RAPPORT N° 413 - PROJET DE LOI, ADOPTE PAR L'ASSEMBLEE NATIONALE APRES DECLARATION D'URGENCE, PORTANT DIVERSES DISPOSITIONS D'ORDRE ECONOMIQUE ET FINANCIER


M. Philippe MARINI, Sénateur


COMMISSION DES FINANCES, DU CONTROLE BUDGETAIRE ET DES COMPTES ECONOMIQUES DE LA NATION - RAPPORT N° 413 - 1997/1998

Table des matières






N° 413

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1997-1998

Annexe au procès-verbal de la séance du 29 avril 1998

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) sur le projet de loi, ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE APRÈS DÉCLARATION D'URGENCE, portant diverses dispositions d'ordre économique et financier,

TOME II

Par M. Philippe MARINI,

Sénateur.

EXAMEN DU TITRE II

(1) Cette commission est composée de : MM. Christian Poncelet, président ; Jean Cluzel, Henri Collard, Roland du Luart, Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. Philippe Marini, René Régnault, vice-présidents ; Emmanuel Hamel, Gérard Miquel, Michel Sergent, François Trucy, secrétaires ; Alain Lambert, rapporteur général ; Philippe Adnot, Bernard Angels, Denis Badré, René Ballayer, Jacques Baudot, Claude Belot, Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM. Roger Besse, Maurice Blin, Joël Bourdin, Guy Cabanel, Jean-Pierre Camoin, Auguste Cazalet, Michel Charasse, Jacques Chaumont, Jean Clouet, Yvon Collin, Jacques Delong, Yann Gaillard, Hubert Haenel, Claude Haut, Jean-Philippe Lachenaud, Claude Lise, Paul Loridant, Marc Massion, Michel Mercier, Michel Moreigne, Joseph Ostermann, Jacques Oudin, Henri Torre, René Trégouët.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 11 ème législ .) : 727, 781, et T.A. 115.

Sénat
: 373 et 408 ( 1997-1998)

Politique économique.

TITRE II

DISPOSITIONS RELATIVES
À L'ADAPTATION DE LA LÉGISLATION FRANÇAISE
ET À LA MODERNISATION DES ACTIVITÉS FINANCIÈRES
EN VUE DE LA TROISIÈME PHASE DE L'UNION ÉCONOMIQUE ET MONÉTAIRE

Au-delà des divisions formelles qu'il comporte, le présent titre comprend deux séries de dispositions ayant trait respectivement au plan de passage à l'euro et à la modernisation des activités financières.

Le plan français de passage à l'euro doit se faire selon le principe du "ni-ni" entre 1999 et 2002 : ni obligation (de conversion), ni interdiction. Dans ce cadre, les dispositions du projet de loi, de nature technique, sont destinées à permettre de convertir les grands mouvements financiers en euros dès 1999. Elles ont principalement pour objet :

- la conversion de la comptabilité du capital social et des déclarations fiscales des entreprises (articles 12, 13 et 26) ;

- la conversion des dettes négociables en euros, en particulier celle de l'État (article 14) ;

- la possibilité d'indexer sur l'inflation les nouvelles émissions d'instruments financiers et, notamment, de l'État afin d'alléger la charge de la dette publique (article 15) ,

- l'autorisation de cotation des instruments financiers en euros, adaptation des systèmes de règlement-livraison, substitution des indices " euro " aux indices " franc " et continuité des contrats (articles 16, 17 et 20 à 24) ;

Les autres dispositions de ce titre ont trait à la modernisation des marchés financiers, processus continu d'évolution et d'adaptation de la place financière de Paris, afin de lui permettre de maintenir sa compétitivité juridique par rapport aux autres places européennes. Bien que mêlées au dispositif de passage à l'euro, elles n'ont pas de lien direct avec lui. Ces dispositions sont les suivantes :

- irrévocabilité des opérations de règlement-livraison de titres et modification des règles de transfert de propriété (articles 18 et 19) ;

- définition législative de l'appel public à l'épargne et établissement d'un corpus de règles propres aux investisseurs "qualifiés" et aux "cercles restreints d'investisseurs" (article 25) ;

- création de nouveaux types d'OPCVM (articles 27 à 29) ;

- rachat par une société de ses propres actions (article 30) ;

- modification du processus de décision au sein du Conseil des marchés financiers (article 32) ;

- extension de la procédure de retrait obligatoire aux certificats d'investissement et fusion obligatoire des certificats d'investissement et des certificats de droits de vote (article 33).

*

* *

Votre rapporteur souhaite rappeler brièvement quelques éléments généraux concernant le passage à la monnaie unique avant d'aborder l'examen des articles.

1) Le calendrier du passage à la monnaie unique

Depuis le Conseil européen de Madrid, en décembre 1995, le calendrier de passage à la monnaie unique est clairement établi.

Le 2 mai 1998, les chefs d'Etat et de Gouvernement, réunis à Bruxelles, décideront de leur participation à l'Union économique et monétaire (UEM), sur la base des recommandations du Conseil des ministres Ecofin, en prenant en compte les rapports de la Commission et de l'Institut monétaire européen (IME) ainsi que l'opinion du Parlement européen.

Le 3 mai, le Conseil Ecofin déterminera les pré-parités de change bilatérales définitives pour les monnaies des pays membres de l'UEM.

Le 1 er janvier 1999, les parités de change entre les monnaies participantes et l'euro seront fixées de manière irrévocable. La monnaie unique européenne sera dès lors une réalité.

Toutefois, ce n'est qu'à partir du 1 er janvier 2002 que les pièces et les billets en euro seront mis en circulation, les monnaies nationales devant définitivement disparaître le 1 er juillet 2002.

24 mars 1998 : l'Institut monétaire européen (IME), qui regroupe les banques centrales, établit son rapport sur la convergence en Europe et le rend public le lendemain.

28 mai : référendum au Danemark sur le traité d'Amsterdam.

30 juin : date limite pour la mise en place de la Banque centrale européenne à Francfort qui se substitue à l'IME

25 mars : la Commission de Bruxelles publie son rapport sur la convergence, assorti de recommandations aux gouvernements.

27 septembre : élections générales en Allemagne.

26 mars : réunion extraordinaire du Conseil de la Bundesbank qui produit son propre rapport de convergence en Europe et le présente le 27 au gouvernement.

31 décembre : annonce du taux de conversion de l'euro vis-à-vis de chaque monnaie nationale. En dépit de la fixation des parités croisées le 2 mai, le niveau de l'euro ne peut être connu avant. Certaines monnaies ne participant pas à l'euro (sterling) tout en continuant d'appartenir à l'écu, il faut attendre le moment où l'euro se substitue à l'écu, le 31 décembre, pour connaître le taux de conversion

fin mars : les banques centrales de Belgique et des Pays-Bas transmettent à leurs gouvernements leurs rapports de convergence.

2 avril : débat au Parlement allemand.

21 avril : débat en France à l'Assemblée nationale (le 23 au Sénat) sur une proposition de résolution concernant les recommandations de la Commission de Bruxelles.

 

23-24 avril : vote du Bundestag sur l'euro.

1er mai : conseil des ministres des Finances de l'Union européenne à Bruxelles sur l'euro.

1er janvier 1999 : l'euro est la monnaie unique des pays de l'Union monétaire. Le franc et le mark ne sont plus que "l'expression non décimale" de l'euro en France et en Allemagne, avant de disparaître totalement le 1er juillet 2002.

2-3 mai : sommet extraordinaire, à Bruxelles, des chefs d'Etat et de gouvernement. Trois missions : établir la liste des pays ; fixer les parités bilatérales des monnaies entrant dans l'euro ; choisir le président de la Banque centrale européenne et les membres du directoire.

4 janvier 1998 : première cotation de l'euro sur les marchés.

2) Le principe du "ni obligation - ni interdiction"

La période de transition, des monnaies nationales à la monnaie unique, durera ainsi trois ans. Elle représente une difficulté pour les entreprises puisque coexisteront plusieurs formes d'une même monnaie, l'euro et les monnaies nationales qui subsisteront comme subdivisions non décimales de l'euro.

En octobre 1996, la direction du Trésor a demandé à Jacques Creyssel, directeur général de la stratégie et des études économiques du CNPF, et à Pierre Simon, directeur général de l'Association française des établissements de crédit et des entreprises d'investissement (AFECEI), de constituer un groupe de travail destiné à mettre en évidence les conséquences pratiques du passage à l'euro pour les entreprises. Le rapport issu de ce groupe de travail a été présenté et discuté au Comité national de l'euro, qui l'a approuvé, le 20 mars 1997.

La première recommandation de ce rapport " Simon-Creyssel " reprend le principe posé lors du Conseil européen de Madrid de décembre 1995, et réaffirmé par l'article 8-1 du projet de règlement communautaire approuvé le 7 juillet 1997, selon lequel le passage à la monnaie unique ne devrait entraîner " ni obligation ni interdiction " . En d'autres termes, les entreprises seront libres d'établir leurs comptes en euros ou en francs entre le 1 er janvier 1999 et le 31 décembre 2001. Passé cette date, elles devront impérativement établir leurs comptes en euros.

Toutefois, la possibilité ouverte aux entreprises, à compter du 1 er janvier 1999, de tenir leur comptabilité en euros, pose le problème, pour celles dont l'exercice ne coïncide pas avec l'année civile, du transfert en euros de comptes préalablement tenus en francs. C'est pourquoi la deuxième recommandation du groupe de travail propose la réalisation d'un " arrêté intercalaire " des comptes au 31 décembre 2001, cette solution permettant de ne pas modifier la clôture comptable de l'entreprise.

Cet " arrêté intercalaire " - en quelque sorte un arrêté intermédiaire limité - exonère les entreprises des formalités assez lourdes liées à l'établissement de comptes intermédiaires. Au 31 décembre 2001, elles devraient convertir à l'euro leur balance en capitaux sans pour autant comptabiliser les opérations de fin d'exercice (amortissements, provisions...) : la conversion devrait donc porter sur l'ensemble des postes de bilan et du compte de résultat.

Enfin, une troisième recommandation tend à éviter que les entreprises concernées aient deux exercices comptables consécutifs d'une durée cumulée de vingt-quatre mois mais d'une durée individuelle non égale à douze mois. Cette situation poserait des problèmes sur le plan fiscal et juridique, ainsi qu'en termes de présentation des comptes et de relations avec les tiers.

Section 1

Dispositions comptables
ARTICLE 12

Dispositions relatives à la tenue de la comptabilité en euros

Commentaire : le présent article donne aux entreprises qui le souhaitent le choix - irrévocable - de tenir leur comptabilité en euros dès le 1 er janvier 1999 et prévoit une dérogation relative à l'enregistrement, dans un même compte de résultat, des arrondis de conversion engendrés par l'introduction de la monnaie unique.

Le passage à la monnaie unique soulève plusieurs problèmes juridiques et notamment celui de la possibilité d'établir des documents comptables dans une unité monétaire autre que le franc, ce qui est actuellement interdit, ainsi que celui des techniques de conversion utilisables.

Le présent article apporte une solution à ces deux problèmes.

I. LA FACULTÉ D'ÉTABLIR DES DOCUMENTS COMPTABLES EN EUROS DÈS LE PREMIER JANVIER 1999

Les dispositions actuelles de l'article 16 du Code de commerce imposent aux entreprises l'utilisation du franc pour la tenue de l'ensemble de leur comptabilité, y compris les livres comptables (livre-journal, grand-livre). Manifestement, le maintien de ces dispositions feraient obstacle à l'utilisation de l'euro par les entreprises.

C'est pourquoi le paragraphe I du présent article propose de déroger aux dispositions de l'article 16 du Code de commerce.

Au demeurant, on observera que :

- d'une part, cette règle connaissait déjà une dérogation pour les SICAV et les fonds communs de placement, en vertu de l'article 32 de la loi n° 88-1201 du 23 décembre 1988 qui dispose : "... la comptabilité des SICAV et fonds communs de placement, peut être tenue en unités monétaires autres que le franc français..." ;

- d'autre part, la tenue d'une comptabilité en ECU était déjà possible à condition de tenir également une comptabilité en francs ; cette position a été renforcée par l'article 283-1 du décret n° 94-663 du 2 août 1994, qui permet une publication des comptes en francs, accompagnée -et non substituée- d'une publication des comptes en ECU, avec indication en annexe du taux de conversion à la date de clôture.

La diversité des situations commande cependant, conformément du reste au principe du "ni-ni" de ne pas abroger les dispositions de l'article 16, mais seulement d'établir la possibilité d'y déroger.

En effet, de nombreuses entreprises devront nécessairement établir leurs comptes en euros. C'est le cas en premier lieu d'entreprises qui ont des relations avec l'étranger ou avec d'autres entreprises ayant fait le même choix de l'euro.

Par ailleurs, les sociétés cotées devront nécessairement établir leurs comptes en euros du fait du basculement de l'ensemble des marchés financiers (voir article 16 du présent projet de loi).

Enfin, de nombreuses entreprises ont des systèmes informatiques communs pour la comptabilité générale et la production d'états de gestion. Dès lors que l'essentiel de leurs opérations sera réalisé en euro, le basculement de leur comptabilité de gestion, et donc de leur système comptable, apparaît nécessaire.

En revanche, d'autres entreprises dont l'activité est surtout domestique et tournée vers le public souhaiteront probablement attendre l'introduction des pièces et des billets en euro.

La tenue d'une double comptabilité étant exclue, un régime de liberté s'impose.

II. LES TECHNIQUES DE CONVERSION ET LE PROBLEME DES ARRONDIS

A. LES RÈGLES POSEES PAR LE DROIT COMMUNAUTAIRE

Durant la période transitoire, du 1 er janvier 1999 au 30 juin 2002, l'euro et le franc vont coexister, ce qui va conduire à d'innombrables opérations de conversion. Ces opérations vont cependant soulever des difficultés puisque la conversion d'un montant de francs en euros -ou inversement- donnera lieu en général à des arrondis.


Comme il n'est pas possible de retenir un taux de conversion simple (par exemple, un euro égal à 6 francs ou à 7 francs), puisque cela reviendrait à dévaluer ou réévaluer le franc sans justification, le passage des francs en euros va être à l'origine d'écarts de valeur résultant des arrondis de conversion.

Afin de permettre à l'ensemble des pays européens de résoudre ce problème de manière homogène, le règlement communautaire n° 1103/97 du Conseil du 17 juin 1997 fixe un cadre général et des règles précises quant aux techniques de conversion qui devront être utilisées.

1) Le taux de conversion irrévocable qui sera fixé à la fin de l'année 1998 comportera six chiffres significatifs, c'est-à-dire cinq chiffres après la virgule.

Il faudra le plus souvent arrondir le résultat suivant une logique mathématique courante : arrondir au centime supérieur lorsque le troisième chiffre après la virgule est égal ou supérieur à 5 et au centime inférieur lorsque ce troisième chiffre après la virgule est inférieur à 5.

Exemple :

Soit un euro = 6,47551 francs

Valeur en francs de 47,21 euros :

47,21 x 6,47551 = 305,7088271 francs,

soit 305,71 francs.

Valeur en francs de 47,22 euros :

47,22 x 6,47551 = 305,7735822 francs

soit 305,77 francs

Un autre exemple met en évidence les difficultés liées aux arrondis. Soit un euro = 6,12345 francs ; calculons la valeur en euros de sommes autour de 100 francs :

99,96 FRF = 16,32413 =

16,32 euros

99,97 FRF = 16,32576 )

 

99,98 FRF = 16,32739 )

 

99,99 FRF = 16,32803 )

 

100,00 FRF = 16,33066 ) =

16,33 euros

100,01 FRF =16,33229 )

 

100,02 FRF = 16,33392 )

 

100,03 FRF = 16,33556 =

16,34 euros

Ainsi, six montants en francs auront la même contre-valeur en euros; 16,33 euros correspondront à 99,97 francs comme à 100,02 francs.

Deux séries de problèmes peuvent alors être identifiées.


Les écarts dus aux conversions successives

Si la conversion euro/franc puis franc/euro ne pose pas de problème, il en va autrement pour la conversion franc/euro puis euro/franc. Ainsi, 99,97 francs donnent 16,33 euros, mais 16,33 euros correspondent à 100 francs (sur la base de un euro = 6,12345 francs).

La conversion franc/euro puis euro/franc peut donc créer des écarts allant jusqu'à plus ou moins 3 centimes. Imaginons un client ayant reçu une facture en francs et réglant en euros : son fournisseur recevra un règlement en francs de la banque d'un montant légèrement différent, ce qui pose des problèmes de rapprochement dans sa comptabilité.


Les écarts dus aux conversions avant ou après calcul

Toutes les opérations (addition, soustraction, multiplication, division, etc.) risquent de donner des résultats différents selon que la conversion sera faite sur les éléments de base avant calcul ou sur le résultat final. En particulier, la somme des arrondis n'est pas égale à l'arrondi de la somme .

Les différentes recommandations sur ce point vont dans le sens du principe de conversion du total plutôt que des éléments, afin de limiter l'impact des arrondis.

2) Les taux de conversion ne peuvent pas être arrondis ou tronqués lors des conversions.

3) L'utilisation du taux inverse dans les fonctions de conversion est interdite.

4) Si l'on transforme des francs en euros, il faut diviser le montant initial par le taux de conversion ; si l'on transforme les euros en francs, il faut multiplier le montant initial par le taux de conversion. Toutes les conversions (des monnaies nationales vers l'euro ou de l'euro vers les monnaies nationales ) devront prévoir six chiffres significatifs, avec un arrondi au-dessus ou au-dessous, en fonction de la décimale suivante. Si l'application du taux de conversion donne un résultat qui se situe exactement au milieu, la somme est arrondie au chiffre supérieur. Toute somme d'argent à convertir d'une unité monétaire nationale dans une autre doit d'abord être convertie dans un montant exprimé dans l'unité euro ; ce montant ne pouvant être arrondi à moins de trois décimales est ensuite converti dans l'autre unité monétaire nationale.

5) La conversion en euros des comptes des entreprises va donner lieu à des arrondis, l'article 5 du règlement n° 1103/97 du Conseil, du 17 juin 1997 prévoit que " les sommes d'argent à payer ou à comptabiliser, lorsqu'il y a lieu de les arrondir après conversion dans l'unité euro conformément à l'article 4 sont arrondies au cent supérieur ou inférieur le plus proche. Les sommes d'argent à payer ou à comptabiliser qui sont converties dans une unité monétaire nationale sont arrondies à la subdivision supérieure ou inférieure la plus proche ou, à défaut de subdivision, à l'unité la plus proche ou, selon les lois ou pratiques nationales, à un multiple ou à une fraction de la subdivision ou de l'unité monétaire nationale. Si l'application du taux de conversion donne un résultat qui se situe exactement au milieu, la somme est arrondie au chiffre supérieur."

B. LES PROBLEMES SOULEVES EN DROIT FRANCAIS ET LA SOLUTION APPORTEE PAR LE PRESENT ARTICLE


L'apparition de légers écarts d'arrondis pourrait obliger les entreprises à comptabiliser des profits ou des pertes.

Or actuellement, une telle comptabilisation n'est pas possible. En effet, le deuxième alinéa de l'article 13 du code de commerce pose le principe de l'interdiction et de la compensation dans un même compte de charges et de produits.

Cet article dispose en effet que "les éléments d'actif et de passif doivent être évalués séparément.

"Aucune compensation ne peut être opérée entre les postes d'actif et de passif du bilan ou entre les postes de charges et de produits du compte de résultat.

"Le bilan d'ouverture d'un exercice doit correspondre au bilan de clôture de l'exercice précédent."


C'est pourquoi le présent article, par dérogation à l'article 13 du code de commerce précité, prévoit que "les différences d'arrondis de conversion résultant de l'application des règles d'arrondissement propres à l'introduction de l'euro sont inscrites en résultat pour leur montant net" .

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter le présent article sans modification.

Section 2

Dispositions relatives à la conversion du capital social des sociétés par actions, des sociétés à responsabilité limitée et des sociétés coopératives

ARTICLE 13

Dispositions relatives à la conversion du capital social des sociétés anonymes et des sociétés à responsabilité limitée

Commentaire : le présent article propose une adaptation des règles applicables aux opérations touchant le capital social dans le but d'encourager sa conversion en euros pendant la période transitoire.

Le présent article propose, d'une part, la suppression de la mention obligatoire de la valeur nominale des actions et, d'autre part, l'adaptation des procédures d'ajustement.

I. LA SUPPRESSION DE LA MENTION OBLIGATOIRE DE LA VALEUR NOMINALE DES ACTIONS

La conversion du capital social des entreprises en euros obéira, elle aussi, au principe fondamental "ni obligation - ni interdiction", le délai limite étant fixé à la fin de la période transitoire, soit le 31 décembre 2001.

Au cours de cette période transitoire, les entreprises pourront convertir leur capital social, soit de manière globale, soit action par action.

La méthode de conversion globale du capital social consiste à diviser le capital social converti en euros par le nombre d'actions ou de parts. Elle offre l'avantage de la simplicité, puisqu'elle permet de limiter les arrondis en convertissant une somme plutôt que des montants individuels. Toutefois, elle conduit à une valeur nominale exprimée avec plusieurs décimales, ce qui pose, à l'évidence un problème en termes de lisibilité, étant donné le nombre important de décimales.

La conversion de la valeur nominale de chaque action ou de chaque part sociale présente les avantages et les inconvénients inverses. Mais, surtout, dans la mesure où elle tend à arrondir chaque résultat soit au cent d'euro près soit à l'euro près, elle nécessite à chaque fois une augmentation ou une réduction du capital social.

Or, l'article 268 de la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales dispose que "le montant nominal des actions ou coupures d'action est fixé par les statuts".

Toutefois, cette obligation de la mention de la valeur nominale des actions ou des parts sociales ne s'impose qu'aux seules sociétés anonymes

Le paragraphe I du présent article , en remplaçant, dans le texte de l'article 268 de la loi du 24 juillet 1966, le mot " est " par les mots " peut être ", transforme cette obligation en faculté.

En outre, le paragraphe I prévoit deux dispositions tirant les conséquences de la suppression de la mention obligatoire de la valeur nominale des actions :

il prévoit que "cette option s'applique alors à toutes les émissions d'actions" , et ce afin d'éviter la coexistence d'actions avec valeur nominale et d'autres sans valeur nominale ;

il supprime le 1° de l'article 434 de la même loi, qui prévoit les peines encourues par les dirigeants d'une société anonyme, qui auraient sciemment négocié "des actions sans valeur nominale".

Il convient de souligner que ces dispositions sont de nature permanente , et non liées à la seule introduction de l'euro.

II. L'ADAPTATION DES PROCEDURES D'AJUSTEMENT DU CAPITAL

A. EN CAS D'AUGMENTATION DU CAPITAL


La conversion en euros du capital social d'une entreprise se heurte à une double difficulté.

D'une part, il s'agit d'une opération technique qui nécessite l'intervention de l'assemblée générale, compétente pour décider des augmentations de capital.

D'autre part, la décision de convertir, si elle était réservée aux seuls dirigeants de l'entreprise, ne respecterait pas le principe du "ni ni", posé par l'article 8 du projet de règlement communautaire, approuvé le 7 juillet 1997.

C'est pourquoi, le II du présent article prévoit, non un transfert de compétences, mais une simple délégation de pouvoirs de l'assemblée des associés d'une SARL vers les dirigeants de la société.

Ce même paragraphe détermine les conditions d'une telle délégation de pouvoirs.

Deux points méritent d'être relevés.

D'une part, les dispositions en question sont conjoncturelles : elles sont liées à "la conversion du capital social en unité euro".

D'autre part, les conditions de la délégation sont largement inspirées des dispositions applicables aux sociétés anonymes : l'assemblée générale des actionnaires doit déterminer au préalable un plafond dans la limite duquel l'augmentation peut avoir lieu ; un délai de vingt-six mois est fixé pour procéder à l'émission des actions conduisant à l'augmentation ; la délégation donnée aux gérants concerne non seulement l'opération en tant que telle, mais aussi le constat de sa réalisation et la modification des statuts qui en résulte.

L'Assemblée nationale a adopté un amendement tendant à insérer un IV au présent article, dont l'objet est de faciliter la conversion du capital social en euros pour les sociétés coopératives , en simplifiant les procédures d'augmentation de capital par incorporation de réserves.

B. EN CAS DE REDUCTION DU CAPITAL

Le III du présent article concerne les réductions du capital , rendues nécessaires, le cas échéant, par suite de la conversion du capital social des sociétés en euros.

Actuellement, la procédure de réduction de capital non motivée par des pertes est régie par certaines dispositions de la loi du 24 juillet 1966, à savoir l'article 63 en ce qui concerne les SARL , et les articles 215, 216 et 217-2 s'agissant des sociétés anonymes.

Comme toute réduction du capital non motivée par des pertes, la procédure devra être autorisée par l'assemblée générale extraordinaire. Toutefois, par dérogation aux règles habituelles, le paragraphe III du présent article prévoit de supprimer la faculté d'opposition dont disposent les créanciers, à condition toutefois que le montant de la réduction soit affecté à un compte de réserve indisponible prévoit également une procédure simplifiée pour réaliser la réduction du capital : l'assemblée générale extraordinaire pourra déléguer au conseil d'administration, au directoire ou aux gérants, les pouvoirs nécessaires pour procéder à la réduction dans un délai de vingt-six mois à compter de l'autorisation.

Votre rapporteur souhaite faire observer qu'un grand nombre de sociétés ont déjà convoqué leur assemblée générale, sans que leur ordre du jour ait pu prendre en compte cette réforme. Toutefois, les sociétés dont les assemblées générales d'actionnaires ont été convoquées avant l'adoption du présent projet de loi et qui auront lieu après la promulgation du présent projet devraient pouvoir intégrer les facilités accordées par l'adoption du présent projet de loi dans leur ordre du jour complémentaire.

A défaut de pouvoir être intégrée dans l'ordre du jour, ces modifications pourraient être, le cas échéant, invoquées par tout actionnaire, par voie d'incident de séance.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter le présent article sans modification.

Section 3

Dispositions relatives aux dettes publiques et privées
ARTICLE 14

Conversion en euros des dettes publiques et privées

Commentaire : le présent article propose d'autoriser les personnes publiques et privées à convertir en euros les titres de créance qu'elles ont émis, pendant la période transitoire durant laquelle coexisteront l'unité euro et les unités monétaires nationales, subdivisions non décimales de l'euro. Il précise également le cadre juridique de la conversion et sa méthode.

Prenant en compte la volonté des professionnels de voir l'ensemble des marchés financiers basculer en euros dès le 1er janvier 1999, le présent article utilise la possibilité offerte aux Etats membres par le quatrième alinéa de l'article 8 du projet de règlement communautaire approuvé le 7 juillet 1997, de "relibeller" en unité euro, les dettes publiques et privées.

Son objectif est plus politique que technique : il s'agit de favoriser l'adoption la plus rapide et la plus efficace possible de l'euro par les marchés financiers, en offrant aux émetteurs qui le souhaitent la possibilité d'utiliser une méthode de conversion dérogatoire, sur certains points, au droit commun.

Le présent article autorise l'Etat et les autres émetteurs publics ou privés à convertir en euros leur dette négociable. Il prévoit que les émetteurs qui décideront de s'engager dans cette voie devront utiliser une méthode de conversion précise et leur offre la possibilité d'utiliser une procédure exorbitante du droit commun.

I. LA MÉTHODE DE CONVERSION

La contre-valeur de l'euro dans l'unité nationale considérée, qui servira à déterminer le taux de conversion de l'euro, ne sera connue qu'après la clôture des marchés, le 31 décembre 1998.

L'application de ce taux de conversion posera le problème de la gestion des décimales apparues lors du calcul.

Afin de résoudre ce problème, le paragraphe III du présent article propose de retenir la méthode dite du "un euro plus soulte" qui permet d'aboutir à une dette composée de coupures de un euro, le versement de la soulte permettant d'indemniser les écarts à gommer. Cette méthode est également ouverte aux émetteurs privés.

Il s'agit, en effet, de compenser, par un versement en espèces correspondant au montant rompu, la diminution de la créance détenue par les titulaires du titre, en valeur nominale, résultant de la décision d'une conversion avec arrondi à l'euro.

L'opération, qui consiste à réduire à un euro les valeurs nominales des instruments de dette présentés sous forme de coupures, est appelée "redénomination de la dette".

Ce procédé a, en grande partie, été choisi pour des raisons techniques, informatiques notamment : en effet, il aurait été très complexe et trop long de passer, sur le plan informatique, de la comptabilité en capital entier (ou en nombre de titres) à la comptabilité en capital décimalisé.

L'Assemblée nationale a adopté un amendement introduisant un quatrième alinéa au II du présent article, qui dispose que "lorsque l'émission est constituée de titres de même valeur nominale unitaire, ces titres sont convertis en titres au nominal d'un euro".

Il s'agit d'éviter d'avoir à effectuer, pour chaque émission obligataire convertie, des versements en espèces supérieurs à un euro.

Votre commission vous présentera également un amendement tendant à prendre en considération le cas des obligations matérialisées et des obligations convertibles.

II. LA PROCÉDURE DÉROGATOIRE

Sous quelque forme qu'ils se présentent, les titres de créance, chacun en ce qui le concerne, sont régis par un contrat d'émission, qui lie l'émetteur et le souscripteur puis les détenteurs de ces titres.

Chaque modification étant donc soumise à la volonté des parties, le nombre et la diversité des émetteurs et des investisseurs est susceptible de conduire à des situations extrêmement variées peu compatibles avec la nécessaire fongibilité des titres exigée sur tout marché financier. En définitive, c'est tout le processus d'introduction de l'euro qui pourrait s'en trouver ainsi fragilisé.

C'est pourquoi, afin de faciliter le passage à l'euro, le Gouvernement a prévu de fixer, par dérogation exorbitante au droit commun, certaines limites à la volonté des parties.

Pour l'Etat, seuls certains instruments constitutifs de la dette sont concernés : le paragraphe I ne vise en effet que les obligations du Trésor et les bons du Trésor en francs ou en écus. Cela exclut donc la dette négociable qui sera, elle, soumise à conversion.

En revanche, pour les autres personnes morales publiques ou privées, sont concernés les titres de créances visés au 2° de l'article 1 er de la loi financière du 2 juillet 1996, c'est-à-dire, en réalité, l'ensemble des titres de créances, qu'il s'agisse des obligations ou des titres de créances négociables.

Le présent article prévoit deux dérogations importantes au droit commun.

En premier lieu, la décision de convertir la dette en euros pourra se faire sans convoquer la masse des créanciers.

En second lieu, s'agissant uniquement des émetteurs de droit privé, le pouvoir de décision est transféré par la loi de l'Assemblée générale au conseil d'administration ou au directoire.

La décision de convertir doit toutefois être publiée dans des conditions et selon des modalités qui seront précisées par décret.

III. LE RÉGIME FISCAL DE LA CONVERSION

Le paragraphe IV du présent article fixe le régime fiscal de la conversion, dont la méthode est proposée par les trois paragraphes précédents.


Cette question est importante car elle précise le régime fiscal qui s'appliquera tant aux rompus versés en numéraire qu'aux titres remis à l'échange.

Le IV du présent article propose que "les versements en espèces mentionnés au III sont reçus en franchise d'impôt sur le revenu".

Toutefois, le présent article pose deux réserves :

la première vise les particuliers : elle est relative aux dispositions du 5 de l'article 94 A du code général des impôts : il s'agit de calculer les plus-values sur cession ultérieure des titres issus de la conversion par référence au prix ou à la valeur d'acquisition des titres "échangés" ;

la seconde vise les entreprises : elle concerne les dispositions de l'article 238 septies A du code général des impôts : la soulte versée est intégrée dans le régime d'imposition des primes de remboursement tel que prévu à cet article, avec application, le cas échéant, de la répartition actuarielle par annuités de l'imposition de la prime de remboursement.

Lors de la discussion à l'Assemblée nationale, le Gouvernement a insisté sur la neutralité fiscale de l'opération de conversion.

Toutefois, l'argumentation développée à cette occasion n'emporte pas la conviction.

En effet, tant pour les particuliers que pour les entreprises si la soulte reçue est bien versée en franchise d'impôt sur le revenu, cette franchise s'analyse comme un sursis d'imposition , la soulte ayant vocation à être imposée ultérieurement au moment de la cession des titres (c'est le cas général) ou, le cas échéant, par répartition actuarielle sur la durée restante de l'emprunt au moment de l'acquisition des titres (c'est le cas pour les entreprises).

Ce régime du sursis d'imposition soulèvera immanquablement des difficultés importantes aussi bien pour les contribuables que pour les établissements teneurs de livres, et même pour l'administration de l'impôt. C'est pourquoi, votre rapporteur vous présentera un amendement tendant à ce que soient abandonnés le sursis d'imposition pour les personnes physiques et l'imposition immédiate pour les entreprises.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter le présent article ainsi amendé.

ARTICLE 15

Emission d'instruments financiers indexés
sur le niveau général des prix

Commentaire : le présent article propose d'autoriser l'Etat et les autres personnes morales à émettre des titres de créance et des instruments financiers à terme indexés sur le niveau général des prix. Il vise ainsi à instaurer une dérogation à l'interdiction quasi générale qui frappe, depuis 1959, l'introduction, dans toute disposition statutaire ou conventionnelle, de clauses d'indexation fondées sur l'inflation.

I. LE DROIT EXISTANT


L'article 79 de l'ordonnance n° 58-1374 du 30 décembre 1958 portant loi de finances pour 1959 dispose, que "sont abrogées toutes dispositions générales de nature législative ou réglementaire tendant à l'indexation automatique des prix de biens ou de services ", et surtout que "dans les nouvelles dispositions statutaires ou conventionnelles... sont interdites toutes clauses prévoyant des indexations fondées sur... le niveau général des prix...".

Cette interdiction générale des indexations était, à l'époque, motivée par la volonté d'éviter les effets inflationnistes des clauses dites "d'échelle mobile".

En revanche, les indexations fondées sur le prix des biens ou services en relation directe avec l'activité de l'une des parties étaient autorisées.

Toutefois, une telle prohibition a vu sa portée réduite en raison :

- d'une part, du champ d'application limité de l'article 79 : celui-ci prévoit en effet que les dettes d'aliments peuvent être indexées sur le salaire minimum interprofessionnel ; en outre, des lois postérieures ont élargi la portée de cette exception aux rentes viagères, et à celles accordées dans le cadre de l'indemnisation des rapatriés ;

- et, d'autre part, d'une interprétation libérale de la jurisprudence : en effet, la Cour de cassation a considéré que les dispositions de l'ordonnance de 1958 devaient être interprétées de manière restrictive parce que dérogatoires au principe de la liberté contractuelle ; de même, l'exigence d'un lien entre l'indice choisi et l'objet du contrat a fait l'objet d'une appréciation bienveillante.

II. LES DISPOSITIONS DU PRÉSENT ARTICLE

Le I du présent article a pour objet d'introduire une dérogation au droit existant en autorisant l'indexation sur le niveau général des prix, dans des conditions fixées par décret, des titres de créance et des instruments financiers à terme, mentionnés respectivement au 2° et au 4° de l'article premier de la loi n° 96-597 du 2 juillet 1996 de modernisation des activités financières.


Cette disposition entend couvrir essentiellement les obligtions qui seront indexées sur le niveau général des prix, ainsi que les contrats à terme dans le gisement desquels ces titres entreront.

Il convient d'observer que l'indexation ainsi autorisée ne concerne que les instruments financiers, ce qui exclut, par exemple, son application aux contrats d'assurance-vie.

Il convient également de relever que pour les instruments financiers autres que ceux visés par le présent article (actions et titres de capital, parts ou actions d'organismes de placement collectif), l'indexation n'aurait pas de sens.

Toutefois, cela ne devrait pas faire obstacle à ce que les OPCVM obligataires puissent détenir des obligations ou, plus généralement, des instruments financiers indexés.

Par ailleurs, un décret simple est prévu afin de préciser les modalités du recours à une indexation et, notamment, le ou les indices susceptibles d'être utilisés.

L'indice des prix à la consommation publié par l'INSEE devrait être utilisé à ce titre.

En effet, d'après les informations dont dispose votre rapporteur, un débat aurait eu lieu sur la question de savoir s'il fallait se référer à l'indice français ou à un indice européen. Le premier terme de l'alternative l'a finalement emporté, au regard de deux considérations :

- d'une part, l'indice français, publié par l'INSEE, est connu des investisseurs ;

- d'autre part, l'indice européen, tel qu'il est déterminé par Eurostat, comporte le défaut d'être révisable, ce qui ne donne aucune sécurité aux investisseurs.

Le II du présent article tend à ce que les instruments financiers indexables ne soient plus exclus a priori du bénéfice du prélèvement libératoire.

Actuellement, en effet, le régime fiscal des titres indexés (selon les clauses d'indexation conformes aux dispositions de l'ordonnance de 1958 modifiée, c'est à dire, ayant un lien direct avec l'activité des parties ou l'objet du contrat) est moins favorable que celui des titres de créance à taux fixe.

Les revenus des placements dits "à revenu fixe" sont susceptibles d'être soumis à un prélèvement forfaitaire, dont le régime est défini par les articles 125 A, B et C du code général des impôts. Lorsqu'il est appliqué, ce prélèvement forfaitaire est libératoire de l'impôt sur le revenu.

Le II du présent article prévoit de supprimer, dans les a et c du IV de l'article 125 A du code général des impôts, les conditions relatives à l'indexation du capital, pour celles des indexations qui seraient autorisées en vertu des dispositions de l'article 79 de l'ordonnance du 30 décembre 1958.

III. L'APPORT DU PRÉSENT ARTICLE

L'apport essentiel des dispositions soumises à notre examen consiste à autoriser l'Etat à émettre des obligations indexées sur le niveau général des prix.


Cette possibilité nouvelle présente des avantages certains aussi bien pour l'Etat, que pour les épargnants. En outre, elle est de nature à renforcer l'attractivité de la place financière de Paris.

L'Etat pourra en effet, grâce à ce type d'instruments, réduire le coût de sa dette.

En outre, le recours à des obligations indexées a pour vertu de contraindre l'Etat à une autodiscipline en matière d'inflation puisque, sauf à accepter une augmentation de la charge de la dette, celui-ci trouvera son intérêt à maintenir l'inflation à de faibles niveaux.

Quant aux épargnants , ils disposeront d'un instrument de protection contre l'inflation, protection qui ne trouverait cependant à s'exercer qu'en cas de reprise de l'inflation.

Enfin, l'émission d'obligations indexées donne aux marchés financiers un signal sur la détermination de l'Etat à poursuivre une politique de maîtrise de l'inflation. De telles obligations permettent également d'accroître l'offre d'instruments financiers disponibles sur la place financière de Paris, à un moment où l'introduction de la monnaie unique intensifiera la concurrence sur les marchés financiers.

Il faut toutefois être conscient que cette possibilité nouvelle n'est pas exempte de risques.

Outre le risque pour les finances publiques que l'on vient de mentionner, l'indexation peut être à l'origine d'une inflation "automatique" ou "auto-entretenue". C'est la raison pour laquelle, comme a pu le constater votre commission lors de la dernière audition du gouverneur de la Banque de France, M. Jean-Claude Trichet, les banquiers centraux sont très réservés sur la possibilité d'autoriser l'indexation des instruments financiers.

Bien consciente de ces risques, votre commission vous demande néanmoins d'accepter le présent article en raison, d'une part, du faible montant des encours envisagés et, d'autre part, des faibles risques de reprise de l'inflation du fait de la mise en place de la monnaie unique.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter le présent article sans modification.

Section 4

Utilisation de l'euro par les marchés financiers

ARTICLE 16

Utilisation de l'euro par les marchés gérés par une entreprise de marché

Commentaire : le présent article prévoit les modalités d'utilisation de l'euro par les différents types de marchés financiers.

Les professionnels ayant fait part de leur volonté d'utiliser l'euro dès le début de la phase transitoire, c'est-à-dire le 1er janvier 1999, le présent article vise :

- d'une part, à permettre la cotation en euros pour l'ensemble des marchés financiers français dès le 1 er janvier 1999 ;

- et, d'autre part, à donner une base légale incontestable à cette cotation.

I. LES DIFFERENTS TYPES DE MARCHES FINANCIERS

Conformément à la directive n° 93/22/CEE du Conseil du 10 mai 1993 concernant les services d'investissement dans le domaine des valeurs mobilières, transposée en droit français par la loi n° 96-597 du 2 juillet 1996 de modernisation des activités financières, les marchés réglementés sont ceux qui font l'objet d'une déclaration de marché réglementé de la part de l'Etat dans lequel ils se situent. Cette déclaration est donnée conformément et selon la procédure fixée par les articles 41 et 42 de la loi financière.

Les marchés réglementés sont organisés par une entreprise de marché, c'est-à-dire aux termes de l'article 40 de la loi financière, une société commerciale dont l'activité principale est précisément d'assurer le fonctionnement d'un marché réglementé d'instruments financiers.

Tous les autres marchés sont des marchés non réglementés. On peut cependant distinguer les marchés organisés et les marchés libres dits de "gré à gré".

Les marchés organisés, tout en ne faisant pas l'objet d'une déclaration de marché réglementé, voient leur fonctionnement encadré et "organisé" par une autorité de marché, ou une entreprise de marché.

En revanche, les marchés de gré à gré se caractérisent à la fois par l'absence de réglementation des opérations et l'absence d'autorité chargée d'en assurer la police.

En pratique, l'ensemble des marchés financiers français (premier marché, deuxième marché, nouveau marché, MATIF et MONEP) sont reconnus comme réglementés, en application de la clause dite du "grand-père" prévue à l'article 97 VII de la loi du 2 juillet 1996 précitée.

Seul le marché des titres de créances négociables est juridiquement un marché de gré à gré, même s'il est, dans les faits, étroitement surveillé par la Banque de France.

II. LES DISPOSITIONS DU PRESENT ARTICLE

Par dérogation au principe du ni-ni, posé par l'article 8 du projet de règlement du Conseil approuvé le 7 juillet 1997, le présent article autorise les entreprises de marché à assurer la cotation en euros des instruments financiers visés à l'article premier de la loi financière et échangés sur le marché dont elles ont la charge.

Cette dérogation est du reste conforme à l'article 8-4 du règlement précité, qui permet aux Etats membres participants de prendre des mesures pour élargir l'utilisation de l'unité euro dans deux domaines précis -celui de l'encours de la dette publique et celui des marchés organisés -, même si ces mesures peuvent imposer l'utilisation de l'unité euro à certains opérateurs économiques.

Une telle disposition, a priori superfétatoire, s'explique par la volonté d'assurer une base juridique incontestable au basculement en euros des marchés financiers.

En effet, normalement, la cotation en euros pourrait être assurée par l'accord des parties. Mais on pourrait considérer que cet accord ne pourrait utilement s'exercer que vis à vis des parties liées par un contrat, c'est-à-dire les entreprises de marché et les membres de leur marché.

En revanche, il n'est pas sûr que la décision de basculer puisse être opposée aux investisseurs directs de marchés réglementés, dès lors qu'ils sont obligés, conformément à la règle dite de "concentration" posée à l'article 45 de la loi du 2 juillet 1996 précitée, de faire passer leurs transactions par les marchés en question.

C'est pourquoi, afin d'éviter toute contestation possible, le présent article autorise expressément les entreprises de marché à basculer en euros.

Ce basculement pourra se faire soit directement en euros, soit en déterminant la contre-valeur en unité euro d'un montant en unité franc non converti. C'est la technique dite du nominal de marché qui permet de coter en euros des titres de créances non convertis par leur émetteur et d'effectuer les opérations sur titres correspondantes.

Le paragraphe I pose les définitions des termes utilisés dans le présent article.

Sans surprise, les instruments financiers sont ceux visés à l'article premier de la loi du 2 juillet 1996, à savoir :

1° Les actions et autres titres donnant ou pouvant donner accès, directement ou indirectement, au capital ou aux droits de vote, transmissibles par inscription en compte ou tradition ;

2° Les titres de créance qui représentent chacun un droit de créance sur la personne morale qui les émet, transmissibles par inscription en compte ou tradition, à l'exclusion des effets de commerce et des bons de caisse ;

3° Les parts ou actions d'organismes de placements collectifs ;

4° Les instruments financiers à terme ,

De façon plus utile, le second alinéa définit le nominal de marché comme étant la conversion, jusqu'à la cinquième décimale, la contre-valeur en unité euro d'une valeur en unité franc étant " exprimée à la cinquième décimale si la sixième décimale est comprise entre zéro et quatre inclus et à la cinquième décimale supérieure si la sixième décimale est comprise entre cinq et neuf inclus ".

Cette rédaction, issue d'un amendement de l'Assemblée nationale, fait prévaloir une approche "par seuil" plus facilement compréhensible que l'approche plus mathématique initialement retenue par le Gouvernement.

Le paragraphe II vise les instruments financiers cotés sur les marchés réglementés.

Pour ces marchés seulement, la loi autorise les entreprises de marché à basculer directement en euros.

Concrètement, pour les marchés d'actions, la conversion se fera directement en euros, alors qu'elle se fera en nominal de marché, c'est-à-dire en pourcentage de la contre-valeur en euros des unités francs, pour les marchés obligataires.

Le paragraphe III vise les instruments financiers négociés sur des marchés organisés, et le paragraphe IV, ceux négociés sur des marchés de pur gré à gré.


Dans ces cas, l'inscription en compte pourra se faire à la contre-valeur en unité euro de sa valorisation en francs.

Pour ces deux types de marchés, la difficulté provient du fait qu'il n'y a pas d'entreprise de marché et donc d'entité capable de décider de la modalité de basculement : unités euros ou nominal de marché. C'est pourquoi, les rédacteurs du texte ont prévu de n'autoriser que la technique du nominal de marché.

Cela ne signifie pas que, sur ce type de marchés, si les parties en conviennent, le basculement des opérations ne pourra pas se faire directement en unité euro. Cela signifie simplement que, dans de tels cas, ce basculement sera opposable aux tiers sans qu'il soit nécessaire de le prévoir dans la loi.

Il est même concevable que ce basculement implique une entreprise de marché 1( * ) , comme ce sera le cas sur le marché de l'or et plus généralement sur les marchés de matières premières. Mais n'étant pas sur des marchés réglementés, donc non soumis à l'obligation de concentration, ce basculement ne concernera que la relation entre l'entreprise de marché et les membres agréés et pourra valablement être opposé aux investisseurs, qui auront alors la possibilité de s'adresser à d'autres intermédiaires.

C'est pourquoi, la dérogation apportée par la loi à la règle du ni-ni ne peut, logiquement aller au-delà de ce qui est prévu par le présent article.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter le présent article sans modification.

ARTICLE 17

Passage à l'euro des systèmes de paiement et de règlement
contre livraison de titres

Commentaire : le présent article vise à tirer les conséquences des dispositions de l'article 16 relatives à la cotation et à la valorisation des instruments financiers en euros.

Il convient de rappeler ici, d'une part, la volonté de la place financière de Paris d'adopter la monnaie unique dès le 1 er janvier 1999 et, d'autre part, la possibilité offerte à chaque Etat par l'article 8-4 du projet de règlement communautaire concernant l'introduction de l'euro, de déroger au principe du ni-ni pour imposer l'utilisation de l'euro dans les marchés financiers et les systèmes de paiement.

Dans ce contexte, le présent article donne l'autorisation aux entreprises de marché, aux chambres de compensation et aux parties prenantes à un accord instituant un système de paiement ou un système de règlement -livraison de titres, d'effectuer le basculement en euros.

L'Assemblée nationale a adopté un amendement de nature rédactionnelle dont le but est de préciser que, s'agissant du passage à l'euro des systèmes de paiement et de règlement contre livraison de titres, il reviendra aux participants eux-mêmes de déterminer la date du basculement.

Tel est l'objet du premier alinéa du présent article, qui concerne les marchés fonctionnant sans chambre de compensation.

Le champ des transactions sur les marchés financiers, prévu par le deuxième alinéa relatif aux chambres de compensation, concerne les instruments financiers visés à l'article premier de la loi du 2 juillet 1996 de modernisation des activités financières.

Le troisième alinéa du présent article étend l'utilisation exclusive de l'euro aux systèmes de règlements interbancaires et aux systèmes de règlement et de livraison de titres prévus par l'article 93-1 de la loi n° 84-46 du 24 janvier 1984 relative à l'activité et au contrôle des établissements de crédit. L'objectif est d'éviter un double fonctionnement des systèmes de règlement, en monnaie nationale et en euro, qui alourdirait les coûts de gestion.

Enfin, le quatrième alinéa du présent article rend irrecevable toute contestation fondée sur le seul fait que les opérations réalisées l'aient été en unité euro.

L'irrecevabilité d'une telle contestation constitue un dispositif important tendant à donner une forte sécurité juridique au passage à l'euro des systèmes de paiement et de règlement contre livraison de titres.

Le caractère irrévocable du passage à la monnaie unique ne peut que le rendre mieux accepté et plus rapide.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter le présent article sans modification.

ARTICLE 18

Sécurité juridique des systèmes de paiement et
de règlement contre livraison de titres

Commentaire : le présent article contient diverses dispositions destinées à renforcer la sécurité juridique des systèmes français de paiement et des systèmes de règlement contre livraison de titres dans la perspective du passage à l'euro.

Il convient de rappeler l'évolution des systèmes de paiement et des systèmes de livraison de titres contre paiements d'espèces (systèmes de titres) dans le cadre de la préparation de l'Union économique et monétaire, avant de présenter les aménagements proposés par le présent article.

I. L'ÉVOLUTION DES SYSTÈMES DE PAIEMENT ET DES SYSTÈMES DE RÈGLEMENT-LIVRAISON DE TITRES DANS LE CADRE DE LA RÉALISATION DE L'UNION ÉCONOMIQUE ET MONÉTAIRE

La sécurité des transactions, c'est à dire la certitude qu'ont les investisseurs que leurs opérations seront correctement exécutées et ne pourront pas être remises en cause, constitue un élément important de l'attractivité d'une place financière.

De ce point de vue, la place financière de Paris a beaucoup progressé au cours des quinze dernières années, tant en raison d'évolutions techniques, que d'innovations juridiques.

Cette problématique a été considérablement renouvelée dans le cadre du passage à la monnaie unique.

A. ÉVOLUTIONS RÉCENTES DE LA SÉCURITÉ DE LA PLACE DE PARIS

1. Les évolutions techniques


Les principales évolutions ont surtout concerné les systèmes de paiement de gros montants , destinés aux échanges de trésorerie entre banques. Sous l'impulsion de la Banque de France, dont le législateur a consacré et renforcé le rôle en la matière 2( * ) , ces systèmes ont fait l'objet d'une nouvelle organisation en 1997. Celle-ci repose désormais sur un système à règlement brut en temps réel dénommé " Transferts Banque de France " ( TBF ), un système à règlement net dénommé " Système net de paiement " ( SNP ) et une plate-forme technique unique gérée par la Centrale des Règlements Interbancaires ( CRI ).

S'agissant des systèmes de titres, la dématérialisation a été accompagnée par le renforcement du rôle de l'unique dépositaire central des valeurs mobilières , Sicovam SA . Depuis le mois de juillet 1995, cette société de place, dont la Banque de France détient 40 % du capital, gère non seulement la filière valeurs mobilières - Relit (système automatisé de règlement-livraison de titres) - , mais aussi la filière bons du Trésor et titres de créances négociables - Saturne (système automatisé de traitement unifié des règlements de créances négociables). Chacune de ces deux filières assure le dénouement des transactions par livraison des titres contre paiement simultané, sur une base automatisée, dans des délais courts et normalisés, selon des règles propres à chaque marché. Depuis 1997, ces deux filières ont été unifiées au sein d'un nouveau système de règlement-livraison à haute valeur ajoutée : Relit Grande Vitesse (RGV).

2. Les évolutions juridiques

Outre la dématérialisation des titres, intervenue en 1984 , la loi du 26 juillet 1991 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier a amélioré significativement le régime juridique des opérations de prêts de titres 3( * ) . Par ailleurs, la loi du 31 décembre 1993 portant diverses dispositions relatives à la Banque de France, à l'assurance, au crédit et aux marchés financiers, complétée par la loi du 8 août 1994 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier, a précisé les conditions d'opposabilité aux tiers des opérations de " pension livrée " 4( * ) dont le régime juridique avait été défini par une convention de place en 1988 .

Parmi ces améliorations, il convient de souligner celle effectuée par l'article 4 de la loi du 31 décembre 1993 précitée qui écarte, pour les opérations réalisées dans le cadre de systèmes d'échanges de moyens de paiement, la règle dite du "zéro heure", afin d'éviter les effets néfastes qui résulteraient d'une propagation à l'ensemble du système bancaire de la défaillance d'un établissement de crédit (risque systémique), et qui constitue désormais une référence juridique à l'échelon européen.

B. LE RENOUVELLEMENT DE CETTE PROBLÈMATIQUE DANS LE CADRE DU PASSAGE À LA MONNAIE UNIQUE

La préparation de l'Union économique et monétaire (UEM) a profondément renouvelé et accéléré les mutations des systèmes de paiement et des systèmes de règlement-livraison de titres 5( * ) .

En premier lieu, le bon fonctionnement de ces systèmes sera un facteur crucial de l'efficacité de la conduite des politiques monétaires des Etats participant à l'UEM . Ils devront en effet permettre de gérer les garanties exigées pour la conduite de la politique monétaire unique par le Système Européen de Banques Centrales (SEBC) (voir encadré ci-après).

En second lieu, ces systèmes joueront un rôle important pour assurer la liberté de circulation des capitaux au sein du marché intérieur . Les infrastructures sur lesquelles ils reposent devront permettre de faire face aux besoins nouveaux résultant de la mise en place de la monnaie unique et au développement subséquent des opérations bancaires et financières transfrontières .

Les modifications induites par le passage à l'euro sur les systèmes de paiement et de règlement-livraison de titres

Comme on le sait, la politique monétaire dans la zone euro sera unique et conduite par la Banque centrale européenne (BCE). Cependant, le principe d'unicité de la politique monétaire ne fera pas obstacle à sa mise en oeuvre décentralisée. Chaque banque centrale nationale (BCN) restera l'interlocuteur privilégié des établissements de crédit de son territoire. Ensemble, BCE et BCN formeront le système européen de banques centrales (SEBC), lequel mettra en oeuvre les orientations de la politique monétaire commune définies par la BCE.

Pour remplir sa fonction, le SEBC va devoir agir sur la liquidité bancaire en euro , c'est à dire sur les capacités de refinancement des banques commerciales auprès de chaque BCN. Or, les statuts du SEBC prévoient que ces opérations de mise à disposition de liquidités devront faire l'objet de remises d'actifs en garantie , de façon à ce que les BCN ne supportent pas de risques de crédit dans l'accomplissement de cette activité (application de la règle selon laquelle la banque centrale ne prête jamais "en blanc").

Pour pouvoir fonctionner normalement, ces remises de garantie devront remplir deux séries de conditions :

- d'une part, elles devront répondre à des critères précis et homogènes d'éligibilité . Deux types de garanties sont prévus :

* les titres libellés en euros déposés chez un dépositaire central national et répondant à des critères d'éligibilité uniformes fixés par la BCE ;

* les garanties, négociables ou non, dont les critères d'éligibilité seront établis par les banques centrales nationales, dans le cadre de lignes directrices fixées par la BCE. On trouvera dans cette catégorie les créances sur les entreprises auxquelles la Banque de France accorde la meilleure cotation.

- d'autre part, elles devront pouvoir faire l'objet de procédures transfrontières de livraison rapides et sûres, ce qui suppose d'assurer un minimum d'interconnexion des systèmes de paiement entre eux et des systèmes de règlement-livraison de titres entre eux . En effet, aujourd'hui les BCN n'acceptent de mobiliser que des garanties gérées localement. Lorsque l'Union monétaire sera réalisée, les BCN devront accorder des crédits aux banques non seulement contre des garanties domestiques, mais aussi contre des garanties localisées à l'étranger. Accepter ces garanties, quelle que soit leur localisation, découle du principe d'égalité de traitement qui figure dans le traité de l'Union européenne et répond également au souhait de constituer un vaste marché intégré des titres en Europe.

1. L'interconnexion des systèmes de paiement

Afin de permettre le règlement des opérations transfrontières réalisées sur le marché monétaire de l'euro, les BCN ont créé le système Target qui réalise l'interconnexion des systèmes à règlement brut en temps réels (RTGS) des pays participant à l'UEM. Il sera ainsi possible d'effectuer en quelques secondes le transfert d'un système à l'autre d'ordres de paiement en euros qui seront réglés de façon irrévocable et définitive.

En France, c'est le système à règlement brut en temps réels TBF qui constituera la composante nationale de Target. Pour fonctionner correctement, Target aura besoin d'infrastructures et de procédures communes. C'est ici qu'intervient la nécessité pour chaque participant à Target d'assurer l'irrévocabilité absolue des transactions effectuées dans son propre système de paiement.

2. L'interconnexion des systèmes de règlement-livraison de titres


En dépit du fait que plusieurs systèmes de titres ont déjà développé des liens pour échanger des titres entre eux, il n'existe pas, pour l'instant, et contrairement aux systèmes de paiement, de projet avancé d'interconnexion des systèmes de titres.

Pour pallier cette difficulté, les banques centrales ont décidé de mettre en oeuvre un dispositif ad hoc dénommé CCBM (Correspondent Central Banking Model) . Chaque banque centrale ouvrira un compte-titres auprès de chacune des autres banques centrales. Lorsqu'une contrepartie du SEBC approchera la banque centrale du pays A avec laquelle elle est en relation afin d'obtenir un crédit en euro et que tout ou partie des titres apportés en garantie seront déposés dans un pays B, il sera demandé à l'établissement emprunteur de livrer les titres à la banque centrale du pays B pour le compte de la banque centrale du pays A. Ce dispositif relativement simple présente l'avantage de n'exiger aucune modification d'organisation au sein des établissements de crédit et des systèmes de titres. Cependant, il ne pourra que difficilement faire face à la montée en puissance des flux financiers intra-zone et il est nécessaire qu'assez rapidement s'y substituent des solutions durables qui reposent plus largement sur les systèmes existants. Deux voies sont envisagées.

- La première est celle de l'interconnexion des systèmes de règlement de titres de l'Union européenne et dans laquelle s'inscrit la création, au début de l'année 1997, de l'association des dépositaires centraux de titres ( ECSDA ). Cette association a publié au mois de juillet 1997 les caractéristiques générales d'un système d'interconnexion des systèmes de titres, afin de permettre à un participant à l'un de ces systèmes de mobiliser l'ensemble des titres dont il peut disposer dans les autres systèmes. Cette réforme, qui sera mise en oeuvre de façon progressive, devrait contribuer de façon décisive à assurer l'unification du marché européen des titres.

- La seconde évolution réside dans la création de systèmes permettant d'engager des règlements irrévocables et définitifs d'opérations sur titres en cours de journée . Actuellement, dans la plupart des systèmes de règlement de titres, la livraison irrévocable des titres n'est obtenue qu'en fin de journée. On constate néanmoins que dans un nombre croissant de pays européens, des réformes sont en cours, ou ont déjà été menées à bien, afin de créer la possibilité d'obtenir la livraison irrévocable de titres dans un délai bref en cours de journée. C'est le cas en particulier en Suisse, aux Pays-Bas et en Allemagne. RGV en France devrait fonctionner selon ce principe, à condition toutefois que l'on modifie le droit actuel afin de préciser le régime du droit de propriété, ce qui est l'objet de l'article 19 du présent projet de loi.

On observera que l'irrévocabilité en cours de journée permet de sécuriser les échanges de titres et accroît les possibilités d'arbitrage entre des titres déposés dans des systèmes différents. C'est donc une condition importante pour la mise en oeuvre de liens transfrontières et c'est la raison pour laquelle l'ECSDA a décidé d'en faire une condition minimale pour la participation d'un système de titres au dispositif d'interconnexion.

Enfin, la façon dont les professionnels , intermédiaires et entreprises de marché, et les régulateurs français mèneront à bien la transition vers l'euro des différents systèmes de paiement et de titres, conditionnera grandement l'attractivité de la place financière de Paris et, partant, sa place dans le grand marché unique des services bancaires et financiers. Il y a donc également un enjeu de compétitivité industrielle dont il importe d'être conscient.

Ces différents enjeux ont conduit les autorités européennes à élaborer une directive " concernant la limitation du risque systémique dans les systèmes de paiement et de dénouement des transactions sur valeurs mobilières " actuellement en voie d'adoption définitive 6( * ) .

L'adoption de cette directive imposerait d'aménager le régime juridique français des systèmes de paiement et de livraison de titres sur quatre aspects.

En premier lieu, il est indispensable que les intermédiaires financiers, établissements de crédit ou entreprises d'investissement, puissent obtenir de la liquidité bancaire contre remises de garantie dans un environnement juridique homogène et sécurisé, ce qui n'est pas tout à fait le cas actuellement, notre droit étant fragmenté entre plusieurs régimes juridiques spécifiques à certains types d'opérations (prêts de titres, pensions- livrées et opérations compensables dans le cadre d'un marché réglementé).

En second lieu, il est nécessaire d'asseoir le caractère irrévocable des opérations intervenant dans le cadre de systèmes de paiement ou de titres . Comme on l'a vu, cette irrévocabilité existe déjà pour les systèmes de paiement, mais elle n'est que relative. En revanche, elle n'existe pas du tout pour les systèmes de titres. Il convient donc de renforcer cette sécurité pour les systèmes de paiement et de l'établir pour les systèmes de titres.

En troisième lieu, il est nécessaire d'établir ou de renforcer la surveillance des systèmes de paiement et de titres .

Pour ce qui est des systèmes de paiement, l'article 4 de la loi du 4 juillet 1993 établit la compétence de la Banque de France pour " veiller au bon fonctionnement et à la sécurité des systèmes de paiement ". Avec l'entrée en vigueur de l'article 105 du traité sur l'Union européenne, cette compétence s'exercera désormais sous réserve de la compétence plus générale de la Banque centrale européenne pour " promouvoir le bon fonctionnement des systèmes de paiement ".

En revanche, aucune autorité publique ou professionnelle n'est actuellement compétente pour contrôler les systèmes de titres. Il apparaît donc souhaitable, dans la ligne des orientations fixées par la loi financière, de confier cette compétence au Conseil des marchés financiers.

Enfin, il est important de prévoir la possibilité d'effectuer des règlement-livraison de titres irrévocables en cours de journée, afin de mettre nos systèmes de titres à parité juridique avec les systèmes européens équivalents les plus avancés. Ce sera l'objet de l'article 19 du présent projet de loi.

II. LES AMÉNAGEMENTS PROPOSÉS PAR LE PRÉSENT ARTICLE

Le présent article prévoit de modifier le droit actuel sur cinq points.

A. LE RENFORCEMENT DE LA SÉCURITÉ JURIDIQUE DES OPÉRATIONS RÉALISÉES DANS LE CADRE DE SYSTÈMES DE PAIEMENT.

La loi du 25 janvier 1985 sur le redressement et la liquidation judiciaires des entreprises interdit, en principe, au débiteur d'effectuer des paiements à compter du jour d'ouverture de la procédure. L'interdiction des paiements est une conséquence logique du dessaisissement du failli, procédure autrefois systématique dans le droit des procédures collectives et dont la loi de 1985 comporte encore plusieurs manifestations.

Or, le décret d'application du 27 décembre 1985 précise que le jugement d'ouverture prend effet à compter de sa date, ce dont les juges concluent qu'il prend effet rétroactivement à compter de zéro heure le jour de son prononcé et non à compter de l'heure de son prononcé (l'heure du prononcé n'est d'ailleurs jamais indiquée en pratique). En conséquence, dans l'hypothèse où un établissement participant à un système de paiement serait déclaré en faillite, l'application de la règle du "zéro heure" impliquerait la remise en cause des paiements effectués depuis la première heure du jour considéré, obligeant ainsi, en théorie, les bénéficiaires desdits paiements à les restituer, sans pouvoir, bien entendu, récupérer les paiements faits, inversement, au profit de l'établissement défaillant.

L'application de cette règle soulève des difficultés importantes notamment lorsqu'il s'agit de paiements internationaux, compte tenu des problèmes de décalages horaires et de fermeture des marchés de changes.

Pour prévenir ces difficultés, la loi du 31 décembre 1993 précitée a prévu, en son article 4 7( * ) , d'insérer un article 93-1 dans la loi bancaire du 24 janvier 1984, disposant que :

" Nonobstant toute disposition législative contraire, les paiements effectués dans le cadre de systèmes de règlements interbancaires, jusqu'à l'expiration du jour où est rendu un jugement de redressement ou de liquidation judiciaires à l'encontre d'un établissement participant, directement ou indirectement, à un tel système ne peuvent être annulés au seul motif qu'est intervenu ce jugement ".

Ainsi, la loi valide les paiements effectués le jour de la mise en redressement judiciaire de l'un des participants à un système de règlement interbancaire, ce qui évite notamment la remise en cause d'une compensation ou d'écritures informatiques complexes, mais ne fait pas échapper le débiteur défaillant à l'ensemble du droit de la faillite.

La nouvelle rédaction de l'article 93-1 de la loi bancaire proposée par le I du présent article accroîtrait le caractère irrévocable des opérations intervenues dans le cadre de systèmes de paiements, puisque celles-ci ne pourraient désormais être annulées " même au motif qu'est intervenu ce jugement (de redressement ou de liquidation judiciaires)".

On passerait ainsi d'un régime d'irrévocabilité relative, à un régime d'irrévocabilité absolue des opérations réalisées dans les systèmes de paiement.

On observera qu'un tel régime serait plus strict que celui que prévoit la directive, puisque l'article premier de celle-ci dispose que : " les ordres de transfert et la compensation produisent leurs effets en droit et, même en cas de procédure d'insolvabilité à l'encontre d'un participant, sont opposables aux tiers à condition que les ordres de transfert aient été introduits dans le système avant le moment de l'ouverture d'une procédure d'insolvabilité (...) à moins que le système n'ait eu connaissance ou n'eût dû avoir connaissance de l'ouverture de cette procédure. "

B. L'IRREVOCABILITÉ DES OPÉRATIONS RÉALISÉES DANS LE CADRE DE SYSTÈMES DE TITRES, LA DÉFINITION DE TELS SYSTÈMES ET DES DISPOSITIONS SPÉCIFIQUES QUI LEUR SONT APPLICABLES

Le premier alinéa du texte proposé par le paragraphe I de cet article pour l'article 93-1 de la loi bancaire prévoit d'aligner le régime juridique des opérations effectuées dans le cadre de systèmes de titres sur celui des opérations effectuées dans le cadre de systèmes de paiement et de les faire bénéficier ainsi de l'irrévocabilité absolue.

Toutefois, cette extension est adaptée aux spécificités des systèmes de réglement-livraison pour tenir compte de la désynchronisation entre les instructions de paiement et les instructions de livraison de titres, instructions qui précèdent les opérations matérielles de paiement et de livraison. C'est pourquoi, le deuxième alinéa du texte proposé par le paragraphe I pour l'article 93-1 de la loi bancaire prévoit que l'irrévocabilité absolue est également de mise pour les " instructions de paiement " et les " instructions de livraison ", " dès lors qu'elles ont acquis un caractère irrévocable". Il convient de noter la référence aux " instructions " alors que la directive en cours vise les " ordres ". Il est également précisé dans ce même texte que la définition du moment et des modalités selon lesquels une instruction est considérée comme irrévocable dans un système est renvoyée aux règles de fonctionnement de ce système. Ce faisant, le présent article applique par anticipation l'article 3 paragraphe 3 de la directive en cours d'adoption qui dispose que : " le moment où un ordre de transfert est introduit dans un système est défini par les règles de fonctionnement de ce système. "

Enfin, l'article 93-1 est complété par une définition des systèmes de règlement de livraisons de titres, ou plus exactement d'instruments financiers afin de tenir compte des nouvelles définitions posées par la loi financière du 2 juillet 1996. Il faut comprendre de cet article, qui donne, tout à la fois, la définition des systèmes de réglement-livraison et celle des systèmes de paiement, qu'un système de règlement-livraison est : " une procédure nationale ou internationale organisant les relations entre deux parties au moins, ayant la qualité d'établissement de crédit, d'institution ou d'entreprise visée à l'article 8 de la loi bancaire (Trésor public, Banque de France, les services financiers de La Poste, l'ID-DOM, l'ID-TOM et la Caisse des dépôts et consignations), d'entreprise d'investissement ou d'adhérent à une chambre de compensation ou d'établissement non résident ayant un statut comparable, permettant l'exécution, à titre habituel, par compensation ou non, de paiements, ainsi que la livraison de titres entre les participants."

C. LA CRÉATION D'UN NOUVEAU RÉGIME JURIDIQUE ET FISCAL POUR LES REMISES DE GARANTIE EFFECTUÉES DANS LE CADRE DE SYSTÈMES DE PAIEMENT OU DE RÉGLEMENT-LIVRAISON


Les remises de garanties de titres ou d'espèces ont pour objet de rendre plus sûres les transactions. Actuellement, la loi prévoit trois régimes différents de remises de garanties :

- celles effectuées dans le cadre d'opérations de prêts de titres, sur la base de l'article 31 de la loi du 17 juin 1987 sur l'épargne, modifié par l'article 104 de la loi financière 8( * ) ;

- celles effectués dans le cadre d'opérations de prises en pensions, sur la base de l'article 12 de la loi du 31 décembre 1993 précitée ;

- enfin, celles effectuées dans le cadre d'opérations compensables intervenant sur un marché réglementé, sur la base de l'article 52 de la loi financière, mais qui pratiquement ne s'applique que pour les opérations à terme intervenant sur le MATIF (marché français d'instruments financiers à terme).

En créant un article 93-2 dans la loi bancaire, le paragraphe I du présent article prévoit un nouvel espace d'application pour ces remises de garanties, dans le cadre de systèmes de paiement ou de règlement-livraison.

Ce nouveau régime recouvre partiellement le régime de l'article 52 de la loi bancaire mais s'en distingue néanmoins sur trois points :

- les modalités de constitution, d'affectation, de réalisation ou d'utilisation des remises seront fixées par les règlements, la convention-cadre ou la convention type régissant le système de règlements interbancaires ou de règlement-livraison, alors que dans le régime de l'article 52 de la loi financière, ces modalités peuvent être fixées par les parties ;

- ces remises pourront porter également sur des "créances", alors que dans le cadre de l'article 52, elles ne peuvent porter que sur des valeurs, titres, effets ou sommes d'argent. Concrètement, cela inclut le papier commercial, comme par exemple les bordereaux Dailly ;

- en contrepartie de cette extension, le nouveau régime ne trouvera à s'appliquer que pour les systèmes de place, puisqu'il ne s'agira que de systèmes " organisant les relations entre plus de deux parties ", alors que l'article 52 de la loi financière vise les opérations intervenues dans le cadre de conventions (...) " entre deux parties au moins ".

Par ailleurs, le paragraphe II du présent article prévoit de modifier l'article 38 bis du code général des impôts, afin d'étendre à ces remises de garantie la neutralité fiscale déjà instituée pour les remises de l'article 31 de la loi de 1987 et celles de l'article 52 de la loi financière.

D. L'EXTENSION DES COMPÉTENCES DU CONSEIL DES MARCHÉS FINANCIERS (CMF) DANS LA SURVEILLANCE DES SYSTÈMES DE RÈGLEMENT-LIVRAISON D'INSTRUMENTS FINANCIERS.

De la même façon que la Banque de France est compétente pour veiller au bon fonctionnement et à la sécurité des systèmes de paiement, le CMF serait désormais compétent pour agréer, réglementer et contrôler les systèmes de règlement-livraison d'instruments financiers.

Tout d'abord le CMF serait compétent pour approuver les règles de fonctionnement de ces systèmes, étant entendu que sa compétence ne peut faire obstacle aux orientations définies par la Banque de France pour ce qui est de la partie "règlement". C'est ce qui résulte de la dernière phrase du texte proposé par le paragraphe I de cet article pour le dernier alinéa de l'article 93-1 de la loi bancaire et également du texte proposé par le 2° du paragraphe III pour le 16° de l'article 32 de la loi financière.

Ensuite, le CMF disposerait du pouvoir réglementaire de fixer les " principes généraux d'organisation et de fonctionnement des systèmes de règlement et de livraison d'instruments financiers " (texte proposé par le 2° du III pour le 16° de l'article 32).

Enfin le CMF disposerait, mutatis mutandis , de la plénitude des attributions de contrôle qu'il détient en application des articles 67 à 69 de la loi financière sur les prestataires de services d'investissement (texte proposé par le 3° du III pour la création d'un nouvel article 69-1 dans la loi financière). Il doit être ici entendu que les systèmes de paiement, comme ceux de règlement-livraison sont tenus par des " dépositaires centraux ", ce qui nous amène précisément à la cinquième modification effectuée par cet article.

E. L'ÉTABLISSEMENT DE LA COMPÉTENCE DU CMF SUR L'ENSEMBLE DES TENEURS DE COMPTE ET SUR LES DÉPOSITAIRES CENTRAUX D'INSTRUMENTS FINANCIERS

1. L'activité de teneur de compte


L'activité de teneur de comptes d'instruments financiers, qui consiste à administrer les comptes titres des investisseurs, a fait l'objet au cours de ces dix dernières années de profondes évolutions, comme en témoigne la variété des vocables utilisés pour la définir (" teneurs de comptes ", " teneurs de livres " ou encore " conservateurs ").

On rappelle que le paragraphe II de l'article 94 de la loi de finances pour 1982 qui a opéré la dématérialisation des titres a prévu que : " les valeurs mobilières émises en territoire français et soumises à la législation française, quelle que soit leur forme, doivent être inscrites en comptes tenus par la personne morale émettrice ou par un intermédiaire habilité ".

Il y a donc fondamentalement deux sortes de teneurs de comptes :

- les intermédiaires habilités par le ministère de l'économie et des finances, qui sont en pratique la quasi-totalité des établissements de crédit et certaines entreprises d'investissement (anciennes sociétés de bourse) ;

- les sociétés non cotées ou ne faisant pas appel public à l'épargne.

Le 2° de l'article 32 de la loi financière a établi la compétence du CMF pour fixer les conditions d'exercice, par les prestataires de services d'investissement (établissements de crédit et entreprises d'investissement), des services de conservation, ainsi que les fonctions de compensateur et de teneur de comptes et les conditions d'habilitation, à cet effet, des établissements visés à l'article 94 II de la loi de finances pour 1982.

La nouvelle rédaction proposée par les 1° et 2° du III du présent article fait apparaître plus clairement la distinction entre les deux catégories de teneurs de comptes - professionnels de la finance et sociétés non cotées - et établit plus clairement la compétence du CMF sur cette deuxième catégorie (texte proposé pour le 14 ° de l'article 32 de la loi financière).

2. Les dépositaires centraux

Dans la droite ligne des orientations fixées par la loi financière qui a dégagé le concept d'entreprises de marché, le texte proposé par le 2° du III du présent article pour le 15 ° de l'article 32 de la loi financière, prévoit de donner une valeur juridique au concept de " dépositaire central " d'instruments financiers et de soumettre cette activité au contrôle du CMF.

Il n'existe actuellement qu'une seule société susceptible d'être qualifiée de dépositaire central : Sicovam SA.

Ces dépositaires centraux devraient désormais être soumis à l'habilitation du CMF, lequel serait également compétent pour approuver leurs règles de fonctionnement et les contrôler.

IV. LES PROPOSITIONS DE VOTRE COMMISSION

Votre commission approuve les orientations générales du présent article en ce qu'elles renforcent la sécurité juridique des opérations financières réalisées sur la place de Paris et contribuent à la mise en place du marché unique des marchés financiers.

Toutefois, elle vous proposera un amendement rédactionnel relatif à la définition des systèmes de règlement-livraison de titres et un autre amendement destiné à prendre en compte les nantissements de titres ou d'espèces dans le cadre des systèmes de paiement ou de règlement-livraison de titres.

Votre commission vous proposera également un amendement permettant de sécuriser juridiquement la compensation des prêts et dépôts de gestion de trésorerie interbancaire au regard de la loi relative au redressement et à la liquidation judiciaire des entreprises.

Enfin, votre commission regrette la sédimentation des régimes juridiques de remises de garantie, à laquelle elle avait tenté de mettre un terme en insérant l'article 52 de la loi financière. Il serait souhaitable, d'ici la codification de ces dispositions dans le futur code monétaire et financier, d'unifier le régime juridique de ces dispositions.

Décision de la commission : sous réserve de l'adoption de l'amendement qu'elle vous présentera, votre commission des finances vous propose d'adopter le présent article.

ARTICLE 19

Droit de propriété dans les systèmes de règlement
contre livraison de titres

Commentaire : le présent article a pour objet de permettre la mise en pension intrajournalière des titres acquis pour leurs clients par les intermédiaires.

I. LA SITUATION ACTUELLE


Comme on l'a vu dans le commentaire de l'article 18, la création de systèmes de règlement contre livraison de titres permettant d'engager des règlements irrévocables et définitifs d'opérations sur titres en cours de journée constitue une étape importante dans l'interconnexion des systèmes de titres à l'échelon européen. Elle permet en effet de sécuriser les échanges de titres et accroît les possibilités d'arbitrage entre des titres déposés dans des systèmes différents.

C'est la raison pour laquelle l'Association européenne des dépositaires centraux d'instruments financiers, l'ECSDA, a décidé d'en faire une condition minimale pour la participation d'un système de titres au dispositif d'interconnexion.

Au demeurant, cette évolution s'inscrit dans le droit fil des orientations préconisées par l'Institut monétaire européen (IME) 9( * ) et le Conseil des ministres de la Communauté européenne 10( * ) .

Le présent article s'inscrit dans cette problématique générale et tend à préciser les conditions du transfert de propriété dans les systèmes de titres organisant le règlement-livraison d'opérations réalisées de gré à gré. Il revêt une grande importance pour la sécurisation de Relit Grande Vitesse (RGV), système qui fait intervenir la Banque de France et les établissements de crédit pour le compte d'investisseurs institutionnels, et gère l'ensemble des opérations réalisées dans le cadre des interventions de politique monétaire, par la Banque centrale, ainsi que celles consécutives aux adjudications des valeurs du Trésor.

On rappellera brièvement le contexte actuel, avant d'exposer de façon plus précise le problème que tente de résoudre le présent article.

A. LE CONTEXTE ACTUEL

La Banque de France a accepté de mettre en place des pensions livrées intrajournalières (dites pensions livrées conservatoires ou PLC) pour fournir la liquidité nécessaire au dénouement des opérations qui seront traitées dans le système RGV.

En effet, les établissements qui participeront à RGV ne disposent pas toujours d'un " stock " suffisant de titres susceptibles d'être mis en pension. La Banque de France a donc accepté de prendre également en pension les titres qui sont l'objet même des livraisons dans le cadre des opérations de règlement-livraison de RGV, c'est à dire les " flux ".

Une partie de ces flux correspond à des titres qui sont achetés par les établissements participant à RGV pour leur propre compte, une autre partie à des titres achetés pour le compte de la clientèle. Or, la Sicovam 11( * ) n'est pas en mesure de distinguer les uns des autres.

Dès lors, la question se pose de l'utilisation des titres achetés pour le compte de la clientèle dans les PLC conclues avec la Banque de France.

La Banque de France a fait savoir, il y a déjà plusieurs années, qu'elle n'accepterait de prendre en pension des titres achetés pour le compte de la clientèle que si les conditions suivantes sont réunies :

• qu'il y ait un accord exprès de l'acheteur ; on observera au demeurant que l'article 63-1 de la loi financière du 2 juillet 1996 interdit aux prestataires de services d'investissement d'utiliser, pour leur propre compte, les titres des investisseurs dont ils assurent la tenue de compte, à moins d'un consentement explicite de l'investisseur 12( * ) ;

• qu'il s'agisse d'un client qui soit capable de se rendre compte de la portée de son accord, c'est à dire d'un " professionnel ".

La seconde condition peut d'ores et déjà être considérée comme remplie dans la mesure où RGV est un système qui, compte tenu de ses caractéristiques, n'est pas destiné à des particuliers.

En revanche, la première condition suppose que soit précisé le régime juridique du transfert de propriété des instruments financiers.

B. EXPOSÉ DU PROBLÈME

Pour que l'acheteur puisse donner utilement un accord à une éventuelle mise en pension des titres qu'il a achetés, encore faut-il qu'il soit propriétaire des titres au moment où la PLC est conclue.

Or, le législateur n'a fixé de règles précises sur le transfert de propriété dans les systèmes de titres que concernant les opérations réalisées dans le cadre de marchés réglementés, c'est à dire actuellement celles qui se dénouent dans RELIT. Ces règles sont les suivantes :

• l'article 47 bis de la loi du 3 janvier 1983 sur le développement des investissements et la protection de l'épargne prévoit que : " en cas de cession sur un marché réglementé de titres inscrits en compte (...) le transfert de propriété de ces titres résulte de leur inscription au compte de l'acheteur, à la date et dans les conditions définies par les règles de place " ;

• Lesdites règles de place 13( * ) précisent que l'inscription au compte de l'acheteur doit intervenir " le jour de la négociation ou, au plus tard, le lendemain de ce jour " pour les titres achetés au comptant (fin de mois pour les achats sur le compartiment Règlement mensuel du premier marché).

Or, pour les opérations qui seront traitées sur le marché de gré à gré, qui sont celles qui se dénoueront dans RGV, le législateur n'a fixé aucune règle précise. Le transfert de propriété est donc effectué selon les règles de droit commun du code civil qui découlent de l'article 1583.

Selon cet article, la vente est parfaite " dès lors qu'on est convenu de la chose et du prix quoique la chose n'ait pas encore été livrée, ni le prix payé ". C'est la règle dite du " consensualisme ". Toutefois, cette règle ne saurait constituer une base suffisamment solide pour permettre à la Banque de France de prendre en pension, sans risque juridique, les titres constituant les " flux " de RGV. En effet, il est fait, en matière de transfert de propriété des titres, une application divergente de cette règle selon que l'on se réfère à la jurisprudence de la chambre civile de la Cour de cassation ou à celle de la chambre commerciale.

Pour la chambre commerciale 14( * ) , l'acheteur devient bien propriétaire des titres dès la négociation, donc bien avant le règlement-livraison dans les livres du dépositaire central - la Sicovam.

Pour la chambre civile 15( * ) , le transfert de propriété de titres dématérialisés obéit au régime des choses de genre incorporelles pour lesquelles le transfert de propriété n'est réalisé qu'à partir du moment où la chose est individualisée, c'est à dire, s'agissant de titres, à partir du moment où les titres cédés sont inscrits au compte de l'acheteur. Selon cette jurisprudence civile, le transfert de propriété ne serait donc pas encore fait au moment du règlement-livraison.

Dès lors que, au moment du règlement-livraison dans RGV, on ne peut avoir la certitude que les titres ont bien cessé d'appartenir au vendeur, la première de deux conditions posées par la Banque de France pour prendre les " flux " RGV en pension est donc, en l'état actuel du droit, impossible à réunir.

Il serait donc opportun que le législateur modifie l'article 47 bis de telle sorte qu'il soit clair que, pour les titres acquis sur des marchés de gré à gré, le transfert de propriété s'effectue, au plus tard, au moment du règlement-livraison dans les livres du dépositaire central. C'est précisément l'objet du présent article.

II. LES AMÉNAGEMENTS PROPOSÉS PAR LE PRÉSENT ARTICLE

Le présent article a pour principal objet de préciser le régime juridique du transfert de propriété des opérations de gré à gré effectuées dans le cadre de systèmes de règlement-livraison de titres. Accessoirement, il procède à diverses harmonisations entre la loi financière du 2 juillet 1996 et la loi du 3 janvier 1983 précitée.

A. LE RÉGIME DU TRANSFERT DE PROPRIÉTÉ DES OPÉRATIONS DE GRÉ À GRÉ RÉALISÉES DANS LE CADRE DE SYSTÈMES DE RÈGLEMENT LIVRAISON DE TITRES

Cette modification résulte de l'adjonction par le 3° du paragraphe I du présent article , de deux alinéas complémentaires à l'article 47 bis de la loi du 3 janvier 1983.

Le premier alinéa fixe le moment auquel intervient le transfert de propriété des instruments financiers cédés dans le cadre d'opérations de gré à gré et portant sur des instruments financiers inscrits en compte chez un intermédiaire habilité participant à un système de règlement-livraison de titres. Afin de lever toute ambiguïté, il est précisé que ce transfert de propriété résulte " du dénouement irrévocable de l'opération tel que les règles de fonctionnement du système de règlement et de livraison l'ont fixé. "

On observera que cette disposition transpose, par anticipation, les recommandations de la position commune susvisée du Conseil des ministres de la Communauté et, en particulier, de son article 5 qui dispose que : " un ordre de transfert ne peut être révoqué par un participant à un système ou par un tiers à partir du moment fixé par les règles de fonctionnement de ce système ".

Le second alinéa dispose que : " le client acquiert la propriété des instruments financiers s'il en a réglé le prix. Tant que le client n'a pas réglé le prix, l'intermédiaire qui a reçu lesdits instruments financiers en est le propriétaire ". Dès lors, l'intermédiaire pourra, durant le laps de temps qui sépare le dénouement irrévocable de l'opération et le paiement du prix par le client, remettre les titres en pension.

Comme le relève justement le rapporteur général de l'Assemblée nationale, M. Didier Migaud, 16( * ) cette disposition ne constitue pas une dérogation à l'interdiction du " tirage sur la masse " (article 63-1 de la loi financière) : seul le propriétaire des titres reste autorisé à les utiliser, mais jusqu'au paiement par le donneur d'ordre, le propriétaire est l'intermédiaire.

Ainsi, cet article précise le régime juridique du transfert de propriété des instruments financiers négociés de gré à gré dans le cadre d'un système de titres et, dans le même temps, reconnaît aux participants à un tel système un droit limité d'utilisation des titres issus des flux de ce système. Cette utilisation n'est qu'intrajournalière et a pour objet de garantir le caractère irrévocable du dénouement des opérations réalisées.

B. L'HARMONISATION DES DISPOSITIONS DE LA LOI DE 1983 SUR LA PROTECTION DE L'ÉPARGNE

On se souvient que la loi financière du 2 juillet 1996 a transposé en droit français la notion d'instruments financiers, introduite par la directive du 10 mai 1993 sur les services d'investissement (DSI) afin de pouvoir établir le passeport européen pour les services financiers.

En conséquence, il est proposé de modifier les articles 47 bis et 47 ter de la loi du 3 janvier 1983 précitée afin de remplacer les mots " titres " par ceux d' " instruments financiers ". Il est du reste précisé pour l'application de ces deux articles, que seuls sont concernés les instruments financiers visés aux 1°, 2° et 3° de l'article premier de la loi financière, c'est à dire, les actions et autres titres de capital, les obligations et autres titres de créance ainsi que les parts ou actions d'organismes de placement collectif, à l'exclusion donc des instruments financiers à terme visés au 4° de ce même article premier.

L'Assemblée nationale a adopté le présent article sans modification.

Décision de la commission : votre commission des finances vous propose d'adopter le présent article sans modification.

Section 5

Continuité des relations contractuelles
ARTICLE 20

Continuité des taux et indices contractuels

Commentaire : le présent article propose de confirmer le principe de continuité des contrats dans lesquels sont mentionnés des taux ou des indices affectés par le passage à l'euro. Il précise également les règles de publicité concernant le remplacement d'un taux ou d'un indice au cas où celui-ci disparaîtrait du fait de l'introduction de la monnaie unique.

Le règlement n° 97/1103/CE du 17 juin 1997
fixant certaines dispositions relatives à l'introduction de l'euro, pose le principe de la continuité juridique des contrats, afin d'assurer le maximum de sécurité juridique lors du passage à l'euro. Son article 3 dispose en effet que : " l'introduction de l'euro n'a pas pour effet de modifier les termes d'un instrument juridique ou de libérer ou de dispenser de son exécution, et elle ne donne pas à une partie le droit de modifier un tel instrument ou d'y mettre fin unilatéralement ".

Ce principe de continuité concerne l'ensemble des instruments juridiques, dont l'article premier du règlement communautaire précité donne une définition. Il s'agit des " dispositions législatives et réglementaires, actes administratifs, décisions de justice, contrats, actes juridiques unilatéraux, instruments de paiement autres que les billets et les pièces, et autres instruments ayant des effets juridiques ".

Le présent article a pour objet d'apporter une réponse à la question des conséquences sur la continuité des contrats de la disparition ou de la modification d'un indice ou d'un taux de référence figurant dans un contrat auxquels de très nombreux contrats font référence.

En effet, si un contrat de prêt à taux fixe ne sera guère affecté par l'introduction de la monnaie unique, tel ne sera pas le cas pour un contrat de prêt à taux variables.

Trois situations sont envisageables après le passage à l'euro :

- le maintien du taux ou de l'indice ;

- la modification de la composition ou de la définition d'un taux variable ou d'un indice auquel il est fait référence dans une convention : le premier alinéa du présent article prévoit qu'une telle modification est sans effet sur l'application de ladite convention ;

- la disparition de ce taux variable ou de cet indice : le deuxième alinéa propose alors l'intervention du ministre chargé de l'économie qui peut désigner, par arrêté, le taux variable ou l'indice qui s'y substitue, le but de cette disposition étant d'assurer une publicité suffisante à ce remplacement.

Enfin, le troisième alinéa du présent article permet aux parties à la convention de déroger, d'un commun accord, à l'application du taux ou de l'indice ainsi substitué par voie d'arrêté.

Cette disposition évite ainsi toute restriction à la liberté contractuelle, en donnant la possibilité aux parties de renégocier le contrat, conformément à la dernière phrase de l'article 3 du règlement communautaire précité, selon laquelle la continuité juridique des contrats " s'applique sans préjudice de ce dont les parties sont convenues ".

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter le présent article sans modification.

ARTICLE 21

Garantie en cas de double conversion des dettes et créances

Commentaire : le présent article a pour objet, dans un but de sécurité juridique, d'empêcher toute contestation relative à l'écart susceptible d'apparaître en cas de conversion en euros d'une somme libellée en francs puis de conversion en sens inverse de cette même somme. Cette disposition n'est toutefois valable que si les opérations de conversion ont respecté strictement les règles prévues par les articles 4 et 5 du règlement n° 97/1103/CE du 17 juin 1997.

Le règlement n° 1103/97 du Conseil du 17 juin 1997 fixant certaines dispositions relatives à l'euro définit notamment les règles de conversion et d'arrondi entre les monnaies nationales et l'euro.

L'article 4 de ce règlement fixe les règles applicables aux taux de conversion dont on sait qu'en vertu de l'article 109 L, paragraphe 4 première phase du Traité, ils ne pourront être arrêtés qu'au 1er janvier 1999.

Ces règles sont les suivantes :

- les taux de conversion comportent six chiffres significatifs, soit cinq décimales ;

- ces taux ne peuvent être ni arrondis ni tronqués lors des conversions ;

- l'utilisation de taux inverses calculés à partir des taux de conversion est interdite : cela conduirait à arrondir les taux et pourrait entraîner des imprécisions significatives en raison de l'effet multiplicateur de l'arrondi. Ainsi, les contre-valeurs d'unités monétaires nationales en euros devront être calculées en multipliant ou en divisant selon le cas par le taux de conversion entre l'euro et l'unité monétaire nationale considérée ;

- la conversion des monnaies nationales entre elles doit s'effectuer en utilisant l'euro, aucune autre méthode de calcul ne pouvant être utilisée.

En outre, l'article 5 du règlement précité définit, quant à lui, les règles relatives à l'arrondi après conversion. Il prévoit, dans la mesure où il n'existe pas de millième d'euro, que " les sommes d'argent à payer ou à comptabiliser...sont arrondies au cent supérieur ou inférieur le plus proche" , soit deux décimales après la virgule. Si un résultat de conversion en euro se situe exactement au milieu (troisième décimale égale à 5), la somme sera arrondie au chiffre supérieur.

L'application des règles posées par les articles 4 et 5 du règlement pose toutefois problème dans la mesure où, en cas de conversions successives, la somme finalement obtenue peut différer légèrement de celle existant initialement.

Les écarts enregistrés seront toujours très faibles, de l'ordre de quelques centimes. Mais les gains ou les pertes peuvent devenir significatifs pour l'une des deux parties à la transaction, en cas d'accumulation d'un nombre important d'écarts résultant d'une multiplicité d'opérations donnant lieu à conversion.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter le présent article sans modification.

Section 6

Dispositions fiscales
ARTICLE 22

Harmonisation des règles d'arrondissement en matière fiscale

Commentaire : le présent article a pour objet d'unifier les règles d'arrondissement des bases d'imposition et de liquidation des impositions fiscales.

I. LE DROIT ACTUEL EST MARQUÉ PAR UNE GRANDE DIVERSITÉ DES RÈGLES D'ARRONDISSEMENT EN MATIÈRE FISCALE


Le droit actuel se caractérise par une grande complexité des règles d'arrondissement en matière fiscale. Non seulement celles-ci varient d'un impôt à l'autre, mais les principes concernant les bases d'imposition ou les bases de liquidation de l'impôt (cotisations) diffèrent également.

A. LES RÈGLES D'ARRONDISSEMENT POUR LES BASES D'IMPOSITION

La règle générale en matière d'arrondissement des bases d'imposition est celle de l'arrondissement au franc inférieur. Ainsi, une note du ministre de l'économie du 30 avril 1976 précise que la règle de l'arrondissement au franc inférieur constitue le principe général " applicable à tous les éléments qui concourent à la détermination des bases d'imposition " et commun " à tous les impôts et taxes, sauf dispositions plus favorables prévues par le code général des impôts à l'égard des contribuables ".

En réalité, cette règle souffre de nombreuses exceptions.

Ainsi, la détermination de la base d'imposition de la taxe sur la valeur ajoutée est régie par le principe de l'arrondissement au franc le plus voisin . En effet l'article 270 du code général des impôts dispose que la taxe sur la valeur ajoutée " frappe les sommes imposables suivies de franc en franc, l'arrondissement étant opéré au franc le plus voisin ".

En revanche, la détermination de la base d'imposition de l'impôt sur les sociétés est régie par le principe de l'arrondissement à la dizaine de francs inférieure . Le premier paragraphe de l'article 219 du code général des impôts dispose que  " pour le calcul de l'impôt, toute fraction du bénéfice imposable inférieure à 10 francs est négligée ".

Cette règle est également valable pour le calcul des bases d'imposition de :

- l'impôt sur le revenu , en vertu de l'article 193 du code général des impôts qui précise que le revenu imposable est arrondi à la dizaine de francs inférieure pour le calcul de l'impôt sur le revenu ;

- les taxes sur les salaires , en vertu de l'article 225 du même code qui dispose que " pour le calcul de la taxe, toute fraction n'excédant pas 10 francs est négligée " ;

- la taxe d'habitation en vertu de l'article 310 H de l'annexe II du code général des impôts qui précise que la valeur locative est arrondie à la dizaine de francs inférieure ;

- les taxes foncières et la taxe d'habitation ainsi que les taxes annexes correspondantes en vertu du deuxième alinéa du 1 de l'article 1657 qui dispose que " les bases des taxes foncières et de la taxe d'habitation ainsi que celles des taxes annexes correspondantes sont arrondies à la dizaine de francs inférieure " .

L'article 261 de l'annexe III du code général des impôts rappelle également qu '" il est fait abstraction des fractions de sommes et valeurs inférieures à 10 francs pour la perception du droit ou de la taxe [...] " prévue par :

- les droits d'enregistrement et les taxes de publicité foncière ainsi que les prélèvements d'office sur les bons du trésor et les titres anonymes ;

- l'ensemble des droits d'enregistrement perçus par les communes, les départements et les régions ;

- et les impositions perçues au profit de certains établissements publics et d'organismes divers.

B. LES RÈGLES D'ARRONDISSEMENT POUR LE MONTANT DES COTISATIONS

Selon la nature des cotisations, leur montant peut être arrondi selon quatre règles différentes : au franc le plus voisin, au franc inférieur, au franc supérieur et à la dizaine de francs inférieure.

Obéit à la règle de l'arrondissement au franc le plus voisin le montant des impôts directs de toute nature, sauf les acomptes provisionnels d'impôt sur le revenu. Le quatrième alinéa de l'article 1657 du code général des impôts dispose que " les cotisations d'impôts directs de toute nature sont arrondies au franc, les fractions de franc inférieures à 0,50 franc étant négligées et celles de 0,50 franc et au-dessus étant comptées pour 1 franc. Il en est de même du montant des majorations, réductions et dégrèvements ".

Obéit à la règle de l'arrondissement au franc inférieur le montant de tous les impôts et les taxes autres que les impôts directs, notamment la TVA, les droits d'enregistrement, l'impôt de solidarité sur la fortune et les produits domaniaux. En effet, l'article 1724 dispose que " sous réserve de ce qui est dit à l'article 1657, la liquidation de toutes sommes à recevoir, à quelque titre et pour quelque cause que ce soit, est opérée en négligeant les centimes. Il est procédé à cet arrondissement au niveau du décompte de chaque impôt ou taxe ". De même, le montant des acomptes pour l'impôt sur les sociétés est arrondi au franc inférieur en vertu du dernier alinéa de l'article 360 de l'annexe II du code général des impôts.

Obéit à la règle de l'arrondissement au franc supérieur le montant de tous les avoirs fiscaux et des crédits d'impôt.

Enfin, obéit à la règle de l'arrondissement à la dizaine de francs supérieure le montant de chaque acompte de l'impôt sur le revenu conformément au deuxième alinéa de l'article 357 B de l'annexe III du code général des impôts.

Est ainsi démontrée l'excessive complexité des règles relatives à l'arrondissement des bases d'imposition et des cotisations.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : UNE HARMONISATION DES RÈGLES D'ARRONDISSEMENT

A. LE DISPOSITIF PROPOSÉ


Le présent article propose d'unifier les règles d'arrondissement des bases d'imposition et de liquidation de l'impôt.

Il prévoit que les bases des impositions de toute nature soient arrondies au franc ou à l'euro le plus proche et que la fraction de franc ou d'euro égale à 0,50 soit comptée pour 1. En outre, toute disposition contraire est abrogée.

Cet article permet donc d'imposer une règle unique d'arrondissement en matière fiscale.

En outre, il anticipe sur le passage à l'euro puisqu'il prévoit que le principe de l'arrondissement en matière fiscale s'appliquera également lorsque les opérations de fixation des bases d'imposition et de liquidation s'effectueront en euro.

B. L'IMPACT DE CE DISPOSITIF SUR LES RECETTES FISCALES

Selon les informations contenues dans l'étude d'impact annexée au présent projet de loi, cette mesure n'aurait pas de conséquence significative.

En effet, en ce qui concerne les bases de liquidation, les arrondissements à l'unité inférieure et à l'unité supérieure devraient globalement se neutraliser.

En revanche, la disparition de l'arrondi à la dizaine inférieure devrait se traduire par un gain pour l'Etat en ce qui concerne les bases d'imposition. Toutefois, ce dernier doit être relativisé et ne devrait pas dépasser 38 millions de francs. Ainsi, pour l'impôt sur le revenu, il devrait atteindre onze millions de francs sur un montant de 294,7 milliards de francs de recettes prévus au titre de cet impôt par la loi de finances pour 1998.

Cette mesure devrait également avantager les collectivités territoriales. L'article 1657 du code général des impôts fixe les règles relatives à l'établissement et la mise en recouvrement des rôles.

En ce qui concerne les bases d'imposition , le deuxième alinéa du 1 de cet article dispose que " les bases des taxes foncières et de la taxe d'habitation ainsi que celles des taxes annexes correspondantes sont arrondies à la dizaine de francs inférieure ".

Le passage à la règle d'arrondissement au franc le plus proche va donc entraîner une augmentation des bases des taxes foncières et de la taxe d'habitation que l'administration fiscale répercutera directement sur les bases notifiées par les collectivités locales.

Toutefois, les gains générés par cette mesure seront très limités, puisqu'ils sont estimés entre 5 et 10 millions de francs.

En revanche, les bases d'imposition de la taxe professionnelle obéissent déjà à la règle de l'arrondissement au franc le plus proche. La mesure proposée par le présent article ne modifiera donc pas ces dernières.

En ce qui concerne les bases de liquidation , le troisième alinéa du 1 de l'article 1657 précité dispose que " les taux applicables aux bases de cotisations pour le calcul des impositions directes locales sont exprimés avec trois chiffres significatifs, le troisième chiffre étant augmenté d'une unité si le chiffre suivant est égal ou supérieur à 5 ".

Les cotisations obéissent donc déjà à la règle de l'arrondissement au franc le plus proche. Elles ne seront donc pas affectées par la mesure proposée par le présent article.

Décision de votre commission : votre commission propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 23

Création d'un droit d'option pour la souscription
des déclarations fiscales en euros

Commentaire : le présent article a pour objet de permettre au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie de déterminer, par décret, la liste des déclarations fiscales pouvant être souscrites en euros.

I. LES CONSÉQUENCES DE L'EURO POUR LES ENTREPRISES


Afin d'assurer un passage harmonieux à l'euro, un projet de règlement a été publié en août 1997 en annexe à une résolution du Conseil sur les règles de remplacement des monnaies nationales et de l'écu par l'euro ainsi que sur celles portant sur la circulation des pièces et billets libellés en euros. Ce projet prévoit que " les Etats membres participants ne peuvent adopter des dispositions imposant l'utilisation de l'unité euro autres que celles qui sont prévues au paragraphe 4 que conformément à un calendrier fixé par la législation communautaire ".

Le plan français de passage à l'euro respecte cette règle puisqu'il repose sur le principe du " ni obligation-ni interdiction ". Dans ce cadre, certaines dispositions du projet de loi visent à autoriser les entreprises à convertir en euros leurs flux financiers dès 1999.

Ainsi, l'article 12 du présent projet de loi donne aux entreprises qui le souhaitent le choix de tenir leur comptabilité en euros dès le 1 er janvier 1999. Toutefois, cette opportunité ne s'avérerait guère avantageuse si les entreprises étaient obligées de continuer à souscrire en francs leurs déclarations fiscales.

Toutefois, cette mesure ne produirait pas ses pleins effets si, dans le même temps, les entreprises continuaient d'être obligées de souscrire leurs déclarations fiscales en francs français.

II. LE DROIT D'OPTION POUR LA SOUSCRIPTION DES DÉCLARATIONS FISCALES EN EURO

Le premier alinéa du présent article propose d'autoriser les entreprises, pendant la période transitoire, à souscrire, après option irrévocable, certaines déclarations fiscales en euros.

Toutes les déclarations fiscales ne sont pas concernées puisqu'il est prévu qu'un décret fixera la liste des déclarations visées par cette option. La rédaction définitive dudit décret n'est pas arrêtée mais selon les informations recueillies par votre rapporteur auprès du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, seraient concernées les déclarations relatives :

- aux bénéfices industriels et commerciaux ;

- aux bénéfices non commerciaux et aux bénéfices agricoles ;

- à la taxe professionnelle ;

- aux taxes assises sur les salaires ;

- à la taxe sur la valeur ajoutée et à la taxe sur les véhicules de société.

Toutes les entreprises sont susceptibles d'être concernées par cette mesure. Toutefois, le deuxième alinéa du présent article précise que " l'option pour les déclarations en unité euro est subordonnée à la tenue des documents comptables dans cette même unité euro . "

En outre, cette option est irrévocable, à l'instar de celle prévue pour la tenue d'une comptabilité en euros. En conséquence, cette mesure intéressera surtout les entreprises entretenant d'importantes relations avec l'étranger ou avec d'autres entreprises ayant fait le choix de l'euro ainsi que les sociétés cotées en bourse.

Décision de votre commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.


ARTICLE 24

Aménagement de la détermination des écarts de conversion de change
lié à l'introduction de l'euro

Commentaire : le présent article a pour objet de faire prendre en compte, pour la détermination des écarts de change des devises ainsi que des créances et dettes libellées en monnaies étrangères détenues par les entreprises et affectant le bénéfice imposable, les taux de conversion bilatéraux arrêtés irrévocablement entre Etats participant à la troisième phase de l'Union économique et monétaire.

I. LES REGLES FISCALES ET COMPTABLES D'EVALUATION DES AVOIRS, CRÉANCES ET DETTES EN MONNAIES ÉTRANGÈRES.


Les entreprises peuvent détenir des créances et dettes libellées en monnaies étrangères, mais aussi des avoirs en devises étrangères. Ces créances, dettes et avoirs sont inscrits au bilan de l'entreprise pour leur contre-valeur en francs.

Dès lors, les fluctuations de change sont susceptibles d'affecter l'actif net de l'entreprise, qui détermine le bénéfice imposable.

C'est pourquoi, le paragraphe 4 de l'article 38 du Code général des impôts prévoit que les écarts de conversion des devises ainsi que des créances et des dettes libellées en monnaies étrangères détenues par les entreprises doivent être évaluées, à la clôture de chaque exercice, en fonction du dernier cours de change. Ce cours de change fait l'objet d'une publication dans le bulletin des impôts.

Cette règle fiscale diffère des règles comptables qui prévoient que les écarts de conversion ne soient pris en compte dans le résultat, par le truchement de provisions, que lorsqu'ils entraînent des pertes latentes.

Or, ces différences susceptibles d'apparaître entre le résultat fiscal et le résultat comptable, imposent aux entreprises de procéder à des ajustements fiscaux en fin d'exercice, ajustements qui ne se limitent pas aux créances et aux dettes figurant encore au bilan à cette date, mais s'étendent à celles qui se sont éteintes durant l'exercice.

II - LE DISPOSITIF PROPOSÉ PAR LE PRESENT ARTICLE

Le passage à la troisième phase de l'Union économique et monétaire va modifier les conditions des écarts de change pour les devises dépendant de la future zone euro. En effet, deux séries de taux de conversion devront être fixées :

- la première consistera à déterminer les taux de change bilatéraux entre chacune des monnaies des Etats participant à l'Union économique et monétaire ;

- la seconde visera à fixer la parité entre chacune de ces monnaies nationales et l'euro.

Or, ces deux conversions interviendront à des moments différents : la première sera réalisée lors du Conseil européen de Bruxelles, qui se tiendra au cours du week-end du 1 er mai ; la seconde sera connue au début de l'année 1999.

Le présent article propose de permettre aux entreprises qui détiennent des devises, créances ou dettes libellées dans une monnaie de la zone euro d'évaluer, à la clôture de l'exercice s'achevant le 31 décembre 1998, ces avoirs et dettes d'après les taux de conversion arrêtés début 1999 par le Conseil de l'Union européenne et non d'après les cours des changes au 31 décembre 1998.

Ces dispositions n'auront qu'un caractère transitoire. Les règles posées par le paragraphe 4 de l'article 38 du code général des impôts seront de nouveau applicables après l'adoption de la monnaie unique.

L'euro entraînant, par définition, la disparition des écarts de conversion de change dans l'UEM, par le paragraphe 4 de l'article 38 du code général des impôts ne concernera plus que les variations de change entre l'euro et les autres monnaies.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter le présent article sans modification.

Section 7

Dispositions relatives à l'épargne et à l'investissement

ARTICLE 25

Définition de l'appel public à l'épargne

Commentaire : le présent article propose, d'une part, de préciser la définition de l' " appel public à l'épargne " et, d'autre part, de délimiter le champ du placement privé, afin d'offrir un cadre plus souple pour les investisseurs qualifiés, et plus favorable pour la collecte de l'épargne de proximité.

D'un point de vue économique, l'appel public à l'épargne (APE) peut être défini, comme une " technique permettant, lors de la constitution des sociétés ou en vue d'augmenter leur capital, de solliciter des capitaux auprès d'une épargne plus ou moins anonyme " 17( * ) .

D'un point de vue juridique, cette notion sert à délimiter le contrôle, par les autorités publiques, des émetteurs de valeurs mobilières, lorsque ceux-ci " sollicitent " l'épargne publique. Cependant, cette notion souffre, depuis l'origine, d'une certaine imprécision, source d'insécurité juridique. Par ailleurs, son extension de plus en plus fréquente aux petites et moyennes sociétés, engendre pour ces entreprises des contraintes peu compatibles avec leurs besoins de financement.

C'est pourquoi, depuis plusieurs années, les entreprises émettrices 18( * ) , comme les intermédiaires demandent une modernisation de cette définition de nature à offrir plus de sécurité juridique et à laisser une place au " placement privé ", c'est à dire à un régime allégé d'obligations d'information, pour les investisseurs professionnels.

Dans ce contexte, plusieurs voix s'étaient élevées pour réclamer une réforme de la notion de l'appel public à l'épargne.

Dès juillet 1996, votre rapporteur avait préconisé, dans le cadre d'un rapport sur la modernisation du droit des sociétés remis au Premier ministre, de donner une définition plus précise de l'APE, qui " pourrait partir des éléments actuels de l'article 72 de la loi de 1966, mais en écartant les placements privés réalisés par les prestataires de services d'investissement dans la mesure où ils font appel à un nombre très restreint d'investisseurs, et faire référence au degré de diffusion des titres dans le public (évalué tant lors de leur émission qu'ultérieurement, à la suite des cessions intervenues), apprécié en fonction d'un seuil défini soit par la loi, soit par la COB sur habilitation législative . " 19( * ) .

Dans le même temps, la Commission des opérations de bourse (COB) a lancé, en juin 1996, une vaste consultation de place qui l'a conduite à proposer aux pouvoirs publics, conformément aux dispositions de l'ordonnance de 1967, une nouvelle définition de l'APE et, surtout, une définition du " placement privé ".

Ayant décidé de donner suite aux travaux de la COB, le Gouvernement invite le législateur à poursuivre dans cette voie.

I. LA SITUATION ACTUELLE

Notion clef, mais aux contours imprécis, l'APE est actuellement de plus en plus contestée par les opérateurs économiques.

A. UNE NOTION CLEF

A l'origine, l'appel public à l'épargne visait les seules sociétés commerciales. Il emportait, et emporte toujours, pour la société qui souhaite y recourir, l'obligation de respecter certaines conditions et surtout, il soumet cette personne au contrôle de la COB.

1. Les conditions à respecter pour faire appel public à l'épargne

On peut distinguer les obligations qui pèsent, de façon permanente, sur la société, et celles qui pèsent, de façon ponctuelle, sur les opérations.

a) Les obligations permanentes pesant sur les sociétés faisant appel public à l'épargne

La loi de 1966 édicte un ensemble de règles impératives qui, ensemble, constituent le statut que doivent respecter, en permanence, les sociétés faisant appel public à l'épargne.

Pour l'essentiel, ces obligations ont trait :

au capital social : il doit être de 1.500.000 francs au minimum (contre 250.000 francs sans APE) ;

à la constitution de la personne morale : établissement d'un projet de statut déposé au greffe, publication d'une notice au bulletin officiel des annonces légales (BALO) ; établissement et publication d'un prospectus destiné au public et soumis au visa préalable de la COB ; dépôt des fonds et de la liste des souscripteurs dans une banque, chez un notaire ou à la Caisse des dépôts et consignations ; convocation et tenue d'une assemblée générale constitutive selon des règles strictes... ;

à la publicité en cours de vie sociale : les sociétés qui font appel public à l'épargne sont tenues de respecter des mesures de publicité particulières, notamment au BALO, lors de la convocation des assemblées générales, des augmentations ou des réductions de capital, des opérations de fusion, scission, liquidation...

à la publicité des comptes et des informations financières : outre le dépôt de leurs comptes annuels au greffe du tribunal de commerce, les sociétés dont les actions sont cotées doivent publier au BALO des informations concernant leur situation financière. Doivent ainsi être portés annuellement à la connaissance du public, les comptes sociaux et consolidés ; semestriellement, un rapport d'activité et un tableau de résultats ; trimestriellement, le montant de leur chiffre d'affaires...

à une obligation d'information permanente : le règlement n° 92-02 de la COB impose notamment aux sociétés cotées de porter à la connaissance du public tout fait important susceptible d'avoir une incidence significative sur le cours du titre.

b) Les obligations ponctuelles en cas d'opérations d'appel public à l'épargne

L'article 6 de l'ordonnance du 28 septembre 1967 dispose en effet :

" Toute société qui fait publiquement appel à l'épargne pour émettre des valeurs mobilières doit au préalable publier un document à l'information du public (...)

" Avant l'admission aux négociations sur un marché réglementé d'actions ou d'obligations, l'impression du même document est également obligatoire (...) "


Par ailleurs, l'article 7 dispose :

" le projet de document mentionné à l'article précédent est soumis au visa préalable de la COB (...) "

Aux termes des différents règlements élaborés par la COB en application de ces articles, ces obligations d'information sont les suivantes :

• la cession et l'émission de titres sans demande d'admission sur un marché réglementé en France sont subordonnées à l'établissement d'un " prospectus " simplifié devant faire l'objet d'un dépôt auprès de la COB ;

• la cession et l'émission de titres avec demande d'admission sur un marché réglementé en France supposent l'établissement d'un " prospectus " complet soumis au visa préalable de la COB.

2. Le contrôle de la COB

Dans son rapport annuel de 1996 précité, la COB a rappelé que la finalité du régime qui découle de l'APE est de protéger les intérêts du public dont l'épargne est ainsi sollicitée, en soulignant à cet égard que l'ordonnance du 28 septembre 1967 lui a assigné cet objectif comme principale mission.

En effet, l'article premier de l'ordonnance de 1967, confirmé par le législateur lors du vote de la loi financière du 2 juillet 1996, dispose que :

" La Commission des opérations de bourse, autorité administrative indépendante, veille à la protection de l'épargne investie dans les instruments financiers et tous autres placements donnant lieu à appel public à l'épargne , à l'information des investisseurs et au bon fonctionnement des marchés d'instruments financiers. "

Pour remplir cette mission, la COB est autorisée à prendre des règlements concernant le fonctionnement des marchés placés sous son contrôle, à prescrire des règles de pratique professionnelle auxquelles les sociétés faisant appel public à l'épargne doivent se soumettre, à délivrer des injonctions aux auteurs de pratiques contraires à ses règlements, à infliger des sanctions pécuniaires, à utiliser ses pouvoirs d'enquête...

Pourtant, en dépit de son importance dans la vie économique et financière du pays, l'APE ne fait l'objet d'aucune définition juridique précise.

B. UNE NOTION IMPRÉCISE ET ÉVOLUTIVE

Le législateur de 1966 s'est en effet contenté de poser un certain nombre de présomptions légales dans la loi sur les sociétés commerciales, offrant ainsi l'opportunité aux autorités de contrôle - en l'occurrence la COB - et au juge de dégager le contenu de cette notion.

1. L'absence de définition légale

L'article 72 de la loi du 24 juillet 1966, tel que modifié par l'article 96 de la loi financière dispose :

" Sont réputées faire publiquement appel à l'épargne les sociétés dont les titres sont admis aux négociations sur un marché réglementé, à dater de cette inscription, ou qui, pour le placement des titres, quels qu'ils soient, ont recours soit à des établissement de crédit, soit à des établissements mentionnés à l'article 99 de la loi n° 84-16 relative à l'activité et au contrôle des établissements de crédit (anciennes maisons de titres), ou sociétés de bourse (entreprises d'investissement), soit à des procédés de publicité quelconque, soit au démarchage ".

Il s'agit donc, non pas d'une définition, mais d'un ensemble de présomptions légales résultant soit d'un état de fait - la cotation des titres émis par une société sur un marché réglementé - soit du recours par cette société à certaines techniques de placement consistant dans la publicité, le démarchage ou le concours de certains intermédiaires financiers.

On remarquera par ailleurs que cette disposition ne concerne que les sociétés commerciales, même si le législateur a étendu progressivement le champ des catégories de personnes habilitées à recourir à ce mode de financement 20( * ) .

2. Une construction réglementaire et jurisprudentielle

Dès 1969, la COB a considéré que l'article 72 de la loi de 1966 n'édictait que des présomptions légales et qu'il lui appartenait, en vertu de la mission générale qu'elle tient du législateur, de préciser cette définition.

Elle a ainsi considéré que l'APE devait également être apprécié au regard de " l'étendue de la diffusion effective des titres dans le public " 21( * ) et a complété une à une les présomptions légales.

a. L'étendue de la diffusion dans le public

Ce critère supplémentaire de la diffusion des titres " au-delà d'un cercle restreint de personnes " s'est peu à peu imposé, mais est longtemps resté imprécis, les tribunaux estimant qu'il s'agissait là d'une question de fait dépendant des circonstances de chaque espèce.

Il a fallu attendre le règlement n° 88-04 22( * ) pour que cette notion soit finalement intégrée dans la définition de l'APE et le seuil fixé à 300 personnes, chiffre inspiré des critères du Securities and Exchange Committee (SEC), organe de régulation des marchés financiers américains.

Le règlement n° 92-02 23( * ) relatif à l'offre publique de valeurs mobilières confirme cette analyse en considérant que : " le caractère public de l'offre résulte de la diffusion des valeurs mobilières au-delà d'un cercle de 300 personnes ou du recours, pour leur placement, à des intermédiaires financiers ou à tout procédé de publicité ou de démarchage ".

La COB a donc ajouté aux termes de la loi, un seuil quantitatif, fixé à 300 personnes, au-delà duquel le caractère public de l'offre est présumé.

b. L'inscription sur un marché réglementé

La première présomption légale concernant les sociétés dont les titres sont admis aux négociations sur un marché réglementé, il s'en suit que les sociétés dont les titres figurent au relevé quotidien du marché hors cote (en voie d'être remplacé par le marché libre OTC), ne devraient pas, en principe, relever de cette présomption. Or, la COB considère, ultra legem , que l'inscription sur le relevé quotidien de ce marché suffit à caractériser une situation d'appel public à l'épargne, quitte à reconsidérer ensuite cette position si le nombre d'actionnaires et l'importance des transactions se révèlent réduits 24( * ) .

c. Le recours à des intermédiaires financiers

Les tribunaux ont eu tendance à donner une interprétation extensive de la liste limitative énumérée par l'article 72 de la loi de 1966. Ils ont ainsi considéré que le recours à des " démarcheurs spécialisés " ou à des " conseillers financiers ", notions qui ne sont pas définies par la loi, caractérisait également l'APE.

Ensuite, ils ont estimé que le recours à des intermédiaires professionnels au sens large était en soi une mesure de publicité, laquelle constitue la troisième présomption légale de l'APE.

d. Le recours à la publicité

La troisième présomption légale consistant dans le recours à des procédés publicitaires quels qu'ils soient, la COB a considéré qu'il y avait publicité à chaque fois que l'opération envisagée s'adressait à un " cercle de personnes n'ayant pas de liens personnels entre elles ou avec l'émetteur ", ce qui de facto lui confère un large pouvoir de qualification juridique.

C'est en faisant varier ainsi les contours de l'APE que la COB a été en mesure d'étendre progressivement son propre champ de compétence. Si l'on admet que l'information financière contribue à la protection des investisseurs, cette extension doit être considérée comme une amélioration. Mais elle a eu également pour conséquence d'accroître les contraintes pesant sur les entreprises, en particulier les petites et moyennes entreprises, ce qui explique, en partie au moins, les contestations actuelles.

C. UNE NOTION DE PLUS EN PLUS DISCUTÉE


L'extension progressive du champ de l'APE a soulevé deux sortes de problèmes.

1. Un accroissement de l'insécurité juridique lié à l'imprécision de la notion

L'imprécision des critères, leur nombre et leur pertinence font que des sociétés commerciales peuvent très bien être dans le champ de l'APE sans le savoir ou sans le vouloir. Cette situation est d'autant plus critiquable, qu'une fois soumis à ce régime juridique, il leur est très difficile d'en sortir.

a) L'appel public passif

La progression " naturelle " (héritage, partage, actionnariat salarié) du nombre d'actionnaires peut assez rapidement faire grimper leur nombre au-delà de 300, alors même que la personne morale ne se livre à aucune opération d'appel public à l'épargne. Une société familiale non cotée, dont le nombre d'actionnaires augmente, au fil des successions, au-delà de 300 doit ainsi se soumettre au régime de l'APE et fournir à tout demandeur ses notes d'information financière.

b) L'appel public dissident

L'entrée dans le champ d'application de l'appel public à l'épargne peut échapper au contrôle de la société lorsqu'un actionnaire, souvent minoritaire, s'adresse, en dehors de tout marché organisé, à un large public au sens du règlement de la COB. Cet appel public " dissident " aura en effet pour conséquence l'application d'un régime contraignant pour la personne morale, en dehors de toute volonté expresse de sa part.

c) L'absence de sortie de l'appel public à l'épargne

Il n'y a pas véritablement de sortie du régime de l'APE, par exemple, dans le cas où une société non cotée a placé des titres dans le public à un moment donné, mais ne s'est livrée depuis plusieurs années, à aucune autre opération similaire. En effet, dès lors que ces titres, par exemple des obligations, ne sont pas échus, ils demeurent dispersés, au sens de la COB, et la société émettrice doit continuer à respecter l'ensemble des prescriptions liées à l'APE.

2. Des contraintes souvent mal comprises

Les obligations d'information et de procédure qui s'imposent à une société dès lors qu'elle fait appel à l'épargne publique constituent des contraintes, somme toute assez légères, pour les sociétés cotées qui sont généralement de grandes entreprises disposant de services juridiques étoffés et rompus à ce genre de formalisme.

Il en va tout différemment pour les petites et moyennes entreprises, pour lesquelles ces obligations peuvent constituer un véritable carcan, d'autant plus mal supporté qu'il est subi plus que voulu, que son utilité n'est pas immédiatement perceptible et qu'il est souvent perçu, à tort ou à raison, comme pouvant avoir des conséquences commerciales désastreuses en termes de concurrence.

C'est pourquoi, la présente réforme s'efforce d'apporter, positivement ou négativement, une solution à ces différents problèmes.

II. LES AMÉNAGEMENTS PROPOSÉS

Le présent article propose de définir le cadre de l'appel public à l'épargne ainsi que celui du placement restreint, notion plus large que le seul placement privé, et de modifier le régime juridique concernant l'obligation de publication de la note d'information.

A. LA DÉFINITION DE L'APPEL PUBLIC À L'ÉPARGNE

Les trois premiers alinéas du texte proposé pour le paragraphe I de l'article 6 de l'ordonnance de 1967 par le paragraphe I du présent article donnent une véritable définition de l'APE qui rompt avec le régime de présomptions légales de l'article 72 de la loi de 1966.

Sur la forme, on observera que cette définition de l'APE figure désormais à l'article 6 de l'ordonnance du 28 septembre 1967 relative à la COB, qui ne contenait, jusqu'à présent, que des dispositions concernant le document destiné à l'information du public et que, parallèlement, l'article 72 de la loi de 1966 est abrogé par le paragraphe IV du présent article .

Sur le fond, l'APE serait désormais constitué :

• par l'admission aux négociations sur un marché réglementé 25( * ) , d'un instrument financier mentionné à l'article premier de la loi financière du 2 juillet 1996 (titres de capital, titres de créances, parts ou actions d'organismes de placement collectif, instruments financiers à terme) ;

• ou par l'émission ou la cession d'instruments financiers dans le public en ayant recours soit à la publicité , soit au démarchage , soit à des établissements de crédit ou à des prestataires de services d'investissement .

Comme on peut le constater, cette définition ne diffère guère du régime de présomptions légales donné par l'article 72, à ceci près :

- qu'il s'agit d'une définition légale - " l'appel public à l'épargne est constitué par " - et non plus d'un régime de présomptions, caractérisé par l'utilisation de la locution : " s ont réputées ". Cette définition est donc, a priori, exclusive de toute intervention ultra legem de la part du juge ou de l'autorité réglementaire ;

- que son point d'application est désormais " l'appel public à l'épargne " et non plus " les sociétés qui font appel public à l'épargne " ;

- que ne sont plus visés les titres d'une société - titres de créances ou de capital - mais les instruments financiers , ce qui inclut également les titres d'organismes de placement collectif et les instruments financiers à terme.
Le rapporteur général de la commission des finances de l'Assemblée, M. Didier Migaud, semble y voir une novation importante dans la mesure où désormais : " les obligations d'information liées à l'appel public à l'épargne s'imposeront clairement à l'ensemble des personnes morales qui émettent des instruments financiers et non pas aux seules sociétés commerciales " Rapport Assemblée nationale précité p. 225 .

B. LA DÉFINITION DU PLACEMENT RESTREINT


Jusqu'à présent, le placement restreint n'apparaissait qu'en creux de l'APE, par opposition au placement public : est placement restreint tout ce qui n'est pas appel public à l'épargne, c'est à dire lorsque la diffusion de titres s'effectue hors d'un marché réglementé et dans un public d'investisseurs de moins de 300 personnes, autrement que par voie de démarchage, de publicité ou de commercialisation par un intermédiaire.

Le texte proposé pour l'article 6 de l'ordonnance de 1967 donne une définition positive du placement restreint, dont le contenu diffère substantiellement de la définition actuelle.

En effet, le texte proposé par le paragraphe I du présent article pour le dernier alinéa du paragraphe I de l'article 6 de l'ordonnance de 1967 dispose que l'émission ou la cession d'instruments financiers ne constituent pas une opération d'appel public à l'épargne lorsqu'elles sont effectuées :

- soit " auprès d'investisseurs qualifiés " (c'est la notion actuelle de placement privé) ;

- soit " dans un cercle restreint d'investisseurs " ;

étant entendu que ces investisseurs, qu'ils soient qualifiés ou qu'ils fassent partie d'un cercle restreint, doivent agir pour compte propre.

La notion d'investisseurs qualifiés est apparue comme étant la principale innovation de la réforme proposée. Elle ne doit cependant pas conduire à méconnaître l'évolution également significative de la notion de cercle restreint et le passage d'une conception quantitative à une conception qualitative du placement restreint.

1. La notion d'investisseur qualifié

Cette notion a donné lieu à d'amples réflexions, que nous présenterons rapidement, avant d'examiner de façon plus détaillée le texte qui nous est proposé.

a) Les réflexions actuelles sur les notions d'investisseur qualifié ou averti

Différents pays ont déjà introduit la notion d'investisseur averti dans leur droit positif (Angleterre, Allemagne, Etats-Unis). Aux Etats-Unis en particulier, le placement privé se définit par rapport à la qualité de l'investisseur approché. Les investisseurs dits " avertis " peuvent alors prendre la forme de :

- " qualified institutional investors " (rule 144 A) . Aucun visa de la SEC n'est alors requis de la part de l'émetteur et ces investisseurs ont la possibilité de revendre librement les valeurs mobilières ainsi acquises (" restricted securities ") à d'autres acheteurs institutionnels avertis (" qualified institutionnal buyers ");

- " accredited investors " (regulation D). Ce cercle d'investisseurs, plus vaste que le précédent, peut comprendre des " high networth individuals " (patrimoine supérieur à un million de dollars ou revenus annuels supérieurs à 200.000 dollars). La revente de ces titres est réglementée.

En France , la notion d'investisseur averti existe déjà en droit positif. Elle a été dégagée par la jurisprudence récente, laquelle utilise indifféremment les termes " d'opérateur averti ", " d'opérateur avisé " ou de " client averti ", dans des affaires de responsabilité des intermédiaires financiers 26( * ) .

Surtout, elle apparaît dans la la loi financière du 2 juillet 1996 qui, transposant la directive sur les services d'investissement (DSI) 27( * ) prévoit dans ses articles 32 et 58 que les règles de bonne conduite concernant les prestataires de services d'investissement, les entreprises de marché et les chambres de compensation établies par le Conseil des marchés financiers (CMF) doivent tenir compte de la " compétence professionnelle de la personne à laquelle le service d'investissement est rendu ".

Par ailleurs, l'article 45 de la loi financière, qui établit la règle de concentration des ordres sur un marché réglementé, prévoit que, par dérogation à cette règle, des instruments financiers cotés sur un marché réglementé peuvent être négociés en dehors d'un tel marché à condition que la demande en soit faite par les investisseurs et que la transaction remplisse des conditions fixées par le règlement général du CMF concernant " son volume, le statut de l'investisseur , la nature de l'instrument financier négocié et l'information du marché réglementé sur lequel cet instrument est admis. "

A la suite du vote de cette loi, la COB, lors d'une consultation de place lancée en juin 1996, avait proposé de définir le placement privé uniquement par référence à un seuil quantitatif, comme étant : " une offre par émission ou par cession de valeurs mobilières, limitée à un public restreint, à l'exclusion de tout procédé de publicité ".

Toutefois, tenant compte des observations faites par les principales organisations professionnelles concernées, la COB s'était orientée, au terme de la consultation, vers une définition du placement privé fondée sur un critère plutôt qualitatif, en raison du recours à la notion d'investisseur professionnel ou averti.

Selon la COB 28( * ) , il devait s'agir :

- des investisseurs professionnels, (prestataires de services d'investissement, établissements de crédit...), sans limitation du nombre, agissant pour compte propre ;

- un nombre limité d'investisseurs avertis agissant également pour compte propre et pouvant être :

* soit 50 personnes morales au plus, ayant un portefeuille de titres d'une valeur supérieure à 100 millions de francs ;

* soit 30 personnes physiques au plus, titulaires d'un portefeuille de titres d'une valeur supérieure à 50 millions de francs.

b) Le texte proposé

Le texte proposé par le Gouvernement est en réalité assez différent de la définition donnée par la COB, puisqu'il prévoit (texte prévu par le paragraphe I du présent article pour le II de l'article 6 de l'ordonnance de 1967) de définir les investisseurs qualifiés comme étant :

- des personnes morales ;

- agissant pour compte propre ;

- disposant des compétences et des moyens leur permettant de réaliser des transactions sur instruments financiers sans bénéficier de la protection conférée par les obligations d'informations.

Il s'agit donc d'une interprétation restrictive de la notion, qui prend en compte les seuls investisseurs " institutionnels ", personnes morales disposant de moyens et de compétence avérés, à l'exclusion des " investisseurs avertis " simples personnes physiques, accréditées en raison de leurs compétences ou de leur fortune.

La " liste des catégories d'investisseurs qualifiés " serait définie par un règlement de la COB.

Par ailleurs, les organismes de placement collectif en valeurs mobilières se verraient considérés comme des investisseurs qualifiés. Cette précision est nécessaire si on souhaite autoriser certains OPCVM à bénéficier du régime du placement privé, puisque, d'une part, ils agissent toujours pour compte de tiers, et d'autre part, certains d'entre eux (les FCP notamment) n'ont pas la personnalité morale. C'est donc par dérogation à la définition générale que la loi les considérerait comme étant des investisseurs qualifiés.

2. La notion de cercle restreint d'investisseurs

Autant le dire tout de suite, la notion de cercle restreint d'investisseurs est un faux ami législatif , car elle vise moins la prise en compte d'un nombre restreint d'investisseurs que la qualité de ces investisseurs. C'est en effet l'épargne de proximité , ou " love money ", qui est visée ici, c'est à dire les investisseurs membres de la famille ou du réseau amical des dirigeants de l'entreprise. La notion de cercle restreint devrait même être abandonnée, si toutefois elle ne renvoyait pas à la notion de " cercle restreint de personnes " visée par le droit européen 29( * ) .

Cette notion est donc distincte de la précédente même si, en pratique, les investisseurs proches peuvent aussi être des investisseurs qualifiés. Mais elle en s'en rapproche, car elle prend en compte la nature des investisseurs, jugés, du fait de leur proximité de l'entreprise, de ses dirigeants ou de ses actionnaires, suffisamment informés pour ne pas avoir besoin des informations normalement exigées des sociétés faisant appel public à l'épargne.

Toutefois, cette interprétation ne transparaissait pas clairement dans le projet initial du Gouvernement, lequel prévoyait de renvoyer la définition de cette notion à un règlement de la COB. De surcroît, l'exposé des motifs du projet pouvait prêter à confusion puisqu'il indiquait que les rédacteurs du projet avaient souhaité viser " à la fois un nombre limité d'investisseurs, même non qualifiés, ou un nombre plus important d'investisseurs liés par des relations professionnelles, personnelles ou familiales. "

Mettant la lettre de la loi en accord avec l'exposé des motifs du projet, l'Assemblée nationale a décidé de fixer dans la loi la définition du cercle restreint d'investisseurs, comme étant un ensemble de personnes morales ou physiques, dont le nombre est inférieur à un seuil fixé par un règlement de la COB, ou dont le nombre est plus important, mais qui sont liées à l'émetteur par des relations professionnelles, personnelles ou familiales.

On observera au passage que la commission des finances de l'Assemblée nationale qui souhaitait fixer le seuil dans la loi, s'est opposée au Gouvernement qui a préféré renvoyer la détermination de ce seuil à la COB.

Quoiqu'il en soit, la combinaison astucieuse de la précision du seuil et de la souplesse du standard juridique (les investisseurs proches) permet de résoudre positivement le problème de l'APE passif.

En contrepartie, la discussion à l'Assemblée nationale a clairement montré que l'intention du Gouvernement était de ramener le seuil actuel de 300 personnes à 100 personnes. C'est en tout cas ce qu'a déclaré M. Dominique Strauss Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie pour qui : " le seuil de 100 paraît plutôt bien choisi , mais il se peut que la COB soit amenée à le faire évoluer pour parer aux risques qui peuvent se présenter. En fixant le seuil par la loi, et sachant qu'un texte peut prendre plusieurs mois pour passer au Parlement, nous serions incapables de suivre le rythme de la vie financière, d'où le renvoi au décret. Mais cela ne change rien à l'ordre de grandeur qui doit, me semble-t-il rester à peu près de cet ordre. Il n'y a aucune ambiguïté sur ce point " 30( * ) .

C. LA NOTE D'INFORMATION S'IMPOSANT À TOUTE PERSONNE FAISANT APPEL À L'ÉPARGNE PUBLIQUE

Le texte proposé par le paragraphe I du présent article pour le III de l'article 6 de l'ordonnance de 1967 précise l'obligation d'établir une note d'information pour les sociétés faisant appel public à l'épargne.

Le nouveau régime juridique de cette note d'information se distingue du précèdent sur trois points :

• Il n'y a plus de distinction entre le prospectus établi par les sociétés faisant appel public à l'épargne et celui des sociétés ayant décidé de faire coter leurs titres sur un marché réglementé. Cette suppression est bien venue, dans la mesure où toutes les sociétés faisant coter leurs titres entrent, par définition, dans le champ de l'APE ;

• Les modalités d'établissement du prospectus ne seront plus fixées par la loi mais par un règlement de la COB. L'actuel article 6 de l'ordonnance de 1967 dispose en effet que le document destiné à l'information du public doit être remis à toute personne dont la souscription est sollicitée ; qu'il doit être tenu à la disposition du public au siège social et dans tous les établissements chargés de recueillir des souscriptions et qu'en outre, en cas d'introduction sur un marché réglementé, il est également tenu à la disposition du public auprès de l'entreprise de marché qui en assure le fonctionnement.

Dans le projet du Gouvernement, il était prévu que le contenu même de ce document, qui porte sur " l'organisation, la situation financière et l'évolution de l'activité de la société ", soit renvoyé au règlement de la COB. L'Assemblée nationale a décidé, à juste titre, de maintenir les grandes lignes de ce contenu dans la loi.

Cette délégalisation, ainsi opportunément limitée, ne soulève pas de difficultés.

• Enfin, il est expressément prévu que le règlement précité de la COB prévoie les conditions dans lesquelles une personne morale cesse de faire appel public à l'épargne.

III. LES OBSERVATIONS DE VOTRE COMMISSION

Afin de pouvoir apprécier la réforme proposée, il semble nécessaire de revenir un instant sur l'utilité et le sens que revêt aujourd'hui la notion d'appel public à l'épargne.

A. L'UTILITÉ ET LE SENS DE LA NOTION D'APPEL PUBLIC

Cette notion ressortit à ce que l'on pourrait appeler la mission primitive de la COB : le contrôle de l'information financière délivrée aux investisseurs par les émetteurs de valeurs mobilières.

En 1967, ce contrôle a été mis en place dans le but d'apporter une meilleure protection aux investisseurs français (les " épargnants ") dans le but de diminuer leur méfiance traditionnelle à l'égard des placements en bourse . On peut y voir une sorte de consumérisme financier à ceci près qu'il dépasse la simple protection des consommateurs et participe à une politique d'orientation de l'épargne vers les placements à long terme.

Ce contrôle semble reposer initialement sur l'idée qu'existent deux sortes d'investisseurs. D'une part, le professionnel, (homme d'affaires, intermédiaire financier...) réputé être parfaitement averti du fonctionnement des sociétés et des marchés pour lequel aucune protection particulière ne s'impose. D'autre part, l'épargnant moyen, censé gérer ses économies en bon père de famille et dont l'épargne mérite une protection renforcée.

Cependant, cette distinction suppose de pouvoir donner une définition à la fois précise et souple de l'investisseur qualifié. Et c'est vraisemblablement pour contourner cette difficulté que les rédacteurs de l'ordonnance de 1967 n'ont pas recouru à une définition erga omnes, mais à un système de présomptions légales, laissant au juge (la COB n'existait pas encore) le soin de dégager une casuistique de l'appel public à l'épargne.

Par la suite, l'adjonction par la COB d'un critère quantitatif s'est avérée bienvenue afin de pouvoir laisser hors du champ des contraintes réglementaires les sociétés se finançant exclusivement par recours à l'épargne de proximité.

Trente plus tard, force est de constater que les données du problème ont considérablement évolué.

Tout d'abord, la protection des investisseurs passe désormais moins par le contrôle des émetteurs que par celui des intermédiaires (établissements de crédit, entreprises d'investissement, organismes de placement collectif) qui s'exerce aussi bien sur les marchés réglementés que sur les marchés de gré à gré. L'information financière, autrefois distribuée avec parcimonie par des sociétés soucieuses avant tout de confidentialité, est aujourd'hui devenue surabondante et, dans une certaine mesure inutile, du fait de l'essor des organismes de placement collectif dont l'utilité est, précisément, de permettre de gérer la surabondance d'informations.

Par ailleurs, la DSI a considérablement clarifié et harmonisé les catégories juridiques du droit financier, notamment, en introduisant la distinction fondamentale entre les marchés réglementés et ceux qui ne le sont pas.

Dès lors, la question pourrait se poser d'une disparition pure et simple de la notion d'APE, ne laissant plus subsister que la référence à la notion de marché réglementé. Sur ces marchés, les obligations d'information financière seraient renforcées et le contrôle de la COB maximum, alors que sur les autres marchés, obligations et contrôle pourraient être allégés.

Une telle évolution constituerait une simplification a priori séduisante. Mais elle introduirait un hiatus entre sociétés cotées et sociétés non cotées, alors qu'il semble au contraire important 31( * ) d'organiser un continuum juridique entre ces deux catégories de sociétés. En effet, si les contraintes imposées aux sociétés cotées étaient par trop importantes par rapport à celles pesant sur les sociétés non cotées, ces dernières n'auraient plus d'incitation à se faire coter. Les possibilités qu'ont les émetteurs d'arbitrer entre les différentes techniques de financement s'en trouveraient réduites et l'évolution naturelle des entreprises les plus dynamiques vers les marchés financiers serait entravée.

Or, précisément, la notion d'APE permet de répondre à cette préoccupation. En effet, elle permet de graduer la protection des investisseurs en introduisant un échelon intermédiaire entre le pur gré à gré et les marchés réglementés, surprotégés, mais auxquels n'ont accès que les grandes sociétés. Cette notion est donc toujours d'actualité.

Cependant, si la réforme proposée par le Gouvernement contient incontestablement des éléments positifs, elle recouvre également des zones d'ombre qu'il convient d'éclairer afin de se prononcer en connaissance des causes et des effets.

B. UNE RÉFORME IMPORTANTE MAIS COMPLEXE

La réforme proposée contient plusieurs améliorations, parmi lesquelles on relèvera la définition positive donnée de l'APE et celle du placement restreint.

Elle règle, pour l'avenir, le problème de l'APE passif, en attendant que le règlement de la COB apporte une solution à celui de la sortie de l'APE.

Par ailleurs, l'unification des prospectus d'information va incontestablement dans le bon sens et la délégalisation de certaines dispositions les concernant ne soulève plus de difficultés après que l'Assemblée nationale en a limité le champ.

Enfin, la question de l'appel public dissident est en partie résolue, dans un sens favorable aux actionnaires minoritaires, puisqu'il sera toujours possible à l'un d'entre eux d'obtenir que la société dont il est actionnaire passe sous le régime de l'APE, en organisant une plus grande diffusion des titres.

Néanmoins, plusieurs points appellent des observations plus détaillées.

1. Sur la définition de l'appel public à l'épargne

La nouvelle définition donnée par le présent article de l'APE réalise plusieurs changements de perspectives sur lesquels il semble nécessaire d'apporter quelques précisions.

a) L'utilité de dissocier le statut de l'opération d'APE de celui du statut de l'émetteur

Pour bien comprendre la portée du changement du point d'application de la définition, c'est à dire le passage d'une définition des " sociétés faisant appel public à l'épargne " à une définition de l' " appel public à l'épargne ", un bref retour en arrière s'impose.

Initialement, la loi de 1966 sur les sociétés commerciales, dont les dispositions doivent être lues avec l'article 1841 du code civil, ne prenait en compte que le statut des sociétés pouvant faire appel public à l'épargne :

- seules les sociétés commerciales peuvent faire appel public à l'épargne ;

- toutes les sociétés commerciales ne peuvent pas faire appel public à l'épargne 32( * ) ;

- celles d'entre elles qui le font, sont soumises à un certain nombre d'obligations permanentes, dont la plus significative est l'exigence renforcée en fonds propres.

Cette conception était sous-tendue par l'idée que la protection de l'épargne publique reposait avant tout sur la qualité des émetteurs habilités à solliciter cette épargne.

Cependant, dès 1967, l'ordonnance portant création de la COB prit en compte la notion d'opérations d'appel public à l'épargne, auxquelles elle attacha des obligations spécifiques, dont la plus importante est la note d'information soumise au visa de la COB. Il s'agit là d'une conception de la protection de l'épargne publique sensiblement différente de la précédente et selon laquelle les investisseurs peuvent prendre les risques, mais à condition d'en être informés.

Ainsi se trouvait établie une dissociation entre le statut de l'émetteur (les obligations permanentes) et celui de l'opération (les obligations ponctuelles).

Cette dissociation s'est trouvée renforcée, d'une part, par les directives européennes 33( * ) , qui ne prennent en compte que les " opérations " d'offre publique et, d'autre part, par le fait que le législateur a autorisé toute une série d'intervenants, autres que les sociétés commerciales, à faire appel public à l'épargne (OPCVM, SCPI, collectivités territoriales...).

Ce changement de perspective, resté sans traduction dans notre droit positif, avait engendré les insatisfactions que l'on sait (voir supra ) puisque, bien que toujours lié à la notion de sociétés commerciales, l'APE pouvait s'appliquer à des opérations que ces sociétés n'avaient pas l'intention de placer sous ce régime (APE dissident, APE passif).

La réforme proposée opère donc une clarification justifiée des notions en distinguant bien :

- le statut des opérations dont la définition est donnée, fort logiquement, dans l'ordonnance de 1967 ;

- et le statut des émetteurs, qui reste régi par les dispositions spécifiques les concernant (loi de 1966 sur les sociétés commerciales, loi de 1988 sur les OPCVM...).

Toutefois, d'un point de vue pratique, elle laisse inchangé le champ d'application de l'APE et tout au plus, peut-on considérer qu'elle ouvre la porte à un allégement des obligations permanentes pesant sur les émetteurs.

Il en va de même s'agissant de l'introduction de la notion d'instruments financiers dans la définition de l'APE.

b) L'utilité de la prise en compte des instruments financiers

Le passage d'une définition prenant en compte uniquement les titres émis par les sociétés, qu'il s'agisse des titres de créance ou de capital, à une définition portant sur les instruments financiers, fait entrer dans le champ de l'APE :

- les actions ou parts d'organismes de placement collectif (SICAV et FCP) ;

- les instruments financiers à terme ;

- les titres de créances négociables, émis par des personnes autres que les sociétés commerciales (bons du trésor et effets publics à court terme).

Ce changement de perspective est lui aussi, sans grande réelle portée pratique.

En effet, les OPCVM sont déjà soumis à la réglementation de l'APE du fait du critère quantitatif - et obéissent de surcroît à une réglementation spécifique, plus contraignante que pour les sociétés commerciales.

Concernant les instruments financiers à terme, la notion d'appel public n'a à vrai dire pas de sens (ceux d'entre eux qui sont cotés ne sont en général pas émis par des sociétés commerciales et les autres, par exemple les swaps de devises, ne concernent que des opérations entre professionnels) ; de surcroît ils font l'objet d'une réglementation spécifique (loi financière et loi de 1885 sur les marchés à terme).

Enfin, les titres de créance négociables font déjà l'objet d'une réglementation spécifique.

Il s'agit donc là encore d'une clarification conceptuelle, sans grande portée pratique. Tout au plus, ce changement de perspective aura une importance dans la perspective de la cotation des parts ou actions d'OPCVM, à l'instar de ce qui existe déjà en matière de fonds communs de créance.

c) Le passage d'une conception quantitative à une conception qualitative de l'APE et les relations entre l'APE et le placement restreint

La prise en compte par la COB d'un seuil permettant de distinguer les opérations d'appel public à l'épargne, des autres opérations, avait sans aucun doute le mérite de la simplicité. Mais il était de nature à introduire une confusion sur les justifications du contrôle, confusion dont le présent article garde encore la trace.

En effet, ce n'est pas parce que les investisseurs sont en nombre " restreint " qu'ils ne justifient pas d'une protection particulière ; mais parce que ce nombre " restreint " est considéré comme étant un bon indicateur de leur proximité avec l'émetteur et donc de leur connaissance des risques qui entourent l'opération à laquelle ils participent.

Dès lors, il apparaît beaucoup plus satisfaisant de prendre directement en compte, comme critère de l'APE, la qualité de ces investisseurs soit qu'ils aient une compétence professionnelle avérée (placement privé), soit qu'ils connaissent personnellement l'émetteur (cercle restreint).

Dans cette optique, le placement restreint ne s'oppose pas à la notion de placement public, mais en constitue une sorte d'exception, comme le montre le schéma ci-dessous.



L'articulation de ces notions serait donc la suivante :

- le principe est celui de la liberté pour les opérations de pur gré à gré ;

- les opérations d'APE sont soumises à une réglementation spécifique en termes d'information financière ;

- toutefois, lorsqu'elles s'adressent à des investisseurs qui ont la compétence nécessaire pour juger des risques inhérents à l'opération ou qui sont suffisamment proches des actionnaires ou des dirigeants de la société émettrice pour disposer d'une information suffisante, les règles spécifiques de l'APE ne s'appliquent pas.

d) L'absence de réforme du démarchage

Enfin, il convient de souligner que la nouvelle définition de l'APE continuera toujours de souffrir d'imprécision tant que la notion de démarchage financier , qui est un de ses éléments constitutifs, ne sera pas mieux définie 34( * ) .

Comme le souligne, à juste titre, le rapporteur général de l'Assemblée nationale, M. Didier Migaud, : " le présent article est l'occasion d'affirmer, une fois de plus, la nécessité de réformer le cadre du démarchage financier, qui est régi par des textes anciens, et qui impose des règles différentes selon les secteurs d'activité, le statut des intervenants, et les techniques de commercialisation dont les plus modernes ne sont pas prises en compte. La réforme du démarchage financier, véritable " serpent de mer " depuis plusieurs années, reste d'actualité. "

A cet égard, il convient de rappeler que la Commission des finances du Sénat, dans son rapport n° 340 du 28 juin 1995 sur la proposition de loi n° 225 du 19 janvier 1995 relative à l'activité et au contrôle des entreprises d'investissement et portant transposition de la DSI, avait proposé un ensemble de dispositions législatives (onze articles) portant réforme du démarchage financier, mais que ces dispositions n'avaient pas finalement été retenue dans la loi financière, le Gouvernement préférant approfondir la concertation de place sur ce sujet, approfondissement visiblement toujours en cours nonobstant l'empilement des rapports sur la question.

Cette réforme n'est pas dirimante pour ce qui concerne la frontière entre les opérations de placement restreint et celles d'appel public à l'épargne, mais elle semble nécessaire pour établir avec suffisamment de précision la frontière entre ces dernières et les opérations de pur gré à gré.

2. Sur la notion de placement restreint

Même si l'on doit saluer l'apparition de la notion " d'investisseurs qualifiés ", à côté de celle de " cercle restreint d'investisseurs ", qui constitue effectivement une nouvelle zone de liberté, force est de constater que la définition de ces deux nouveaux concepts juridiques peut être améliorée.

a) La notion d'investisseurs qualifiés

On observera tout d'abord que la définition donnée est, en partie, tautologique, ou plus exactement téléologique. En effet, définir les investisseurs qualifiés comme étant ceux qui disposent " des compétences et des moyens (leur) permettant de réaliser des transactions sur instruments financiers sans bénéficier de la protection conférée (par la loi) " revient à confondre la cause et les effets. C'est précisément pour ne pas faire bénéficier certains investisseurs de la protection accordée par la loi, que le législateur a recours à la notion d'investisseurs qualifiés.

Ceci étant, et selon les informations fournies à votre rapporteur, cette catégorie des investisseurs qualifiés est susceptible de recouvrir deux sous-catégories :

- les investisseurs professionnels , qui exercent un métier en relation directe avec les services d'investissement et qui disposent pour ce faire d'un agrément délivré par les pouvoirs publics. Il s'agit essentiellement des établissements de crédit, des entreprises d'investissement et des entreprises d'assurance. Entrent également dans cette catégorie, les institutions sui generis comme la Banque de France, le Trésor public, les Services financiers de La Poste ou la Caisse des dépôts et consignations ;

- les investisseurs quasi professionnels , qui tout en n'étant pas titulaires d'un agrément en relation avec les services d'investissement, disposent néanmoins de la compétence et des moyens nécessaires pour appréhender les risques inhérents aux opérations financières. Sont susceptibles d'entrer dans cette catégorie les grandes entreprises, cotées ou non cotées, qui disposent de services financiers et juridiques étoffés, mais aussi les caisses autonomes de Sécurité sociale et les mutuelles du code de la mutualité.

b) La notion de cercles restreints d'investisseurs

La rédaction proposée par l'Assemblée nationale est sans aucun doute plus précise que celle du Gouvernement et permet de régler le problème de l'APE passif. Néanmoins, elle est de nature à introduire la confusion, en laissant penser que coexistent une notion quantitative - le cercle restreint - et une notion qualitative - l'investisseur proche - alors qu'en réalité, il s'agit toujours d'appréhender la même réalité : les investisseurs proches de l'entreprise et que le seuil ne sert qu'à présumer de la proximité afin de rendre la loi plus facilement applicable.

En outre, la rédaction proposée par l'Assemblée nationale, après avoir défini la notion de cercle restreint, renvoie à un règlement de la COB le soin de " définir (...) le cercle restreint d'investisseurs ". Cette redondance des définitions est révélatrice d'une confusion des techniques normatives :

- soit il est possible de donner une définition opératoire de l'investisseur proche, et auquel cas il convient de l'inscrire dans la loi, sauf à donner à la COB, la maîtrise de sa compétence ;

- soit au contraire, une telle définition est trop difficile à donner et dans ce cas, il convient de se contenter de poser le standard dans la loi et de laisser au juge (ou à la COB, mais en renvoyant à son pouvoir de décision et non pas à son pouvoir de réglementation) le soin de la préciser au cas par cas.

Assigner à la COB la responsabilité de définir la notion d'investisseur proche revient donc soit à lui confier une mission impossible, soit à dessaisir le législateur de façon injustifiée.

c) Les relations entre les deux notions

Deux questions se posent de ce point de vue :

- faut-il intégrer les investisseurs qualifiés dans le décompte du cercle restreint ?

- la définition d'un seuil pour le cercle restreint ne rend-elle pas inutile le recours à la notion d'investisseurs qualifiés ?

S'il est possible de répondre par la négative à la seconde question (on peut en effet imaginer des marchés réglementés réservés aux seuls investisseurs qualifiés), en revanche, il est impossible d'apporter une réponse à la première question. Il serait donc souhaitable de rendre la loi plus claire sur ce point.

Ces diverses observations conduisent votre commission à vous présenter plusieurs modifications du texte proposé, afin de préciser les notions d'investisseurs qualifiés et de cercle restreint.

Par ailleurs, il semblerait souhaitable, en tout état de cause, d'écarter du démarchage l'application aux opérations réalisées entre investisseurs qualifiés.

Décision de votre commission : votre commission vous propose de modifier le présent article.

ARTICLE 26

Passage à l'euro de la comptabilité des organismes de placement collectif en valeurs mobilières

Commentaire : le présent article tend à faciliter l'adaptation de la comptabilité des organismes de placement collectif en valeurs mobilières, et notamment celle des fonds communs de placement, à la monnaie unique.

L'ensemble des marchés financiers français basculeront à l'euro dès le début de la troisième phase de l'Union économique et monétaire, soit, en pratique, le 4 janvier 1999.

Ce passage rapide à l'euro, souhaité par les professionnels, aura des répercussions importantes sur les organismes de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM), puisque ceux-ci sont eux-mêmes composés d'un ensemble d'instruments financiers (actions, obligations, titres de créances...).

Ainsi, l'essentiel des titres détenus par les OPCVM seront libellés en euros à partir du 4 janvier 1999.

Dès lors, la question se pose de savoir si les parts ou actions d'OPCVM seront elles-mêmes libellées en euros.

A vrai dire, la question ne se pose pas pour les OPCVM dont la comptabilité est actuellement tenue en francs. Pour ceux-là, conserver une comptabilité en francs alors que les actifs sous-jacents sont libellés en euros imposerait un nombre considérable de conversions, entraînerait des coûts de gestion considérables et se heurterait de fait à de grandes difficultés.

En revanche, cette question se pose pour les OPCVM qui, conformément à l'article 32 de la loi n° 88-1201 du 23 décembre 1988 35( * ) ont établi leur comptabilité dans une monnaie autre que le franc et qui devront modifier leurs statuts (pour les SICAV) ou leur règlement (pour les FCP) s'ils souhaitent changer d'unité monétaire.

S'agissant des SICAV , ces modifications ne soulèvent guère de difficulté. Ce sont, en effet, des sociétés commerciales régies par la loi de 1966, et le changement d'unité monétaire relèvera de la volonté des seuls actionnaires, réunis en assemblée générale.

En revanche, s'agissant des fonds communs de placement , la modification du règlement peut se heurter à des difficultés plus sérieuses.

Selon l'article 11 de la loi du 23 décembre 1988, ils sont constitués à l'initiative conjointe d'une société de gestion ou de gestion de portefeuille, et d'une personne morale, dépositaire des actifs du fonds. Le règlement du fonds est ensuite soumis à l'approbation de la Commission des opérations de bourse (COB).

C'est pourquoi, afin de rendre le choix de l'unité monétaire plus facile dans le cas des FCP, le présent article prévoit, par dérogation au droit commun, de donner aux sociétés de gestion de tels fonds, et à elles seules, le pouvoir de modifier unilatéralement le règlement afin de décider si les documents comptables seront ou non établis en euros.

L'Assemblée nationale a adopté un amendement étendant aux fonds communs de créances les dispositions proposées par le présent article.

On remarquera que la rédaction proposée ouvre deux possibilités aux sociétés de gestion. Soit le nouveau règlement mentionnera expressément l'euro comme l'unité utilisée pour la comptabilité du fonds, soit aucune référence ne sera faite à une unité monétaire donnée, ce qui permettra bien évidemment d'utiliser l'euro à la suite d'une simple décision de gestion.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter le présent article sans modification.

ARTICLE 27

Création des organismes de placement collectif
en valeurs mobilières à compartiments

Commentaire : le présent article propose la création des organismes de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM) à " compartiments ".

I. LA SITUATION ACTUELLE


Un OPCVM à " compartiments " regroupe, au sein d'une même structure juridique, deux ou plusieurs catégories (" compartiments ") d'actifs homogènes obéissant à des profils de gestion différents. Son principal intérêt est d'offrir aux investisseurs la possibilité de modifier la structure de leur patrimoine sans avoir à effectuer des cessions et des souscriptions, ce qui permet de réduire les coûts financiers liés à de telles opérations (droits d'entrée et de sortie).

L'absence de la catégorie des OPCVM à compartiments constitue une lacune dans le droit français.

A. LE RETARD FRANÇAIS

Cette catégorie d'instruments financiers est couramment utilisée à l'étranger, notamment au Royaume-Uni, en Belgique, au Luxembourg et en Irlande.

Or, une application stricte du principe d'unicité du patrimoine fait obstacle à la mise en place de tels OPCVM dans le droit français.

Cette situation est préjudiciable à notre industrie de la gestion pourtant florissante puisqu'elle est la deuxième du monde.

Cette restriction apparaît d'autant moins justifiée qu'il est possible aux épargnants français d'avoir accès à ce type d'instruments grâce à la libre commercialisation des OPCVM répondant à des critères définis par la directive européenne de coordination de 1985 (de tels OPCVM sont alors dits " coordonnables "). Aujourd'hui, plus de 80% (65 sur 75) des OPCVM étrangers européens commercialisés en France sont des OPCVM à compartiments.

De plus, cette restriction aboutit à des manoeuvres de contournement de la part de nombreux établissements français qui ont établi des OPCVM de ce type au Luxembourg, afin de les proposer à leurs clients français.

Il est donc souhaitable de mettre le droit en harmonie avec la pratique et de permettre ainsi à notre industrie d'affronter, en toute clarté, la concurrence européenne.

B. UNE ADAPTATION LÉGISLATIVE NÉCESSAIRE

La mise en place de l'euro se traduira inéluctablement par un accroissement des pressions concurrentielles qui concernera au premier chef l'industrie de la gestion financière. En effet, en ce domaine, la concurrence sera d'autant plus vive que le " passeport européen " existe depuis longtemps.

Or, l'industrie de la gestion collective est génératrice d'emplois à haute valeur ajoutée. En outre, elle permet d'exercer une influence sur les entreprises qui font appel aux marchés de capitaux 36( * ) . Il est donc important, afin de renforcer la compétitivité de cette industrie en France, de lui permettre d'être à armes égales avec ses concurrentes.

Pour l'investisseur, cette évolution sera synonyme d'un choix plus large de produits financiers et, surtout, d'une diminution des frais de gestion.

II. LE PROJET DU GOUVERNEMENT

Le présent article insère un chapitre V bis dans la loi n° 88-1201 du 23 décembre 1988 relative aux OPCVM, destiné à asseoir le régime juridique de ces nouveaux OPCVM et à les soumettre au contrôle de la COB.

A. LE RÉGIME JURIDIQUE

Le régime juridique des OPCVM à compartiments se caractérise par le souci de traier chaque compartiment comme une entité autonome.

Le paragraphe I définit la notion d'OPCVM à compartiments. La création de compartiments devra être prévue par les statuts ou le règlement de l'OPCVM. A cet égard, il convient de relever l'absence de plafond légal ou réglementaire au nombre de compartiments.

En vertu d'un principe d'unité " économique ", chaque compartiment donnera lieu à l'émission d'actions ou de parts représentatives d'une et d'une seule catégorie des actifs de l'OPCVM. Par exemple, un OPCVM spécialisé dans les actions pourra contenir un compartiment spécifique pour les actions françaises, un deuxième pour les actions européennes, un troisième pour les actions asiatiques, etc. Ainsi sera préservée l'homogénéité des actifs au sein de chaque compartiment.

En vertu d'un principe d'unité " juridique ", il est prévu que les compartiments des OPCVM spécialisés 37( * ) ainsi que ceux des OPCVM bénéficiant d'une procédure allégée 38( * ) , devront être soumis individuellement aux dispositions spécifiques qui régissent ces OPCVM. Ainsi, la création d'un compartiment ne pourra pas être l'occasion de contourner les obligations qui pèsent sur l'OPCVM.

Dans un souci de transparence, le paragraphe II prévoit que chaque compartiment devra faire l'objet d'une comptabilité distincte au sein de la comptabilité de l'OPCVM. Cette comptabilité pourra, au demeurant, être tenue en unités monétaires différentes du franc français ou de l'euro.

On observera que le régime fiscal de ces nouveaux instruments ne fait l'objet d'aucune disposition du présent article. Aucune exonération fiscale n'étant prévue, la cession de valeurs ou de droits représentatifs des parts ou actions de l'OPCVM affectés à chaque compartiment (c'est-à-dire y compris en cas de mouvements entre compartiments) sera imposée au titre des plus-values de cession de valeurs mobilières et de droits sociaux.

En liaison avec une autre innovation du présent projet de loi, le paragraphe III prévoit qu'un compartiment pourra être nourricier 39( * ) d'un autre OPCVM, sans que l'OPCVM auquel le compartiment appartient soit lui-même nourricier.

B. LE CONTRÔLE DE LA COB

La Commission des opérations de bourse (COB) bénéficie d'un "bloc de compétence" en matière de gestion pour le compte de tiers, consacré par la loi financière du 2 juillet 1996.

Dans ses paragraphes I et IV , le présent article attribue compétence à la COB pour :

- délivrer l'agrément nécessaire à la constitution, la transformation, la fusion, la scission et la liquidation des compartiments ;

- définir les conditions de délivrance de cet agrément ;

- déterminer la valeur liquidative de chaque catégorie d'actions ou de parts, laquelle doit être calculée en fonction de la valeur nette des actifs du compartiment.

A chaque changement affectant les compartiments d'un OPCVM à compartiments multiples, la COB effectuera des contrôles identiques à ceux qu'elle exerce aujourd'hui à l'égard des OPCVM eux-mêmes. La création de ce type d'instrument ne se traduira donc pas par un allégement des contrôles.

L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 28

Création d'OPCVM bénéficiant d'une procédure allégée

Commentaire : le présent article propose la création d'organismes de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM) bénéficiant d'une procédure allégée dont la souscription serait réservée aux investisseurs avertis.

I. LA SITUATION ACTUELLE


L'existence aux Etats-Unis, en Australie et en Irlande de catégories particulières d'OPCVM réservées à des professionnels avertis, c'est-à-dire aptes à apprécier la nature des engagements et des risques qu'ils prennent, permet d'alléger les contraintes applicables à ces OPCVM et par conséquent d'en réduire les coûts de gestion.

En France, jusqu'à présent, le législateur n'a pas estimé opportun d'établir de distinction entre les OPCVM destinés au grand public et ceux réservés à des investisseurs qualifiés.

Néanmoins, le règlement de la Commission des opérations de bourse (COB) reconnaît une catégorie d' "OPCVM non offerts au public" qui permet une accélération des procédures d'agrément et un assouplissement des obligations d'information.

Cette possibilité s'exerce sous conditions strictes garantissant un accès réservé aux investisseurs avertis :

- le nombre de souscripteurs doit être inférieur ou égal à 20 ;

- la souscription initiale doit être supérieure à 1 million de francs ;

- aucune publicité auprès du public ne peut être faite.

Le présent article prévoit d'assouplir ces conditions, tout en leur donnant une base légale, afin de permettre à l'industrie française de la gestion collective d'affronter dans de bonnes conditions la concurrence européenne.

II. LE PROJET DU GOUVERNEMENT

Le présent article insère un chapitre V ter dans la loi n° 88-1201 du 23 décembre 1988 relative aux OPCVM.

A. LES CONDITIONS D'ENTRÉE

Afin de réserver l'accès de ces OPCVM à des investisseurs avertis, le paragraphe I prévoit que :

- seuls pourront souscrire des parts ou acheter des actions d'un OPCVM bénéficiant d'une procédure allégée, des investisseurs qualifiés au sens de l'article 6 de l'ordonnance du 29 septembre 1967 instituant une Commission des opérations de bourse (COB) 40( * ) , lorsque la valeur de la part ou de l'action émise ou souscrite sera inférieure à un seuil défini par la COB 41( * ) . Toutefois, lorsque la valeur de la part ou de l'action émise ou souscrite sera supérieure à ce seuil, tout investisseur sera réputé averti et pourra donc souscrire des parts ou acheter des actions d'un OPCVM bénéficiant d'une procédure allégée ;

- l'investisseur devra être informé de la nature particulière de l'OPCVM et donner acte de cette connaissance au dépositaire de l'OPCVM.

B. LA PROCÉDURE ALLÉGÉE

Plusieurs assouplissements sont prévus. Ils concernent :

1. La notification à la COB

Le paragraphe II
prévoit de substituer, pour la constitution, la transformation, la fusion, la scission ou la liquidation de l'OPCVM bénéficiant d'une procédure allégée, un régime de simple notification à la Commission des opérations de bourse (COB) dans le délai d'un mois, au régime de l'agrément préalable auquel sont soumis les autres OPCVM. La COB fixera par voie réglementaire les modalités de ce régime déclaratif ainsi que les conditions dans lesquelles les investisseurs qualifiés pourront souscrire, céder ou racheter des parts ou des actions.

2. La composition de l'actif

Le paragraphe III prévoit que les conditions dans lesquelles les OPCVM bénéficiant d'une procédure allégée peuvent déroger aux obligations en matière de composition d'actif seront précisées par décret en Conseil d'Etat. D'après les informations fournies à votre rapporteur, il devrait leur être permis de détenir jusqu'à 50 % de leur actif en parts ou actions d'un même émetteur (au lieu de 5 % en règle générale).

3. Les opérations d'achat ou de vente à terme

Aux termes du paragraphe III , les statuts de ces OPCVM pourront prévoir des possibilités élargies d'effectuer des opérations d'achat ou de vente d'instruments financiers à terme.

Il convient d'observer qu'en raison des risques qu'ils comportent, ces OPCVM ne rempliront plus les critères posés par la directive européenne de 1985 et ne pourront donc pas être librement commercialisés dans les Etats membres de l'Union européenne (ils ne seront pas " coordonnables ").

III. LES MODIFICATIONS APPORTEES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'Assemblée Nationale a apporté deux modifications au projet du Gouvernement.

D'une part, elle a prévu de remplacer la référence à la "valeur de la part ou de l'action émise ou souscrite" par le "montant initialement investi" 42( * ) . Cette modification terminologique permet de donner plus de souplesse de gestion aux OPCVM bénéficiant d'une procédure allégée et aux investisseurs.

D'autre part, elle a renforcé les obligations de contrôle du dépositaire (ou de toute personne désignée par les statuts ou le règlement) qui devra s'assurer que l'acquéreur ou le souscripteur est bien un investisseur qualifié ou qu'il a bien investi initialement un montant supérieur au seuil fixé par la COB.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 29

Création des organismes de placement collectif en valeurs mobilières maîtres et nourriciers

Commentaire : le présent article propose la création d'organismes de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM) maîtres et nourriciers.

I. LA SITUATION ACTUELLE


Un " OPCVM nourricier " est celui dont les statuts prévoient qu'il peut investir la totalité de son actif en parts ou actions d'un autre OPCVM, dit " OPCVM maître ".

Cette pratique plus connue sous la dénomination de " fonds de fonds " existe déjà aux Etats-Unis et en Irlande.

En France, la loi n° 88-1201 du 23 décembre 1988 relative aux OPCVM fait obstacle au développement de tels instruments financiers, dans la mesure où elle prévoit qu'un OPCVM :

- ne peut détenir plus de 5 % de son actif en actions ou en parts d'autres OPCVM ;

- ni détenir plus de 5 % de son actif en titres d'un même émetteur.

De plus, la directive européenne n° 85/611 du 20 décembre 1985 sur la reconnaissance mutuelle des OPCVM pose le principe de l'interdiction, pour un OPCVM souhaitant être coordonné (c'est-à-dire librement commercialisé dans l'Union européenne), de détenir plus de 5 % de ses actifs en parts d'autres OPCVM. Toutefois, cette directive de 1985 est en cours de modification afin de permettre le dépassement de ces seuils et la possibilité de créer, précisément, des fonds de fonds.

Le présent article, anticipant sur cette révision du droit européen, propose d'assouplir le régime juridique actuel, afin de donner à notre industrie de la gestion collective la possibilité de se battre à armes égales avec ses concurrentes. En effet, l'introduction de l'euro sera à l'origine d'une intensification de la concurrence sur le marché européen de la gestion collective.

II. LE PROJET DU GOUVERNEMENT

Le présent article propose d'insérer un chapitre V quater dans la loi n° 88-1201 du 23 décembre 1988 relative aux OPCVM.

On peut distinguer les dispositions s'appliquant aux OPCVM nourriciers et celles s'appliquant aux OPCVM maîtres.

A. DISPOSITIONS RELATIVES AUX OPCVM NOURRICIERS

Selon le paragraphe I , un OPCVM " nourricier " est un OPCVM dont les statuts ou le règlement peuvent prévoir, dans les conditions fixées par un règlement de la Commission des opérations de bourse (COB), que l'actif est investi en totalité en actions ou parts d'un seul OPCVM, dit " maître ", avec toutefois la possibilité de détenir des liquidités à titre accessoire.

Par ailleurs, on rappelle qu'en application du paragraphe III de l'article 27, un compartiment d'un OPCVM à compartiments pourra être nourricier d'un autre OPCVM maître.

B. DISPOSITIONS RELATIVES AUX OPCVM MAÎTRES

L'encadrement auquel sont soumis les OPCVM maîtres se justifie par le souci de garantir la transparence de leur gestion dans un contexte fortement marqué par l'internationalisation des placements : les fonds nourriciers peuvent se situer dans différents Etats qui ne sont pas forcément celui d'implantation du fonds maître.

Les conditions relatives aux OPCVM maîtres varient selon qu'ils sont commercialisés en France ou dans un autre Etat membre de l'Union européenne.

1. OPCVM commercialisés en France

Le paragraphe II prévoit que les OPCVM relevant de toutes les catégories prévues dans la loi de 1988 pourront être OPCVM maîtres. Il pourra ainsi s'agir :

- d'un OPCVM de droit commun,

- d'un OPCVM spécialisé (fonds communs de placement à risques, fonds communs de placement dans l'innovation, fonds communs d'intervention sur les marchés à terme),

- d'un OPCVM bénéficiant d'une procédure allégée (nouvelle catégorie introduite par l'article 28 du présent projet de loi).

Il faut toutefois remarquer que, par souci de transparence, il est prévu que les obligations propres des OPCVM maîtres se transmettront aux OPCVM nourriciers.

Toujours par souci de transparence, des échanges d'informations entre les dépositaires et les commissaires aux comptes de l'OPCVM maître et l'OPCVM nourricier devront être prévus.

2. OPCVM commercialisés dans un autre Etat-membre de l'Union européenne

Le paragraphe II prévoit quatre conditions simultanées pour qu'un OPCVM commercialisé dans un autre Etat membre de l'Union européenne puisse recueillir des fonds nourriciers français :

1- respecter les principes qui permettent d'être coordonné au sens de la directive européenne de 1985 relative à la reconnaissance mutuelle des OPCVM ;

2- relever d'un Etat qui prévoit les mêmes facilités pour les OPCVM français (principe de réciprocité) ;

3- permettre des échanges d'information entre les dépositaires et les commissaires aux comptes du fonds maître et du fonds nourricier dans le cadre de leurs missions ;

4- conclure un accord d'échange d'informations et d'assistance entre la COB et son homologue en matière d'OPCVM dans l'Etat d'implantation du fonds maître.

L'Assemblée nationale a adopté l'article 29 avec deux amendements : l'un de correction d'une erreur de référence, l'autre de coordination.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE ADDITIONNEL APRES L'ARTICLE 29

Régime fiscal des transactions sur titres et des contrats d'échange
réalisés par les entreprises d'investissement

Commentaire : votre commission vous propose d'insérer le présent article additionnel afin d'aligner le régime fiscal des entreprises d'investissement sur celui des établissements de crédit pour les transactions sur titres et les contrats d'échange de taux d'intérêt ou de devises .

Pour permettre des évaluation à la valeur de marché, le législateur a jugé utile de prévoir un régime fiscal spécifique pour les transactions sur titres et les contrats d'échange de taux d'intérêt ou de devises conclus par les établissements de crédit et les maisons de titres.

En revanche, lorsqu'elles sont réalisées par une entreprise d'investissement définie par la loi financière du 2 juillet 1996, ces mêmes opérations relèvent de la fiscalité de droit commun.

Cette situation, outre qu'elle introduit des distorsions de concurrence non justifiées, est en contradiction avec les orientations générales de la loi financière dont l'un des principaux apports a été précisément de faire prévaloir, chaque fois que cela était possible, le principe selon lequel un même métier doit être exercé selon les mêmes règles et sous le contrôle des mêmes autorités.

En outre, on observera que les maisons de titres qui relevaient toutes du régime fiscal précité, ont perdu leur statut particulier le 1 er janvier dernier pour devenir soit établissement de crédit, soit entreprises d'investissement. En l'absence d'intervention législative, celles d'entre elles qui ont opté pour le statut d'entreprise d'investissement se trouvent donc exclues du régime fiscal dont elles bénéficiaient auparavant, sans que leur activité ait pour autant changé de nature.

C'est pourquoi le présent article, vous propose d'étendre ce régime fiscal spécifique aux entreprises d'investissement. Il convient de souligner que l'aménagement proposé ne représente pas un coût budgétaire significatif.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter le présent article additionnel.

ARTICLE ADDITIONNEL APRES L'ARTICLE 29

Régime juridique des bons d'options et des warrants

Commentaire : votre commission vous propose d'insérer le présent article additionnel afin d'assouplir les contraintes relatives à l'émission des bons d'options et des warrants.

Le paragraphe 1° du II de l'article 42 de la loi financière du 2 juillet 1996 impose qu'un émetteur souhaitant faire coter un warrant sur actions à Paris obtienne préalablement l'accord exprès de l'émetteur du sous-jacent.

L'application de cette règle conduit un nombre croissant d'intermédiaires financiers à ne plus demander la cotation de warrants sur valeurs étrangères à Paris. Nombre de sociétés étrangères hésitent en effet à donner l'accord formel qui leur est demandé, interprétant cette demande comme une crainte du régulateur français quant à la réputation de la banque émettrice.

L'extension d'une telle pratique a des conséquences dommageables pour le développement de la place financière de Paris, les autres places européennes disposant à cet égard d'une législation moins contraignante. Elles bénéficient donc d'un avantage compétitif qui ne pourra qu'être renforcé après le 1 er janvier 1999.

C'est pourquoi, il semble opportun d'assouplir quelque peu les dispositions actuelles.

Le présent article propose de prévoir un droit d'opposition de l'émetteur de l'instrument sous-jacent, plutôt qu'un accord de sa part. En effet, dans bien des cas, lorsque l'émetteur de l'instrument sous-jacent est étranger, il est extrêmement difficile d'obtenir un accord exprès de sa part. Un droit d'opposition, qui peut être enfermé dans un délai relativement bref, apparaît donc plus simple, tout en préservant les droits de l'émetteur de l'instrument sous-jacent. En outre, dans le cas particulier des indices, il semble inopportun de prévoir un accord ou même un droit d'opposition des émetteurs des instruments sous-jacents.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter le présent article additionnel.

ARTICLE ADDITIONNEL APRES L'ARTICLE 29

Responsabilité des dépositaires et des gestionnaires pour compte de tiers

Commentaire : votre commission vous propose d'insérer le présent article additionnel afin de préciser les responsabilités respectives des dépositaires et des gestionnaires pour compte de tiers.

En matière de gestion collective, le partage des responsabilités du dépositaire et du gestionnaire n'est pas établi de façon très précise. L'article 15 de loi du 23 décembre 1988 relative aux organismes de placement collectif en valeurs mobilières prévoit en effet qu'ils sont responsables " individuellement ou solidairement, selon les cas ", des infractions aux dispositions législatives ou réglementaires applicables aux fonds communs de placement, ainsi que des actes pris en violation du règlement du fonds.

Il apparaît au contraire souhaitable de mieux circonscrire cette responsabilité par rapport à leur mission respective et ce afin d'éviter tout engagement de la responsabilité de l'une des parties pour des fautes commises exclusivement par une autre partie.

A cet effet, le présent article additionnel propose :

- de préciser aux articles 3 et 13 de la loi du 23 décembre 1988 précitée les conditions de mise en oeuvre de la responsabilité du dépositaire par rapport à sa mission ;

- de supprimer à l'article 11 de la même loi, la condition selon laquelle le fonds commun de placement est constitué à l'initiative conjointe d'une société de gestion et d'un dépositaire. En pratique, l'initiative est le plus souvent prise par la société de gestion. La suppression de cette condition permettra d'affirmer l'autonomie de la gestion pour compte de tiers ;

- de modifier l'article 15 de la même loi car le dépositaire n'a pas être considéré comme solidairement responsable des infractions et fautes de la société de gestion. Il est responsable uniquement s'il a failli à sa propre mission ;

- de préciser à l'article 24 que le dépositaire, dans l'exercice de sa mission, peut échanger avec les commissaires aux comptes tous renseignements utiles. L'assouplissement de la règle du secret professionnel permettrait aux deux intervenants de coopérer plus efficacement dans l'intérêt des porteurs ou actionnaires d'OPCVM.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter le présent article additionnel.

ARTICLE ADDITIONNEL APRES L'ARTICLE 29

Instauration d'une période transitoire permettant aux OPCVM
concernés de remplir les obligations prévues par
l'article 8 de la loi de finances pour 1998

Commentaire : votre commission vous propose d'insérer le présent article additionnel afin d'instaurer une période transitoire dans le cadre de l'article 8 de la loi de finances pour 1998 relatif à l'imposition, au titre de chaque exercice, des écarts des valeurs liquidatives des titres d'OPCVM, détenus par les entreprises soumises à l'impôt sur les sociétés, à l'exclusion notamment des titres d'OPCVM " actions ".

L'article 8 de la loi de finances pour 1998 étend l'application des dispositions de l'article 209 OA du code général des impôts aux entreprises régies par le code des assurances qui en étaient initialement exclues, à l'exception des entreprises qui exercent majoritairement leur activité dans le secteur de l'assurance vie ou dans le secteur de la capitalisation.

Ces dispositions prévoient l'imposition, au titre de chaque exercice, des écarts des valeurs liquidatives des titres d'OPCVM détenus par les entreprises soumises à l'impôt sur les sociétés, à l'exclusion notamment des titres d'OPCVM " actions ".

Ces derniers sont définis en l'espèce comme ceux dont la valeur réelle de l'actif est représentée de façon constante pour 90 % au moins par des actions, des certificats d'investissement et des certificats coopératifs d'investissement émis par des sociétés ayant leur siège dans la Communauté européenne.

I - L'EXISTENCE D'UNE PERIODE TRANSITOIRE DANS LE TEXTE D'ORIGINE

Les dispositions de l'article 209 OA ont été instituées par la loi de finances pour 1993 et concernaient initialement l'ensemble des entreprises soumises à l'impôt sur les sociétés hormis les sociétés relevant du code des assurances. Dans le texte d'origine, une période transitoire avait été instaurée afin de permettre aux OPCVM principalement investis en actions qui ne respectaient pas le ratio de 90 % de s'adapter aux nouvelles dispositions. Les gestionnaires ont ainsi pu disposer d'une période d'un an expirant le 31 décembre 1993 pour modifier la composition du portefeuille desdits OPCVM, permettant ainsi aux entreprises qui détenaient des titres d'OPCVM principalement investis en actions de se dispenser de prendre en compte dans le résultat du premier exercice d'application l'écart de valeur liquidative constaté sur ces titres. Une instruction du 26 mars 1993 a défini les modalités pratiques d'application de cette période transitoire.

Cette période transitoire avait permis une adaptation des OPCVM sans perturber les marchés financiers par des mouvements d'achat et de vente intempestifs motivés exclusivement par des considérations fiscales.

II. LES CONSEQUENCES DE L'ABSENCE DE PERIODE TRANSITOIRE POUR RESPECTER LES DISPOSITIONS DE L'ARTICLE 8 DE LA LOI DE FINANCES POUR 1998

L'article 8 de la loi de finances pour 1998, qui étend les dispositions de l'article 209 OA aux compagnies d'assurance de dommages, n'introduit aucune période transitoire. L'absence de toute période transitoire emporterait pourtant des conséquences dommageables pour les gestionnaires.

En l'état actuel du texte d'application que constitue l'instruction du 26 mars 1993, un OPCVM qui ne serait pas, au premier jour d'application des dispositions, investi pour au moins 90 % en actions de sociétés françaises ou européennes, entrerait en effet définitivement dans le champ d'application de l'article 209 OA, sans pouvoir prétendre bénéficier ultérieurement de l'exonération, alors même que la composition de son portefeuille viendrait à respecter le ratio.

A ce jour, les gestionnaires n'ont donc d'autre solution que de proposer à leurs clients institutionnels de transférer leur portefeuille vers de nouveaux OPCVM conformes à la loi fiscale. De tels mouvements entraîneraient pourtant des difficultés pour le gestionnaire, sans commune mesure avec l'objectif recherché. En effet :

- le gestionnaire de l'OPCVM "délaissé" devrait faire face à la fois à la sortie massive des souscripteurs et à l'obligation qui lui est faite de respecter néanmoins les contraintes imposées par la réglementation : répartition des risques et procédure spécifique applicable en cas de diminution de l'actif net en-dessous du minimum prévu (événement qui entraîne la suspension des rachats et, à terme, la liquidation de l'OPCVM) ;

- les transferts d'un OPCVM à l'autre sont coûteux car ils supposent un nombre important de transactions à l'occasion desquelles des frais de bourse son prélevés, au préjudice de l'investisseur final ;

- au niveau des OPCVM nouvellement agréés, le gestionnaire se verrait contraint de lisser les souscriptions, puisque le respect du ratio de 90 % est apprécié en moyenne journalière sur chaque semestre et qu'aucun délai n'est accordé au gestionnaire pour atteindre ce seuil à partir du jour de la création. Cette contrainte peut par ailleurs amener le gestionnaire à intervenir massivement sur le marché des actions au préjudice des porteurs.

C'est pourquoi il est nécessaire qu'une période transitoire puisse être accordée.

III. LA NÉCESSITÉ DE PRÉVOIR UN DELAI MINIMUM POUR LA PERIODE TRANSITOIRE

La modification de l'orientation des placements d'un OPCVM peut nécessiter le dépôt d'une nouvelle demande d'agrément auprès de la COB et l'obligation de proposer à l'ensemble des porteurs ou actionnaires une sortie sans frais, dès lors qu'elle entraîne un changement de classification de l'OPCVM.

En conséquence, la durée de la période transitoire ne pourrait difficilement être inférieure à six mois à compter de la date à laquelle les contribuables auront été informés de son existence. En pratique toutefois, la date du 30 septembre 1998 semble constituer un compromis acceptable.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter le présent article additionnel.

ARTICLE 29 bis (nouveau)

Modification de la dénomination et de la composition du
Conseil de discipline des OPCVM

Commentaire : le présent article, inséré à l'initiative de l'Assemblée nationale, propose de renommer l'actuel Conseil de discipline des OPCVM en Conseil de discipline de la gestion pour compte de tiers.

I. LA SITUATION ACTUELLE


Le Conseil de discipline des OPCVM a été institué par la loi n° 88-1201 du 23 décembre 1988 relative aux organismes de placement collectif en valeurs mobilières et portant création des fonds communs de placement.

A. COMPOSITION

Le Conseil de discipline comprend neuf membres nommés pour quatre ans :

- un président, désigné par le vice-président du Conseil d'Etat ;

- le président d'une association représentant les OPCVM, désignée par arrêté du ministre chargé de l'économie ;

- deux membres nommés par arrêté du ministre chargé de l'économie sur proposition de l'association susvisée ;

- quatre membres nommés par arrêté du ministre chargé de l'économie sur proposition :

* de l'organisme représentatif des établissements de crédit ;

* du Conseil des bourses de valeur (devenu Conseil des marchés financiers depuis la loi financière du 2 juillet 1996, par regroupement avec le Conseil des marchés à terme) ;

* du Conseil des marchés à terme ;

* d'une association représentant les sociétés d'assurance.

- un membre désigné par le Président de la Commission des opérations de bourse (COB).

Il comprend, en outre, un commissaire du gouvernement, nommé par le ministre de l'économie.

B. ATTRIBUTIONS

Le Conseil a pour fonction essentielle de sanctionner les infractions aux lois et règlements applicables aux OPCVM, ainsi que les manquements aux règles de pratique professionnelle de nature à nuire à l'intérêt des actionnaires ou des porteurs de parts.

Il peut agir soit d'office, soit à la demande du Gouvernement ou de la COB. Il statue par décision motivée et ses décisions sont susceptibles de recours devant le Conseil d'Etat. La COB peut demander une deuxième délibération. Enfin, les membres du Conseil sont tenus au secret professionnel.

Les sanctions qu'il peut prononcer sont l'avertissement, le blâme et l'interdiction à titre temporaire ou définitif de tout ou partie des activités. En outre, il peut prononcer des sanctions pécuniaires dont le montant ne peut être supérieur à cinq millions de francs ni au décuple des profits éventuellement réalisés.

II. LES MODIFICATIONS SOUHAITÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'Assemblée nationale a souhaité modifier les dispositions de la loi de 1988 relatives au Conseil de discipline sur les point suivants :

1° la dénomination : cet organisme qui s'appellerait désormais : " Conseil de discipline de la gestion pour compte de tiers ".

2° la composition et les modalités de désignation : le nombre des membres professionnels serait ramené de quatre à trois et ceux-ci seraient désignés comme suit :

- un membre sur proposition du Conseil des marchés financiers ;

- un membre après consultation de l'organisme représentatif des établissements de crédit et des entreprises d'investissement (Association française des établissements de crédit et des entreprises d'investissement -AFECEI) ;

- un membre après consultation d'une association représentant les sociétés d'assurance.

De plus, ce Conseil comprendrait désormais un représentant des salariés des sociétés de gestion de portefeuille, à l'instar de ce qui a été prévu, mutatis mutandis, pour le Conseil des marchés financiers.

Enfin, l'Assemblée nationale a prévu d'étendre le champ de compétence du Conseil de discipline afin de lui donner compétence pour sanctionner les manquements aux règles de pratique professionnelle de nature à nuire seulement à l'intérêt des actionnaires ou des porteurs de parts, mais aussi à celui des mandants.

III. LES OBSERVATIONS DE VOTRE COMMISSION

Le présent article tire, formellement, les conséquences des modifications intervenues dans la loi financière du 2 juillet 1996 et tendant à reconnaître les spécificités de la gestion financière au sein des métiers du titre.

En effet, le législateur de 1996 a souhaité conférer une plus grande unité juridique à ce métier, en s'efforçant de gommer les différences entre la gestion collective, essentiellement pratiquée par les banques, et la gestion sur base individuelle, pratiquée par les sociétés de gestion de portefeuille.

Il s'était également attaché à lui reconnaître une plus grande autonomie par rapport aux autres métiers du titre en lui imposant des " règles de bonne conduite " spécifiques (article 64 de la loi financière) et en confiant l'ensemble de sa surveillance à la Commission des opérations de bourse.

Par ailleurs, avait été décidée la création du " Comité consultatif de la gestion financière ", organisme placé auprès de la COB dont la fonction est de donner un avis sur toutes les matières relatives à la gestion pour compte de tiers et, en particulier, sur la délivrance des agréments.

Le législateur avait toutefois renoncé à pousser jusqu'au bout cette logique, notamment en n'imposant pas la filialisation obligatoire des activités de gestion ni la création d'un Conseil de la gestion financière, même si ces objectifs étaient clairement conservés en ligne de mire.

Ainsi, votre commission des finances, à l'origine de cette avancée législative, avait-elle considéré que :

" Les voies de la réforme sont ainsi esquissées pour donner naissance à un Conseil de la gestion financière, autorité professionnelle faisant pendant au Conseil des marchés financiers et regroupant les compétences actuellement dévolues au Conseil de discipline des OPCVM (et au comité consultatif de la gestion financière) " 43( * ) .

Votre commission, considérant l'heure venue de franchir une nouvelle étape dans cette construction législative, vous proposera de pousser plus avant la réforme esquissée par l'Assemblée nationale et de créer ce Conseil de la gestion financière.

Décision de la commission : votre commission vous propose de modifier cet article.

ARTICLE 30

Rachat par une société de ses propres actions

Commentaire : le présent article propose d'assouplir le régime juridique et fiscal du rachat par les sociétés de leurs propres actions.

Le rachat par une entreprise de ses propres actions est, dans les pays anglo-saxons, une opération financière banale et de plus en plus fréquente. Elle constitue, pour l'entreprise, un instrument de gestion des capitaux propres permettant, notamment, d'améliorer ses ratios de rentabilité du capital. Pour l'actionnaire, c'est un moyen de partager les richesses accumulées, dans la droite ligne des théories de la " shareholder value " et du " corporate governance ". Enfin, d'un point de vue macro-économique, elle permet une meilleure allocation des ressources en rendant au marché des capitaux promis à une moindre rentabilité et qui pourront être investis dans d'autres entreprises, ou, plus largement, dans d'autres placements plus rentables.

En France, ce type d'opérations se heurte à un régime juridique particulièrement rigide qui ne permet d'envisager les rachats d'actions que pour des opérations véritablement structurelles, précédant bien souvent un retrait du marché. C'est pourquoi, depuis plusieurs années, un mouvement de réflexion, associant professionnels et pouvoirs publics, s'est engagé en faveur de l'assouplissement de ce régime.

Le présent article propose de donner suite à cette réflexion et constitue un premier pas dans le sens d'une modernisation du droit des sociétés.

I. LA SITUATION ACTUELLE

La situation actuelle se caractérise par un régime juridique et fiscal peu propice au rachat par une société de ses propres actions, source d'insatisfaction pour les professionnels qui en demandent la modernisation.

A. UN REGIME JURIDIQUE ET FISCAL PEU PROPICE AU RACHAT D'ACTIONS

Il faut distinguer aujourd'hui deux types d'opérations de rachat qui répondent à des logiques bien différentes :

- d'une part les opérations de rachat qui se réalisent par voie de réduction du capital . Il s'agit essentiellement du " rachat d'actions non motivé par des pertes " dont le régime juridique est défini par les articles 215 et 216 de la loi de 1966 44( * ) . Ces opérations obéissent à une logique purement financière, mais sont enserrées dans une procédure particulièrement lourde et dissuasive , l'offre publique de rachat (OPRA), et se heurtent de surcroît à des contraintes fiscales ;

- d'autre part, les opérations de rachat qui se réalisent sans réduction du capital mais dont les objectifs sont particulièrement étroits. Il s'agit, d'une part, de la procédure dite de " régularisation des cours ", définie à l'article 217-2 de la loi de 1966 et, d'autre part, du rachat d'actions en vue de faire participer les salariés aux résultats de l'entreprise (participation, stock-options) fixé par l'article 217-1 de cette même loi 45( * ) .

1. Le rachat d'actions avec réduction du capital (rachat d'actions non motivé par des pertes)

La réduction du capital non motivée par des pertes est ouverte à toutes les entreprises, qu'elles soient ou non cotées, et n'est pas limitée. Elle obéit à une motivation financière, mais est enserrée dans un régime juridique très contraignant.

a) Motivations

L'actuel développement des rachats d'actions permet de mettre en valeur les aspects positifs, pour l'actionnaire, de ce type d'opérations, notamment en termes de création de valeur : les actionnaires vendeurs enregistrent une prime par rapport au cours normal. En 1996, cette prime a évolué entre + 5,1 % et + 150 % 46( * ) ; pour les actionnaires qui décident de ne pas vendre, le rachat peut créer un effet positif sur le bénéfice par action ou sur l'actif net par action.

Pour les entreprises, le rachat d'actions avec réduction du capital peut être intéressant dans une période de bas taux d'intérêt, lorsque la rémunération d'une trésorerie abondante n'est plus jugée suffisamment intéressante, ou lorsque les possibilités de croissance externe, c'est-à-dire par rachat de sociétés concurrentes, ne sont pas suffisantes.

b) Régime juridique et fiscal

1) Le régime juridique

Tout d'abord, la réduction du capital n'étant pas motivée par des pertes, celle-ci n'est pas toujours possible, compte tenu de certains obstacles : émission par la société d'obligations échangeables (article L. 206 al. 1), d'obligations convertibles (L. 195 al. 5) ou encore d'obligations à bons de souscription (L. 194-4 al. 1 er ).

En outre , le rachat est parfois contraint par un ordre de priorité : la société qui a émis des actions à dividende prioritaire sans droit de vote doit racheter prioritairement ces actions prioritaires (art. L. 267-7 al. 2).

La procédure de droit commun (article 217 deuxième alinéa et articles 215 et 216) est particulièrement lourde.

Elle doit être autorisée par l'Assemblée générale extraordinaire (AGE) et être étendue à l'ensemble des actions de la société . Les commissaires aux comptes établissent un rapport spécial où ils font connaître leur appréciation sur l'opération au regard notamment de l'égalité des actionnaires.

L 'AGE peut certes déléguer au conseil d'administration ou au directoire tous pouvoirs pour réaliser l'opération de réduction du capital. Mais cette délégation ne peut pas porter sur les conditions essentielles de l'opération qu'il appartient de fixer : le montant de la réduction, le nombre de titres concernés, le choix de la méthode de réduction.

Le projet de réduction du capital doit être accepté par l'ensemble des créanciers de l'entreprise . Ceux-ci disposent pour se prononcer d'un délai de trente jours à compter de la " date du dépôt au greffe du procès-verbal de délibération de l'AGE qui a décidé ou autorisé la réduction ".

Si le nombre d'actions présentées à l'offre est supérieur à la quantité souhaitée, il est procédé pour chaque actionnaire vendeur à une réduction proportionnelle au nombre d'actions " dont il justifie être propriétaire au moment du rachat " et non pas au nombre d'actions qu'il apporte à l'offre.

Mais la principale difficulté vient, pour les sociétés cotées, de la nécessité de procéder à une offre publique de rachat (OPRA) comme le précise l'article 181 du décret du 23 mars 1967.

" Art. 181. Lorsque la société a décidé de procéder à l'achat de ses propres actions en vue de les annuler et de réduire son capital à due concurrence, elle doit faire cette offre d'achat à tous les actionnaires.

" A cette fin, un avis d'achat est inséré dans un journal habilité à recevoir les annonces légales dans le département du siège social et, en outre, si la société fait publiquement appel à l'épargne, au Bulletin des annonces légales obligatoires. (...) "


Cette offre est une offre simplifiée aux termes de l'article 5-3-2 du règlement du Conseil des bourses de valeur (CBV). Néanmoins, l'article R 14 du règlement COB n° 89-03 oblige pour sa part l'initiateur à rédiger une note d'information quand la société procède au rachat de ses actions et la COB se montre vigilante quant à l'information délivrée sur les motivations et les conditions de l'opération.

Comme le montre le rapport Esambert (voir infra), le calendrier juridique d'une OPRA est en moyenne de l'ordre de trois mois.

Cette procédure est donc à la fois longue, lourde et conçue pour la réalisation d'une opération exceptionnelle dans la vie de l'entreprise. En outre, elle est assortie d'un régime fiscal dissuasif.

2) Le régime fiscal

La procédure de rachat n'est guère intéressante pour les actionnaires, dans la mesure où elle a la nature juridique d'un remboursement et non d'une cession de titres. Le gain réalisé par le propriétaire des titres rachetés constitue donc un revenu mobilier imposable au barème progressif de l'impôt sur le revenu (articles 109-1, 112 et 158-3 du code général des impôts -CGI-) et non un gain imposable au taux réduit de 16 % dans la catégorie des bénéfices non commerciaux.

Les sommes reçues étant considérées comme des revenus mobiliers, elles n'ouvrent pas droit à l'avoir fiscal contrairement à ce qui se produit pour les dividendes.

Cette solution n'apparaît guère satisfaisante en équité, puisque lorsque l'associé se retire en cédant ses titres à un tiers, il bénéficie du taux réduit des plus-values, alors que dans le cas où il accepte de vendre ses titres à la société, il supporte l'impôt progressif.

2. Le rachat d'actions sans réduction du capital

Le rachat par une société de ses propres actions, hors réduction du capital, apparaît comme une pratique interdite (article L. 217 de la loi de 1966). Cette interdiction de principe supporte toutefois quelques dérogations, mais celles-ci sont trop restrictives pour autoriser une gestion financière du capital.

a) Le principe de l'interdiction du rachat par une société de ses propres actions, hors réduction du capital

Comme le fait justement remarquer le professeur Alain Couret 47( * ) " la pratique du rachat d'actions est généralement perçue par les juristes de façon négative et cette perception trouve sa traduction dans la loi du 24 juillet 1966 franchement hostile aux opérations de ce type, hostilité encore renforcée par la transposition de la deuxième directive du Conseil des Communautés européennes par la loi du 30 décembre 1981".

1) Le fondement de l'interdiction

L'interdiction de racheter repose sur des justifications très anciennes, la doctrine classique considérant qu'une société ne peut être à la fois créancière et débitrice d'elle-même. Or le rachat introduit une confusion des qualités qui est conceptuellement dérangeante.

Par ailleurs, la doctrine s'accorde à voir dans le capital social, outre la clef de répartition des droits des associés, le gage des créanciers 48( * ) . Réduire le capital, c'est donc porter atteinte aux garanties des créanciers.

Enfin, on peut encore évoquer la crainte de voir une société spéculer sur ses propres titres et accomplir ainsi une activité étrangère à l'objet de ses statuts.

Dans le droit fil de cette conception, la deuxième directive européenne n° 77-91 du 13 décembre 1976, modifiée par la directive n° 92-101 du 23 novembre 1992, indique que l'objectif de l'interdiction est de maintenir l'intégrité du capital et l'égalité des actionnaires.

2) Les sanctions juridiques attachées

La loi de 1966 attache au principe de l'interdiction deux sortes de sanctions :

- des sanctions civiles : l'article 217-7 oblige à libérer les actions irrégulièrement souscrites ou acquises ; ces actions devant être cédées dans le délai d'un an à compter de leur souscription ou de leur acquisition et annulées à l'expiration de ce délai ;

- des sanctions pénales : l'article 454-1, alinéa premier punit d'une amende de 60.000 francs le président, les administrateurs ou les directeurs d'une société anonyme ayant, au nom de la société, souscrit, acquis, pris en gage, conservé ou vendu des actions en violation des dispositions légales.

Par ailleurs, on observera que l'article 217-9 interdit à une société d'avancer des fonds, d'accorder des prêts ou de consentir une sûreté en vue de la souscription ou de l'achat de ses propres actions par un tiers.

b) Les dérogations actuelles

Les dérogations à ce principe sont fixées par la loi et font l'objet d'une interprétation restrictive. Il s'agit, d'une part, du rachat en vue de faire participer les salariés aux résultats de l'entreprise ou du rachat par les sociétés qui consentent à leurs salariés des options d'achat de leurs actions et, d'autre part, de mener des opérations de régularisation des cours.

1) Le rachat d'actions pour les salariés (article 217-1)

Cette possibilité est prévue par l'article 217-1 de la loi de 1966 qui se contente de préciser que les actions doivent être attribuées ou les options consenties dans le délai d'un an à compter de l'acquisition.

Cette possibilité, pourtant soumise à peu de contraintes, n'a pas été beaucoup utilisée, à l'exception de sociétés qui souhaitaient éviter la dilution d'un actionnariat principal, souvent familial (L'Oréal, LVMH, Legrand, Carrefour, Promodès....). Signe des temps, certaines entreprises qui avaient mis en place des plans d'options de souscription d'actions rachètent depuis quelques mois leurs actions pour neutraliser l'effet dilutif, à l'instar de Total ou de la Générale des Eaux.

2) Le rachat d'actions à des fins de régularisation des cours (article 217-2)

Ce régime est assez restrictif. Outre l'autorisation de l'assemblée générale ordinaire, le rachat doit en effet obéir à un certain nombre de conditions :

- les titres acquis ne peuvent conduire la société à détenir plus de 10 % de son propre capital social, compte tenu des titres qu'elle détient déjà ;

- l'acquisition ne peut avoir pour effet d'abaisser les capitaux propres à un montant inférieur à celui du capital augmenté des réserves non distribuables ;

- les actions rachetées entrent dans le portefeuille des titres de la société, mais perdent tous leurs droits (droit de vote, droits aux dividendes...) à l'exception du droit d'attribution. La société peut par la suite les revendre sur le marché, les utiliser pour procéder à des acquisitions ou les attribuer aux salariés, voire les annuler si l'assemblée générale des actionnaires le décide ;

- la société doit disposer de réserves, autres que la réserve légale, d'un montant au moins égal à la valeur de l'ensemble des actions qu'elle possède ;

- la société doit informer la COB des opérations qu'elle envisage et lui rendre compte des acquisitions réalisées, tenir un registre des achats et ventes et donner une information dans le rapport annuel sur les opérations effectuées.

En outre, la COB a complété l'article 217-2 par son règlement n° 90-04. Pour être présumées légitimes, les opérations doivent avoir pour objectif de " réduire les fluctuations excessives de cours ". Les interventions doivent être réalisées en " contre-tendance " par rapport au dernier cours coté, par l'intermédiaire d'une seule société de bourse et ne pas dépasser le quart de la moyenne quotidienne du volume de transactions constatées sur une période de référence pendant l'intervention.

Si la société décide d'annuler les actions qu'elle a acquises dans le cadre d'une intervention de régularisation, elle se trouve soumise à la procédure des articles 215 et 216 et donc confrontée au formalisme de cette procédure (voir supra ). Néanmoins, comme ces annulations s'effectuent sur des titres déjà autodétenus, la doctrine dominante considère que la société n'est pas tenue de faire une offre à l'ensemble des actionnaires et que cette réduction du capital ne requiert pas le dépôt d'une OPRA.

Cette procédure, assez spécifiquement française, est donc largement inadaptée à l'objectif de gestion économique du capital.

C'est dans ce contexte que s'est fait jour, depuis plusieurs années, une demande de modernisation de cette législation.

B. UNE FORTE DEMANDE DE MODERNISATION

L'arrivée en masse d'investisseurs étrangers sur les marchés financiers français s'est traduite par une importance accrue accordée aux ratios de rentabilité des entreprises, mais aussi à leur capacité à se recentrer sur leur coeur de métier ( core business ) et à se défaire des participations croisées. Par ailleurs l'importance de l'autofinancement, dans un contexte de bas taux d'intérêt a conduit les entreprises à s'interroger sur l'utilisation de leurs trésoreries. Ces deux facteurs conjugués ont conduit entreprises et investisseurs à demander un assouplissement du cadre juridique et fiscal des rachats d'actions et de l'annulation de titres.

Cette demande a fait l'objet d'un examen précis de la part des pouvoirs publics.

Déjà en juillet 1996, votre rapporteur, dans le cadre du rapport sur la modernisation du droit des sociétés 49( * ) remis au Premier ministre avait proposé " d'améliorer et (de) compléter le régime du rachat par une société de ses propres actions ". Plus précisément, il était recommandé :

- d'améliorer le régime juridique de la procédure de régularisation de cours ;

- d'autoriser les sociétés à racheter leurs propres actions à des fins différentes de la régulation de cours, dans une limite globale définie par la loi ;

- de préciser la rédaction de l'article 217-9 relatif à l'interdiction pour une société de consentir des prêts pour l'achat de ses propres actions.

Plus récemment, la COB a mandaté un membre de son collège, M. Bernard Esambert, afin de lui faire rapport sur cette question. Le rapport de M. Esambert publié en janvier 1998 propose lui aussi de " libéraliser le rachat d'actions " en substituant au principe général de l'interdiction, un régime d'autorisation, néanmoins encadré afin de garantir la transparence et les droits des différentes parties prenantes à l'opération.

Cette réforme utile à l'économie française est rendue possible dans le cadre de la directive européenne.

1. Les motivations de la réforme

Outre la volonté de permettre une meilleure gestion financière du capital, la réforme du cadre légal est justifiée par la nécessité de mettre un terme aux détournements de procédure constatés. A ces deux arguments, le gouvernement ajoute deux arguments d'ordre macro-économiques dont la pertinence mérite d'être soulignée.

a) Permettre une meilleure gestion financière du capital

Comme cela a déjà été indiqué, le rachat d'actions est un outil de gestion financière sur le moyen terme, à la disposition des dirigeants de l'entreprise. Il permet notamment :

- d'arbitrer avec le paiement de dividendes ;

- de " piloter " les capitaux propres afin d'améliorer mécaniquement les ratios de rentabilité et notamment le célèbre " return on equity " (ROE) ;

- d'optimiser l'allocation des ressources financières et d'abaisser le coût moyen du capital ;

- de gérer la sortie du capital d'un actionnaire, sans peser sur le cours de bourse (décroisement de participations, privatisation) ;

- d'empêcher la dilution liée à certaines opérations de financement utilisant des titres donnant accès indirectement au capital (obligations convertibles, obligations à bons de souscription d'actions) ou de motivation des salariés ( stock options).

Enfin le rachat d'actions doit permettre le partage des richesses avec les actionnaires en leur redistribuant une partie de la richesse accumulée.

b) Mettre fin aux détournements de procédure

Comme le met en évidence le rapport Esambert, l'inadaptation de la législation actuelle favorise des pratiques de contournement. Sont ainsi apparus des pratiques ou des montages visant à permettre des rachats d'actions en dehors du cadre strict défini pour l'offre publique de rachat d'actions.

En premier lieu, un certain nombre de montages juridiques permettent de contourner l'interdiction pour une société d'accorder des prêts en vue de l'achat de ses propres actions.

Surtout, l'interdiction du rachat de ses propres actions peut être contournée par des opérations au sein d'un groupe par le biais de filiales ou de sous-filiales.

Enfin, la COB a récemment eu connaissance de plusieurs projets visant à permettre à une société de racheter ses propres actions par l'utilisation de bons de cession, sans passer par la procédure de l'offre publique de rachat.

c) Favoriser l'allocation du capital et renforcer les procédures anti-OPA

Dans l'exposé des motifs du projet de loi, le gouvernement invoque la nécessité " d'optimiser l'allocation des flux d'épargne au sein de l'économie française (...)". " Grâce à cette technique, les sociétés ayant atteint un stade de maturité avancé peuvent rendre leurs capitaux excédentaires au marché, ce dernier finançant ainsi l'investissement d'autres sociétés, en phase de croissance ou de développement rapide. L'insuffisance du capital en France rend une telle mesure particulièrement nécessaire afin de soutenir la croissance en fonds propres des entreprises ".

Cette justification, reprise par le rapporteur général de l'Assemblée générale, M. Didier Migaud, 50( * ) est sans conteste fondée.

On remarquera néanmoins que l'intérêt de cette démonstration est moins de servir la réforme ponctuelle, et à vrai dire assez technique qui nous occupe aujourd'hui, que de servir de jalon dans l'histoire des idées politiques, puisqu'elle repose, de façon très explicite, sur l'idée que le marché est le moyen le plus efficace et le plus sûr de distribuer cette ressource rare que constitue le capital.

Par ailleurs, il est également vrai que la procédure du rachat d'actions peut servir à renforcer le système de défense d'une société cotée dont les titres feraient, ou seraient en passe de faire, l'objet d'une OPA. En effet, le rachat d'actions ayant pour effet d'augmenter le cours des actions de la société en question, celle-ci devient plus chère, et donc plus difficile à acquérir, pour les éventuels acheteurs.

2. Le cadre général de la directive européenne

Les règles posées par la deuxième directive 77/91 du 13 décembre 1976 en matière de rachats d'actions dessinent un cadre juridique plus libéral que la législation française.

Elle autorise en effet les rachats d'actions, indépendamment de toute réduction de capital, dans la limite de 10 % du capital. Elle soumet toutefois cette procédure aux conditions suivantes :

- l'autorisation d'acquérir doit être accordée par l'Assemblée générale qui fixe les modalités d'acquisition envisagées, et notamment, le nombre maximal d'actions à acquérir, la durée pour laquelle l'autorisation est accordée, celle-ci ne devant pas excéder 18 mois, et des fourchettes de prix ;

- les acquisitions ne peuvent avoir pour effet que l'actif net devienne inférieur au montant du capital souscrit augmenté des réserves non distribuables.

Ce formalisme peut être évité lorsque " l'acquisition d'actions propres est nécessaire pour éviter à la société un dommage grave et imminent ", c'est à dire en pratique la défense anti-OPA. Dans cette hypothèse, c'est l'assemblée générale suivante qui devra être informée des raisons et des modalités des acquisitions effectuées.

Les actions qui ne sont pas acquises en vue d'une réduction du capital doivent être cédées dans un délai de trois ans au maximum. A défaut, les actions doivent être annulées.

Les titres autodétenus sont privés de droit de vote. La société qui détient des titres en autocontrôle doit par ailleurs mentionner dans un rapport de gestion les raisons des acquisitions effectuées pendant l'exercice ainsi que le nombre et la valeur des actions acquises et la fraction du capital qu'elles représentent.

S'agissant des rachats avec réduction du capital, la directive prévoit seulement que toute réduction du capital soit subordonnée à une décision de l'assemblée générale à une majorité d'au moins les 2/3 des actionnaires. Cette décision doit faire l'objet d'une publicité et les droits des créanciers doivent être respectés.

Dans ce contexte, le présent article nous propose d'assouplir considérablement le régime juridique du rachat d'actions.

II. LES AMÉNAGEMENTS PROPOSÉS PAR LE PRÉSENT ARTICLE

Le présent article comporte trois modifications par rapport au texte existant :

A. LE PASSAGE D'UN PRINCIPE D'INTERDICTION À UN PRINCIPE D'AUTORISATION

Le 2° du paragraphe I du présent article propose de modifier l'article 217 de la loi de 1966 qui, dans sa rédaction actuelle, édicte l'interdiction pour une société de souscrire ou d'acheter ses propres actions (alinéa premier), sauf cas de réduction de capital non motivée par des pertes (deuxième alinéa) et prévoit la sanction civile de libération des actions souscrites ou acquises en violation de la loi (troisième et quatrième alinéas).

Désormais cet article comprendrait deux paragraphes :

Le paragraphe I , comme antérieurement, interdira la " souscription " par une société de ses propres actions. Cette affirmation de principe tient au fait que la substance même du capital social interdit qu'une société puisse se faire à elle-même une promesse d'apport.

Ce paragraphe continuera d'assortir ce principe de sanctions civiles, mais qui, par coordination, ne viseront plus que la souscription et non l'achat.

Par ailleurs, le régime des sanctions pénales attachées à l'interdiction de racheter ses propres actions sera modifié en conséquence (9° et 10° du paragraphe I du présent article).

En revanche, le deuxième alinéa qui, dans sa réduction actuelle, prévoit la possibilité pour une société de racheter ses propres actions en cas de réduction du capital non motivée par des pertes, sera transféré dans un article additionnel après l'article 217 : l'article 217 1 A.

Précisément, le paragraphe II du nouvel article 217 posera le principe de l'autorisation pour une société d'acheter ses propres actions et renverra à d'autres articles la fixation de ses modalités de mise en oeuvre. En vertu du second alinéa de ce même paragraphe, le rachat d'actions devra impérativement transiter par un intermédiaire financier agréé et non par un prête-nom.

Il y aurait donc désormais trois procédures de rachat d'actions :

- l'ancienne procédure de rachat avec réduction du capital non motivée par des pertes, dont les formalités sont très légèrement allégées ;

- l'ancienne procédure de rachat d'actions pour les salariés qui reste inchangée ;

- une nouvelle procédure simplifiée de rachat, susceptible de déboucher sur une réduction du capital, mais dans une limite globale de 10 % du capital social fixée par la loi, et qui se substitue à l'ancienne procédure de rachat en vue de régularisation de cours.

B. L'INSTITUTION D'UNE PROCEDURE SIMPLIFIEE DE RACHAT D'ACTIONS POUR LES SOCIETES COTEES EN REMPLACEMENT DE L'ANCIENNE PROCEDURE DE ACTION EN REGULARISATION DE COURS

1. Le régime juridique


Cette nouvelle procédure sera fixée par l'article 217-2 de la loi de 1966 et ne sera ouverte qu'aux sociétés dont les titres sont admis aux négociations sur un marché réglementé, c'est à dire les sociétés cotées . Le rachat devra, en principe, intervenir " en bourse ", du fait de l'obligation de concentration des transactions sur instruments financiers négociés sur un marché réglementé (article 45 de la loi financière).

La décision de recourir à cette procédure sera de la compétence de l'assemblée générale ordinaire et devra prévoir :

- les finalités de l'opération . Il s'agit des objectifs généraux de l'opération qui pourront être, par exemple, la correction d'un excès de fonds propres ou la régularisation du cours des actions ;

- ses modalités . Parmi celles-ci devront figurer obligatoirement la durée pendant laquelle le directoire ou le conseil d'administration, selon le cas, sera autorisé à proposer une offre de rachat et le plafond de l'offre . Cette offre devra nécessairement intervenir dans un délai de dix-huit mois à compter de la date de l'autorisation donnée par l'assemblée. Quant au plafond, il ne pourra excéder 10 % du capital . Comme on peut le constater, plafond et durée sont directement repris de la deuxième directive précitée du Conseil du 13 décembre 1976. En revanche, et contrairement au texte actuel, l'autorisation de l'assemblée ne devra plus nécessairement fixer les prix maximum d'achat minimum de vente, le nombre maximum d'actions à acquérir.

L'Assemblée nationale a souhaité compléter les formalités obligatoires de cette procédure par l'information du comité d'entreprise.

Le deuxième alinéa du texte proposé prévoit que " l'acquisition, la cession ou le transfert " des actions pourra être effectué " par tous moyens ". Cette expression est destinée à lever l'ambiguïté actuelle résultant de la rédaction de l'article 217-2 qui ne vise que les cas de cession et de transfert et pas les cas d'acquisition 51( * ) . Elle a également pour objet de prévoir le cas où, par dérogation à la règle de concentration, les actions seraient acquises, cédées ou transférées hors marché.

Les actions rachetées pourront donc soit être vendues ou transférées, soit annulées, mais à la différence de la procédure actuelle, il ne sera plus nécessaire dans ce cas de recourir à la procédure de l'offre publique de retrait prévue par les articles 215 et 216, comme c'est le cas actuellement, même si les règles générales de la procédure de réduction du capital s'appliqueront (voir supra ). Il s'agit là de la principale modification apportée par ce texte.

L'annulation des actions rachetées est soumise à une autorisation, ou directement décidée, par l'assemblée générale extraordinaire.

En cas d'annulation, un rapport spécial des commissaires aux comptes sur l'opération devra être communiqué directement aux actionnaires de la société dans un délai fixé par décret.

Par ailleurs, la société devra informer, chaque mois, le CMF des achats, cessions, transferts et annulations ainsi réalisés, lequel portera ces informations " à la connaissance du public ".

On observera à cet égard que le dispositif proposé ne règle pas la question du chevauchement de compétence entre la COB et le CMF, puisque l'article 217-5 qui prévoit que " les sociétés doivent déclarer à la Commission des opérations de bourse les opérations qu'elles envisagent d'effectuer en application des dispositions de l'article 217-2 (...) " demeure inchangé.

Les possibilités d'utiliser la procédure de rachat d'actions pour abonder les plans de participation, d'intéressement ou encore pour accorder des options d'achat d'actions ( stock options ) demeurent inchangées.

Enfin, la modification de l'article 217-3 prévue par le 6° du I du présent article, prévoit, afin de lever toute ambiguïté, de reprendre l'obligation déjà prévue à l'article 164 de la loi de 1966 et selon lequel, les actions autodétenues sont privées de droit de vote.

2. Le régime fiscal

Actuellement, le régime fiscal des opérations de rachat d'actions résulte de la combinaison des articles 109, 112 et 160 ter du code général des impôts (CGI).

L'article 109 pose le principe que ces gains constituent une distribution de revenus et relèvent en conséquence de l'application du barème progressif. Toutefois, ces gains n'ouvrent pas droit au bénéfice de l'avoir fiscal.

Par dérogation à cet article 109, l'article 112, 6° prévoit que, dans les cas de rachat d'actions pour régularisation de cours ou à des fins de participation des salariés, les gains retirés du rachat sont soumis au régime plus avantageux des plus-values de cessions sur valeurs mobilières.

L'article 160 ter est redondant avec l'article 109 puisqu'il prévoit que les gains retirés de rachats d'actions résultant de la procédure de régularisation de cours ou de participation des salariés sont " exonérés du revenu ". Cette rédaction ambiguë ne signifie pas qu'il s'agit d'une exonération d'impôt, mais uniquement de la non application du barème progressif sur le revenu selon les règles des plus-values.

La situation actuelle est donc la suivante :

- rachat avec réduction du capital non motivée par des pertes : imposition au barème ;

- rachat, sans réduction du capital, à des fins de régularisation de cours : imposition selon le régime des plus-values ;

- rachat, sans réduction du capital, à des fins de participation des salariés : imposition selon le régime des plus-values.

Le présent article prévoit de confirmer ce dispositif pour ce qui est du rachat non motivé par des pertes et du rachat à des fins de participation des salariés.

Par ailleurs, il ferait bénéficier le nouveau régime de l'article 217-2 de rachat simplifié, du régime actuel du rachat à des fins de régularisation des cours.

Enfin, il supprimerait les dispositions de l'article 160 ter du CGI afin de lever toute ambiguïté sur l'absence d'exonération.

Il s'en suit que des opérations de rachat avec réduction du capital pourront être :

- soit taxées au barème si elles ont lieu dans le cadre de la procédure générale de rachat non motivé par des pertes et pouvant porter sur plus de 10 % du capital ;

- soit taxées au régime des plus-values, si elles ont lieu dans le cadre de la procédure de rachat simplifié, ne pouvant porter que sur 10 % au plus du capital.

C. L'ALLEGEMENT DE LA PROCEDURE DE RACHAT D'ACTIONS NON MOTIVE PAR DES PERTES

Cette procédure, désormais fixée par l'article 217-1-A de la loi de 1966, serait très légèrement modifiée sur deux points :

En premier lieu, le rapport des commissaires aux comptes sur le projet de réduction du capital devrait être désormais communiqué à chaque actionnaire dans un délai fixé par décret (modification résultant du 1° du paragraphe I du présent article).

En second lieu, l'interdiction actuelle de recourir à cette procédure en cas d'existence d'un emprunt obligataire complexe non encore abouti en titres de capital, serait supprimée ( 6  et le 7° du paragraphe I du présent article ). Ainsi, un rachat d'actions avec réduction du capital, non motivé par des pertes, serait possible même en présence :

- d'obligations à bons de souscription en cours de validité ;

- d'obligations convertibles en actions ;

- d'obligations échangeables en actions non encore échangées ou remboursées.

Décision de votre commission : Votre commission vous demande d'adopter le présent article sans modification.

Section 8

Dispositions relatives à Mayotte et Saint-Pierre-et-Miquelon

ARTICLE 31

Dispositions relatives à Mayotte et Saint-Pierre-et-Miquelon

Commentaire : le présent article propose des modifications permettant l'émission et la mise en circulation de l'euro dans les collectivités territoriales de Mayotte et de Saint-Pierre-et-Miquelon.

Mayotte et Saint-Pierre-et-Miquelon sont les deux collectivités territoriales d'outre-mer de la République française à statut spécial. Elles sont associées à la Communauté européenne en vertu de l'article 227 alinéa 3 du Traité de Rome mais, contrairement aux départements d'outre-mer, elles n'étaient pas expressément visées par les dispositions du Traité sur l'Union européenne.

Les modifications apportées par le présent article permettront l'introduction de l'euro dans ces deux collectivités, en même temps que dans les départements d'outre-mer.

I - LA SITUATION ACTUELLE

Les textes législatifs actuels doivent être modifiés afin de permettre l'émission et la mise en circulation de l'euro à Mayotte et à Saint-Pierre-et-Miquelon.

Dans l'état actuel du droit français, deux obstacles s'y opposent :

- la référence au " signe monétaire français " dans les textes relatifs aux régimes monétaires de Mayotte et de Saint-Pierre-et-Miquelon,

- l'existence de deux instituts d'émission différents : l'IEDOM à Saint-Pierre-et-Miquelon, qui assurera l'introduction de l'euro dans ce territoire et dans les départements d'outre-mer, où il est également présent ; et l'IEOM à Mayotte.

A. LA RÉFÉRENCE AU " SIGNE MONÉTAIRE FRANÇAIS "

Les textes actuels 52( * ) prévoient que la monnaie ayant cours légal et pouvoir libératoire à Mayotte et à Saint-Pierre-et-Miquelon est le " signe monétaire français ", qui désigne aujourd'hui le franc français.

Cette situation est incompatible avec l'introduction de l'euro qui n'est pas un " signe monétaire français ".

En outre, le mot " franc " subsistera dans les territoires d'outre-mer, où ne circulera pas l'euro. La référence au " signe monétaire français " pourrait donc se révéler trompeuse par rapport au franc CFP (change franc Pacifique).

B. LA COMPÉTENCE CONTESTABLE DE L'IEOM A MAYOTTE

1. L'IEOM à Mayotte


A Mayotte, la circulation du franc français est assurée par l'Institut d'émission d'outre-mer (IEOM). Cet établissement public à caractère industriel ou commercial a été créé par la loi de finances rectificative pour 1966 et sa compétence a été étendue à Mayotte par deux lois portant diverses dispositions d'ordre économique et financier de 1977 et 1991.

Dans les territoires du Pacifique pour lesquels il est également compétent, l'IEOM met en circulation les francs CFP.

2. L'IEDOM à Saint-Pierre-et-Miquelon et dans les départements d'outre-mer

A Saint-Pierre-et-Miquelon, la circulation du franc français est assurée, comme dans les départements d'outre-mer, par l'Institut d'émission des départements d'outre-mer (IEDOM). Cet établissement public à caractère industriel ou commercial a été créé par l'ordonnance de 1959 portant réforme du régime de l'émission dans les départements de la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique et la Réunion. Saint-Pierre-et-Miquelon relève de l'IEDOM depuis une loi de 1976 (en effet, ce territoire a été un département d'outre-mer à part entière entre 1976 et 1985).

C'est l'IEDOM qui assurera l'introduction de l'euro dans les départements d'outre-mer et à Saint-Pierre-et-Miquelon.

3. Il semble peu justifié de maintenir Mayotte dans le champ de compétence de l'IEOM

Comme l'a souligné la Cour des Comptes dans deux rapports de 1996 consacrés à l'IEDOM et à l'IEOM, il paraît peu cohérent de conserver deux instituts d'émission différents ayant dans les départements d'outre-mer, ainsi qu'à Saint-Pierre-et-Miquelon et à Mayotte des missions similaires.

Cette anomalie pourrait être résolue en élargissant la compétence de l'IEDOM à Mayotte au détriment de l'IEOM qui se limiterait aux territoires d'outre-mer.

II - LE PROJET DU GOUVERNEMENT

Le présent article propose de créer les conditions de la mise en circulation de l'euro à Mayotte et à Saint-Pierre-et-Miquelon en introduisant dans leurs régimes monétaires respectifs la notion de " signe monétaire métropolitain " et en faisant entrer Mayotte dans le champ de compétence géographique de l'IEDOM.

A. LA RÉFÉRENCE AU " SIGNE MONÉTAIRE MÉTROPOLITAIN "

Les paragraphes I et II proposent de remplacer l'ancienne référence aux " signes monétaires français ", qui ne permet pas l'introduction de l'euro, par une référence aux " signes monétaires ayant cours légal et pouvoir libératoire dans la métropole ", c'est à dire le franc français dans un premier temps, auquel devrait se substituer l'euro.

Ce seront désormais ces signes métropolitains qui auront cours légal et pouvoir libératoire, dans les mêmes conditions, à Mayotte ( paragraphe I ) et à Saint-Pierre-et-Miquelon ( paragraphe II ).

B. LE TRANSFERT DE COMPÉTENCE DE L'IEOM A L'IEDOM

1. Rôles respectifs de l'IEDOM et de l'IEOM après l'introduction de l'euro


C'est l'IEDOM qui sera chargé de l'introduction de l'euro dans les départements d'outre-mer, à Saint-Pierre-et-Miquelon et à Mayotte.

Le paragraphe I propose donc que l'IEDOM assure, à Mayotte, à partir d'une date fixée par décret, la mise en circulation des signes monétaires métropolitains, dans les mêmes conditions que dans les départements d'outre-mer et à Saint-Pierre-et-Miquelon. Il s'agit d'une extension de la compétence géographique de l'IEDOM.

L'IEOM restera compétent pour les territoires d'outre-mer, qui ne participeront pas à l'euro et continueront à utiliser le franc CFP.

2. Les modalités du transfert de compétence entre l'IEOM et l'IEDOM à Mayotte

Le transfert de compétences entre l'IEOM et l'IEDOM concernant Mayotte est proposé aux paragraphes I et III (abrogation des articles des lois de 1977 et 1991 précitées qui établissaient la compétence de l'IEOM sur Mayotte).

Le paragraphe I propose que les conditions du transfert, avec notamment la question des modalités de la mise à disposition des réserves de billets, des services et des installations, fassent l'objet d'un décret pris après avis du collège des censeurs de l'IEDOM et de l'IEOM. Les collèges de censeurs, chargés du contrôle de ces instituts d'émission, se composent du commissaire du gouvernement auprès de la Caisse française de développement et du représentant de la Banque de France.

Ce transfert ne devrait pas rencontrer d'obstacles techniques majeurs que ce soit en matière de personnel, d'installations, ou de services.

C. LA CONTRAINTE DE TEMPS

L'article 34 du présent projet de loi prévoit que le transfert devra être achevé avant le 1 er janvier 1999 (date prévue d'introduction de l'euro en France) ou, si elle est différente, à la date à laquelle la France participe à la monnaie unique. L'organisation de l'émission monétaire à Mayotte devra donc être en place pour l'introduction de l'euro. La relative simplicité de ce transfert devrait permettre le respect de cette contrainte de temps.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter le présent article sans modification.


ARTICLE 31 bis (nouveau)

Dépôt d'un rapport du Gouvernement relatif aux garanties de prêts en faveur du logement locatif à Mayotte

Commentaire : le présent article additionnel propose la présentation par le Gouvernement d'un rapport au Parlement relatif aux conditions de garantie des prêts en faveur du logement locatif à Mayotte.

La collectivité territoriale de Mayotte connaît actuellement une situation préoccupante en matière de financement du logement locatif, imputable à des difficultés du Crédit Foncier de France (CFF).

Cette situation a motivé le dépôt d'un amendement à l'Assemblée nationale imposant au Gouvernement la présentation, avant le 1 er janvier 1999, d'un rapport sur les conditions de garantie des prêts en faveur du logement locatif à Mayotte.

I - LA SITUATION ACTUELLE

A. LES CONSÉQUENCES DU RETRAIT DU CREDIT FONCIER DE FRANCE


La collectivité territoriale de Mayotte connaît une forte croissance démographique justifiant un effort particulier dans le domaine du logement locatif.

Or, la collectivité territoriale n'a pas les ressources financières suffisantes pour garantir à 100% les emprunts immobiliers. C'est pourquoi, le législateur
53( * ) a autorisé l'Etat à apporter sa garantie à hauteur de 50 % des encours des prêts consentis par le CFF en faveur du logement locatif pour les demandes de garanties présentées avant le 30 juin 1999.

Les difficultés financières rencontrées par le CFF l'ont amené à arrêter son activité dans les DOM-TOM, ce qui, à Mayotte, a eu des conséquences graves dans la mesure où celui-ci constituait la seule source de financement du logement locatif.

B. LES NOUVELLES PISTES DE RÉFLEXION

Deux autres organismes financiers sont susceptibles de se substituer au CFF dans le financement du logement locatif : la Caisse française de développement (CFD) et la Caisse des dépôts et consignations (CDC).

Actuellement, la CFD octroie des prêts sur Mayotte, garantis à 50 % par la collectivité territoriale, sans exiger de garantie de l'Etat.

La CDC, pour sa part, propose de se substituer au CFF à condition de bénéficier également d'une procédure extraordinaire de garantie par l'Etat de ses prêts à Mayotte.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Dans ce contexte, le présent article propose de prévoir la remise d'un rapport du Gouvernement au Parlement, avant le 1 er janvier 1999.

Plus concrètement, il s'agit de lancer une réflexion sur la possibilité pour un organisme financier, la CDC ou la CFD, de se substituer au CFF afin de permettre la reprise du programme de logements locatifs à Mayotte bénéficiant d'une garantie de l'Etat à hauteur de 50 %.

Il semble résulter des débats à l'Assemblée nationale, que le Gouvernement privilégierait l'activité de la CFD à Mayotte ce qui éviterait à l'Etat d'avoir à apporter une garantie. En effet, M. Dominique Strauss-Khan, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, a refusé de reprendre à son compte un amendement de M. Henry Jean-Baptiste prévoyant la garantie de l'Etat.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article additionnel sans modification.

Section 9

Autres dispositions

ARTICLE 32

Fonctionnement du Conseil des marchés financiers

Commentaire : le présent article propose d'assouplir certaines règles de fonctionnement du Conseil des marchés financiers.

Autorité professionnelle dotée de la personnalité morale, le Conseil des marchés financiers (CMF) est issu de la fusion du Conseil des bourses de valeur (CBV) et du Conseil des marchés à terme (CMT), réalisée par la loi financière du 2 juillet 1996 54( * ) .

Il est composé de 16 membres, professionnels des marchés, et élit son président en son sein. Un représentant de la Banque de France et un commissaire du Gouvernement assistent également aux délibérations, sans voix délibérative.

Le Conseil dispose de larges pouvoirs de contrôle et de réglementation. En outre, il joue un rôle important en matière d'agrément.

En matière de réglementation 55( * ) , il est compétent, notamment, pour édicter les règles de " bonne conduite " applicables aux prestataires de services d'investissement, aux entreprises d'investissement et aux chambres de compensation, ainsi que les principes généraux d'organisation et de fonctionnement que doivent respecter les marchés réglementés. De même, il est compétent pour établir les règles relatives aux opérations financières et, notamment, les procédures d'offre publique obligatoire et de retrait obligatoire.

En matière de contrôle 56( * ) , il est chargé de veiller au respect par les prestataires de services d'investissement exerçant leurs activités en France, les entreprises de marché et les chambres de compensation, des règles de bonne conduite qui leur sont applicables en vertu des lois et règlements en vigueur. Il veille également à la régularité des opérations effectuées sur les marchés réglementés.

Enfin, en matière de délivrance des agréments 57( * ) , il est chargé d'approuver le " programme d'activité " que sont obligés de déposer les candidats à l'agrément de prestataire de services d'investissement, pour tous les services autres que la gestion pour compte de tiers.

A l'issue de 18 mois de fonctionnement 58( * ) , il apparaît opportun d'assouplir les règles de fonctionnement de cet organisme, afin de lui permettre de remplir sa mission dans les conditions de rapidité exigées par le fonctionnement des marchés financiers.

I. LA SITUATION ACTUELLE

Le législateur et le Gouvernement, tout en élargissant considérablement les pouvoirs de cette autorité professionnelle, ont souhaité encadrer fortement son fonctionnement. Or cet encadrement s'est révélé en pratique d'autant plus contraignant qu'il a été renforcé par le juge.

A. DES RÈGLES DE FONCTIONNEMENT CONTRAIGNANTES

Le Gouvernement a prévu, dans l'article 3 du décret du 3 octobre 1996 59( * ) , la démission d'office des membres absents trois fois consécutives. On observera que cette disposition a déjà trouvé à s'appliquer. Par ailleurs, les règles relatives au quorum ne permettent pas au CMF de délibérer lorsque moins de la moitié de ses membres est présente. Enfin, le Conseil étant l'instance de décision, il n'est pas prévu de délégation de pouvoirs au profit du président notamment en matière de décisions individuelles, contrairement à ce qui est prévu, par exemple, pour la Commission des opérations de bourse (COB).

Toutefois, la réglementation applicable ménage quelques éléments de souplesse. Ainsi, le président du CMF peut déléguer certains de ses pouvoirs propres à un autre membre du Conseil. En outre, chaque membre du CMF a la faculté de donner mandat à un autre membre de voter en son nom lors des réunions. Par ailleurs, et sauf exceptions prévues par la loi, les décisions du Conseil sont prises à la majorité simple des membres présents et non à la majorité qualifiée. Enfin, le Conseil avait recours très fréquemment à une procédure de consultation écrite de ses membres. Mais cet élément de souplesse a disparu à la suite d'un arrêt de mai 1997 de la Cour d'appel de Paris censurant une décision prise selon cette procédure.

B. DES CONTRAINTES RENFORCÉES PAR LE JUGE

Par dérogation au principe de collégialité, selon lequel toute décision doit être délibérée collectivement, le CMF a utilisé la procédure de la consultation écrite. Ce type de consultation, à vrai dire assez fréquent dans les organismes publics ou semi-publics, était déjà utilisé, sans texte, par le CBV. En la reprenant dans son règlement général 60( * ) , le CMF n'a fait que donner une base écrite à une pratique utilisée par son prédécesseur 61( * ) .

Par un arrêt du 28 mai 1997, la Cour d'appel de Paris a annulé une décision du CBV prise par consultation écrite. A la suite de cet arrêt, le CMF a donc mis fin à toute utilisation de cette procédure de consultation écrite.

Or, cette nouvelle situation rend le fonctionnement du CMF très difficile pour deux raisons.

D'une part, le CMF rend de très nombreuses décisions 62( * ) et le plus souvent dans l'urgence (le délai habituel est de 5 jours de bourse).

D'autre part, ses membres, étant des professionnels, exercent des responsabilités extérieures qui ne leur laissent que peu de disponibilité pour assister aux travaux.

II. LE PROJET DU GOUVERNEMENT

Afin de redonner une certaine souplesse de fonctionnement au CMF, le présent article propose :

- de donner une base légale à la procédure de consultation écrite,

- de rendre facultative la présence du représentant de la Banque de France aux délibérations du CMF,

- d'autoriser des délégations de pouvoir du Conseil à son président.

A. LA CONSULTATION ÉCRITE

Dans un premier temps, afin de donner une base réglementaire plus solide à la procédure de consultation écrite du CMF, le Gouvernement avait décidé de compléter le décret du 3 octobre 1996. Le Conseil d'Etat, saisi pour avis de ce projet de décret, a rendu un avis négatif 63( * ) , estimant que seule la loi pouvait apporter de telles modifications.

C'est pourquoi le 2° du paragraphe I du présent article complète l'article 27 de la loi financière de 1996 afin de permettre au Conseil de " statuer par voie de consultation écrite ".

Deux conditions encadrent cette possibilité.

D'une part, il faut qu'il y ait " urgence constatée par (le) président ", la délibération collective lors de réunions du Conseil demeurant le mode de fonctionnement normal.

D'autre part, cette consultation ne doit pas concerner des décisions prises en matière disciplinaire, pour lesquelles une délibération collective du Conseil est obligatoire.

Le 3° du même paragraphe du présent article renvoie à un décret en Conseil d'Etat le soin de préciser " les modalités de déroulement des consultations écrites " 64( * ) .

B. LA PRÉSENCE FACULTATIVE DU REPRÉSENTANT DE LA BANQUE DE FRANCE AUX DÉLIBÉRATIONS DU CMF

Le 1° du paragraphe I du présent article modifie l'article 27 de la loi financière de 1996 afin de rendre facultative la présence du représentant de la Banque de France aux délibérations du Conseil.

Cette disposition s'explique vraisemblablement par le fait que la présence du représentant de la Banque de France n'apparaît pas nécessaire lors des délibérations qui ne portent pas sur des questions monétaires.

C. LES DÉLÉGATIONS DE POUVOIR AU PRÉSIDENT

Le paragraphe II
du présent article insère un article 27-1 dans la loi financière de 1996 afin d'autoriser le Conseil à déléguer à son président, ou à son représentant, membre du Conseil, le pouvoir de prendre des décisions individuelles.

Plusieurs conditions encadrent cette nouvelle disposition :

1- cette faculté ne s'exerce que pour des décisions individuelles concernant des organismes soumis au contrôle du CMF ;

2- elle ne s'exerce pas en matière disciplinaire ;

3- une " information préalable du commissaire du gouvernement " est obligatoire ;

4- le règlement général du CMF fixera les conditions et les limites dans lesquelles ces délégations de pouvoir pourront s'exercer 65( * ) .

L'Assemblée nationale a adopté l'article 32 avec deux amendements de correction d'erreurs de référence.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 33

Retrait des certificats d'investissement cotés

Commentaire : le présent article a pour objet de faciliter les conditions dans lesquelles les certificats d'investissement admis aux négociations sur un marché réglementé peuvent être retirés de la cote.

I. LA SITUATION ACTUELLE


Les certificats d'investissement ont été créés par la loi du 3 janvier 1983 sur le développement de l'investissement et la protection de l'épargne. Leur régime est fixé aux articles 283-1 à 283-5 de la loi du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales.

L'objectif recherché à l'époque était de permettre aux entreprises, surtout publiques, de se procurer des fonds propres sans pour autant céder des droits de vote et donc du pouvoir.

La démarche suivie a donc consisté à démembrer l'action entre :

- un certificat de vote , représentatif du droit de vote attaché à l'action ;

- un certificat d'investissement, représentatif des droits pécuniaires attachés à l'action.

Quinze ans après, force est de constater que cette catégorie d'instruments financiers est depuis longtemps passée de mode.

Après une brève période de faveur, dans le contexte spécifique des nationalisations, les investisseurs n'ont été que modérément intéressés par ce produit, généralement peu liquide et enregistrant de ce fait une décote par rapport à l'action.

C'est pourquoi, dès 1986, le législateur a prévu de faciliter la réversibilité du processus de démembrement en permettant la transformation de certificats d'investissement en actions, dès lors qu'un certificat d'investissement se trouverait réuni avec un certificat de droit de vote, que ce soit par la cession de ce dernier au porteur du premier, par leur cession concomitante, ou, de plein droit, par la détention entre les mains d'un même porteur d'un certificat d'investissement et d'un certificat de droit de vote.

Pourtant, ni cette réforme, ni la création consécutive, par l'ancien Conseil des bourses de valeurs (CBV) et la Commission des opérations de bourse (COB), d'un marché des certificats de droits de vote pour faciliter la reconstitution des actions n'ont encore permis de réduire suffisamment le nombre des certificats d'investissement.

C'est pourquoi, dans son 27 ème rapport annuel pour 1994, la COB a proposé d'étendre aux certificats d'investissement la procédure du retrait obligatoire, instaurée par la loi du 31 décembre 1993 portant diverses dispositions relatives à la Banque de France, à l'assurance, au crédit et aux marchés financiers.

Cette procédure, désormais fixée par l'article 33 de la loi financière du 2 juillet 1996, permet, à l'issue d'une procédure d'offre ou de demande de retrait d'associés, de transférer aux actionnaires majoritaires, à leur demande, les titres encore détenus par les actionnaires ultra-minoritaires, c'est-à-dire ne représentant pas plus de 5 % du capital ou des droits de vote, après les avoir justement indemnisés.

L'impossibilité d'utiliser cette procédure en matière de certificats d'investissement a pour effet, selon les termes mêmes de l'étude d'impact jointe au présent projet de loi d'empêcher " les entreprises dont une partie du capital est composée de certificats d'investissement de simplifier leur structure de capital. Elle est particulièrement gênante pour les entreprises du secteur public qui font l'objet d'une privatisation de gré à gré et dont les actions ne sont pas cotées. "

Le présent article propose de résoudre ce problème en instaurant une procédure de retrait obligatoire pour les certificats d'investissement et de vote et une procédure de reconstitution forcée des certificats de droits de vote.

II. LES PROCEDURES PROPOSÉES

A. LA MISE EN PLACE D'UNE PROCEDURE DE RETRAIT POUR LES CERTIFICATS D'INVESTISSEMENT ET LES CERTIFICATS DE DROIT DE VOTE


Le texte proposé par le présent article pour l'article 283-1-1 de la loi de 1966 sur les sociétés commerciales, transpose mutatis mutandis , l'article 33 de la loi financière qui encadre la procédure du retrait facultatif et du retrait obligatoire ( squeeze out) pour les actions. On observera que cette procédure, instaurée en 1993 à l'initiative de la commission des finances du Sénat, a fait ses preuves puisqu'elle a été utilisée 68 fois en 1995, 63 fois en 1996 et 60 fois en 1997.

Ainsi, la nouvelle procédure prévue par le 1° du texte proposé pour le nouvel article 233-1-1 de la loi de 1966 s'étendra à l'ensemble des sociétés, cotées ou non cotées, ayant émis des certificats cotés. Elle prévoit que :

- le seuil de détention des droits du vote et du capital par un même actionnaire ou des actionnaires agissant de concert au sens de l'article 356-1-3 de la loi de 1966 sera fixé à 95 % des droits de vote et du capital, afin d'éviter, par exemple, qu'une société contrôlée à 95 % en droits de vote fasse une offre publique de retrait pour des certificats d'investissement représentant 25 % de son capital, c'est-à-dire : s'agissant de titres offrant potentiellement une grande liquidité ;

- la possibilité pour les porteurs de titres en situation minoritaire de demander au CMF que soit présentée par les actionnaires majoritaires, une offre publique de retrait. Le CMF appréciera le bien-fondé de cette demande au regard de l'absence de liquidité du marché des titres en cause ainsi que de la date de leur rachat pour éviter de récompenser les manoeuvres de personnes qui se seraient délibérément portées vendeurs afin de percevoir une " prime " à l'occasion de l'offre publique de rachat ;

- la possibilité pour les actionnaires majoritaires de lancer leur offre publique de retrait de façon spontanée.

Le 2° du texte proposé pour l'article 283-1-1 fixe les conditions dans lesquelles l'offre publique peut être suivie d'une procédure de retrait obligatoire, contre indemnisation, des titulaires ultra-minoritaires de certificats d'investissement ou de droits de vote, c'est à dire lorsqu'ils ne représentent pas plus de 5 % du capital ou des droits de vote.

L'indemnisation des détenteurs correspond au montant proposé à l'occasion de l'offre publique de retrait ou de la demande de retrait. Toutefois, si une évaluation technique des titres faite selon plusieurs critères, non limitativement énumérés dans l'article, fait apparaître un prix plus élevé, c'est ce prix qui est retenu.

La COB a relevé, dans son rapport pour 1995, que dans la majorité des 68 opérations de retrait réalisées cette année-là, le prix offert aux actionnaires se situait dans la fourchette haute des évaluations effectuées dans le cadre de l'analyse multicritères et correspondait le plus souvent à la valeur la plus élevée.

B. LA MISE EN PLACE D'UNE PROCEDURE DE RECONSTITUTION FORCEE DES DROITS DE VOTE

A l'inverse de la procédure d'offre de retrait, la procédure de reconstitution forcée, instituée par le texte proposé pour le nouvel article 283-1-2 de la loi de 1966 , serait réservée aux sociétés cotées.

Toutefois, cette procédure ne s'appliquerait qu'aux cas où les certificats d'investissement de ces sociétés présentent une liquidité extrêmement faible, puisqu'elle ne s'appliquerait qu'aux sociétés dont les certificats d'investissement représentent au plus 1 % du capital social.

Aucune exigence tenant au contrôle de la société n'est prévue en raison même de l'objectif poursuivi, visant à permettre la simplification de la structure de capital en retirant de la cote les titres devenus résiduels.

Une procédure de ce type a déjà été instituée par la loi n° 86-912 du 6 août 1986 relative aux modalités d'application des privatisations complétée par l'article 22 de la loi n° 88-17 du 5 janvier 1988, s'agissant des certificats d'investissement émis par les sociétés nationalisées faisant l'objet d'une nationalisation.

Les garanties prévues par cette loi sont reprises dans le présent article. Il en va ainsi :

- de la compétence de l'assemblée générale extraordinaire pour décider de procéder à la reconstitution des certificats existant en actions en mettant en oeuvre une procédure de cession des certificats de droit de vote dérogatoire au principe selon lequel un tel certificat ne peut être cédé qu'accompagné d'un certificat d'investissement ou au porteur d'un certificat d'investissement. Les certificats de droit de vote seront en effet cédés à la société, la décision d'utiliser cette procédure étant prise sur le rapport du conseil d'administration ou du directoire de la société ;

- de l'accord unanime des titulaires de certificats de droits de vote pour la mise en oeuvre de cette procédure. Cette condition très stricte comporte néanmoins un léger assouplissement puisque ne sont pris en compte que les titulaires présents ou représentés lors de l'assemblée générale ;

- de la fixation du prix de cession selon la procédure applicable à l'approbation des avantages particuliers. Dans ce cadre, le commissaire aux avantages particuliers, éventuellement assisté d'experts, évalue le prix des certificats de droit de vote en suivant la méthode multicritère, très protectrice des intérêts patrimoniaux des minoritaires, applicable au retrait obligatoire, évoquée ci-dessus. En cas d'approbation par l'assemblée générale extraordinaire, les certificats de droit de vote sont cédés à la société. Si l'assemblée réduit l'évaluation faite, l'accord des titulaires de certificats de droit de vote est requis, et, à défaut de cet accord, la cession n'est pas réalisée.

La reconstitution des actions résulte de la cession à titre gratuit, par la société, des certificats de droit de vote qu'elle a acquis aux porteurs des certificats d'investissement. L'avantage ainsi consenti aux titulaires de certificats d'investissement est important, puisque les porteurs de certificats d'investissement vont devenir actionnaires à des conditions privilégiées, alors que c'est la société, donc l'ensemble des actionnaires, qui va supporter la charge du rachat. Cependant, cet avantage n'apparaît pas disproportionné compte tenu de l'intérêt qui s'attache pour la société à la simplification de la structure de son capital, dont les actionnaires, qu'ils aient ou non cédé, contre indemnité, des certificats de droits de vote, profiteront également.

Pour le bon déroulement de l'opération, il est nécessaire de permettre à la société de retrouver l'identité des porteurs de certificats d'investissement et de droit de vote sans avoir à modifier ses statuts, dans l'hypothèse où ceux-ci ne le permettraient pas. C'est l'objet du dernier alinéa du texte proposé.

III. LES PROPOSITIONS DE VOTRE COMMISSION

Votre commission vous propose d'insérer le texte proposé pour l'article 283-1-1 dans la loi financière, à côté du squeeze out pour les sociétés cotées, dans la mesure où il s'agit d'une compétence attribuée au CMF.

En second lieu, votre commission vous proposera de préciser la procédure applicable en matière de reconstitution forcée des certificats de droits de vote. En effet, les titulaires de certificats de droit de vote ne peuvent participer au vote de la décision de l'AGE, en vertu de l'article 82 de la loi de 1966 auquel l'article 193 se réfère, car ils sont les bénéficiaires d'un avantage particulier. Il est donc nécessaire de prévoir un dispositif spécifique leur permettant de s'exprimer avant l'AGE.

Décision de votre commission : votre commission vous propose de modifier cet article.

ARTICLE 33 bis (nouveau)

Légalisation de la déclaration d'intention en cas de franchissement de seuil pour les sociétés cotées

Commentaire : le présent article, adopté à l'initiative de la commission des finances de l'Assemblée nationale, propose de légaliser la déclaration d'intention, actuellement fixée par un règlement de la Commission des opérations de bourse, pour tous les acquéreurs de titres de sociétés cotées qui franchiraient certains des seuils de contrôle prévus à l'article 356-1 de la loi du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales et d'assortir cette obligation de sanctions civiles.

I. LA SITUATION ACTUELLE


La déclaration d'intention en cas de franchissement de seuil a pour objet d'informer le marché des opérations financières significatives qui s'y déroulent et, notamment, celles destinées à prendre le contrôle de sociétés par voie d'offres publiques d'achat (OPA). Elle permet ainsi aux investisseurs d'être informés de l'évolution du marché et, le cas échéant, d'en tenir compte dans leurs décisions d'investissement.

Cette obligation générale fait donc partie de la panoplie des instruments dont disposent les autorités de contrôle afin d'assurer l'égalité des actionnaires et la transparence des marchés.

Actuellement cette obligation résulte du règlement n° 88-02 de la Commission des opérations de bourse (COB) 66( * ) qui fixe une procédure analogue à celle proposée par le présent article, à la différence près toutefois, que cette procédure ne comporte pas de sanctions civiles et ne revêt, de ce fait, qu'un caractère assez formel.

C'est la raison pour laquelle le présent article propose de fixer de façon plus précise les contours de cette procédure et, surtout, de l'assortir de sanctions civiles, ce qui ne peut être fait que par la loi.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Une déclaration d'intention serait obligatoire pour les investisseurs qui franchiraient les seuils du dixième ou du cinquième du capital d'une société cotée. On observera que pour les autres seuils, une déclaration n'est pas nécessaire, puisque le seuil de 33 % est celui des offres publiques d'achat obligatoires et celui de 50 % celui de la garantie de cours. Dans ces deux derniers cas, l'intention de l'acquéreur est nécessairement connue. Par ailleurs, le seuil du vingtième, qui impose le dépôt d'une déclaration de franchissement de seuil, n'a pas été retenu comme suffisamment significatif pour justifier une déclaration d'intention.

Comme en matière de déclaration de franchissement de seuil, dans le cas où le nombre ou la répartition des droits de vote ne correspondrait pas au nombre ou à la répartition des actions enregistrées, le calcul des seuils se fait sur la base des droits de vote et non des actions.

1. Contenu de la déclaration d'intention

Cette déclaration d'intention devrait préciser les éléments suivants :

- le fait que l'acquéreur agisse seul ou de concert ;

- son intention d'arrêter ses achats ou de les poursuivre ;

- son intention d'acquérir ou non le contrôle de la société ;

- son intention de demander sa nomination ou celle d'une ou plusieurs personnes comme administrateur, membre du directoire ou du conseil de surveillance. C'est dans cette dernière obligation que résulte la seule modification au règlement COB, puisque celui-ci ne prévoyait jusqu'à présent que l'obligation relative à sa propre nomination.

2. Procédure applicable

a) La communication de la déclaration d'intention

Cette déclaration devrait être adressée :

- à la société dont les actions ont été acquises ;

- au Conseil des Marchés Financiers, qui la rendrait publique ;

- à la Commission des opérations de bourse (COB), en même temps que la déclaration de franchissement de seuil.

Une déclaration d'intention modificative pourrait être établie dans le cas d'un changement important intervenant dans l'environnement, la situation ou l'actionnariat de la société concernée. Une telle déclaration modificative n'est pas prévue dans le règlement COB.

b) Les sanctions en cas de non respect

Dans le cas où l'acquéreur ne procéderait pas à la déclaration d'intention à laquelle il serait désormais tenu, il se verrait privé des droits de vote attachés aux actions excédant la fraction du seuil franchi. Cette privation partielle des droits de vote se prolongerait jusqu'à l'expiration d'un délai de deux ans à compter de la date de régularisation de la notification.

Dans le cas où l'acquéreur agirait en contravention des intentions par lui déclarées, le tribunal de commerce compétent, pourrait, à la demande du président de la société, d'un actionnaire ou de la Commission des opérations de bourse (COB), prononcer la suspension totale ou partielle, pour une durée ne pouvant excéder cinq ans, de l'ensemble des ses droits de vote.

III. LES PROPOSITIONS DE VOTRE COMMISSION

Le présent article soulève deux catégories de problèmes, les uns liés à sa rédaction et les autres liés aux incertitudes entourant la notion de contrôle d'une société.

A. LES AMELIORATIONS DU TEXTE PROPOSE

1° L'appréciation du franchissement de seuil


Actuellement, le franchissement de seuil est apprécié par rapport à la notion de répartition des actions (article 356-1 de la loi de 1966). Toutefois, l'article 356-1-1 prévoit que :

" lorsque le nombre ou la répartition des droits de vote ne correspond pas au nombre ou à la répartition des actions, les pourcentages prévus au premier alinéa de l'article 356-1 sont calculés en droits de vote ".

Il se peut en effet que les droits de vote soient supérieurs au nombre des actions, par exemple dans le cas où la société aurait émis des actions à droit de vote double.

Il se peut au contraire que les droits de vote soient inférieurs au nombre des actions, lorsque certains titres ont été privés du droit de vote, par exemple à la suite d'un franchissement de seuil non déclaré (article 356-4).

L'appréciation du franchissement des seuils par référence aux seuls droits de vote peut donc faciliter les manoeuvres de certains acquéreurs afin de prendre le contrôle d'une société, sans avoir à déclarer le franchissement des seuils.

Supposons par exemple, une société qui franchirait le seuil du dixième en acquérant, en une seule fois 19 % des titres d'une société, sans pour autant le déclarer. Elle subirait une privation de ses droits de 9 %.

Dans un deuxième temps, cette même société acquerrait 9 % supplémentaires et se retrouverait ainsi avec 19 % des droits de vote et 28 % du capital, sans avoir jamais rien déclaré.

Il serait donc souhaitable de modifier le critère d'appréciation des seuils afin de rendre cette appréciation plus stricte en prenant la plus haute des deux valeurs en droit de vote ou en capital.

2° La déclaration d'intention modificative

La rédaction proposée concernant la déclaration d'intention modificative est source d'ambiguïté.

Le texte proposé par le Gouvernement et adopté par l'Assemblée nationale signifie en effet qu'il est possible, pour l'acquéreur, de changer d'intention avant la fin du délai de douze mois ; ce changement d'intention ne peut être motivé que par des modifications importantes intervenant dans " l'environnement, la situation ou l'actionnariat de la société concernée ".

En revanche, il ne résulte pas clairement de ce texte, que la déclaration modificative doive être publiée, même si on pourrait déduire une telle obligation du fait que la nouvelle rédaction proposée pour l'article 356-4 de la loi de 1966 prévoit des sanctions civiles pour l'actionnaire qui n'aurait pas respecté le contenu de la déclaration.

C'est pourquoi, il semblerait plus clair de prévoir expressément que non seulement un changement d'intention est possible, mais que lorsqu'il a lieu, sa déclaration est obligatoire.

3° Le régime des sanctions

Afin de garantir véritablement le respect du régime des déclarations d'intention, il conviendrait de prévoir que l'absence de déclaration ou l'établissement de fausses déclarations, soient sanctionnés de plein droit par une privation des droits de vote sur l'ensemble des titres détenus.

Par ailleurs, il conviendrait de modifier le régime de la saisine du tribunal de commerce : en cas de manquement à l'obligation de notification du franchissement de seuil ou à celle de déclaration d'intention, tout actionnaire devrait pouvoir saisir ce tribunal, statuant en la forme des référés, afin qu'il puisse se prononcer sur la capacité à voter du nouvel acquéreur, ou décider de reporter la date de l'assemblée générale.

B. L'AMELIORATION DE LA DEFINITION DU CONTROLE D'UNE SOCIETE PAR UNE AUTRE

L'ensemble du dispositif proposé par le présent article a pour objet de permettre une meilleure connaissance par les actionnaires des conditions de la prise de contrôle d'une société par un investisseur ou un groupe d'investisseurs.

Or, la notion de contrôle est une notion complexe faisant l'objet d'interprétations différentes selon que l'on se réfère au droit des sociétés (article 355-1 de la loi de 1966) ou au droit financier (règlement général du Conseil des marchés financiers (CMF) articles 5-4-1 et 5-4-6 d) et e) ).

Le troisième tiret de l'article 355-1 de la loi de 1966 prévoit qu'il y a contrôle d'une société par une autre " lorsqu'elle détermine en fait par les droits de vote dont elle dispose les décisions dans les assemblées générales ". Selon certaines décisions de justice, ce texte ne permettrait pas d'ajouter les voix des personnes agissant de concert avec cette société 67( * ) .

En revanche, l'article 5-4-1 du règlement général du CMF (article issu de l'ancien règlement du Conseil des bourses de valeur -CBV-) dispose que " lorsqu'une personne physique ou morale, agissant seule ou de concert , vient à détenir plus du tiers des titres de capital ou plus du tiers des droits de vote d'une société française dont les titres sont inscrits à la cote officielle ou à la cote du second marché, elle est tenue, à son initiative, d'en informer immédiatement le Conseil et de déposer un projet d'offre publique visant la totalité des titres de capital et des titres donnant accès au capital ou aux droits de vote, et libellé à des conditions telles qu'il puisse être déclaré recevable par le Conseil. "

Ce texte a pour objet d'obliger la société qui franchit le seuil de 33 % à déposer un projet d'offre publique d'achat ou d'échange, cette obligation étant fondée sur le changement de contrôle entraîné par ce franchissement. Il ajoute donc les actions et voix des personnes agissant de concert avec cette société.

De même, l'article 5-4-6 e) du règlement du CBV prévoit que le CMF peut accorder une dérogation à l'obligation de déposer une offre publique lorsque " la ou les personnes détenaient préalablement le contrôle de la société au sens du troisième tiret du premier alinéa de l'article 355-1 de la loi de 1966 ". Le texte et son application par le CMF ajoutent les actions et voix des personnes agissant de concert.

Ainsi, la même notion de contrôle est appréciée de deux façons distinctes ; tantôt les voix des partenaires agissant de concert sont totalisées, tantôt ces voix ne sont pas totalisées. Cette dysharmonie entre le droit commercial et le droit financier est d'autant plus critiquable que l'article 5-4-6 d) du règlement du CBV précité se réfère expressément au contrôle " au sens de l'article 355-1 " donnant ainsi à ce texte de loi deux sens différents.

Il serait donc souhaitable, puisqu'il s'agit de renforcer les possibilités pour le marché d'être informé des prises de contrôle, de préciser au préalable la notion même de contrôle et d'en donner une définition identique en droit financier et en droit commercial.

C'est ce que vous proposera votre commission en insérant un article additionnel après l'article 33 bis .

Décision de votre commission : votre commission vous propose d'adopter le présent article ainsi modifié.

ARTICLE ADDITIONNEL APRES L'ARTICLE 33 bis

Définition de la notion de contrôle de fait d'une société par une autre

Commentaire : votre commission vous propose d'insérer le présent article additionnel afin de modifier la notion de contrôle de fait d'une société par une autre, actuellement définie par le troisième tiret de l'article 355-1 de la loi du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales.

Le troisième tiret de l'article 355-1 de la loi du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales définit le contrôle de fait d'une société commerciale sur une autre. Aux termes de cet article, le contrôle est établi :

" - lorsque ( la société qui contrôle ) détermine en fait, par les droits de vote dont elles dispose, les décisions dans les assemblées générales de ( la ) société ( contrôlée ). "

La modification proposée consiste :

- à prendre en compte les voix des sociétés qui agissent de concert pour déterminer le contrôle ;

- à pouvoir apprécier le contrôle sur une seule assemblée générale et non sur plusieurs.


Il convient de rappeler que la portée de l'article 355-1 se limite, selon les termes du premier alinéa de cet article, aux dispositions contenues dans " les paragraphes 2 et 4 de la présente section ".

Le paragraphe 2, qui concerne les " notifications et informations ", intègre d'ores et déjà l'action de concert (articles 356-1-2, 3° et 356-1-3), de sorte que les franchissements de seuils déclenchant les " notifications et informations " sont déjà calculés en totalisant les voix des concertistes. En conséquence, la réforme proposée du troisième tiret de l'article 355-1 ne modifie rien au droit existant.

En revanche, s'agissant du paragraphe 4, relatif aux " participations réciproques ", l'article 359-1 traite de la suppression des droits de vote attachés aux actions détenues par une société " contrôlée " par l'émettrice de ces titres. C'est ici que la modification proposée de l'article 355-1 trouve sa portée et sa signification : dès lors qu'une société A contrôle une société B, cette société B ne pourrait plus voter en assemblée de A avec les actions émises par A et que détient B.

Cet article 359-1, du à une initiative du regretté Président Dailly, a pour objet de combattre l'auto-contrôle. Ce texte, combiné avec les dispositions de l'actuel article 355-1, emporte que, lorsqu'une société A a déterminé en fait, par l'exercice de ses droits de vote, les décisions en assemblée de B, les actions de A détenues par B ne doivent pas être admises à voter lors de la prochaine assemblée générale.

La modification proposée par votre commission des finances aurait pour effet de déclencher ce mécanisme lorsque les voix détenues par A et par son partenaire de concert permettraient à A de déterminer en fait les décisions en assemblée de B.

La question qui demeure est de savoir à quel moment cette interdiction de vote édictée par l'article 359-1 prendrait effet. Dans le droit actuel (voir commentaire de l'article 33 bis), il faudrait attendre deux assemblées de B pour vérifier que A contrôle B, de sorte que A pourrait enjoindre à B de voter dans le sens dicté par elle à l'occasion de toutes les assemblées que A réunirait depuis la date de la première assemblée de B, jusqu'à la constatation du contrôle. L'application effective de l'article 359-1 est donc différée pendant un délai recouvrant la durée séparant la première assemblée de B et le moment nécessaire, après la deuxième assemblée de B, pour constater l'existence du contrôle de A sur B.

En revanche, la proposition de votre commission permettrait, dès constatation que A a déterminé les décisions en assemblée de B, de supprimer aussitôt l'exercice des droits de vote des actions de A détenues par B.

Cette suppression immédiate donnerait plein effet à l'article 359-1 et ne pénaliserait pas la société A : ou bien celle-ci contrôle B, ce qui légitime la suppression ; ou bien elle ne contrôle pas B, et alors la suppression des droits de vote ne cause aucun préjudice à A. Seule B subirait un préjudice de cette suppression affectant les droits de vote des actions A qu'elle détient : si B n'est pas contrôlée par A il lui suffira d'en informer le marché. En cas de différend, les tribunaux compétents trancheront.

Votre rapporteur souhaite encore faire observer que, lorsqu'il s'agit pour le CMF d'accorder une dérogation à l'offre publique obligatoire sur le fondement de l'article 5-4-6 d) de son règlement, on comprend que le CMF vérifie que le contrôle perdure depuis deux assemblées au moins. En effet, la dérogation ne peut être octroyée à la faveur d'un contrôle fortuit, occasionnel ou de brève durée. Le CMF peut donc ajouter cette condition de durée, puisque de toute façon la faculté d'accorder la dérogation lui appartient discrétionnairement.

En revanche, lorsqu'il s'agit d'appliquer le texte d'ordre public de l'article 359-1, la condition de durée que l'on poserait pour apprécier l'existence du contrôle conduit à qualifier le contrôle dès qu'il se manifeste.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter le présent article additionnel.

ARTICLE 34

Entrée en vigueur de certaines dispositions du titre II

Commentaire : le présent article fixe le régime d'entrée en vigueur de différents articles du titre II relatifs à l'introduction de l'euro.

Le présent article a pour objet de fixer au 1 er janvier 1999, ou, si elle est différente, à la date à laquelle la France participe à la monnaie unique, l'entrée en vigueur de certaines dispositions du titre II du présent projet de loi ou la prise d'effet de certains actes prévus par ces dispositions.

Afin de ménager l'hypothèse d'une participation de la France à la monnaie unique postérieure au 1 er janvier 1999, l'article 34 prévoit que la présente loi restera applicable en cas de non-participation à la date du 1 er janvier prochain. Toutefois, un report de la date de participation de la France à l'euro semble très improbable.

1. Par dérogation au principe traditionnel selon lequel les articles d'une loi entrent en vigueur un jour franc à compter de la publication de la loi au Journal Officiel, certaines dispositions du présent projet de loi n'entreront en vigueur qu'à la date d'introduction de l'euro.

Il s'agit :

- des dispositions comptables de l'article 12 ;

- des dispositions de l'article 16 relatives à l'utilisation de l'euro par les marchés financiers ;

- des dispositions de l'article 17 relatives au passage à l'euro des systèmes de paiement et de règlement contre livraison de titres ;

- des dispositions des articles 20 et 21 relatives à la continuité des relations contractuelles ;

- des dispositions de l'article 22 relatives à l'harmonisation des règles d'arrondissement en matière fiscale ;

- des dispositions de l'article 23 relatives à la création d'un droit d'option pour la souscription des déclarations fiscales en euros.

Cette dérogation au principe traditionnel, prévue au paragraphe I , s'explique par le fait que ces dispositions n'ont de sens que si l'introduction de l'euro se réalise effectivement.

2. En second lieu, le présent article prévoit que, si certains articles entrent en vigueur conformément à la règle normale, les actes pris sur leur fondement ne prendront effet qu'à la date de la participation de la France à la monnaie unique.

Il s'agit :

- des dispositions de l'article 13 relatives à la conversion du capital social des sociétés anonymes et des sociétés à responsabilité limitée ( paragraphe II ),

- des dispositions de l'article 14 relatives à la conversion en euros des dettes publiques et privées ( paragraphe III ),

- des dispositions de l'article 26 relatives au passage à l'euro de la comptabilité des organismes de placement collectif en valeurs mobilières ( paragraphe IV ).

3. Enfin, en liaison avec l'article 31 du présent projet de loi 68( * ) , le paragraphe V du présent article prévoit que la date fixée par décret pour le transfert de compétences, à Mayotte, entre l'Institut d'émission d'outre-mer (IEOM) et l'Institut d'émission des départements d'outre-mer (IEDOM), ne peut être postérieure à celle de la participation de la France à la monnaie unique, afin que l'introduction de l'euro puisse se faire simultanément en métropole, dans les départements d'outre-mer, à Saint-Pierre-et-Miquelon, et à Mayotte.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter le présent article sans modification.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 29 avril 1998, sous la présidence de M. Christian Poncelet, la commission a d'abord procédé à l'examen du rapport de M. Alain Lambert, rapporteur général , et de M. Philippe Marini (Titre II) sur le projet de loi n° 373 (1997-1998), adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, portant diverses dispositions d' ordre économique et financier . L'examen des dispositions des titres I, III, IV et V figure dans le tome I du présent rapport .

La commission a examiné, en second lieu, le Titre II portant diverses dispositions relatives à l'adaptation de la législation française et à la modernisation des activités financières en vue de la troisième phase de l'Union économique et monétaire, sur le rapport de M. Philippe Marini, rapporteur .

La commission a adopté sans modification l'article 12 relatif à la tenue de la comptabilité en euros et l'article 13 relatif à la conversion du capital social des sociétés anonymes et des sociétés à responsabilité limitée.

A l'article 14 relatif à la conversion en euros des dettes publiques et privées, la commission a examiné deux amendements de M. Philippe Marini, l'un prévoyant une franchise fiscale pour les rompus de conversion, l'autre prenant en compte les obligations convertibles et matérialisées. La commission a ensuite adopté l'article 14 ainsi amendé.

La commission a ensuite adopté sans modification l'article 15 relatif à l'émission d'instruments financiers indexés sur le niveau général des prix, l'article 16 relatif à l'utilisation de l'euro par les marchés gérés par une entreprise de marchés et l'article 17 relatif au passage à l'euro des systèmes de paiement et de règlement contre livraison de titres.

A l'article 18 relatif à la sécurité des systèmes de paiement et de règlement contre livraison de titres, la commission a adopté deux amendements rédactionnels proposés par M. Philippe Marini, rapporteur . Elle a également adopté un amendement relatif à la compensation des dépôts bancaires puis elle a adopté l'article 18 ainsi amendé.

Par ailleurs, la commission a adopté sans modification l'article 19 relatif au droit de propriété dans les systèmes de règlements contre livraison de titres, l'article 20 relatif à la continuité des taux et indices contractuels et l'article 21 relatif à la garantie en cas de double conversion des dettes de créances.

A l'article 22 relatif à l'harmonisation des règles d'arrondissement en matière fiscale, M. Michel Charasse a souhaité obtenir des informations complémentaires sur les conséquences de cette mesure pour les impositions locales. En outre, il a demandé si l'Etat reverserait les éventuels excédents aux collectivités locales. M. Philippe Marini a obtenu mandat de la commission pour interroger les services du Gouvernement et, le cas échéant, déposer un amendement de clarification.

La commission a ensuite adopté sans modification l'article 23 relatif à la création d'un droit d'option pour la souscription des déclarations fiscales en euros et l'article 24 relatif à l'aménagement de la détermination des écarts de conversion de change liés à l'introduction de l'euro.

A l'article 25 relatif à la définition de l'appel public à l'épargne, la commission a examiné deux amendements proposés par M. Philippe Marini, rapporteur, visant, d'une part, à clarifier les notions d'investisseur qualifié et de cercle restreint d'investisseurs et, d'autre part, à exclure les investisseurs qualifiés du champ d'application de la loi sur le démarchage. M. Michel Charasse s'est interrogé sur la pertinence de la notion de cercle restreint d'investisseurs et s'est étonné que le premier amendement propose d'accorder à la commission des opérations de bourse un pouvoir réglementaire qui appartient en principe au Gouvernement. M. Philippe Marini a alors déclaré que la rédaction de cet amendement serait ultérieurement modifiée pour prendre en compte ces remarques. La commission a adopté l'article 25, modifié par les deux amendements précédemment exposés.

Puis elle a adopté sans modification l'article 26 relatif au passage à l'euro de la comptabilité des organismes de placement collectif en valeurs mobilières, l'article 27 relatif à la création des organismes de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM) à "compartiments", l'article 28 relatif à la création des OPCVM bénéficiant d'une procédure allégée et l'article 29 relatif à la création des OPCVM "maîtres et nourriciers".

Elle a ensuite adopté, sur la proposition de son rapporteur, quatre amendements tendant à insérer des articles additionnels après l'article 29 et relatifs à l'alignement du régime fiscal des entreprises d'investissements sur celui des établissements de crédit, à l'établissement d'une meilleure séparation des responsabilités entre gestionnaires et dépositaires, à l'instauration d'un dispositif transitoire pour les titres d'organismes de placement collectif en valeurs mobilières investis principalement en actions et enfin, à une modification des warrants financiers.

La commission a ensuite adopté l'article 29 bis (nouveau) relatif à l'extension des compétences du conseil de discipline des OPVCM à l'ensemble de la gestion pour compte de tiers. Toutefois, la commission a donné mandat à M. Philippe Marini, rapporteur, de lui soumettre ultérieurement un amendement visant à fusionner le conseil de discipline des OPCVM et le comité consultatif de la gestion financière. Elle a ensuite adopté, sans modification, l'article 30 relatif au rachat par une société de ses propres actions, l'article 31 relatif aux dispositions concernant Mayotte et Saint-Pierre et Miquelon, l'article 31 bis (nouveau) relatif au rapport sur les conditions de garantie des prêts au logement locatif à Mayotte et l'article 32 relatif au fonctionnement du Conseil des marchés financiers.

A l'article 33 relatif au retrait des certificats d'investissements cotés, la commission a examiné deux amendements de précision proposés par M. Philippe Marini, rapporteur , puis elle a adopté l'article 33, ainsi amendé.

A l'article 33 bis (nouveau) relatif à l'instauration d'une déclaration d'intention en cas de franchissement de seuil, la commission a examiné cinq amendements de M. Philippe Marini, rapporteur , tendant à améliorer la procédure proposée. Elle a ensuite adopté l'article 33 bis ainsi amendé.

Après un large débat, auquel ont participé MM. Michel Charasse, Christian Poncelet, président, et Jean-Philippe Lachenaud , la commission a adopté un amendement tendant à insérer un article additionnel après l'article 33 bis visant à modifier la loi du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales, afin de modifier la notion de contrôle de fait d'une société.

Elle a également adopté sans modification l'article 34 relatif à l'entrée en vigueur de certaines dispositions du Titre II.



1 Bien qu'ayant pour activité principale d'organiser les transactions sur un marché financier réglementé, les entreprises de marché peuvent également gérer des marchés organisés. En revanche, et par construction, il ne saurait y avoir d'entreprise de marché sur un marché de pur gré à gré.

2 Article 4 de la loi du 4 août 1993 relative au statut de la Banque de France et au contrôle des établissements de crédit.

3 Cette loi a permis de déroger, pour ce type d'opérations, aux règles interdisant le pacte commissoire et aux règles de la faillite pour réaliser une compensation immédiate entre les titres et les espèces en cas de défaillance de l'une des parties.

4 La "pension" consiste pour un établissement de crédit à obtenir d'un autre établissement de crédit, de la Banque centrale ou d'un autre agent économique, une avance de fonds, en général à très court terme, moyennant la remise de valeurs mobilières, de titres de créances négociables et de bons du Trésor, d'effets publics ou privés d'une valeur au moins équivalente à celle de l'avance consentie. D'un point de vue technique, elle ne se différencie pas des "repurchase agreements" pratiqués sur les places anglo-saxonnes.

5 Voir étude de la Banque de France, réalisée sous la direction de M. Jean-Paul Redouin, directeur général du Crédit, dans le Bulletin de la Banque de France n° 46 d'octobre 1997, ainsi que l'étude de la Banque de France sur l'utilisation transfrontière des titres dans le cadre de l'Union économique et monétaire réalisée sous la direction de M. Yvon Lucas dans le bulletin de la Banque de France n° 48 de décembre 1997.

6 Le 30 mai 1996, la Commission a adopté une proposition de directive (COM 96 193 final, JOC 207 du 18 juillet 1996 p. 13) concernant la finalité du règlement et les garanties. Ce texte a été communiqué au Parlement, au Conseil, au Comité économique et social et à l'Institut monétaire européen. Le 4 juillet 1997, la Commission a adopté une proposition modifiée en tenant compte des résultats de la consultation du Parlement européen, du Comité économique et social et de l'Institut monétaire européen. Le 13 octobre 1997, le Parlement européen a adopté sa position commune ( JOC 375 du 10 décembre 1997, p. 34). Le 29 janvier 1998, le Parlement européen a adopté trois amendements en seconde lecture. La Commission devrait rendre son avis sur ces amendements très prochainement.

7 Voir rapport de la commission des finances du Sénat n° 88 1993-1994 p. 27 et suivantes.

8 La loi financière du 2 juillet 1996 (article 104) précise que le prêt de titres peut être garanti par la remise d'espèces ou de titres " en pleine propriété" et que des remises complémentaires peuvent être faites pour tenir compte de l'évolution de la valeur des titres prêtés.

9 L'IME a publié, en janvier dernier, un rapport sur "
les normes applicables à l'utilisation des systèmes de règlement-livraison de titres de l'Union européenne dans le cadre des prêts du Système européen de banques centrales (SEBC) " dans lequel il préconise (norme n°1) que : " l'organisation des systèmes de règlement-livraison de titres doit reposer sur un contexte juridique solide, de façon à garantir l'irrévocabilité du règlement et du transfert des titres, ainsi qu'une protection adéquate des droits du SEBC afférents aux titres qu'il détient sur les comptes dont il dispose dans ces systèmes ".

10 Le deuxième considérant de la position commune arrêtée par le Conseil le 13 octobre 1997 (n° 43/97) prévoit que : " il est d'une importance capitale de réduire l'incertitude associée à la participation à des systèmes de règlement des opérations sur titres, en particulier lorsqu'il existe un lien étroit entre ces systèmes et les systèmes de paiement. "

11 Voir commentaire de l'article 18

12 Cette disposition vise en fait à interdire la pratique du " tirage sur la masse " qui consiste, pour un intermédiaire, à placer en garantie les titres que lui sont confiés ses clients, afin de couvrir un besoin de liquidité rendu nécessaire par les opérations qu'il réalise pour son propre compte.

13 article 8-1-3 du règlement général du Conseil des bourses de valeur et règlement n° 94-02 du Comité de la réglementation bancaire

14 C. Cass 22 novembre 1988 - et 23 novembre 1993

15 C. Cass 27 octobre 1993

16 Rapport AN n° 781 p. 202

17 Rapport annuel de la COB pour 1996

18 Voir, notamment, Rapport de M. Jean-Paul Saillard, à la Chambre de commerce et d'industrie de Paris du 26 février 1998 : " l'appel public à l'épargne : analyse des propositions de réforme ".

19 Rapport sur la modernisation du droit des sociétés publié à la documentation française, page 26.

20 L'article 1841 du code civil interdit aux sociétés n'y ayant pas été autorisées par la loi de faire appel à l'épargne publique ou d'émettre des titres négociables, à peine de nullité des contrats conclus ou des titres émis. C'est ainsi que seules les sociétés anonymes et les sociétés en commandite par actions sont autorisées, par la loi de 1966, à faire publiquement appel à l'épargne, à l'exclusion de toutes les autres sociétés commerciales (SARL, SNC, SAS, commandite simple). Peuvent également faire appel public à l'épargne, en vertu des textes spécifiques qui les régissent, les sociétés civiles dont l'objet est d'acquérir un patrimoine immobilier dans un but locatif (SCPI et sociétés d'attribution) , les banques mutualistes ou coopératives, certains groupements d'intérêt économique, les sociétés coopératives agricoles, les associations ayant une activité économique et les OPCVM.

21 Bulletin mensuel de la COB, novembre 1969.

22 Règlement n° 88-04 relatif aux informations à publier par les collectivités faisant appel public à l'épargne, homologué par arrêté du 6 juillet 1988, JO du 14 juillet 1988 p. 9158

23 Règlement n° 92-02 pris en application de la directive du 17 avril 1989, homologué par arrêté du 3 mars 1992, JO du 15 mars 1992 p. 3745.

24 Voir rapport COB 1984.

25 Aux termes de l'article 41 de la loi financière du 2 juillet 1996 un marché réglementé est un marché reconnu comme tel par le ministre de l'économie et des finances. L'article 42 de cette même loi prévoit que pour être reconnu comme réglementé, un marché d'instruments financiers doit garantir un fonctionnement régulier des négociations et faire l'objet d'une réglementation précise par l'entreprise de marché qui en assure le fonctionnement.

26 Pour un aperçu de cette jurisprudence voir la chronique de M. Jean-Guillaume d'Hérouville : "
La notion d'investisseur averti " dans la revue Banque & Droit de janvier-février 1998 n° 57 pp. 20 et suiv.

27 Le trente deuxième considérant de l'exposé des motifs de la DSI précise que "
l'un des objectifs de la présente directive est d'assurer la protection des investisseurs ; que à cette fin, il s'avère approprié de prendre en compte les différents besoins de protection des diverses catégories d'investisseurs et leur niveau d'expertise professionnelle ". L'article 11 de cette même directive dispose : " 1. (...) Ces règles (les règles déontologiques s'appliquant aux entreprises d'investissement) doivent (...) être appliquées de manière à tenir compte de la nature professionnelle de la personne à laquelle le service est fourni (...).  3. Lorsqu'une entreprise d'investissement exécute un ordre, le critère de la nature professionnelle de l'investisseur, aux fins de l'application des règles visées au paragraphe 1, est apprécié par rapport à l'investisseur qui est à l'origine de l'ordre, que celui-ci soit placé directement par l'investisseur lui-même ou indirectement par l'intermédiaire d'une entreprise d'investissement (...) ".

28 Rapport annuel de la COB (1996) p. 25.

29 Article 2 d) de la directive du Conseil n° 89/298/CE du 17 avril 1989 portant coordination des conditions d'établissement, de contrôle et de diffusion du prospectus à publier en cas d'offre publique de valeurs mobilières

30 J.O. débats A.N. p. 2353

31 Voir Rapport précité sur la modernisation du droit des sociétés, juillet 1996.

32 L'article 1841 du code civil, dispose en effet : "
il est interdit aux sociétés n'y ayant pas été autorisées par la loi de faire publiquement appel à l'épargne ou d'émettre des titres négociables, à peine de nullité des contrats conclus ou des titres émis ".

33 Directives 80/310/CE portant coordination des conditions d'établissement, de contrôle et de diffusion du prospectus à publier pour l'admission de valeurs mobilières à la cote officielle d'une bourse de valeurs (transposée par le règlement COB n° 91-02) et 89/298/CE du 17 avril 1989 portant coordination des conditions d'établissement, de contrôle et de diffusion du prospectus à publier en cas d'offre publique de valeurs mobilières (transposée par le règlement COB n° 92-02).

34 L'article 2 de la loi n° 72-6 relative au démarchage financier et à des opérations de placement et d'assurance définit le démarchage comme : "
le fait de se rendre habituellement au domicile ou à la résidence des personnes, ou sur leurs lieux de travail, ou dans des lieux publics, en vue de conseiller la souscription, l'achat, l'échange ou la vente de valeurs mobilières ou une participation à des opérations sur ces valeurs. Sont également considérés comme activités de démarchage les offres de services faites ou les conseils donnés, de façon habituelle, en vue des mêmes fins, au domicile ou à la résidence des personnes, ou sur les lieux de travail, par l'envoi de lettres ou circulaires ou par communications téléphoniques. "

35
"par dérogation aux dispositions du premier alinéa de l'article 16 du code de commerce, la comptabilité des SICAV et des fonds communs de placement peut être tenue en unités monétaires autres que le franc français"

36 Il s'agit de la problématique du " gouvernement d'entreprise ".

37 Il s'agit des fonds communs de placement à risques, des fonds communs de placement dans l'innovation, des fonds communs d'intervention sur les marchés à terme, régis notamment par des dispositions spécifiques de la loi n° 88-1201 du 23 décembre 1988 relative aux OPCVM.

38 Cette nouvelle catégorie d'OPCVM est prévue à l'article 28 du présent projet de loi.

39 L'article 29 du présent projet de loi introduit les nouvelles catégories de fonds maîtres et nourriciers.

40 Paragraphe II de l'article 6 de l'ordonnance n° 67-833 du 28 septembre 1967 instituant une Commission des opérations de bourse (COB) tel que modifié par l'article 25 du présent projet de loi.

41 Le seuil qui sera retenu par la COB pourrait se situer aux alentours de 2 ou 3 millions de francs ; à titre de comparaison, le seuil fixé pour les titres de créances négociables est de 1 million de francs.

42 Rappelons que cette référence permet, comparée au seuil fixé par la COB, de déterminer les conditions d'accès aux OPCVM bénéficiant d'une procédure allégée.

43 Rapport Sénat 1995-1996 n° 254 sur le projet de loi de modernisation des activités financières p. 40.

44 Pour être complet, il faut également mentionner la possibilité de rachat à la suite du refus d'agrément du cessionnaire des actions, lorsque les statuts prévoient cette procédure (article 275, deuxième alinéa de la loi de 1966) et le rachat d'un nombre limité d'actions (0,25 % du capital social) afin de faciliter une opération d'augmentation du capital social ou une fusion ou une scission par l'élimination de " rompus " (article 184 du décret du 23 mars 1967).

45 Pour être complet, il faut également mentionner, dans cette catégorie, le rachat d'actions en cas de transmission du patrimoine à titre universel ou à la suite d'une décision de justice (article 217-6 de la loi de 1966).

46 Voir
La vie française du 30 novembre au 6 décembre 1996 p. 16.

47 Alain Couret : "
Le rachat par une société de ses propres actions comme technique de gestion financière " Revue Banque & Droit n° 53 - mai-juin 1997 pp. 3 et suiv.

48 Colloque organisé en 1977 par l'Université Paris II "
Le capital social : grandeur ou décadence ? ".

49 Rapport précité pp. 61 et suivantes.

50 Rapport précité p. 252.

51 Voir rapport sur la modernisation du droit des sociétés de M. Philippe Marini p. 62.

52 Dans le cas de Mayotte, il s'agit de la loi portant diverses dispositions d'ordre économique et financier de 1977

53 Article 55 de la loi n° 96-609 du 5 juillet 1996 portant dispositions diverses relatives à l'outre-mer

54 Articles 27 à 39 de la loi n° 96-597 du 2 juillet 1996 de modernisation des activités financières.

55 Articles 32 et 33 de la loi financière.

56 Article 67 de la loi financière.

57 Article 11 de la loi financière.

58 Le CMF a été mis en place en octobre 1996.

59 Décret n° 96-868 du 3 octobre 1996 relatif à la formation et à l'organisation du Conseil des marchés financiers.

60 Article 1.1.2. du règlement général du CMF homologué par arrêté ministériel du 19 mars 1997 après avis de la COB et de la Banque de France.

61 Le CBV a pris, entre octobre 1995 et octobre 1996, 447 décisions relatives à des opérations financières dont 137 par consultation écrite (soit 31%). Le CMF a pris, entre octobre 1996 et avril 1997, 167 décisions relatives à des opérations financières dont 55 par consultation écrite (soit 33%).

62 En 1997, le CMF s'est réuni 29 fois (hors formations disciplinaires et " taux change ").

63 Avis de section du 9 septembre 1997.

64 Selon toute vraisemblance, ce décret devrait prévoir notamment un délai de réflexion de 48 heures et la faculté pour les membres du CMF de demander une délibération lors d'une réunion du Conseil.

65 Selon toute vraisemblance, ce règlement général devrait comporter la liste des décisions pouvant faire l'objet d'une délégation et prévoir l'obligation pour le président de rendre compte devant le Conseil de l'utilisation qu'il aura faite de cette délégation.

66 Règlement "
concernant l'information à publier lors des franchissements de seuils de participation dans le capital d'une société cotée " homologué par arrêté du 21 avril 1988 paru au Journal officiel du 23 avril 1988.

67 La Cour d'appel de Paris a jugé par arrêt du 20 février 1998 ADAM contre CGE et HAVAS, que la rédaction actuelle de ce texte ne permet pas de prendre en compte la notion de concert pour la détermination du contrôle.

68 L'article 31 du présent projet de loi est relatif au régime monétaire de Mayotte et de Saint-Pierre-et-Miquelon en vue de l'introduction de l'euro dans ces collectivités territoriales.


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