Intérieur et décentralisation : décentralisation
Michel MERCIER
Table des matières
- I. EVOLUTION GÉNÉRALE DES CRÉDITS
-
II. PRINCIPALES OBSERVATIONS DU RAPPORTEUR
- A. L'AUGMENTATION DES CONCOURS DE L'ETAT SERT SURTOUT À COMPENSER LA DISPARITION DE RESSOURCES FISCALES
- B. L'AUGMENTATION DES DOTATIONS DOIT ÊTRE MISE EN PARALLÈLE AVEC CELLE DES CHARGES CONFIÉES AUX COLLECTIVITÉS LOCALES
- C. LES PRINCIPALES DISPOSITIONS DU PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2002
- D. LES REFORMES INDISPENSABLES
I. EVOLUTION GÉNÉRALE DES CRÉDITS
A. LES CRÉDITS INSCRITS AU BUDGET DU MINISTÈRE DE L'INTÉRIEUR
1. Evolution d'ensemble
Dans le
projet de loi de finances pour 2002, les crédits de l'agrégat 21
«
Collectivités locales
» représentent
45,4 % du total des crédits inscrits au budget du ministère
de l'intérieur. Leur montant s'élève à
7.832 millions d'euros, en baisse de 109 millions d'euros par rapport
à 2001 (-2,4 %).
Les dépenses d'intervention (titre IV) progressent de 209 millions
d'euros (+3,4 %) tandis que les subventions d'investissement (titre VI)
diminuent de 319 millions d'euros (-18,2 %).
La diminution s'explique par une rationalisation des règles de
traduction en crédits de paiement des autorisations de programme
ouvertes au titre de la dotation globale d'équipement (DGE) des communes.
Le montant des autorisations de programme demandé pour 2002
s'élève à 1.710 millions d'euros. Il est inférieur
de 84 millions d'euros (-4,7 %) à celui demandé en 2001. Ce
montant constitue le solde entre, d'une part, la progression de 846 millions
d'euros des autorisations de programme demandées au titre de la DGE, de
la dotation régionale d'équipement scolaire (DRES) et de la
dotation départementale d'équipement des collèges (DDEC)
et, d'autre part, la non dotation du chapitre 67-50 au titre du regroupement
communal, dont l'enveloppe s'élevait en 2001 à 762 millions
d'euros.
Comme les années précédentes, les crédits inscrits
dans la loi de finances pour 2002 ne devraient pas refléter la
totalité des crédits disponibles au titre de 2002.
En 2001, 27,2 % des crédits ouverts au titre de l'exercice provenaient
de reports de 2000 vers 2001. Hors fonds structurels européens, ce
pourcentage s'élevait à 11,9 %.
Part des reports dans les crédits ouverts en 2001
(en millions d'euros)
En 2000, l'écart entre les crédits ouverts au titre de l'exercice et les crédits inscrits dans la loi de finances s'élevait à 28,5 %. En 2001, ce taux est redescendu à 15,6 %.
Ecart entre les crédits inscrits dans la loi de finances 2001 et les crédits ouverts au titre de l'exercice
(en millions d'euros)
|
Crédits LFI 2001 |
Crédits ouverts en 2001 |
Variation |
Ecart en % |
Agrégat « collectivités locales » |
7.942,3 |
11.117,3 |
3.175 |
+ 40 % |
Agrégat « collectivités locales » - fonds structurels |
7.942,3 |
9.186,4 |
1.244,1 |
+ 15,6 % |
Comme
l'année dernière, il convient de remarquer que l'article 60
«
Programme de sécurité dans les
établissements scolaires
» du chapitre 67-50 n'est
pas doté en loi de finances mais supporte des dépenses
importantes. En 2000, 155 millions d'euros ont été ouverts sur ce
chapitre à partir de reports de l'exercice 1999 et 41,42 millions
d'euros ont été consommés (271,7 millions de francs), soit
un montant équivalent à la dépense constatée en
1999.
Ces crédits constituent les reliquats d'un plan quinquennal de mise en
sécurité des établissements scolaires, lancé en
1994 et clôturé le 30 mars 2000. La date d'affectation des
autorisations de programme a été reportée au
31 décembre 2001. Au 1
er
janvier 2001, il ne restait
plus que 3,9 millions d'euros disponibles sur cet article.
2. Les dotations de compensation des transferts de compétences
La
dotation générale de décentralisation (DGD)
, inscrite
au chapitre 41-56 du budget du ministère de l'intérieur,
progresse de 3 % en 2002.
L'article L. 1614-1 du code général des collectivités
territoriales prévoit que cette dotation évolue comme la dotation
globale de fonctionnement, qui progresse de 4,07 % en 2002. Pourtant, le
taux de progression de la DGD constaté est rarement identique à
celui de la DGF car elle fait l'objet chaque année d'ajustements pour
tenir compte de l'évolution de la répartition des
compétences et des personnels entre l'Etat et les collectivités
locales.
Ainsi, dans le projet de loi de finances pour 2002, la DGD des communes
progresse de 4,01 %, la DGD des départements de 1,8 % et la
DGD des régions de 4,07 %.
Il convient de rappeler que, en dépit l'objectif affiché par les
lois de décentralisation, l'intégralité des crédits
correspondant à la compensation des transferts de compétence
n'est pas regroupé au sein de la DGD. D'autres crédits subsistent
au ministère de la culture, afin de lui permettre d'atteindre plus
facilement l'objectif de 1 % des dépenses du budget de l'Etat, et au
ministère de l'emploi et de la solidarité au titre de la
formation professionnelle.
Le graphique ci-dessous met en évidence l'évolution regrettable
dont font l'objet les principes de la compensation des transferts de
compétences depuis quatre ans. L'article L. 1614-4 du code
général des collectivités territoriales prévoit que
ceux-ci sont principalement compensés par des transferts de
fiscalité et, pour le solde, par la DGD. On constate toutefois
qu'aujourd'hui, la DGD des départements sert presque exclusivement
à compenser des pertes de recettes issues de la suppression ou de la
réduction du produit d'impôts transférés au
début des années 80.
La collectivité territoriale de Corse perçoit une DGD
spécifique, inscrite au chapitre 41-57 du budget du ministère de
l'intérieur. Elle augmente de 5,1 % afin de tenir compte des transferts
de compétences prévus dans le projet de loi relatif à la
Corse. En application de l'article 39 de ce projet, les crédits de
l'article 30 «
Offices de développement agricole et
hydraulique
» sont fondus dans ceux de l'article 10
«
Compensation pour divers transferts de
compétences
».
La
dotation régionale d'équipement scolaire
(DRES) et la
dotation départementale d'équipement des collèges
(DDEC) sont indexées sur l'évolution de la formation brute de
capital fixe des administrations publiques, dont le taux d'évolution
pour 2002 est de 1,7 %. Ce taux est appliqué au montant des
autorisations de programme de 2001 et permet, pour 2002, de demander 561,8
millions d'euros pour la DRES et 279 millions d'euros pour la DDEC.
En crédits de paiement, les crédits de la DRES progressent de
2 %, et s'élèvent à 554,4 millions d'euros, tandis
que ceux de la DDEC augmentent de 2,2 %, pour s'établir à
275,3 millions d'euros.
3. La dotation globale d'équipement
L'évolution des crédits de la dotation globale d'équipement suscite parfois des interrogations légitimes de la part des élus locaux. Alors que, sur le terrain, les crédits disponibles ne parviennent pas à satisfaire toutes les demandes enregistrées, on constate chaque année un niveau de reports de crédits de paiement très important.
Part des crédits reportée de 2000 sur 2001
(en millions d'euros)
|
Dotation en loi de finances 2000 |
Crédits ouverts |
Reports sur 2001 |
% de crédits reportés par rapport aux crédits inscrits en loi de finances |
% de crédits reportés par rapport aux crédits ouverts |
Communes |
403,94 |
848,99 |
497,09 |
123,06 % |
58,55 % |
Départements |
421,64 |
567,21 |
100,25 |
23,77 % |
17,67 % |
L'évolution des reports de crédits entre 2000 et 2001 mérite une explication :
Evolution des reports de crédits de la DGE
(en millions d'euros)
|
Reports de 1999 sur 2000 |
Reports de 2000 sur 2001 |
Evolution |
Communes 1 ère part |
191,75 |
69,79 |
- 65,7 % |
Communes 2 ème part |
390,51 |
427,3 |
+ 9,4 % |
Départements 1 ère part |
37,19 |
52,30 |
+ 40,6 % |
Départements 2 ème part |
62,65 |
47,95 |
- 24,5 % |
Total |
682,09 |
597,34 |
- 12,5 % |
S'agissant de la
DGE des départements
,
l'évolution des reports entre 2000 et 2001 est conforme aux
résultats constatés les années antérieures. Sachant
que les crédits relatifs au quatrième trimestre d'une
année ne sont délégués qu'au premier trimestre de
l'année suivante, environ un quart des crédits inscrits en loi de
finances initiale est reporté. Pour la première part, la dotation
en loi de finances pour 2000 s'élevait à 252,62 millions d'euros,
soit 4,8 fois le montant des reports constatés en fin d'exercice. Pour
la deuxième part, ce montant était de 180,69 millions d'euros,
soit 3,7 fois le montant des reports.
S'agissant de la
première part de la DGE des communes
, qui n'est
plus dotée en loi de finances depuis 1996 et qui se caractérisait
depuis cette date par d'importants reports d'année en année, le
montant des reports diminue de 121,96 millions d'euros (800 millions de
francs) entre 2000 et 2001. Cela s'explique par l'annulation de 600 millions de
francs de reports de crédits dans la loi de finances rectificative de
l'hiver 2000 et par l'utilisation progressive des 600 millions de francs
restants pour la DGE des services départementaux d'incendie et de
secours.
S'agissant de la
deuxième part de la DGE des communes
, les
reports augmentent entre 2000 et 2001 de 36,79 millions d'euros
(241,33 millions de francs). Cette progression, inférieure à
celle constatée entre 1999 et 2000, s'explique par les règles
d'ouverture des crédits de paiement et des autorisations de programme
pour la DGE des communes. Jusqu'en 2002, les ouvertures étaient de
même montant, ce qui se traduisait mécaniquement par une
augmentation du montant des reports d'une année sur l'autre puisque
l'intégralité des crédits de paiement n'était,
logiquement s'agissant de dépenses d'investissement, pas
consommée au cours de l'exercice.
Les
services départementaux d'incendie et de secours
(SDIS)
bénéficient d'une fraction des crédits de la DGE des
départements. Ces crédits sont, en application de l'article 24 de
la loi n° 99-1126 du 28 décembre 1999 relative à la prise en
compte du recensement général de population de 1999 pour la
répartition des dotations de l'Etat aux collectivités locales,
majorés de 45,73 millions d'euros (300 millions de francs) par an, en
crédits de paiement et en autorisations de programmes.
Cette majoration ne constitue pas un effort financier supplémentaire de
l'Etat puisqu'elle est financée, chaque année, pour 15,24
millions d'euros par un prélèvement sur la DGE des communes et
pour 30,49 millions d'euros par les crédits de l'ancienne
première part de la DGE des communes.
En 2002
, le taux d'indexation de la DGE, qui est celui de
l'évolution de la formation brute de capital fixe des administrations
publiques (+ 1,7 %), sera appliqué au montant des
autorisations de programme (AP) de 2001. La DGE des communes
bénéficiera de 417,3 millions d'euros tandis que celle des
départements sera dotée de 447,3 millions d'euros.
En crédits de paiements (CP), l'année 2002 est marquée par
la rationalisation de la dotation pour la DGE des communes. Pour la
première fois, son montant ne sera pas équivalent à celui
des AP mais à 42 % de celui-ci. Cela permettra de faire diminuer le
stock de crédits reportés vers 2003.
Il convient de relever que si, pour le calcul de l'enveloppe normée des
concours de l'Etat aux collectivités locales, le montant retenu pour la
DGE était celui des CP et non celui des AP, la baisse de la variable
d'ajustement aurait été réduite de 242 millions
d'euros en 2002.
4. Les compensations de perte de recettes fiscales versées aux régions
Les
crédits du chapitre 41-55 du budget du ministère de
l'intérieur compensent aux régions les pertes de recettes
résultant de la suppression au cours des dernières années
de deux impôts auparavant perçus à leur profit, la taxe
additionnelle aux droits de mutation à titre onéreux et la taxe
d'habitation.
Les deux compensations versées sont indexées sur le taux
d'évolution de la dotation globale de fonctionnement (4,07 %).
Cependant, la compensation de la suppression de la part régionale de la
taxe d'habitation fait l'objet d'une revalorisation en 2002 pour tenir compte
de la réalité de la perte enregistrée et pour ajuster les
montant initiaux, qui étaient des estimations.
Les crédits correspondants pour 2002 s'établissent à 1.819
millions d'euros (11.931 millions de francs). En 1998, le chapitre 41-55 du
budget du ministère de l'intérieur n'existait pas et, en 1999, sa
première dotation s'élevait à 807 millions d'euros (5.300
millions de francs).
Attributions par habitant des compensations inscrites au chapitre 41-55
|
Compensation DMTO par habitant |
Compensation
|
|
Compensation DMTO par habitant |
Compensation taxe d'habitation par habitant |
Alsace |
10,50 F |
13,36 F |
Nord-Pas de Calais |
9,48 F |
15,53 F |
Aquitaine |
12,22 F |
16,46 F |
Basse-Normandie |
11,17 F |
15,90 F |
Auvergne |
8,40 F |
16,09 F |
Haute-Normandie |
11,31 F |
16,07 F |
Bourgogne |
11,04 F |
12,17 F |
Pays de Loire |
11,06 F |
15,87 F |
Bretagne |
11,12 F |
17,76 F |
Picardie |
10,57 F |
16,86 F |
Centre |
11,59 F |
17,11 F |
Poitou-Charentes |
10,37 F |
14,97 F |
Champagne Ardennes |
|
|
Provence-Alpes-Côte d'Azur |
|
|
Corse |
9,28 F |
17,15 F |
Rhône-Alpes |
12,19 F |
12,32 F |
Franche-Comté |
8,94 F |
15,08 F |
Guadeloupe |
4,83 F |
6,31 F |
Ile-de-France |
22,74 F |
15,52 F |
Guyane |
3,27 F |
3,76 F |
Languedoc-Roussillon |
12,83 F |
18,20 F |
Martinique |
3,13 F |
12,77 F |
Limousin |
8,06 F |
21,27 F |
Réunion |
3,59 F |
9,02 F |
Lorraine |
9,29 F |
12,72 F |
Total |
13,45 F |
15,41 F |
Midi-Pyrénées |
9,55 F |
16,90 F |
|
|
|
Population issue du recensement général de 1999.
L'article 6 de la loi organique n° 2001-692 du 1 er août 2001 dispose qu' « un montant déterminé de recettes de l'Etat peut être rétrocédé au profit des collectivités territoriales (...) en vue de (...) compenser des exonérations, des réductions ou des plafonnements d'impôts établis au profit des collectivités territoriales ». Votre rapporteur considère que les crédits du chapitre 41-55 auraient vocation à être rétrocédés aux collectivités locales par la voie d'un prélèvement sur les recettes de l'Etat. Un tel procédé éviterait de gonfler artificiellement de 1.819 millions d'euros (11.931 millions de francs) le budget du ministère de l'intérieur.
5. La compensation des exonérations de taxe foncière sur les propriétés bâties
L'article 50 «
Contrepartie de
l'exonération
d'impôt foncier
» du chapitre 41-51 du budget du
ministère de l'intérieur a pour objet de compenser aux
collectivités locales les pertes de recettes résultant de :
- l'application des dispositions de l'article 6 du décret n° 57-393
du 28 mars 1957, qui prévoit que lorsque les exonérations de taxe
foncière sur les propriétés bâties prévues
aux articles 1384, 1384 A et 1384 D du code général des
impôts et aux I et II
bis
de l'article 1385 du même code
entraînent pour les communes et les établissements publics de
coopération intercommunale à fiscalité propre une perte de
recette supérieure à 10 % du produit communal total, ces
collectivités et établissements publics reçoivent une
allocation égale à la différence entre ladite perte de
recettes et une somme égale à 10 % du produit de la taxe
foncière sur les propriétés bâties. Les
crédits nécessaires sont évalués tous les ans par
la direction générale des impôts ;
- l'article 42 de la loi de finances pour 2001 (n° 2000-1352 du
30 décembre 2000), qui instaure un abattement de 30 % des bases de
taxe foncière sur les propriétés bâties au
bénéfice des logements sociaux situés dans les zones
urbaines sensibles.
Le projet de loi de finances pour 2001 prévoyait d'inscrire à cet
article 30,49 millions d'euros (200 millions de francs). L'adoption des
dispositions devenues l'article 42 de la loi de finances pour 2001 a
porté ce montant à 107,9 millions d'euros (707,8 millions de
francs).
Pour 2002, la dotation proposée s'élève à 96
millions d'euros (629 millions de francs), soit une diminution de 12
millions d'euros (78 millions de francs).
B. LES CONCOURS FINANCIERS DE L'ETAT AUX COLLECTIVITÉS LOCALES
1. La répartition entre les prélèvements sur recettes et le budget de l'Etat
Votre
rapporteur retient pour son examen des concours financiers de l'Etat aux
collectivités locales l'ensemble des dotations de l'Etat, des
compensations de pertes de recettes fiscales et les dégrèvements
d'impôts locaux. En revanche, il ne tient pas compte des subventions
accordées par les différents ministères aux
collectivités locales dans le cadre de leurs propres politiques.
Dans le projet de loi de finances pour 2002, les concours financiers de l'Etat
aux collectivités locales s'élèvent à 53.204
millions d'euros (348.955 millions de francs).
Au sein de ce total,
34.636 millions d'euros proviennent de
prélèvements sur les recettes de l'Etat, soit 65,1 %.
Ce
pourcentage est globalement stable depuis 1998.
Prélèvements sur les recettes de l'Etat au profit des collectivités locales
(en millions d'euros)
2. La répartition entre dotations, compensations et dégrèvements
Depuis
1998, la part des dotations dans la masse totale des concours de l'Etat aux
collectivités locales diminue progressivement. Elle est passée de
65 % à 50 % en cinq ans.
A l'inverse, les compensations d'exonérations fiscales ou de
suppressions d'impôts locaux occupent une part croissante et sont
passées de 11 % en 1998 à 31 % dans le projet de loi de
finances pour 2002.
Répartition des concours de l'Etat aux collectivités locales entre dotations, compensations et dégrèvements
(en millions d'euros)
3. Les dotations
Entre
2001 et 2002, le montant des dotations de l'Etat aux collectivités
locales progresse d'environ 2,6 %, un taux de progression comparable
à celui de l'année précédente.
La comparaison de l'évolution du montant des dotations depuis 1998 est
plus délicate car le montant de celle-ci est
« gonflé » par l'intégration à la DGD
de sommes correspondant à la compensation de pertes de recettes fiscales
enregistrées par les départements du fait de la réduction
du taux des droits de mutation à titre onéreux et de la
suppression partielle de la vignette.
En tenant compte de ces compensations, les dotations ont progressé de
21,5 % au cours de la période. Hors compensations, la progression
s'établit à 8,4 %. Ce taux aurait été plus
élevé si la recentralisation de la compétence d'aide
médicale des départements, résultant des dispositions de
la loi n° 99-641 du 27 juillet 1999 relative à la couverture
maladie universelle ne s'était pas traduite par une diminution de 1.430
millions d'euros de la DGD des départements.
Les
dotations de l'Etat aux collectivités locales peuvent être
rangées dans cinq sous ensembles :
La dotation globale de fonctionnement (DGF)
Le montant de la dotation globale de fonctionnement (DGF) inscrit dans le
projet de loi de finances dépend de deux facteurs : le taux
d'évolution de celle-ci, calculé en application des dispositions
du code général des collectivités territoriales, et
l'existence ou non d'abondements du montant de certaines de ses composantes. Le
taux d'évolution de la DGF qui sert à calculer le montant de
cette dotation pour l'année à venir est appliqué au
montant de la DGF de l'exercice en cours, minoré de celui des
abondements dont elle a pu faire l'objet au titre de cet exercice.
-
L'application du taux d'évolution de la DGF
. L'article L.
1613-1 du code général des collectivités territoriales
dispose que la DGF progresse comme le taux prévisionnel
d'évolution des prix pour l'année à venir, majoré
de la moitié du taux d'évolution du PIB pour l'année en
cours.
Pour 2002, l'indice prévisionnel des prix s'établit à
1,5 %, tandis que le taux de croissance du PIB pour 2001 est estimé
à 2,3 %. L'indice de la DGF s'élève donc à
2,65 %.
Ce taux est appliqué au montant de la DGF 2001
« recalée », c'est-à-dire recalculée
en fonction des derniers indices économiques connus et du montant
définitif de la DGF de 2000. Pour 2001, le
« recalage » de la DGF permet d'appliquer le taux de
progression pour 2002 à un montant revalorisé de 240,11 millions
d'euros.
Recalage de la DGF 2001
(en millions d'euros)
|
DGF 2001 initiale |
DGF 2001 « recalée » |
Montant |
17.372,93 |
17.613,04 |
Indice d'évolution entre 2000 et 2001 |
2,9 % |
3,25 % |
Indice prévisionnel des prix 2001 |
1,2 % |
1,6 % |
Taux de croissance du PIB 2000 |
3,4 % |
3,3 % |
En
appliquant le taux de progression de la DGF pour 2002 au montant
« recalé » pour 2001, on obtient un montant de DGF
pour 2002 de
18.079,69 millions d'euros
(118.594,99 millions de
francs)
1(
*
)
. Ce montant est en progression de
4,07 %
par rapport au montant ouvert en 2001, déduction faite de
la régularisation négative au titre de 1999
(-146,33 millions d'euros).
-
les abondements dont fait l'objet la DGF
. Pour obtenir le montant de
la DGF inscrit dans le projet de loi de finances pour 2002, il convient
d'ajouter aux 18.079,69 millions d'euros le montant des différents
abondements dont fait l'objet la DGF. Dans le projet de loi de finances pour
2002, ces abondements sont au nombre de trois. En application de l'article 22,
les sommes extérieures à la DGF concourant au financement des
communautés d'agglomération sont
« rapatriées » au sein de celle-ci, pour un montant
de 309,01 millions d'euros. L'article 24 prévoit une majoration de la
dotation de solidarité urbaine de 121,96 millions d'euros et l'article
25 une majoration de la dotation de solidarité rurale de 24,36 millions
d'euros.
Au total le montant de la DGF inscrit dans le projet de loi de finances pour
2002 s'établit à
18.535,02 millions d'euros, soit 4,67 %
de plus qu'en 2001.
Il convient cependant de souligner que :
- au sein de la majoration de 309 millions d'euros destinée au
financement des communautés d'agglomération, 126 millions
d'euros sont « gagés » par une réduction
d'autant du montant de la dotation de compensation de la taxe professionnelle.
En ne tenant pas compte de ce transfert, la DGF pour 2002 progresse de
3,95 % entre 2001 et 2002 ;
- le 14 novembre 2001, la secrétaire d'Etat chargée du
budget, à l'occasion de sa présentation du projet de loi de
finances rectificative pour 2001, a déclaré que
«
personne ne conteste que nous ferons une croissance de l'ordre
de 2 % en 2001
». La DGF pour 2002 ayant été
calculée à partir d'un taux de croissance pour 2001 de 2,3 %, son
montant serait surévalué si le taux effectivement constaté
était celui évoqué par la secrétaire d'Etat.
Les dotations indexées sur le taux d'évolution de la DGF
Plusieurs dotations de l'Etat aux collectivités locales sont
indexées sur le taux d'évolution de la DGF. Le taux retenu dans
ce cas de figure est celui de l'évolution du montant de la DGF inscrit
dans le projet de loi de finances, hors abondements exceptionnels, par rapport
au montant, également hors abondements, inscrit dans la loi de finances
de l'année précédente. Pour 2002, ce taux est celui de
4,07 %.
Il s'applique à :
- la dotation générale de décentralisation (
DGD
) et
la
DGD-Corse
, dont les évolutions ont été
décrites dans le I ;
- la
dotation spéciale instituteurs
(DSI), qui est indexée
sur la DGF mais dont le montant diminue de 11 % du fait de la prise en
compte de la réduction du nombre d'ayants-droits en raison de
l'intégration progressive des instituteurs dans le corps des professeurs
des écoles. Elle s'établit à 293,54 millions
d'euros ;
- la
dotation élu local
, dont le montant est porté
à 45,23 millions d'euros.
Les dotations indexées sur les recettes fiscales nettes de l'Etat
Les dotations de l'Etat au fonds national de péréquation de la
taxe professionnelle (FNPTP) et au fonds national de péréquation
(FNP) sont, en application des dispositions des articles 1648 A
bis
et
1648 B
bis
du code général des impôts,
indexées sur «
l'indice de variation des recettes fiscales
nettes de l'Etat, nettes des remboursements et dégrèvements et
des prélèvements sur recettes, tel que cet indice résulte
de la loi de finances initiale, corrigé le cas échéant de
l'incidence d'éventuels transferts de recettes liés à des
transferts de compétences aux collectivités locales et
territoriales, à d'autres personnes morales publiques ainsi qu'aux
communautés européennes
».
Cette définition, en tenant compte de l'évolution des recettes
fiscales de l'Etat nette «
des prélèvements sur
recettes
», est mécaniquement défavorable aux
collectivités locales puisque le montant des prélèvements
sur les recettes de l'Etat au profit des collectivités locales est
indexé de telle sorte qu'il augmente d'une année sur l'autre.
Ainsi, le montant déduit à ce titre des recettes de l'Etat est
chaque année supérieur à celui de l'année
précédente.
Pour 2002, le taux d'évolution des recettes fiscales nettes de l'Etat
retenu dans le projet de loi de finances s'établit à
-1,29 %.
Ce taux s'applique aux deux dotations de l'Etat au FNPTP, qui
s'élèveront à 367,15 millions d'euros en 2002, et à
la dotation de l'Etat au FNP, dont le montant s'établit à 106,87
millions d'euros en 2002.
S'agissant du FNP, l'Assemblée nationale, en adoptant un amendement
devenu l'article 21
bis
du présent projet de loi de finances, a
reconduit l'abondement de 22,87 millions d'euros dont il a
bénéficié en 1999, 2000 et 2001. La dotation de l'Etat
à ce fonds s'élève donc à 129,74 millions d'euros.
Néanmoins, le FNP, dont la principale ressource est le
« solde » du FNPTP (c'est-à-dire le montant
disponible au titre de ce fonds une fois financées l'ensemble de ses
missions), devrait pâtir de la réduction des ressources de ce
dernier. Le FNPTP bénéficie d'une fraction du produit de la
fiscalité locale acquitté par France Télécom. Or,
en 2002, ce produit diminuera de 29,49 millions d'euros, pour s'établir
à 286,99 millions d'euros.
Au total, le gouvernement évalue à 899,44 millions d'euros le
montant total des ressources du FNPTP en 2002.
Il convient cependant de se féliciter que, comme le préconise le
Sénat depuis deux ans, le montant de la majoration de la dotation de
solidarité rurale prévue à l'article 25 du présent
projet de loi de finances ne soit pas financé par un
prélèvement sur les ressources du FNPTP.
Les dotations indexées sur la formation brute de capital fixe des
administrations publiques
La dotation globale d'équipement (DGE), la dotation régionale
d'équipement scolaire (DRES) et la dotation départementale
d'équipement des collèges (DDEC) sont indexées sur le taux
d'évolution de la formation brute de capital fixe des administrations
publiques, estimé à
+ 1,7 %.
L'évolution de ces dotations a été présentée
dans le I.
Les autres dotations
Trois dotations, dont le montant total représente 12,8 % du montant
des dotations de l'Etat inscrites dans le projet de loi de finances pour 2002,
ne sont pas comprises dans le périmètre de l'enveloppe
normée des concours de l'Etat aux collectivités locales en raison
du caractère aléatoire de leur évolution, qui ne
dépend pas de l'application d'un taux d'indexation :
-
le fonds de compensation de la taxe sur la valeur ajoutée
(FCTVA) est doté pour 2002 de 3.605,42 millions d'euros, soit une
progression de 0,6 %. Ce taux traduit une quasi-stagnation de
l'investissement local entre 1999 et 2000, puisque, dans la majorité des
cas, les attributions versées au titre du FCTVA sont proportionnelles
aux dépenses réelles d'investissement constatées au cours
de la pénultième année. Entre 1998 et 2002, la dotation du
FCTVA en loi de finances a progressé de 12,66 % ;
-
les amendes forfaitaires de la police de la circulation
routière
, dont le produit est reversé aux
collectivités locales, devrait produire en 2002 une ressource d'un
montant équivalent à celui de 2001, soit 317 millions d'euros.
Depuis 1998, ce produit a progressé de 6,6 % ;
-
le prélèvement sur les recettes de l'Etat au profit de la
collectivité territoriale de Corse et des départements de
Corse
. En application de la loi n° 94-1131 du 27 décembre
1994 portant statut fiscal de la Corse, 10 % du produit de la taxe
intérieure sur les produits pétroliers perçu dans
l'île est reversé à la collectivité territoriale de
Corse et 1,5 % est reversé à chacun des deux
départements. L'article 38 du projet de loi relatif à la Corse
adopté en première lecture par le Sénat porte la fraction
reversée à la collectivité territoriale de Corse à
16 % de manière à compenser les transferts de compétences
auxquels procède le projet de loi.
En conséquence, pour 2002, le montant du prélèvement sur
les recettes de l'Etat est évalué à 27 millions d'euros,
contre 17 millions d'euros en 2001, soit une progression de
54,84 %
2(
*
)
.
4. Les compensations
Le
coût pour l'Etat des compensations d'allégements d'impôts
locaux a été multiplié par 3,6 depuis 1998
, soit une
augmentation de 264 %. Il s'établit à 16.500 millions
d'euros (108.232 millions de francs) dans le projet de loi de finances pour
2002.
Entre 2001 et 2002, il progresse de 23,3 %, soit 3.121 millions d'euros
(20.472 millions de francs).
L'augmentation du coût pour l'Etat des compensations
est
principalement liée à la disparition progressive de la fraction
de l'assiette de la taxe professionnelle assise sur les salaires
, qui
représente une charge de 7.804 millions d'euros dans le projet de loi de
finances pour 2002, en progression de 2.414 millions d'euros (15.834 millions
de francs) par rapport à 2001.
Le coût net pour l'Etat de cette mesure est cependant inférieur.
Il est retracé dans le tableau ci-dessous :
Coût net pour l'Etat de la réforme de la taxe professionnelle
(en milliards d'euros)
Incidence cumulée |
2000 |
2001 |
2002 |
Compensation de la part « salaires » aux collectivités |
- 4,04 |
- 5,78 |
- 8,07 |
Perte de recettes au titre des frais d'assiette et de dégrèvement |
- 0,31 |
- 0,46 |
- 0,66 |
Baisse du montant des dégrèvements |
+ 0,20 |
+ 0,28 |
+ 0,36 |
Diminution de la compensation REI |
+ 0,39 |
+ 0,39 |
+ 0,39 |
Impact compte d'avances aux collectivités locales |
+ 0,27 |
+ 0,32 |
+ 0,43 |
Recettes supplémentaires d'impôt sur les sociétés et gains sur les dividendes |
+ 0,43 |
+ 0,86 |
+ 1,44 |
Baisse du coût du plafonnement en fonction de la valeur ajoutée |
+ 0,00 |
+ 0,03 |
+ 0,23 |
Relèvement de la cotisation de péréquation |
+ 0,41 |
+ 0,47 |
+ 0,52 |
Relèvement de la cotisation minimale assise sur la valeur ajoutée |
+ 0,23 |
+ 0,35 |
+ 0,50 |
TOTAL |
- 2,42 |
- 3,54 |
- 4,86 |
Source : ministère de l'économie, des
finances
et de l'industrie
L'article 39 de la loi de finances pour 1999 (n°1266 du 30 décembre
1998) prévoit que le gouvernement remet chaque année au
Parlement, avant le 1
er
octobre, un rapport sur les
conséquences sur l'emploi, sur les entreprises, sur l'Etat et sur les
collectivités locales de la suppression de la part
« salaires » de la taxe professionnelle. Cette
année, ce rapport n'était pas disponible à la date
d'examen en commission du rapport sur les crédits de la
décentralisation inscrits dans le projet de loi de finances pour 2002.
5. Les réfactions dont font l'objet certaines compensations
A la date d'examen de son rapport par la commission, votre rapporteur n'a pas reçu les éléments qu'il a demandés au gouvernement sur ce point.
6. Les dégrèvements
Les
crédits correspondant à la prise en charge par l'Etat des pertes
de recettes résultant pour les collectivités locales des
dégrèvements d'impôts directs locaux figurent au chapitre
15-01 du budget des charges communes.
Leur montant évolue plus vite que celui des dotations de l'Etat aux
collectivités locales, mais moins que celui des compensations.
Evolution du coût des dégrèvements d'impôts directs locaux
(en millions d'euros)
A la différence des dotations et des compensations, le montant des dégrèvements inscrit dans la loi de finances n'est pas définitif, mais seulement une prévision. Le montant constaté en exécution résulte de l'évolution des taux et des bases des impôts directs locaux au cours de l'exercice. En 2000, l'écart s'explique par la suppression en cours d'année de la part régionale de la taxe d'habitation dont la compensation, pour l'année 2000, a pris la forme d'un dégrèvement.
Montant des dégrèvements inscrit dans la loi de finances et montant constaté en exécution
(en millions d'euros)
|
1999 |
2000 |
2001 |
Montant inscrit dans le « vert » budgétaire |
9.315 |
9.604 |
10.782 |
Montant constaté ou dernière prévision connue |
8.912 |
10.772 |
9.448 |
Le tableau ci-après récapitule l'évolution du coût des différents dégrèvements d'impôts directs locaux :
Evolution des coût des dégrèvements d'impôts directs locaux
(en millions d'euros)
|
1999 |
2000 |
2001 |
2002 |
Taxe sur foncier bâti |
|
|
|
|
D.O. total manuel |
23 |
19 |
21 |
21 |
Cotisations à 80 F |
13 |
13 |
14 |
14 |
DO 500 F condition modeste 70-75 ans |
|
|
23 |
23 |
HLM et SEM : vacances logements |
|
|
4 |
4 |
Autres |
254 |
312 |
276 |
295 |
Dégrèvements |
291 |
344 |
337 |
358 |
Taxe sur foncier non bâti |
|
|
|
|
Pertes de récoltes |
8 |
10 |
12 |
12 |
Cotisations à 80 F |
1 |
1 |
1 |
1 |
D.O. jeunes agriculteurs |
8 |
10 |
11 |
12 |
Autres |
17 |
20 |
15 |
17 |
Dégrèvements |
33 |
41 |
39 |
43 |
Taxe d'habitation |
|
|
|
|
D.O. TOTAL manuel + RMI |
217 |
217 |
249 |
275 |
D.O. partiel (art. 1414 bis) |
241 |
|
|
|
D.O. partiel 100 % (art. 1414 A) |
182 |
|
|
|
D.O. partiel 50 % (art. 1414 B) informatisés |
67 |
|
|
|
Plafonnement revenu (art. 1414) |
616 |
|
|
|
Cotisations < à 80 F |
2 |
1 |
1 |
1 |
Autres + D.O. partiels manuels |
358 |
293 |
192 |
193 |
Gestionnaire de foyers |
2 |
4 |
5 |
6 |
Dégrèvement suppression part régionale (réforme) |
|
951 |
0 |
0 |
Dégrèvement total (art 1414 A) (réforme) |
|
408 |
417 |
430 |
Dégrèvement partiel (art 1414 A) (réforme) |
|
1.559 |
1.591 |
1.650 |
Plafonnement revenu (art. 1414 C) (réforme) |
|
76 |
59 |
44 |
Dégrèvements |
1.684 |
3.511 |
2.515 |
2.599 |
Taxe professionnelle |
|
|
|
|
Allégement transitoire |
1 |
1 |
|
|
50 % cotisation TP transport sanitaire |
|
|
4 |
4 |
Plafonnement V.A. |
5.888 |
5.888 |
5.824 |
5.732 |
Cotisations < à 80 F |
0 |
0 |
0 |
0 |
Dégrèvements poids lourds |
30 |
33 |
34 |
34 |
Autres |
983 |
953 |
694 |
530 |
Dégrèvements |
6.903 |
6.875 |
6.555 |
6.300 |
Autres impôts locaux |
|
|
|
|
Dégrèvements |
1 |
2 |
1 |
1 |
Ensemble |
|
|
|
|
Dégrèvements |
8.912 |
10.772 |
9.448 |
9.300 |
ANV |
601 |
632 |
540 |
601 |
Total |
9.513 |
11.404 |
9.988 |
9.901 |
Source : ministère de l'économie, des finances et de l'industrie.
C. L'ENVELOPPE NORMÉE ET SA VARIABLE D'AJUSTEMENT
1. L'indexation de l'enveloppe normée en 2002
Contrairement à la rhétorique fréquemment
employée,
le contrat de croissance et de solidarité
qui,
en application de l'article 57 de la loi de finances pour 1999 (n° 98-1266
du 30 décembre 1998), fixe le taux d'indexation de
« l'enveloppe normée » des concours de l'Etat aux
collectivités locales
ne constitue pas un outil destiné
à associer les collectivités locales aux fruits de la croissance
mais un mécanisme permettant de déterminer le taux
d'évolution de la dotation de compensation de la taxe professionnelle
(DCTP) d'une année sur l'autre
.
Le montant total de l'enveloppe est déterminé en appliquant
à son montant au titre d'une année un indice comprenant d'une
part l'évolution prévisionnelle des prix pour l'année
à venir et une fraction du taux de croissance du produit
intérieur brut (PIB) pour l'année en cours.
L'enveloppe est composée de treize dotations, dont douze évoluent
en fonction de taux d'évolution fixés par la loi. La
treizième, la DCTP (hors REI), joue le rôle de variable
d'ajustement. Son montant résulte de la différence entre le
montant total de l'enveloppe et la somme du montant des douze autres dotations.
Pour les douze autres dotations, l'existence d'une enveloppe normée
ne change rien au mode de calcul de leur montant.
Il convient de noter que, pour le calcul de l'enveloppe normée, donc
pour le calcul de l'évolution du montant de la DCTP résultant de
l'existence de l'enveloppe normée :
- le montant de l'enveloppe normée au titre de l'année
n
auquel est appliqué le taux d'indexation pour déterminer le
montant de l'enveloppe en
n+1
tient compte du montant
« recalé » de la DGF, c'est-à-dire le montant
de la DGF de l'année
n
recalculé en fonction des derniers
indices économiques connus en application de dispositions de l'article
L. 1613-1 du code général des collectivités
territoriales ;
- les montants retenus pour calculer l'enveloppe normée peuvent
différer des montants inscrits dans le projet de loi de finances. Tout
d'abord, les « abondements exceptionnels » dont peuvent
faire l'objet, dans le cadre des lois de finances, les dotations comprises dans
l'enveloppe normée ne sont pas prises en compte dans le calcul de
l'enveloppe, afin que ces mesures ne pèsent pas sur le montant de la
variable d'ajustement.
La différence entre les montants retenus pour calculer l'enveloppe et
les montants inscrits dans les lois de finances a parfois d'autres
explications. Pour la dotation générale de
décentralisation (DGD), les montants retenus sont ceux qui permettent
une comparaison à périmètre constant, et tiennent compte
des crédits de la « DGD culture », qui est
virée en cours d'exercice au budget du ministère de
l'intérieur. Pour les dotations d'équipement, les montants pris
en compte sont les autorisations de programme. Pour le fonds national de
péréquation de la taxe professionnelle, le montant pris en compte
englobe le produit de la cotisation de péréquation qui alimente
le fonds, tandis que le montant du prélèvement sur les recettes
de l'Etat ne le comprend pas.
Les écarts entre les montants inscrits dans les lois de finances et les
montants retenus pour calculer l'enveloppe normée ont tous une
explication justifiée. Il n'en reste pas moins qu'ils contribuent
à illustrer le
caractère virtuel de cette enveloppe, dont la
seule composante à être véritablement affectée par
son existence est la variable d'ajustement
.
Ecart entre le montant des dotations inscrit dans le projet de loi de finances pour 2002 et les montants utilisés pour calculer le montant de l'enveloppe normée
(en millions d'euros)
Pour
2002, l'article 21 du présent projet de loi de finances propose de
reconduire le mode de calcul de l'enveloppe normée applicable en 2001,
c'est-à-dire d'appliquer au montant de 2001 un indice composé de
la prévision d'évolution des prix de l'année à
venir et 33 % du taux de croissance du PIB en 2001.
L'indice ainsi obtenu est le suivant :
1,5 (prix) + 0,76 (33 % de la prévision de croissance du PIB en 2001, soit 2,3 %) = 2,26 %
En 2001, cet indice s'établissait à 2,32 %.
Evolution de l'enveloppe normée en 2002
Source : documents remis au comité des finances locales par le gouvernement
2. L'évolution de la DCTP en 2002
Le
montant de la DCTP qui résulte de l'application de l'indexation de
l'enveloppe normée en 2002 s'établit à 1.589,6 millions
d'euros. Il est inférieur de 6,94 % à son montant de 2001.
Toutefois, en application des dispositions de l'article 21 du présent
projet de loi de finances relatives au financement des communautés
d'agglomération qui prévoient un prélèvement de
126 millions d'euros,
la baisse de la DCTP entre 2001 et 2002
s'établit à 7,5 %.
Evolution de la DCTP entre 2001 et 2002
(en millions d'euros)
|
2001 |
2002 |
Evolution en % |
DCTP issue de l'application du contrat de croissance et de solidarité |
1.708,04 |
1.589,59 |
- 6,94 % |
DCTP issue du contrat, minorée du prélèvement au profit des communautés d'agglomération |
1.708,04-126,08= 1.581,96 |
1.589,59-126,08 =1.463,51 |
- 7,5 % |
DCTP minorée du financement des communautés d'agglomération, mais majorée des sommes destinées en prendre en compte l'arrêt Pantin |
1.581,96 |
1.463,51 + 80,04 = 1.543,55 |
- 2,4 % |
Il
convient de souligner que les collectivités et établissements
publics de coopération intercommunale qui perçoivent des
attributions au titre de cette dotation verront leur baisse réduite en
raison de l'abondement de la DCTP en application des dispositions de l'article
11 du présent projet de loi de finances. Cet abondement, dont le montant
s'élève à 80,04 millions d'euros, est destiné
à financer les sommes qui seront reversées aux
collectivités locales en compensation de la validation
législative proposée par cet article et destiné à
couper court aux contentieux liés à la non prise en compte des
rôles supplémentaires de taxe professionnelle pour le calcul des
attributions de DCTP. Ces contentieux se développent depuis qu'est
intervenu l'arrêt du Conseil d'Etat du 18 octobre 2000
Commune de
Pantin
.
Avec cet abondement, la baisse de la DCTP est ramenée à
2,4 %. Ces sommes constituent pour les collectivités locales une
ressource exceptionnelle, qu'il n'est pas intellectuellement satisfaisant de
prendre en compte pour apprécier l'évolution de la DCTP entre
2001 et 2002.
II. PRINCIPALES OBSERVATIONS DU RAPPORTEUR
A. L'AUGMENTATION DES CONCOURS DE L'ETAT SERT SURTOUT À COMPENSER LA DISPARITION DE RESSOURCES FISCALES
L'effort
de maîtrise des dépenses publiques doit concerner l'ensemble des
postes de dépenses, y compris les concours de l'Etat aux
collectivités locales.
Or, ceux-ci ont beaucoup augmenté depuis 1998 :
+ 14.084
millions d'euros (92,4 milliards de francs).
85 % de cette progression n'a pas servi à accroître les
ressources des collectivités locales, ni même à financer de
nouveaux transferts de compétences, mais à compenser par des
concours de l'Etat des pertes de recettes fiscales résultant de
dispositions adoptées par le Parlement.
Comme le montre le tableau ci-dessous
, entre 1998 et 2001 :
- les compensations de pertes de recettes fiscales ont progressé de
263 % (+ 11,9 milliard d'euros) ;
- les dotations de l'Etat aux collectivités locales ont progressé
de 8,4 % (+ 2,1 milliards d'euros).
Entre 2001 et 2002, ces pourcentages s'établissent respectivement
à 23,3 % et 2,6 %.
Cette situation est particulièrement ironique si l'on en juge les
intentions affichées par le gouvernement à son arrivée au
pouvoir. En présentant devant le comité des finances locales les
dispositions relatives aux collectivités locales inscrites dans le
projet de loi de finances pour 1998, le secrétaire d'Etat au budget
avait relevé que l'Etat était devenu «
le premier
contributeur de la fiscalité locale
» et qu'il faudrait
«
remédier
» à cette situation
«
insatisfaisante
».
Evolution des concours financiers de l'Etat aux collectivités locales (dotations + compensations)
(en millions d'euros)
|
1998 |
2001 |
2002 |
Evolution 2002/1998 |
Evolution 2002/2001 |
Evolution 2002/1998 |
Evolution 2002/2001 |
Dotations + compensations |
29.820 |
40.079 |
43.904 |
14.084 |
3.825 |
+ 47,2 % |
+ 9,5 % |
Dotations (hors vignette et DMTO) |
25.286 |
26.700* |
27.404* |
2.118 |
704 |
+ 8,3 % |
2,63 % |
Dotations à structure constante* |
25.286 |
28.133 |
28.837 |
3.551 |
704 |
+ 14,04 % |
+ 2,5 % |
Compensations (avec vignette et DMTO) |
4.534 |
13.379 |
16.500 |
11.966 |
3.121 |
+ 263,9 % |
23,33 % |
*Pour
être comparée à structure constante avec l'année
1998, les dotations de l'Etat en 2001 et 2002 doivent être
majorées de 1.433,02 millions d'euros, correspondant au
prélèvement dont à fait l'objet la DGD des
départements suite à la recentralisation de la compétence
d'aide médicale dans le cadre de la loi sur la CMU.
Cette évolution est particulièrement préjudiciable au
budget de l'Etat car elle conduit à accroître de façon
considérable les dépenses de transfert de l'Etat, qui sont des
dépenses incompressibles. En cas de retournement de la conjoncture, tel
celui qui semble se profiler pour 2002,
cela se traduit par une
rigidité accrue du budget de l'Etat et réduit sa capacité
à ajuster ses dépenses à l'évolution de ses
recettes.
B. L'AUGMENTATION DES DOTATIONS DOIT ÊTRE MISE EN PARALLÈLE AVEC CELLE DES CHARGES CONFIÉES AUX COLLECTIVITÉS LOCALES
Entre
2001 et 2002, la principale dotation de l'Etat aux collectivités locales
augmentera de 4,07 %. En comptant les abondements dont font l'objet ses
composantes, le taux de progression de la DGF s'établit à
4,67 %, le plus élevé depuis de nombreuses années.
Toutefois,
appréciée de façon globale, la progression
des dotations de l'Etat aux collectivités locales en 2002 ne sera pas la
meilleure de ces dernières années
. Le tableau ci-dessous
montre que celle-ci a été meilleure entre 1998 et 1999 et entre
2000 et 2001.
Evolution des dotations de l'Etat entre 1998 et 2002
(en millions d'euros)
|
1998 |
1999 |
2000 |
2001 |
2002 |
Dotations de l'Etat (hors compensation DMTO + vignette) |
25.286 |
26.444 |
25.722 |
26.700 |
27.404 |
Augmentation par rapport à l'année précédente |
|
1158 |
711* |
978 |
703** |
*
L'évolution réelle est une baisse de 722 millions d'euros mais
elle doit être corrigée de la réduction de 1.433,02
millions d'euros dont a fait l'objet la DGD des départements à la
suite de la recentralisation de la compétence en matière d'aide
médicale.
** Si, comme les années précédentes, le projet de loi de
finances pour 2002 avait inscrit au titre de la DGE des communes une dotation
en crédits de paiement d'un montant équivalent à celui des
autorisations de programme, soit 417 millions d'euros au lieu de 175 millions
d'euros, les dotations auraient progressé de 945 millions d'euros au
lieu de 703 millions d'euros. .
La secrétaire d'Etat chargée du budget a indiqué le 14
novembre 2001 que le taux de croissance au titre de cette année devrait
être «
de l'ordre de 2 %
».
Si un tel taux de croissance avait été retenu pour calculer la
DGF de 2002, le montant de celle-ci aurait été de :
DGF « recalée » de 2001 (17.613,025 millions d'euros) x prix 2002 (1,5 %) + ½ PIB 2001 (1 %) = 18.053,35 + abondements extérieurs (121,959 + 24,367 + 309,014) = 18.508,69 millions d'euros
Ce
montant est inférieur de 26,42 millions d'euros au montant inscrit
dans le PLF 2002.
Calculée en tenant compte d'un taux de croissance de 2 % en 2001,
la DGF serait en progression de 3,9 % en 2002, et non de 4,07 %.
La progression des dotations de l'Etat aux collectivités locales ne doit
pas être comparée, comme l'a fait la secrétaire d'Etat
chargée du budget lors de l'examen par l'Assemblée nationale de
la première partie du présent projet de loi de finances, à
l'évolution globale des dépenses de l'Etat. A cette occasion,
elle a en effet souligné que «
la DGF a progressé de
16 % en cinq ans, alors que les dépenses de l'Etat ont cru de
8 % sur la même période. La DGF aura donc progressé
deux fois plus vite que les dépenses de l'Etat depuis
1998
»
3(
*
)
.
Les dotations de l'Etat aux collectivités locales ne doivent pas
être appréhendées comme des dépenses de l'Etat mais
comme la rétrocession à celles-ci de ressources destinées
à financer leurs compétences, et non celles de l'Etat.
Par conséquent, il est plus satisfaisant de comparer l'évolution
des dépenses de l'Etat à celle des dépenses mises par
celui-ci à la charge des collectivités locales.
Les sources de dépenses sont nombreuses
: l'augmentation du
taux des cotisations employeurs à la caisse nationale des agent des
collectivités locales, la réforme des services d'incendie et de
secours, l'allocation personnalisée d'autonomie, les textes
réglementaires ou communautaires relatifs à la mise aux normes
environnementale ou de sécurité des équipements, etc.
Les marges de manoeuvre dont disposent les collectivités locales pour
y faire face sont considérablement réduites par le coût des
mesures intervenues depuis 1998 en matière de rémunération
des agents
de la fonction publique territoriale. Lors de son audition par
votre commission le 13 novembre 2001, le ministre de l'intérieur a
indiqué que, en année pleine, le coût du protocole du 10
février 1998 s'élève à 1.358,32 millions d'euros
(8,91 milliards de francs) tandis que les mesures intervenues entre 2000
et 2002 représenteront une charge, en année pleine, de 908,6
millions d'euros (5,96 milliards de francs).
Pour 2002, le coût supplémentaire des mesures intervenues en
matière de rémunération des agents s'établit
à 440,58 millions d'euros, alors que la progression de la DGF
s'élèvera à 827 millions d'euros. Plus de la moitié
de cette augmentation de recette, la plus élevée depuis
longtemps, sera absorbée par la revalorisation des traitements des
agents de la fonction publique territoriale.
Cette comparaison n'est pas destinée à contester
l'opportunité de ces revalorisations de traitement, qui est un sujet sur
lequel il faudrait s'attarder plus longuement, mais à relativiser
l'importance de la progression de la DGF entre 2001 et 2002.
C. LES PRINCIPALES DISPOSITIONS DU PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2002
1. La prolongation du contrat de croissance et de solidarité
L'article 21 du présent projet de loi de finances
prolonge
pour un an l'application des dispositions de l'article 57 de la loi de finances
pour 1999, qui fixe le taux d'évolution du contrat de croissance et de
solidarité.
Il conserve en 2002 le mode de calcul applicable en 2001, c'est-à-dire
un indice comprenant l'évolution des prix pour l'année à
venir et 33 % du taux d'évolution du PIB pour l'année en cours.
Ce choix constitue une déception à un double titre :
- la rupture avec le principe d'une enveloppe triennale est regrettable car
elle empêche la tenue d'un débat d'ensemble sur le financement des
collectivités locales. Ainsi, la loi sur l'intercommunalité du 12
juillet 1999 avait limité aux années 2000 et 2001 la
possibilité de financer les communautés d'agglomération
par la DCTP, de manière à ce qu'un débat global sur le
rôle de la DCTP, qui est aussi la variable d'ajustement du contrat de
croissance, puisse être tenu. En repoussant la négociation du
nouveau contrat, le gouvernement interdit un débat de type ;
- la reconduction de la fraction du PIB de 33 % est contraire à la
logique du contrat de croissance et de solidarité, qui avait depuis 1999
retenu chaque année une part croissante de l'évolution du PIB
(20 % en 1999, 25 % en 2000 et 33 % en 2001).
Plus globalement, il faudra mettre l'année à venir à
profit pour
s'interroger sur la finalité de l'existence d'une
enveloppe normée
. Présentée par la secrétaire
d'Etat chargée du budget, lors de la discussion à
l'Assemblée nationale de la première du présent projet de
loi de finances, comme une disposition permettant «
l'association
des collectivités locales aux fruits de la
croissance
»
4(
*
)
, l'enveloppe
normée est en réalité, du fait du taux d'indexation retenu
pour son évolution, un mécanisme uniquement destiné
à réduire le montant de la DCTP d'une année sur l'autre.
Si le contrat de croissance et de solidarité n'existait pas, les
concours financiers de l'Etat aux collectivités locales augmenteraient
plus vite qu'ils ne le font aujourd'hui. Il est donc difficile d'y voir une
association des collectivités locales aux fruits de la croissance.
2. Le financement des communautés d'agglomération est mis à la charge de la DCTP, de la DSU et de la DSR
L'article 22 du présent projet de loi de finances
propose de
modifier le mode de financement des communautés d'agglomération
tel qu'il avait été défini par la loi n° 99-586 du 12
juillet 1999 relative au renforcement et à la simplification de la
coopération intercommunale.
Cette loi avait pris le parti d'éviter que le financement des
communautés d'agglomération ne se traduise par une augmentation
de la dotation d'intercommunalité susceptible de réduire les
sommes disponibles au titre de la dotation de solidarité urbaine et de
la dotation de solidarité rurale.
Par conséquent, en application de l'article L. 5211-28 du code
général des collectivités territoriales, les
communautés d'agglomération étaient financées
par :
- la DGF, à hauteur des sommes correspondant à la DGF
perçue par les structures intercommunales avant leur transformation en
communautés d'agglomération ;
- un prélèvement sur les recettes de l'Etat qui assure la prise
en charge du surcoût des communautés d'agglomération issues
de la transformation d'établissements publics de coopération
intercommunale existants et la totalité du coût des
communautés d'agglomération créés ex nihilo. Le
montant de ce prélèvement sur recettes s'établissait
initialement à 76,22 millions d'euros et a été
porté par la loi de finances pour 2001 à 182,94 millions
d'euros ;
- dans l'hypothèse où ces sommes seraient insuffisantes, le
complément est trouvé par prélèvement sur la DCTP.
En 2001, ce prélèvement s'élevait à 126 millions
d'euros.
La loi du 12 juillet 1999 avait limité la possibilité de recourir
à la DCTP aux années 2000 et 2001.
A compter de 2002, il convenait de trouver de nouvelles sources de financement.
Le système proposé par le gouvernement et adopté par
l'Assemblée nationale présente deux défauts
:
-
il maintient le prélèvement sur la DCTP
, en gelant son
montant à son niveau de 2001 ;
- il intègre dans la DGF des EPCI les sommes correspondant au
financement « hors DGF » des communautés
d'agglomération en 2001, sans prévoir les crédits
permettant de financer l'augmentation du coût des communautés
d'agglomération entre 2001 et 2002. Par conséquent, compte tenu
des mécanismes de répartition de la DGF,
ce coût sera
pris en charge par une réduction à due concurrence des sommes
disponibles au titre de la DSU et de la DSR
.
Le manque à gagner pour ces deux dotations devrait s'établir
à environ 150 millions d'euros (près d'un milliard de francs).
Le dispositif proposé cumule donc les défauts :
- il instaure ce que le législateur de 1999 avait souhaité
éviter : une pénalisation de la DSU et de la DSR par le
financement des communautés d'agglomération ;
- il revient sur le principe selon lequel la DCTP ne peut pas financer les
communautés d'agglomération au delà de 2001.
D. LES REFORMES INDISPENSABLES
1. Le principe : des ressources locales reposant sur une fiscalité vivante et sur des dotations péréquatrices
Les
nombreux travaux réalisés depuis deux ans ont permis de
dégager un consensus sur les objectifs de la réforme des finances
locales. Il s'agit en premier lieu de réformer la fiscalité
locale et en deuxième lieu d'accroître la
péréquation.
La réforme de la fiscalité locale
est un chantier d'une
telle ampleur que toutes les pistes méritent d'être
étudiées. Aucun clivage tranché n'est apparu à ce
jour.
Il convient cependant de souligner que, si elle constitue un objectif en soi,
la réforme de la fiscalité locale est également un
élément essentiel de la politique en matière de
péréquation
. Les critères permettant de mesurer la
richesse des collectivités locales, utilisés pour
déterminer l'éligibilité à une dotation
péréquatrice ou le montant des attributions au titre de cette
dotation, sont élaborés à partir de bases d'impositions
obsolètes, ce qui interdit de véritablement
« cibler » les collectivités les plus
défavorisées.
En outre,
les évolutions récentes de la fiscalité
locale, et notamment la suppression progressive de la part
« salaires » de l'assiette de la taxe professionnelle,
contribuent à dégrader la fiabilité des indicateurs, et en
particulier du potentiel fiscal
. Les conséquences de celle-ci sur ce
dernier sont corrigées au coup par coup par le biais de divers textes
législatifs, si bien qu'il existe aujourd'hui dans le code
général des collectivités territoriales quatre
définitions du potentiel fiscal.
S'agissant de la
péréquation
, le développement de
celle-ci passe :
- par une meilleure modulation de la participation de l'Etat au financement des
contrats de plan Etat-région en fonction de la richesse des
régions ;
- par
une réforme de la DGF des communes
.
Aujourd'hui, 85 % de celle-ci est consacrée à la dotation
forfaitaire, qui n'est non seulement pas péréquatrice, mais
contre-péréquatrice, puisqu'elle fige des
inégalités issues du gel des attributions de DGF auquel a
procédé la réforme de 1993.
La dotation forfaitaire
constitue le principal facteur explicatif des inégalités de
ressources entre communes au titre de la DGF.
La dotation d'aménagement de la DGF est péréquatrice
puisqu'elle comprend la DSU, la DSR, et la dotation d'intercommunalité,
dont 85 % des crédits sont répartis en fonction du potentiel
fiscal.
Il serait envisageable de mettre fin au jeu de « vases
communiquants » entre, d'une part, la dotation
d'intercommunalité et, d'autre part, la DSU et la DSR non pas en
créant une troisième enveloppe au sein de la DGF, qui aurait pour
effet de supprimer le caractère d'enveloppe fermée de la DGF et
donc d'être source de dérapage budgétaire, mais
en
remplaçant le lien entre dotation d'intercommunalité/DSU-DSR par
un lien dotation d'intercommunalité/dotation forfaitaire.
Ce lien est logique puisque ces deux dotations servent à financer les
mêmes compétences.
En matière de péréquation, la question la plus
controversée est celle de la péréquation dite
« horizontale »
, entre collectivités locales. En
cette matière, il convient d'arbitrer entre la volonté de
corriger les écarts de richesse en bases fiscales et le principe de
libre administration des collectivités locales, qui ne serait pas
compatible avec une « nationalisation » de la
fiscalité locale au sein de ce qui pourrait s'apparenter à un
vaste fonds de péréquation.
Par ailleurs, la péréquation horizontale est peu compatible avec
l'attachement du Sénat au principe d'autonomie fiscale des
collectivités locales, qui permet la responsabilisation des élus
locaux et repose sur la possibilité pour les collectivités
locales de s'administrer librement à partir de ressources fiscales dont
elles votent le taux et dont, par leur action, elles orientent
l'évolution des bases.
2. Accroître la stabilité de la DGF des structures intercommunales
Depuis
l'entrée en vigueur de la loi du 12 juillet 1999 relative au
renforcement et à la simplification de la coopération
intercommunale, l'intercommunalité a connu une
accélération de son développement.
Au 1
er
janvier 2001, 2.000 EPCI étaient constitués,
regroupant 23.485 communes et 40 millions d'habitants. Ces structures
intercommunales exercent des compétences de plus en plus lourdes.
Les modalités de répartition de la DGF des EPCI,
conçues au début des années 90 pour encourager le
développement de l'intercommunalité, ne sont plus adaptées
à un paysage intercommunal stabilisé ou en voie de
l'être.
Ces modalités reposent sur l'émulation entre les EPCI. Le
mécanisme du coefficient d'intégration fiscale (CIF) oblige les
EPCI à toujours s'intégrer davantage, sous peine de voir leurs
attributions individuelles de DGF diminuer.
Une répartition basée sur la comparaison entre le degré
d'intégration des EPCI appartenant à une même
catégorie conduit à une
forte volatilité du montant des
attributions individuelles de DGF
, qui interdit aux EPCI d'avoir une
visibilité convenable de l'évolution de celle-ci. Cette situation
devient particulièrement préjudiciable lorsque des EPCI exercent
des compétences lourdes.
A l'initiative du Sénat, les communautés urbaines, la
catégorie la plus intégrée, ont obtenu la mise en place
d'un régime qui leur garantit la stabilité de l'évolution
de leurs recettes. Il convient de réfléchir aux conditions dans
lesquelles une plus grande stabilité pourrait être procurée
aux autres catégories de structures intercommunales à
fiscalité propre.
Cette réflexion est d'autant plus urgente que
la modification de la
définition du CIF
à laquelle a procédé, en
excluant de celui-ci les dépenses de transfert à concurrence de
10 % par an pendant dix ans, la loi du 12 juillet 1999
vient encore
renforcer l'influence perturbatrice de ce critère de
répartition.
Elle se traduit également par une charge de travail considérable
pour les services de l'Etat puisque les transferts à exclure du CIF ne
sont pas identifiés dans la comptabilité M14, ce qui les oblige
à examiner dans le détail, et au cas par cas, les comptes des
EPCI.
3. Revoir les modalités de compensation des charges nouvelles
Les
transferts de charges de l'Etat aux collectivités locales sont de deux
types :
- les transferts de compétences, pour lesquels le code
général des collectivités territoriales définit les
modalités de la compensation financière ;
- les charges résultants de décisions de l'Etat,
législatives ou réglementaires, dans les domaines autres que les
compétences transférées.
La compensation des charges résultant de transferts de
compétences
Les articles L. 1614-1 à L. 1614-5 du code général des
collectivités territoriales fixent les modalités de la
compensation financière aux collectivités locales, par la voie de
transferts de fiscalité ou de la dotation générale de
décentralisation.
Dans le cadre de ses activités de contrôle, votre rapporteur a
adressé au ministre de l'intérieur un questionnaire relatif
à ces dispositions. Les réponses qu'il a reçues seront
reproduites dans le rapport spécial.
Leur contenu contribue à mettre en évidence la
nécessité de modifier les règles héritées
des lois de décentralisations sur certains aspects, et d'en retrouver
l'esprit sur d'autres.
Il convient d'en retrouver l'esprit s'agissant du principe selon lequel les
transferts de compétence sont compensés principalement par des
transferts de fiscalité plutôt que par des dotations
budgétaires. Or, ces dernières années ont
été marquées essentiellement par la suppression de
ressources fiscales transférées.
Il convient d'en modifier certains aspects tout d'abord parce que, à
l'usage, on constate que les différents textes prévoyant des
transferts de compétences comportent presque toujours des dispositions
relatives à la compensation alors que, en principe, celle-ci est
automatique. Ce besoin de rappel met en évidence le fait que le
système qui existe aujourd'hui n'est pas encore entré dans les
moeurs.
Dans les mêmes textes, on constate aussi parfois des dérogations
au mode de calcul de la compensation. Leur multiplication conduit à
s'interroger sur l'utilité de conserver une règle
générale souvent jugée inadaptée, et qu'il faudrait
peut être revoir.
On constate enfin que certains cas de figure (par exemple les transferts de
compétence des collectivités locales vers l'Etat) ne sont pas
prévus.
Il serait également utile :
- d'harmoniser les procédures applicables en matière de
détermination des charges transférées, et notamment l'avis
de la commission consultative d'évaluation des charges (CCEC), et la
procédure budgétaire. En général, l'avis de la CCEC
intervient après le dépôt du projet de loi de finances
comportant les crédits correspondants.
- que cette commission respecte son obligation légale de remettre
chaque année un rapport au Parlement, d'autant que les rares rapports
existant se sont révélés d'une grande qualité.
Il faut se féliciter que l'article 15
quatervicies
du
projet de loi relatif à la démocratie de proximité
étende le champ de compétence de la CCEC aux transferts de charge
entre les collectivités locales et les organismes de
sécurité sociale.
La compensations des autres charges
Le principe selon lequel l'autorité qui décide d'une
dépense doit également en assumer le coût financier est
autant un sain principe démocratique qu'un gage de responsabilité
politique.
Ce principe est aujourd'hui souvent battu en brèche. Ces derniers mois,
il l'a été tant par le Parlement qui, en adoptant la loi relative
à l'allocation personnalisée d'autonomie, a autorisé
l'Etat à créer une prestation sociale dont le coût reposera
essentiellement sur les départements, que par l'exécutif, comme
en témoignent les récents accords entre le gouvernement et les
syndicats représentatifs sur les rémunérations des agents
de la fonction publique.
Ce contexte conduit votre rapporteur à formuler à nouveau les
recommandations qui figuraient dans son rapport au nom de la mission commune
d'information chargée de dresser le bilan de la décentralisation
et de proposer les améliorations de nature à faciliter l'exercice
des compétences locales
5(
*
)
:
Propositions de la mission commune d'information pour associer les collectivités locales aux décisions ayant une incidence financière sur leurs budgets
«
- les collectivités locales devront
désormais être associées à la négociation des
accords salariaux dans la fonction publique.
Les décisions
prises par l'Etat dans ce domaine ont des conséquences très
lourdes pour les budgets locaux. Entre 1990 et 1997, les dépenses de
personnel de l'Etat ont progressé de 32 % tandis que celles des
administrations publiques locales ont augmenté de 46 %. Ce taux de
progression supérieur n'est pas due uniquement aux recrutements, qui
n'expliqueraient que un cinquième de l'augmentation des dépenses
locales, mais aussi à la structure de la fonction publique territoriale
qui compte une proportion plus élevée d'agent de catégorie
C. En 2000, l'accord salarial du 10 février 1998 se traduit par un
surcoût de 41,3 milliards de francs, dont 23,3 %, soit 10 milliards
de francs, à la charge des collectivités locales. Pourtant, les
collectivités n'ont pas été associées à la
négociation de cet accord.
- en matière de
normes techniques
, votre rapporteur souscrit aux
conclusions du groupe de travail, présidé par notre
collègue Philippe Adnot, constitué sur ce thème au sein du
comité des finances locales et qui préconise notamment
d'accroître la participation des représentants des élus
dans les instances où sont étudiées et
décidées les normes ; de préciser l'étude
d'impact afin d'évaluer le coût des normes sur les budgets ;
d'établir un lien juridique entre la durée de validité des
normes respectées lors de la réalisation d'un équipement
et la durée d'amortissement comptable de cet équipement.
Les dispositions ayant une incidence sur les budgets locaux, qu'elles
donnent lieu ou non à compensation financière, devraient
systématiquement et
préalablement à leur
entrée en vigueur être soumises à l'avis d'instances
telles que le comité des finances locales, à qui le gouvernement
a pris l'habitude de soumettre certains textes, mais surtout la commission
consultative sur l'évaluation des charges (CCEC).
L'article L. 1614-3 du code général des collectivités
territoriales prévoit déjà une procédure de
consultation de la CCEC dans le cadre des compétences
transférées. Cette disposition n'est pas toujours
respectée puisque la commission ne s'est pas réunie entre 1996 et
1999, et que cela n'a pas empêchée la publication de textes
législatifs et réglementaires relatifs aux dépenses et aux
recettes transférées.
Depuis 1995, le bilan des transferts de charges réalisé par la
commission, dans le cadre d'un rapport au Parlement, comprend également
un bilan des charges qui ne s'inscrivent pas dans le cadre des
compétences transférées. Cet apport pourrait être
complété en prévoyant que la commission émet un
avis sur tous les textes qui ont un impact financier sur les
collectivités locales, et pas seulement sur les transferts de
compétence au sens strict. L'avis de la commission devrait comprendre
une évaluation précise des conséquences des dispositions
proposées sur les budgets locaux.
Dans les deux cas, la consultation de la CCEC devrait être
préalable à l'examen de la disposition concernée par le
Parlement s'il s'agit d'une mesure législative ou de la publication du
texte au journal officiel s'il s'agit d'une disposition
réglementaire
. »
1
Ce montant fera, en application des
dispositions de l'article L. 1613-2 du code général des
collectivités territoriales, l'objet d'une régularisation en
2004, à la hausse ou à la baisse, si les indices effectivement
constatés en en 2001 (croissance du PIB) et en 2002(évolution des
prix) diffèrent des prévisions retenues pour calculer la DGF pour
2002.
2
Ce montant devra être revalorisé si le projet de loi
relatif à la Corse retient, dans sa version définitive,
l'amendement adopté par le Sénat, avec l'avis favorable du
gouvernement, portant le pourcentage de 16 % à 18 %.
3
JO Assemblée nationale, séance du 19 octobre 2001,
p. 6341.
4
JO Assemblée nationale, séance du 19 octobre 2001,
p. 6341.
5
Sénat, n° 447, 1999-2000, p. 584.