2. Les prévisions de coût

L'évaluation du coût de l'ouvrage lui-même donna lieu à autant de controverses que l'estimation de la rentabilité du projet en termes de résultat d'exploitation.

Le coût de l'ouvrage

Selon les estimations de la CNR le projet coûtait, en juillet 1993, 17,3 milliards de francs hors TVA. Les principaux postes concernaient les écluses et stations de pompage (31 %), le chenal navigable et le tunnel (26 %), l'environnement et la dépollution (12 %), les ponts et routes (10 %). L'acquisition de terrains ne représentait que 6 % du coût total.

Pour l'IGF et l'IGPC 7( * ) , chargées d'examiner la validité de ces évaluations, l'estimation avait été sérieusement effectuée au plan technique et ne comportait pas de sous-évaluation grossière. Les inspections considéraient cependant que le coût du projet initial était d'environ 19,3 milliards de francs, soit 10 % de plus que l'estimation de la CNR. Elles suggéraient également diverses adaptations au projet et notamment des améliorations :

- techniques (mise du tirant d'air à la norme de 7 mètres pour le transport de conteneurs et construction d'écluses en nacelle pour le passage de petits bateaux) ;

- patrimoniales (conservation de sections du canal Freycinet, protection des sites archéologiques et amélioration de la traversée de Dôle) ;

- hydrauliques (amélioration des étiages et meilleure protection contre les crues).

Au total, la mission de l'IGF et de l'IGPC chiffrait à 2,5 milliards de francs les surcoûts liés à l'adaptation du projet 8( * ) .

C'est ainsi que le coût total hors taxe en valeur 1993 était évalué à 22,087 milliards de francs , soit 23,275 milliards de francs hors taxe en 1995. Encore fallait-il ajouter à ce montant la TVA, ce qui avait pour effet de porter le coût toutes taxes comprises de l'investissement à 27,885 milliards de francs .

Le même rapport observait que le coût des ressources immobilisées par EDF pendant les travaux correspondants aux " intérêts intercalaires " actualisés au taux de 8 % compte tenu de l'échéancier des dépenses, représentait 21,5 milliards de francs .

Le coût total de l'ouvrage en valeur 1995 était par conséquent estimé à 49,4 milliards de francs.

La même mission présenta également une évaluation du résultat d'exploitation de l'ouvrage.

Le résultat d'exploitation prévisionnel

Selon les calculs de la mission " Regnié-Wallon ", les recettes tirées de l'exploitation n'auraient pas permis d'équilibrer les dépenses d'exploitation hors charge d'amortissement .

Avec un trafic de 2,5 millions de tonnes en 2010 et de 13 millions de tonnes en 2030, le déficit d'exploitation aurait été de 108 millions de francs tant en 2010 qu'en 2030. Ainsi, comme l'observent les auteurs du rapport précité, " le résultat d'exploitation aurait été relativement indifférent au niveau effectif de trafic ou au rythme de montée en puissance de la liaison ".

Si le trafic avait atteint 13 millions de tonnes, il aurait malgré tout été nécessaire de fixer le péage à 6 centimes la tonne kilomètre pour que le résultat d'exploitation soit équilibré. Or, ce montant se serait avéré prohibitif, aussi bien par rapport aux péages pratiqués sur les autres réseaux fluviaux européens que comparé à celui fixé sur les autoroutes (en moyenne 5 centimes par tonne/kilomètre).

Dans ces conditions la mission d'inspection estimait que l'attribution d'une subvention d'équilibre était indispensable . Restait à savoir si celle-ci devait provenir d'EDF, de l'Etat, de VNF ou de la CNR.

Il va sans dire que compte tenu de l'importance des sommes en jeu, des opinions contrastées se firent jour au sein de l'Etat sur l'opportunité de construire le canal.

Page mise à jour le

Partager cette page