CHAPITRE II



LE PRÉSENT MALMENÉ :
LES GRANDS PROGRAMMES ALTÉRÉS

La " revue des programmes " qui avait consisté à analyser tous les programmes d'équipement en les confrontant aux besoins des armées avait eu pour résultat, sinon un retour aux crédits d'équipement fixés par la loi de programmation, du moins leur rétablissement après " l'encoche " du budget de 1998. Beaucoup d'avantages étaient prêtés à cette analyse notamment celui de renoncer à la pratique coûteuse d'allongement des délais de réalisation des équipements et de donner une assise solide aux quatre dernières années de la loi de programmation militaire. On sait que cette logique n'a prévalu qu'une année puisque les crédits de paiement des titres V et VI sont à nouveau en baisse. Quelles sont les conséquences dans les trois grands domaines de ce retour aux pratiques qu'on prétendait éviter il y a un an ?

I. LES PROGRAMMES NUCLÉAIRES

A. L'ÉVOLUTION GÉNÉRALE DES CRÉDITS

Les crédits de paiement s'élèvent à 15 855 millions de francs, les autorisations de programme à 18 423 millions de francs.

Sur les onze dernières années l'évolution des crédits de paiement est la suivante :

ÉVOLUTION DES CRÉDITS NUCLÉAIRES DEPUIS 1990

(Crédits de paiement)

 

En millions
de francs courants

En millions
de francs constants 1999

1990

32 089

37 429

1991

31 024

35 150

1992

29 866

33 177

1993

26 420

28 684

1994

21 721

23 193

1995

20 745

21 786

1996

19 452

20 137

1997

18 848

19 234

1998

16 628

16 762

1999

16 624

16 624

2000

15 855

15 682

2000/1999

- 4,6 %

- 5,7 %

2000/1990

- 50,6 %

- 58,1 %

La réduction des crédits de paiement consacrés au domaine nucléaire est très importante, proche de 60 % entre 1990 et 2000. Il est vrai qu'elle est inscrite dans la loi de programmation militaire conformément au calendrier suivant :

(En millions de francs constants 1995, selon la programmation)

1997

1998

1999

2000

2001

2002

Total

18 361

18 103

17 178

17 447

17 142

16 943

105 785

Cependant, la réduction du montant des crédits qui n'aurait dû être que de 5 % entre 1997 et 2000 est en fait de plus de 18 %. Elle est donc déjà plus de deux fois supérieure à ce qu'elle aurait dû être sur toute la durée de la loi de programmation militaire.

Par ailleurs, les crédits de paiement de la dissuasion ont participé pour 488 millions de francs à la ponction opérée sur les titres V et VI au profit du titre III par le décret d'avance du 2 septembre 1999.

L'ensemble du secteur industriel concerné par la réalisation des armes nucléaires est touché par cette réduction considérable des moyens : l'arsenal de Cherbourg de la Direction des constructions navales, le Commissariat à l'énergie atomique, Aérospatiale-Matra et la SNPE.

B. LES FORCES NUCLÉAIRES STRATÉGIQUES

1. Les sous-marins lanceurs d'engins de la nouvelle génération

Aux reports déjà programmés s'ajoutera celui de l'admission au service actif du quatrième SNLE/NG qui n'interviendra qu'en 2008 afin de l'équiper directement en missiles M 51.

COMMANDES ET LIVRAISONS DES SNLE/NG

 

Commandes

Admission service actif selon la programmation

Admission
service actif

Le Triomphant.........

Juin 1987

Mars 1997

Mars 1997

Le Téméraire...........

Octobre 1989

Avril 1999

Automne 1999

Le vigilant...............

Mai 1993

Décembre 2002

Juillet 2004

N° 4.........................

2000

Juillet 2007

Juillet 2008

On sait que les reports précédents ont d'ores et déjà entraîné un surcoût de plus de 2,5 milliards de francs.

Le coût des programmes pour six SNLE/NG était évalué à 90 milliards de francs (francs 1997). Le coût pour quatre SNLE/NG est aujourd'hui à 87 milliards de francs.

2. La composante aérienne

Elle est constituée de trois escadrons de MIRAGE 2000 N porteurs de missiles ASMP (air-sol moyenne portée) et de deux flottilles de SUPER-ÉTENDARD. Une partie de ces avions devrait être remplacée par une version particulière du RAFALE conformément au " modèle 2015 ".

Vers 2010, l'ASMP actuel devrait être remplacé par l'ASMP amélioré, d'une portée plus grande et mettant en oeuvre une charge nucléaire nouvelle. Son développement commencera en 2000. Selon la programmation, 2 milliards de francs devront aller à ce programme pour la période 1997-2002. Le budget prévoit 206 millions de francs pour la poursuite du projet.

3. Les missiles

Outre le missile aéroporté ASMP, qui vient d'être mentionné, les missiles de la force nucléaire stratégique comprennent ceux équipant les SNLE/NG : missiles M 45 et missiles M 51.

Les SNLE de l'ancienne génération sont équipés du missile M 4.

Le missile M 45, version modernisée du missile M 4, doit équiper les trois premiers SNLE de la nouvelle génération. Sa portée, sa furtivité, sa capacité de pénétration sont accrues.

Le missile M 51 doit équiper directement le quatrième SNLE/NG. Pour cela, sa mise en service a été avancée de 2010 à 2008. Le coût du développement est estimé à 30 milliards de francs, hors têtes nucléaires, en diminution de plus de 20 % par rapport à celui du programme M 5 initialement prévu (révision des performances et diminution du nombre des essais). En 2000, doit être passée une commande globale correspondant à deux ans de développement du missile M 51. Pour cette raison, les autorisations de programme s'élèvent à 5 milliards de francs. Les crédits de paiement sont de 1,9 milliard de francs.

4. La simulation des essais

En raison de l'arrêt des essais nucléaires et de la signature en septembre 1996 du Traité d'interdiction des essais nucléaires, il a été jugé nécessaire de mettre au point un programme de simulation des essais. Son objet est de garantir la fiabilité et la sécurité des charges nucléaires des armes actuelles et futures.

La conduite de ce programme de simulation est extrêmement complexe, elle repose sur quatre éléments : l'expertise scientifique et technologique dans un domaine très spécifique du personnel de la Direction des applications militaires du CEA, la mise au point de la machine de radiographie AIRIX, celle du laser mégajoule et le développement de logiciels de calcul très complexes.

Le coût de l'ensemble du programme est estimé à 15 milliards de francs sur une période d'une dizaine d'années. Il est doté en 2000 de 1,8 milliard de francs de crédits de paiement.

5. Les crédits transférés au Commissariat à l'énergie atomique

Ils s'élèveront, pour les crédits de paiement, en 2000, à 7 milliards de francs contre 7,4 milliards de francs pour 1999 et diminuent donc de 5 %.

TRANSFERTS AU PROFIT DU CEA

(En millions de francs courants)

 

Budget 1999

Projet de budget 2000

 

A.P.

C.P.

A.P.

C.P.

Programme SNLE/NG ............................................

57

172,3

67

56,1

Force océanique stratégique hors SNLE/NG ..........

70,5

70,5

51

68

Armement et propulsion nucléaires.........................

5 486

5 448

5 358,3

5 120,4

Charges nucléaires .................................................

1 512

1 487

1 581

1 609

Programmes et constructions neuves ......................

20,2

18,2

40

17,2

Programme Porte-avions Charles de Gaulle ...........

7,4

109

49

66,6

Equipements militaires à terre ................................

8,1

8,1

12

7,8

Maintien en condition opérationnelle des bâtiments

86,9

79,5

118

76,3

TOTAL ..............................................

7 248,1

7 392,6

7 276,3

7 021,4

Les crédits demandés pour le démantèlement des installations et des armements sont de 717 millions de francs.

La loi de programmation 1997-2002 annonçait, en effet, le démantèlement du système HADES et des missiles du plateau d'Albion ainsi que des installations de Pierrelatte et de Marcoule. La fermeture des centres d'expérimentations du Pacifique est, en outre, la conséquence de l'arrêt des essais en vraie grandeur.

Le démantèlement du système HADES et des missiles du plateau d'Albion s'est achevé à la fin de l'année 1998. Les travaux de génie civil du plateau d'Albion devraient être prochainement terminés. Le coût total du démantèlement des deux systèmes est de 530 millions de francs.

Le démantèlement de l'usine de Pierrelatte (uranium enrichi) se poursuivra jusqu'en 2002 ; son coût est estimé à 2 milliards de francs. Le démantèlement de l'usine de Marcoule (plutonium) a débuté en 1998 pour se poursuivre peut-être pendant plusieurs dizaines d'années. Le coût pourrait atteindre 30 milliards de francs dont la moitié serait prise en charge par le ministère de la défense.

Une dotation de 691 millions de francs en augmentation de 12,7 % est inscrite au titre VI du projet de budget au titre des compensations allouées au Territoire de la Polynésie française ; on peut s'interroger sur le bien-fondé de l'imputation de cette dotation au budget de la défense.

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