déséquilibres régionaux : les taux d'utilisation des raffineries sont voisins de 70 % dans le bassin méditerranéen alors qu'ils sont en moyenne de 90 % en Europe du Nord-Ouest.

La situation va en s'aggravant car les accroissements de capacité entraînés par la modernisation des installations sont plus rapides que la croissance du marché. Pour y remédier, trois raffineries ont été fermées en 1995 (deux en Allemagne, une aux Pays-Bas), suivies aujourd'hui par une raffinerie au Danemark et une autre en Angleterre. Ces cinq fermetures représentent une capacité globale d'environ 20 Mt/an.

Il reste toutefois encore une soixantaine de Mt/an à supprimer dans les prochaines années (à titre de comparaison, la capacité française est de 92 Mt/an).

c) ... aggravé en France par des difficultés spécifiques

Ces difficultés sont les suivantes :

- L'avantage fiscal donné au gazole déséquilibre le marché français des carburants routiers . Le gazole représente ainsi 61 % des carburants routiers, alors qu'il n'atteint que 48 % dans l'Union européenne. Il en résulte une inadéquation de la production des raffineries françaises, dont les unités mises en place dans les années 1980 avaient été conçues pour une production maximale d'essence.

- Le programme nucléaire a réduit la demande de fioul lourd à un niveau inférieur de 1,3 Mt en 1996 à la production des raffineries. Ce produit sera de plus en plus difficile à écouler compte tenu de la réduction des teneurs en soufre autorisées.

- La concurrence des grandes surfaces, qui distribuent désormais plus de 50 % des carburants, ne permet pas à la distribution de pallier les difficultés du raffinage . Les prix hors taxes des carburants et les marges de transport et de distribution sont les plus faibles d'Europe, à l'exception du Royaume-Uni où les compagnies pétrolières ont lancé à l'automne 1995 une vive guerre des prix contre les grandes surfaces.

d) Quelles solutions ?

Le maintien d'une industrie française du raffinage étant indispensable à la sécurité de nos approvisionnements en produits raffinés, il doit constituer un objectif prioritaire.

Il importe que la France ne prenne pas plus que sa part dans l'inévitable réduction de la capacité européenne. Dans cet esprit, les sociétés pétrolières réalisent des études pour concevoir la meilleure adaptation des schémas de raffinage, de façon à suivre les évolutions prévisibles des marchés en France dans les dix années à venir et à définir les mesures à prendre en vue de rétablir la compétitivité du raffinage français dans un contexte européen très concurrentiel.

Pour ce qui concerne les difficultés spécifiquement françaises, les plus lourdes de conséquences sont l'écart de fiscalité entre le super et le gazole et le niveau anormalement bas des marges de distribution. Dans ces domaines, un premier pas a été fait en 1996 avec la stabilisation en francs courants du différentiel de taxe intérieure sur les produits pétroliers (TIPP) entre le super et le gazole et avec un ensemble de mesures législatives portant sur la distribution.

Le projet de loi de finances pour 1998 prévoit, quant à lui, un relèvement uniforme de la TIPP de 8 centimes par litre , en maintenant l'écart en valeur absolue entre les taxes sur les différents carburants. En valeur relative, la hausse est cependant plus forte pour le gazole (+ 3,4 %) que pour l'essence sans plomb (+ 2,1 %). Ceci apparaît insuffisant.

Comme l'année dernière, votre commission souhaite que le Gouvernement ait le courage politique de réduire cet écart.

Parallèlement, des solutions devront être trouvées pour que la compétitivité du secteur des transports routiers et du secteur automobile n'en souffre pas
.

3. Le problème du maintien des petites stations-services

Le nombre des stations-service est en décroissance constante depuis 1975 où l'on en comptait 42.500 et votre commission s'inquiète de cette évolution très néfaste pour l'aménagement du territoire . Aujourd'hui, il n'en subsiste plus que 18.400, parmi lesquelles 11.000 sont à la marque des raffineurs, 3.900 appartiennent à la grande distribution et 3.500 sont libres.

Le maintien de ce réseau de distribution est important en raison du service de proximité qu'il permet. Mais il l'est tout autant pour des raisons de sécurité d'approvisionnement, comme l'a encore démontré la crise de novembre 1996 (blocage des grands dépôts par les camionneurs), ainsi que la grève récente de ces derniers.

Aussi, le gouvernement a-t-il crée, en 1991, le Comité professionnel de la distribution des carburants dont les missions principales sont le soutien aux détaillants par des aides appropriées et l'étude d'actions visant à adapter le réseau aux conditions du marché européen.

Rappelons, par ailleurs, que le Parlement a adopté, en 1996, des dispositions législatives concernant la distribution de carburants :

- la loi du 1er juillet 1996 relative à la loyauté et à l'équilibre des prix et de la concurrence a abrogé l'interdiction de refus de vente et durcit les sanctions applicables à la revente à perte. Toutefois, elle n'a pas prohibé les offres ou pratiques de prix abusivement bas appliquées aux carburants ;

- la loi du 5 juillet 1996 relative au développement et à la promotion du commerce et de l'artisanat a renforcé ce dispositif et soumis à autorisation la création ou l'extension de toute installation de distribution au détail de carburant annexée à un magasin de moyenne ou grande surface ;

- enfin, la loi de finances pour 1997 a élargi l'assiette de la taxe d'aide au commerce et à l'artisanat. Le complément de ressources, estimé à 60 millions de francs par an, devait permettre de financer de nouvelles aides pour le maintien d'un réseau suffisant de stations-service sur l'ensemble du territoire, notamment dans les régions rurales. Cependant , le Fonds destiné à recueillir ces sommes n'a toujours pas été doté. Votre commission souhaite que le ministre en précise les raisons et expose la politique que le Gouvernement entend mener en faveur des petites stations-service.

4. Le problème de la suppression de l'avantage fiscal lié à la provision pour fluctuation des cours

L'article 6 du projet de loi de finances pour 1998 prévoit la suppression de l'avantage fiscal lié à la provision pour fluctuation des cours, les provisions constituées devant être réintégrées par parts égales sur une période de trois ans. Cette provision permet aux industries transformatrices de matières premières -dont les compagnies pétrolières- d'atténuer les incidences des variations des cours internationaux des matières premières.

Or, cette mesure aurait pour inconvénient de frapper des résultats indisponibles et non réalisés. Elle entraînerait une ponction de plus de 3 milliards de francs d'impôt qui, même étalée sur plusieurs années, aggraverait encore la situation de l'industrie française du raffinage alors même que sa situation est, on l'a vu, très dégradée.

Au cours de la première lecture du projet de loi de finances, l'Assemblée nationale a cependant adopté un amendement qui tend à limiter les conséquences financières de cet article, dans des conditions que votre commission estime cependant insuffisantes.

D. LE CHARBON

1. L'application du Pacte charbonnier

Signé le 20 octobre 1994, le Pacte charbonnier prévoit l'extinction progressive de l'extraction de charbon, tout en garantissant l'emploi des agents du groupe. Il comporte, en effet, deux dispositions principales :

- l'extraction du charbon prendra fin en 2005, en application d'un plan de fermeture progressive des sites producteurs ;

- les agents de Charbonnages de France (CDF) pourront poursuivre leur carrière jusqu'à ce qu'ils puissent bénéficier de mesures d'âge.

L'application du Pacte s'est traduite par la fermeture des sites de La Mure dans le Dauphiné, de Forbach en Lorraine et de Carmaux dans le Tarn. Aucune fermeture n'est prévue pour 1998, la direction du groupe étant chargée de soumettre à la concertation un programme pour les années à venir.

Les mesures d'âge décidées ont concerné les mineurs âgés d'au moins 45 ans. Pour les mineurs plus jeunes, les incitations à la conversion ont été renforcées : en juin 1996, les aides ont été revalorisées, passant en moyenne de 400.000 à 600.000 francs par agent. En outre, ces aides ne sont plus proportionnelle à l'ancienneté, afin de rajeunir l'âge des départs. Une garantie de retour en cas de licenciement économique avant 2005 est par ailleurs offerte, mais les conditions sont plus avantageuses pour les agents qui y renoncent.

2. Les résultats des Charbonnages de France

Le chiffre d'affaires des CDF a diminué de 11 % en 1996.

Son résultat d'exploitation s'est réduit de 1,3 % et son résultat final s'est considérablement dégradé, passant de + 1,6 milliard de francs en 1995 à - 5,3 milliards en 1996.

Parallèlement, son endettement s'est accru dans des proportions importantes et dépasse aujourd'hui 27 milliards de francs, contre 24 milliards de francs fin 1996.

Votre commission s'inquiète de cet accroissement de l'endettement des Charbonnages de France , dont la charge sera probablement supportée, à terme, par les finances publiques.

3. Les dotations budgétaires

Rappelons que les modalités de la participation financière de l'Etat au plan d'extinction de la production charbonnière ont évolué. Jusqu'en 1995, l'Etat versait à la fois une subvention d'exploitation et une contribution pour " charges spécifiques " couvrant les charges de l'établissement héritées du passé, comme les remboursements d'emprunt ou les prestations aux anciens mineurs. En 1995, le Gouvernement a décidé de ne plus verser de subvention d'exploitation et d'autoriser parallèlement CDF à emprunter à hauteur de 3 milliards de francs. Enfin, une dotation en capital de 2,4 milliards de francs prélevée sur les recettes de privatisation est venue renforcer les capitaux propres de l'établissement en 1997.

La participation de l'Etat inscrite dans le projet de budget pour 1998 atteint un montant comparable à celle de 1997 et elle sera versée selon les mêmes modalités. La subvention pour charges spécifiques, imputée sur les crédits de l'Industrie, passe en effet de 2.940 à 2.920 millions de francs et elle devrait être complétée, comme l'année passée, par une dotation en capital de 2,4 milliards de francs, comptabilisées sur le compte d'affectation spéciale des recettes de privatisation.

On peut, par ailleurs, se féliciter de la rebudgétisation du fonds d'industrialisation des bassins miniers, qui a pour vocation de favoriser l'implantation d'activités nouvelles sur les sites charbonniers.

Le projet de loi de finances pour 1998 prévoit à ce titre 140 millions de francs en autorisations de programme et 146,4 millions de francs en crédits de paiement au budget de l'Industrie. Cette rebudgétisation a l'avantage de pérenniser l'effort consenti par l'Etat pour la reconversion des zones concernées. En outre, à l'occasion de sa première lecture du projet, l'Assemblée nationale a adopté un amendement majorant les crédits inscrits en faveur de ce fonds de 12 millions de francs à la fois en autorisations de programme et en crédits de paiement.

4. Vers une réforme du code minier ?

Les problèmes que suscitent l'application du code minier fera l'objet de deux questions au ministre :

- Quelles solutions le Gouvernement envisage-t-il d'apporter au problème des affaissements miniers qui touche gravement nombre de communes minières ?

- Quand le Gouvernement envisage-t-il d'inscrire à l'ordre du jour du Parlement le projet de loi étendant et adaptant le code minier aux départements d'outre-mer , qui a déjà fait l'objet d'une lecture par le Sénat et de deux lectures par l'Assemblée nationale, sachant que ce texte est très attendu par les professionnels concernés ?

*

* *

La Commission des Affaires économiques et du Plan a donné un avis défavorable à l'adoption des crédits inscrits en faveur de l'énergie dans le projet de loi de finances pour 1998.

EXAMEN PAR LA COMMISSION

Réunie le mercredi 26 novembre 1997 sous la Présidence de M. Jean François-Poncet, président, la commission a procédé à l'examen du rapport pour avis de M. Jean Besson sur les crédits consacrés à l'énergie dans le projet de loi de finances pour 1998.

Evoquant tout d'abord les dossiers européens, M. Jean Besson, rapporteur pour avis, a rappelé que la directive sur l'électricité, adoptée par le Conseil des ministres de l'Energie le 19 décembre 1996, prenait en compte un certain nombre de thèses défendues par la France. Il a souligné qu'elle devrait permettre à notre pays de conserver une programmation à long terme des investissements, de préserver le coeur du service public et le caractère intégré d'Electricité de France (EDF) et qu'elle entraînerait une ouverture limitée et maîtrisée du marché électrique.

Rappelant que les négociations concernant la proposition de directive sur le marché intérieur du gaz naturel s'avéraient beaucoup plus difficiles, il a précisé que si des avancées significatives avaient été réalisées lors du Conseil des ministres de l'Energie du 27 octobre 1997, deux points de blocage majeurs subsistaient cependant, concernant l'organisation de la distribution de gaz et le degré d'ouverture du marché gazier. Il a souhaité que la France continue à défendre fermement ses positions lors du Conseil du 8 décembre prochain et s'est félicité de voir celles-ci confortées par l'arrêt du 23 octobre 1997 de la Cour de Justice des Communautés européennes relatif au monopole d'importation et d'exportation d'électricité et de gaz.

Le rapporteur pour avis a ensuite souligné les difficultés que poseraient à la France l'adoption de la proposition de directive relative à la taxation des produits énergétiques.

Puis, à propos du bilan énergétique français, M. Jean Besson, rapporteur pour avis, a indiqué que la production nationale d'énergie avait progressé de 1,7 %, en 1996, et la consommation totale d'énergie primaire, de 1,8 %, mais que le taux d'indépendance énergétique avait légèrement diminué (à 50,1 %) et que la facture énergétique avait enregistré une hausse de 30,9 %.

Il a alors présenté les axes majeurs de la politique énergétique française et rappelé que le Secrétaire d'état à l'Industrie avait récemment réaffirmé l'engagement nucléaire de la France, qui s'était traduit par une série de mesures concrétisant la poursuite de notre programme nucléaire.

Soulignant la nécessité de gérer l'aval du cycle nucléaire, il a précisé que le Gouvernement souhaitait que soient développées les recherches sur le stockage en surface et " sub-surface " et qu'il avait, par ailleurs, décidé d'abandonner Superphénix pour des raisons économiques, un médiateur étant chargé de proposer des solutions au plan local et régional et les modalités de la fermeture devant être prochainement arrêtées.

Dans ce contexte, il s'est félicité de la rebudgétisation des crédits destinés aux investissements de recherche du Commissariat à l'énergie atomique (CEA), à 325 millions de francs.

Le rapporteur pour avis a relevé que, si les préoccupations environnementales n'étaient pas étrangères à la politique menée par la France dans le domaine nucléaire, elles se traduisaient également dans d'autres aspects de sa politique énergétique, le Gouvernement ayant, en particulier, pour ambition de refaire de la maîtrise de l'énergie une priorité et d'encourager la production d'énergies renouvelables.

Après avoir rappelé que l'encouragement de l'utilisation rationnelle de l'énergie s'inscrivait dans le nouveau cadre juridique de la loi sur l'air, il a évoqué, en particulier, les mesures récentes concernant le secteur des transports, notamment le véhicule électrique, le véhicule au gaz de pétrole liquéfié et le véhicule au gaz naturel.

Il a souligné que les enjeux concernant la production d'énergies renouvelables étaient importants, tant sur le plan économique que sur celui de l'environnement ou de l'indépendance énergétique. Il a souhaité que la France valorise encore davantage son potentiel en ce domaine, dans des conditions économiquement acceptables.

Le rapporteur pour avis a indiqué que les crédits destinés à l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) enregistraient, pour 1998, une augmentation de 5,1 % pour ce qui concernait la subvention de fonctionnement et, pour les investissements, une stabilisation des autorisations de programmes à hauteur de 75 millions de francs, les crédits de paiement étant ajustés en fonction du rythme de réalisation des opérations.

Evoquant ensuite l'évolution des différents secteurs énergétiques, M. Jean Besson, rapporteur pour avis, a indiqué que les résultats d'EDF avaient connu une évolution favorable en 1996, le résultat net ayant progressé de 52 %, mais que les perspectives pour 1997 étaient cependant moins favorables, son résultat net pouvant diminuer de moitié, sous l'effet conjugué de la baisse des tarifs électriques et de la forte augmentation du prélèvement de l'Etat résultant de la clarification des relations entre l'Etat et EDF, organisée par le nouveau contrat d'entreprise pour 1997-2000.

Il a relevé que, si Gaz de France (GDF) avait également connu un bon exercice 1997, avec un résultat net en progression de 31,6 %, sa situation se dégradait cependant également cette année, ses perspectives de développement restant néanmoins très favorables. Il a, en effet, précisé que le prix du gaz demeurait attractif, que GDF menait une politique commerciale dynamique et procédait, en particulier, à la promotion de la " cogénération ", pour laquelle les conditions d'achat par EDF avaient été améliorées.

S'agissant du secteur pétrolier, le rapporteur pour avis a observé qu'il connaissait une certaine embellie, les compagnies pétrolières françaises affichant des résultats positifs et ayant vu leur chiffre d'affaires progresser au cours des trois premiers trimestres de 1997 (+ 14,3 % pour Total et + 14 % pour Elf Aquitaine).

Il a souligné que la situation structurelle du raffinage restait cependant préoccupante et avait amené les compagnies à réduire sensiblement leur budget dans ce secteur. Il a précisé que si ce problème se posait à un niveau européen, il se trouvait aggravé dans notre pays par des difficultés spécifiques, liées notamment à l'avantage fiscal donné au gazole et à la concurrence des grandes surfaces.

M. Jean Besson, rapporteur pour avis, a jugé que le maintien d'une industrie française du raffinage devait constituer un objectif prioritaire et qu'il importait que la France ne prenne pas plus que sa part dans l'inévitable réduction de la capacité européenne de raffinage.

Après avoir rappelé que le projet de loi de finances pour 1998 prévoyait un relèvement uniforme de la taxe intérieure sur les produits pétroliers de huit centimes par litre, il a souhaité, comme l'an dernier, que le Gouvernement ait le courage politique de réduire cet écart, des solutions devant être trouvées pour que la compétitivité du secteur du transport routier et de l'industrie automobile n'en souffrent pas.

Abordant du problème du maintien des petites stations-service, il a souhaité que le Gouvernement s'engage à doter le fonds créé à cet effet.

Pour ce qui concerne le secteur du charbon, M. Jean Besson, rapporteur pour avis, s'est inquiété de la considérable dégradation des résultats des Charbonnages de France et de l'accroissement de leur endettement. Il s'est félicité de la rebudgétisation du Fonds d'industrialisation des bassins miniers. Il a enfin proposé, d'une part, d'interroger le ministre sur les solutions qu'il entendait apporter au problème des affaissements miniers, et d'autre part, d'attirer son attention sur l'urgence qu'il y aurait à inscrire à l'ordre du jour du Parlement le projet de loi étendant et adaptant le code minier aux départements d'outre mer.

En conclusion, le rapporteur pour avis a souligné le caractère prospectif et volontariste de ce budget et a proposé à la commission de donner un avis favorable à l'adoption des crédits inscrits à ce titre dans le projet de loi de finances pour 1998.

Un large échange de vues s'est alors instauré.

Après avoir déclaré partager le souhait du rapporteur pour avis de voir les décisions en matière énergétique s'inscrire dans le long terme, et son inquiétude devant la baisse du taux d'indépendance énergétique, M. Dominique Braye a rappelé que si la France bénéficiait encore d'un taux d'indépendance élevé, elle le devait à sa politique électronucléaire. Ce constat l'a amené à poser le problème de l'abandon de Superphénix et à demander au rapporteur pour avis de préciser sa position sur ces questions.

En réponse, M. Jean Besson, rapporteur pour avis, a rappelé que le redémarrage du surgénérateur avait été contesté et que le décret du 11 juillet 1994 l'ayant autorisé avait été annulé par le Conseil d'Etat le 28 février 1997. Il a insisté sur le fait que des raisons économiques, et non de sûreté, avaient motivé cet abandon. Après avoir indiqué que ce dossier serait examiné par la commission d'enquête sur la politique énergétique de la France, créée par le Sénat, il a fait état du caractère délicat de sa situation de Sénateur socialiste du département de la Drôme, dont la culture était nucléaire et les élus majoritairement favorables à Superphénix.

M. Michel Barnier a souligné l'importance des problèmes énergétiques pour l'aménagement du territoire et pour la vie quotidienne de tous les Français. Il a considéré que le budget de l'énergie consacrait, sur ce dossier, une décision que la majorité sénatoriale n'approuvait pas et qui avait été dictée par le souci de respecter une promesse électorale, sans que le dossier en cause ait été réellement étudié. Il a rappelé les conditions dans lesquelles les décisions du Gouvernement de M. Pierre Bérégovoy, puis de celui de M. Edouard Balladur, avaient conduit à la réouverture de Superphénix et à son fonctionnement comme sous-générateur. Il a déploré que, faisant fi de ces délibérations gouvernementales, l'actuel ministre de l'environnement ait obtenu sa fermeture. Il a estimé que l'on ne pouvait approuver ce budget qui consacrait " la fermeture désinvolte et électoraliste " de Superphénix. Il a regretté que le nouveau Gouvernement n'ait pas, plutôt, procédé à une nouvelle enquête publique et a qualifié de " politique de gribouille " la politique menée par le Gouvernement en ce domaine, qu'il a déclarée non conforme à l'intérêt national.

Pour autant, il a rappelé qu'il ne plaidait pas pour le " tout nucléaire " et a évoqué le caractère décentralisé du débat national sur l'énergie qui s'était déroulé en 1994. Il a souhaité que le rapporteur pour avis demande au Gouvernement quelles suites il entendait donner aux conclusions très intéressantes de ce débat. Il a estimé qu'il convenait de poursuivre la politique d'encouragement aux économies d'énergie et s'est déclaré choqué par la récente campagne de promotion lancée par EDF, tendant à développer la consommation d'électricité.

M. Michel Barnier a regretté que le rapporteur pour avis n'ait pas évoqué la Conférence qui se déroulera prochainement à Kyoto sur le problème de l'effet de serre et le réchauffement de la planète. Il a également déploré la " timidité " du Gouvernement français dans les négociations européennes sur ces questions essentielles.

Il s'est enfin félicité des mesures adoptées le matin même par le Conseil des ministres en matière de limitation de la circulation automobile en cas de pics de pollution et tendant à encourager les véhicules propres, mesures dont il a rappelé qu'elles résultaient de l'application de la loi sur l'air adoptée sous le précédent Gouvernement.

M. Jean François-Poncet, président, a remercié et félicité l'orateur pour l'intérêt et la pertinence de son intervention.

M. Jean Besson, rapporteur pour avis, a indiqué qu'il évoquerait la Conférence de Kyoto dans son rapport. Il a rappelé son souci de tenir compte à la fois de la solidarité qui le liait au Gouvernement et de la position de la majorité de la commission.

Mme Anne Heinis a déclaré partager les remarquables propos de M. Michel Barnier et rendu hommage à la modération du rapporteur pour avis et à sa recherche de solutions équilibrées. Elle a cependant jugé qu'elle ne pouvait suivre sa proposition sans renier ses convictions profondes. Elle a tenu à marquer son désaccord quant aux décisions gouvernementales concernant l'aval du cycle nucléaire. Elle a précisé que, si l'on " cassait " ce dernier, on laissait aux générations futures le problème fondamental de la gestion des déchets ultimes, dont il importait de réduire au maximum la toxicité. Soulignant l'intérêt de Superphénix dans ce contexte -la transmutation des déchets constituant le seul espoir en la matière- elle a qualifié la décision du Gouvernement de fermer le surgénérateur de " caprice idéologique ". Elle a déploré que la France se prive ainsi d'un précieux instrument de recherche, cette dernière pouvant, certes, être poursuivie avec la centrale Phénix, mais sous réserve d'une importante rénovation.

Mme Anne Heinis a ensuite posé une série de questions auxquelles il n'avait pas encore été répondu et qui montraient -selon elle- le caractère idéologique des décisions du Gouvernement, concernant :

- la mesure du coût du maintien de Superphénix à l'arrêt ;

- le coût du stockage d'un " coeur " nucléaire actif, sachant qu'il y en a un et demi en attente et que l'on ne dispose que de l'expérience du stockage de " coeurs " usés ;

- le coût du démantèlement du surgénérateur, dont l'évaluation demandera probablement quatre à cinq ans ;

- les problèmes posés par le retard en matière de recherche fondamentale et par la perte de notre avance technologique qui résulteront de l'arrêt du surgénérateur ;

- l'avenir de notre indépendance énergétique.

Tout en se déclarant hostile au " tout nucléaire ", Mme Anne Heinis a considéré qu'on ne pouvait pas éluder les très graves problèmes qu'elle avait évoqués et qui justifiaient l'avis défavorable qu'elle donnerait à l'adoption des crédits de l'énergie pour 1998.

M. Jean François-Poncet, président, a souligné la gravité et le sérieux des interventions des différents orateurs, qui, loin de relever d'un parti pris idéologique, mais traduisaient le sentiment que la ministre de l'environnement avait, en quelques jours et avec légèreté, amené le Gouvernement à prendre des décisions qui engageaient l'avenir du pays, comme cela avait d'ailleurs été le cas sur d'autres dossiers essentiels, tel que le canal Rhin-Rhône. Il a fait valoir qu'il lui paraissait inacceptable que de telles décisions aient pu être prises sans études approfondies.

M. Désiré Debavelaere a souligné le problème du dédommagement des pays étrangers parties prenantes aux recherches menées dans le cadre du surgénérateur.

La commission a donné un avis défavorable à l'adoption des crédits inscrits au titre de l'énergie dans le projet de loi de finances pour 1998, le groupe socialiste votant en faveur de ces crédits.



1 Voir Enerpresse du 29 octobre 1997.

2 Rappelons que cette résolution reprend et complète la proposition de résolution n° 438 de M. Jacques Oudin.

3 Voir rapport Sénat n° 32 (1997-1998)

4 Il faut, en effet, souligner que contrairement à la plupart des autres pays de l'Union européenne, la France ne dispose pas de telles installations. Ceci signifie que l'ouverture du marché français concernera immédiatement les clients commerciaux de Gaz de France, qui seront considérés comme clients éligibles.

5 Mtep : millions de tonnes-équivalent-pétrole.

6 Intensité énergétique : consommation d'énergie primaire, corrigée du climat, divisée par le PIB marchand en volume.


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