I. LE PROJET DE LIAISON " SAÔNE-RHIN " A-T-IL ÉTÉ VICTIME D'UNE COALITION ?

En apparence, le projet " Saône-Rhin " a été victime de l'hostilité des mouvements écologistes. Or, à y regarder de plus près il s'est heurté à de nombreuses autres oppositions plus discrètes mais tout aussi tenaces.

La liaison Saône-Rhin a-t-elle fait les frais d'un manque de préparation ? A-t-elle subi le contrecoup des transformations de l'environnement économique ? Est-elle victime d'une coalition hétéroclite d'adversaires incapables de proposer une solution alternative aux problèmes de transports entre bassin rhénan et Méditerranée ?

Telles sont les questions que l'on se propose d'examiner, en première analyse.

A. L'HOSTILITÉ DES ÉCOLOGISTES

Pour les associations écologistes réunies au sein du collectif " Saône et Doubs vivants ", le projet de liaison à grand gabarit occasionnait une perte patrimoniale irréparable , et causait des dommages aux hydrosystèmes sans commune mesure avec son intérêt économique.

Selon le Comité de liaison pour les alternatives aux canaux interbassins (CLAC), qui appartient au collectif précité : " le transport fluvial ne représente pas systématiquement le mode de transport le plus respectueux de l'environnement " car s'il " consomme moins d'énergie à la tonne-kilomètre en plaine et sur parcours dénué d'obstacle que le camion ou même que le fer, ce n'est pas vrai en zone de relief : le train qui n'est pas stoppé par les écluses reprend l'avantage, sa vitesse est également supérieure ".

Pour le CLAC, l'idée que le transport par voie d'eau est écologique est " totalement inexacte dès lors que l'on considère les impacts sur les milieux naturels " liés à la réalisation d'une infrastructure à grand gabarit.

Dès lors, la construction d'une liaison interbassin à grand gabarit empruntant le Doubs entre l'Alsace et la Franche-Comté aurait entraîné des conséquences dommageables, voire irréparables, car :

L'approvisionnement en eau du canal n'aurait pas été correctement assuré, le déficit annuel de l'écluse de Besançon pouvant ainsi atteindre de 5 millions de m3 en année moyenne à 30 millions de m3 en année sèche.

Une désorganisation du système hydraulique serait survenue entre Montbéliard et Besançon, région karstique où l'imperméabilisation de certains tronçons du cours du Doubs aurait pu rompre l'équilibre entre eaux superficielles et eaux souterraines.

La liaison aurait eu un impact sur l'approvisionnement en eau potable et menacé 35 des 77 puits existants.

Une augmentation des risques d'inondation aurait été causée par la suppression des méandres du Doubs et l'accélération du flux des crues qui auraient augmenté le risque de conjonction des crues du Doubs et de la Saône (d'autant que l'endiguement du canal aurait limité l'expansion de la rivière en crue).

Une dégradation de la qualité des eaux serait apparue car le canal aurait exacerbé l'effet des effluents présents dans l'eau en ralentissant le courant sur le Doubs à l'étiage et en empêchant la rivière de jouer son rôle de " station d'épuration naturelle " (dû à la présence de micro-organismes qui décomposent et synthétisent la matière organique excédentaire).

L'ouvrage aurait causé une perte patrimoniale irréparable du fait de la disparition d'espèces piscicoles (perte de près de 170 frayères) et de zones humides particulièrement riches en faune et en flore et, d'un point de vue global, de la transformation d'une rivière méandrée en voie canalisée.

Les critiques émises par les écologistes ont eu d'autant plus d'impact dans l'opinion publique que le projet lui-même a souffert, à l'origine, des approximations des experts.

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