Evolution des dépenses prévisionnelles en 2001

(en millions d'euros)

 

Loi de finances initiale 2001

Prévisions 2001 révisées au 28/08/2001

Ecart

Ecart
(en %)

Charges d'intérêts

35,1

53,4

18,3

52,2

Prestations maladie, maternité, soins aux invalides

5.198,5

5,376,4

177,9

3,4

Prestations invalidité

64,8

64,9

0,1

0,1

Allocations de remplacement versées aux conjoints

15,2

12,2

- 3,0

- 20,0

Prestations d'assurance veuvage

1,8

1,8

0

----

Etalement et prise en charge des cotisations des agriculteurs en difficulté

25,9

25,9

0

----

Contribution à la modernisation de l'assurance maladie

7,6

7,6

0

----

Prestations familiales

595,8

601,7

5,9

+ 1,0

Prestations vieillesse

7.758,9

7.780,3

21,4

+ 0,7

Contribution aux assurances sociales des études et des praticiens et auxiliaires médicaux

114,3

115,1

0,8

+ 0,7

Total

13.817,9

14.039,4

221,4

+ 1,6

Source : ministère de l'agriculture et de la pêche.

a) Un besoin de financement nécessaire de l'ordre de 200 millions d'euros

En conséquence de ces écarts à la hausse des dépenses (221 millions d'euros, soit 1,45 milliard de francs), compensés très partiellement par les plus-values de recettes (29 millions d'euros, soit 190 millions de francs), le déficit du BAPSA devrait s'établir en 2001 à 192,6 millions d'euros (1,26 milliard de francs).

Ce déficit sera financé, dans le cadre de la loi de finances rectificative pour 2001, soit par un supplément de subvention d'équilibre, soit par un complément d'affectation du produit de la C3S, comme ce fut le cas à la fin de l'exercice 2000, dans ce dernier cas le gouvernement devrait se pencher avec intérêt sur la jurisprudence du Conseil constitutionnel en matière de modification des recettes inscrite dans la loi de financement de la sécurité sociale. 3( * )

B. QUID DU RÉGIME DE RETRAITE COMPLÉMENTAIRE OBLIGATOIRE ?

1. Les nécessaires mesures d'ajustement des dernières revalorisations

Diverses mesures doivent être envisagées alors que le plan de revalorisation des faibles retraites agricoles touche à sa fin.

Parmi ces mesures, votre rapporteur spécial souhaite plus particulièrement attiré l'attention sur :

- la suppression des minorations pour les monopensionnés en cas de carrière incomplète : la faiblesses des retraites agricoles est avérée ; il semble aujourd'hui injuste de maintenir la règle des minorations pour les exploitants n'ayant pas cotisé pendant une carrière complète ;

- la revalorisation forfaitaire de la majoration pour enfants (actuellement la majoration est proportionnelle à la retraite) afin de ne pas pénaliser davantage les petites retraites ;

- la mensualisation du paiement des retraites agricoles : le régime de retraite des exploitants agricoles est aujourd'hui, avec celui des professions libérales, le seul à ne pas bénéficier de la mensualisation du paiement des retraites. Le coût de trésorerie traditionnellement évoqué pour refuser cette réforme ne se justifie pas.

2. La nécessaire création d'un régime de retraite complémentaire obligatoire sans cesse reportée

a) Un principe accepté

Le rapport du député Germinal Peiro datant d'octobre 1999 et relatif aux retraites agricoles avait souligné le caractère indispensable de ce régime obligatoire de retraites complémentaires.

En effet, l'institution d'un tel régime apparaît être la seule manière efficace de permettre d'atteindre un objectif de pensions de retraites équivalentes à 75 % du SMIC.

L'article 3 de la loi d'orientation agricole de juillet 1999 prévoyait le dépôt sur le bureau des assemblées, dans un délai de trois mois à compter de la publication de la loi , d'un rapport du gouvernement décrivant, catégorie par catégorie, l'évolution qu'il comptait imprimer aux retraites agricoles jusqu'en 2002. Ce rapport devait également étudier les possibilités juridiques et financières de la création d'un régime de retraite complémentaire obligatoire pour les non-salariés agricoles.

Ce rapport a enfin été présenté par le gouvernement en janvier 2001. Il précise que « la création d'un tel régime paraît désormais souhaitable », ce qui n'avait échappé à personne. En outre, il est également précisé que les pouvoirs publics envisagent « la création d'un tel régime après l'achèvement du plan pluriannuel de revalorisation des retraites de base », c'est-à-dire après 2002. Le rapport prend position quant à la nature de ce régime en soulignant que « ce régime devra être un régime par répartition. En effet, un régime par capitalisation est a priori écarté par tous les partenaires en ce qu'il exclut, par hypothèse, les actuels retraités qui n'auraient pas cotisé et ne bénéficieraient pas conséquent d'aucun avantage ». Cette interprétation et ce refus paradigmatique d'un régime par capitalisation semblent contestables à votre rapporteur spécial.

En outre ce rapport se contente d'indiquer que, par exemple, ce régime pourrait avoir pour objectif de porter le minimum de droits à retraite à 75 % du SMIC net de l'année 2000 ; qu'il fonctionnerait sur la base de points, dont une partie serait attribuée gratuitement, à l'origine, aux chefs d'exploitation déjà retraités ou encore en activité ; qu'il serait géré par la MSA.

Ce rapport n'évoque nullement la question, pourtant primordiale, du financement de ce régime et notamment de la participation financière de l'Etat.

Au total, le rapport présenté par le gouvernement en janvier 2001 n'apporte aucune valeur ajoutée comparé au rapport préalable de M. Germinal Peiro.

En outre, il faut rappeler ici que les mesures de revalorisation des petites retraites agricoles intervenues depuis 1994 ne correspondent, exception faite de la première année de mise en oeuvre, qu'au simple recyclage des diminutions spontanées des dépenses de retraite découlant de la diminution rapide des effectifs des retraités.

b) Des modalités contestées
(1) le choix entre un régime de répartition pure et un régime de répartition provisionné

La phase démographique dans laquelle se trouve la population agricole est très défavorable à la création d'un régime complémentaire par répartition puisque le ratio cotisant / retraité est au plus bas à 0,4.

Le choix qui existe aujourd'hui est donc le suivant :

- soit un régime de répartition pure à la condition expresse que l'Etat compense le déficit démographique du régime ;

- soit un régime par répartition provisionné dans lequel les cotisations apportées les premières années servent en partie à alimenter un fonds de réserve. Ce système présente en théorie comme avantage d'être financièrement orthodoxe et de permettre une mutualisation au profit des assurés tout en offrant une rémunération des réserves sur les marchés de même type que celle qu'il est possible d'attendre d'un régime par capitalisation. Un tel système de provisionnement de la répartition ne bénéficie cependant logiquement qu'aux actifs futurs retraités, laissant entier le cas des actuels retraités. En outre cette solution reste inadaptée à la situation démographique actuelle du régime agricole puisqu'elle n'est envisageable que dans le cadre d'un régime où il existe plus d'actifs que de retraités.

Le gouvernement semble privilégier la voie de la mise en place d'un régime de retraite complémentaire, obligatoire, par répartition et bénéficiant immédiatement aux retraités, sans aucune période d'accumulation, ainsi qu'aux futurs retraités pour les périodes n'ayant pas donné lieu à cotisation. Ce dispositif qui exige une participation des exploitants présenterait également la particularité d'un financement partiellement public.

(2) le financement

Le principe d'une cotisation assise sur une assiette forfaitaire proportionnelle au SMIC, déplafonnée pour les chefs d'exploitation, semble retenir l'attention à condition que le volume global de prélèvements obligatoires ne soit pas augmenté, c'est-à-dire que cette nouvelle charge soit gagée par un aménagement de l'assiette par ailleurs.

Quel que soit le champ choisi, le rendement des cotisations est stabilisé autour de 1 milliard.

Aujourd'hui, l'Etat apporte 1,6 milliard de francs en année pleine pour revaloriser les retraites. Un effort équivalent serait nécessaire pour amorcer le système de retraite complémentaire.

(3) le champ des catégories ouvertes

Les organisations professionnelles souhaiteraient que toutes les catégories, chefs d'exploitation, personnes veuves, conjoints et aides familiaux soient couvertes.

Il résulte néanmoins du cadrage financier imposé que seules des hypothèses visant les chefs d'exploitation et personnes veuves sont compatibles, assorties de durée de carrière à préciser, avec les contraintes de financement.

(4) le gestionnaire du régime

L'éventualité avancée est que la Mutualité sociale agricole (MSA), qui gère la retraite de base, dispose d'une expérience en matière de retraite complémentaire et a vocation à servir de guichet unique, gère ce nouveau régime à partir de 2002.

C. RÉFORME DE LA COUVERTURE DU RISQUE ACCIDENTS DU TRAVAIL : UNE OCCASION MANQUÉE

1. Un bilan négatif

L'AAEXA, l'assurance accidents obligatoire pour les exploitants agricoles, a été instituée par une loi du 22 décembre 1966 , applicable à partir de 1969. Elle couvre les conséquences des accidents de la vie privée et ceux des accidents du travail et des maladies professionnelles. Il s'agit d'une assurance privée de personne, obligatoire, et non pas d'une assurance sociale fondée sur la solidarité. L'assurance accident peut être souscrite par l'exploitant auprès de l'assureur de son choix.

Afin de compléter les prestations de l'assurance obligatoire de base, qui sont très faibles, la loi du 25 octobre 1972, qui a instauré l'assurance accidents du travail pour les salariés agricoles, a permis la mise en place d'une assurance complémentaire pour les seuls accidents du travail et les maladies professionnelles, assurance volontaire et donc facultative. Par ailleurs, les compagnies d'assurance proposent d'autres contrats alternatifs qui ne rentrent pas dans le dispositif prévu par la loi de 1972. Le système de couverture des accidents pour les exploitants comprend donc deux niveaux, l'un obligatoire (80 % des assujettis, adhérents) l'autre facultatif (moins de 5 % des assujettis potentiels adhérents).

En 1999, le nombre d'assurés à l'AAEXA était de 841 073 tandis que le nombre d'assurés à l'assurance complémentaire n'était que de 62 405.

Les garanties offertes par le régime obligatoire sont faibles . Si elles couvrent le remboursement des soins et de l'hospitalisation, elles ne prévoient pas le versement d'indemnités journalières ou d'allocations de remplacement. Les rentes, en cas d'incapacité de travail, ne sont versées qu'en cas d'inaptitude égale ou supérieure aux deux tiers (66,66 %).

Le système en vigueur d'assurance à deux étages ne permet pas d'instaurer une solidarité entre les agriculteurs face à l'accident et est générateur d'inégalités.

En outre, le mode de financement de l'assurance complémentaire est également source d'incohérence.
La plupart des assurés volontaires préfèrent opter pour des contrats alternatifs que leur proposent les assureurs et qui échappent aux taxes du Fonds commun des accidents du travail agricole. De ce fait, les contrats d'assurance complémentaire (loi de 1972) sont en chute libre et, pour assurer le versement des rentes liées à ces contrats, l'Etat a imposé une taxe de 10 % sur les contrats obligatoires de base. En outre, il a été contraint d'intervenir par une subvention annuelle qui représente environ 20 % du financement du fonds et devrait atteindre 60 % de son financement en 2010, ce qui est en contradiction avec une logique d'assurance personnelle privée.

Par ailleurs, on assiste à un transfert massif des prises en charge non financées par l'assurance accidents vers l'assurance maladie.

2. La réforme de l'AAEXA a été définitivement adoptée par l'Assemblée nationale le 5 novembre 2001

a) Le contenu de la réforme

Les grands traits de cette réforme sont les suivants :

- maintien d'un régime pluraliste incluant la MSA et les assureurs privés mais dans un cadre beaucoup plus réglementé que le précédent puisque les taux de cotisations et les montants des prestations seront fixés de manière uniforme pendant trois ans, puis par catégories de risques ;

- rôle central confié à la MSA dans la gestion de ce risque (organisation d'un contrôle effectif de l'obligation d'assurance, développement d'actions de prévention) ;

- dissociation du risque de la vie professionnelle et du risque de la vie privée, le premier ressortissant du nouveau régime, le second de l'assurance maladie ;

- définition de l'assiette des cotisations sous une forme forfaitaire et non liée au revenu professionnel ;

- création d'indemnités journalières ;

- relèvement à 70.000 francs (10.671 euros) par an du montant de la rente versée en cas d'invalidité totale résultant d'un accident du travail, mais attribution des rentes sur la base du calcul du taux d'invalidité selon le barème applicable aux salariés, et non de la capacité ou non à exercer la profession agricole ;

- création d'un fonds de réserve national spécifique, géré par la MSA, destiné à provisionner les risques ;

- gestion de la prévention par la caisse centrale de MSA.

b) Une réforme contestable

Lors de son examen au Sénat, le projet de loi portant amélioration de l'AAEXA avait été profondément modifié dans le sens d'une réaffirmation du principe assurantiel et concurrentiel du dispositif.

En effet, le texte définitivement adopté revient à transformer le dispositif auparavant en vigueur en un régime de sécurité sociale dans lequel la concurrence ne pourra plus jouer que sur des aspects secondaires. Un régime visant à améliorer sensiblement les prestations versées aux exploitants agricoles, à créer des indemnités journalière et à renforcer la prévention était tout à fait compatible avec le maintien du système concurrentiel faisant intervenir différents assureurs.

En outre, il apparaît que, en raison du refus de gouvernement de participer au financement des actions de prévention, celles-ci seront limitées au montant financé par les seules cotisations.

D. LE BAPSA ET LE PLFSS NE SONT TOUJOURS PAS COORDONNÉS

L'absence, cette année encore, de présentation consolidée entre le projet de loi de finances et le projet de loi de financement de la sécurité sociale fait apparaître des dissonances entre les mesures agricoles prévues dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2002 et la présentation du BAPSA.

Le régime social agricole pourrait être examiné par le Parlement comme les autres régimes sociaux des non-salariés, dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale. La conclusion des arbitrages du PLFSS ultérieure à celle des arbitrages relatifs au projet de loi de finances conduit, chaque année, à des lacunes et des absences, voire des incohérences, en dépenses comme en recettes dans le cadre du BAPSA.

Comme les années précédentes, on peut ainsi remarquer en 2002 un mouvement de transferts entre le budget de l'Etat et la loi de financement de la sécurité sociale.

Ainsi, l'article 18 du présent projet de loi de finances prévoit l'affectation au BAPSA d'une partie du produit de la C3S (520 millions d'euros, soit 3,4 milliards de francs) en 2002 au régime d'assurance vieillesse des non salariés agricoles.

Cette affectation d'une partie du produit de la C3S au BAPSA est traditionnelle, l'article 38 de la loi de finances pour 2001ayant pérennisé et officialiser cette situation.

Cette affectation a cependant eu pour conséquence de faire du Fonds de réserve pour les retraites le véritable perdant du prélèvement envisagé : ainsi en 2000 le produit de la C3S n'a que partiellement compensé le déséquilibre du FSV prévu par le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 (un déficit de 1,08 milliard de francs en 2001 (160 millions d'euros), soit un ordre de grandeur comparable à celui du prélèvement opéré au profit du BAPSA). Ce sont autant de recettes dont n'a pas bénéficié plus la première partie du FSV dont les excédents doivent pourtant abonder le fonds de réserve pour les retraites.

En outre, votre rapporteur spécial tient à souligner que le recours systématique et croissant à cette affectation de C3S au BAPSA ne constitue qu'un moyen pour le gouvernement de réduire drastiquement sa subvention d'équilibre budgétaire au BAPSA. Ainsi, pour l'année 2002, la subvention d'équilibre du budget général devrait s'établir à 271 millions d'euros, contre 824 millions d'euros en 2001, soit une baisse significative de 67 %.

Enfin, il apparaît que cette ponction d'une partie du produit de la C3S au profit du BAPSA, qui bénéficie déjà d'impositions affectées et d'une subvention d'équilibre du budget de l'Etat, revient à détourner des régimes des commerçants et artisans (ORGANIC et CANCAVA) une partie des sommes qui leur sont normalement dues au titre de la C3S.

De même, le projet de loi de finances ne tient aucunement compte des conséquences financières des mesures adoptées en loi de financement sur le BAPSA et qui ont pour résultat de dégrader le solde de celui-ci par une hausse de ses dépenses. Or, le BAPSA est légalement en équilibre, ce qui imposera des mesures correctrices. Tel qu'il est présenté en loi de finances il ne peut être considéré comme sincère.

L'article 17 du PLFSS pour 2002 prévoit une mesure de revalorisation de 2,2 % des pensions de retraite., alors que le relèvement des pensions retenu pour le projet de BAPSA est de 1,8 %. Les dépenses supplémentaires induites par cette revalorisation du PLFSS devraient s'élever à 21 millions d'euros (138 millions de francs), au titre des retraites contributives, et à 1 million d'euros (6,56 millions de francs) au titre du FSV.

De même, les prévisions de dépenses des prestations familiales ne tiennent compte, dans le BAPSA, que d'un relèvement de 2,1 % de la BMAF (base mensuelle des allocations familiales) et non de 2,2 % comme prévu par le PLFSS pour 2002.