3. Une procédure budgétaire insuffisamment démocratique

Si les ressources du budget des Communautés européennes sont déterminées par les Etats membres et votées par les Parlements nationaux, ces derniers n'ont aucun pouvoir d'influence sur la fixation des dépenses dont le montant résulte d'un compromis entre le Conseil et le Parlement européen, à partir de l'avant-projet de budget proposé par la Commission européenne.

Cette asymétrie procédurale entre recettes et dépenses n'est pas réellement conforme aux exigences de « démocratie budgétaire » , et ne tire pas toutes les conséquences du principe fondamental de consentement à l'impôt. En outre le rôle de l'institution intergouvernementale qu'est le Conseil européen attise les revendications et les compromis parfois douloureux sur la problématique du « taux de retour », dont le caractère souvent primordial tend à nuire à l'établissement d'une « communauté de destins » européenne.

Ainsi un cadre plus démocratique devrait théoriquement aligner les processus décisionnels relatifs aux dépenses et aux recettes sur un même niveau institutionnel, national ou communautaire.

4. Une programmation peu efficace et des dysfonctionnements de gestion majeurs

Depuis longtemps, le budget communautaire manifeste à bien des égards une amplitude excessive et une insuffisante profondeur, c'est-à-dire une multiplication déraisonnable d'actions ne présentant pas nécessairement la taille critique et les effets d'entraînement adéquats, et un niveau d'exécution notoirement faible dans certains domaines, que la Cour des comptes européenne n'a pourtant de cesse de déplorer 22( * ) .

Le saupoudrage des crédits est particulièrement patent dans les politiques internes
, où 28,6% des crédits assurent le financement d'une vingtaine de domaines d'activité dont l'importance stratégique des intitulés (éducation et formation, emploi, environnement...), comparable à celle de départements ministériels nationaux, excède largement celle des montants engagés. Cet éparpillement n'est pas conforme au principe de subsidiarité, pas plus qu'aux exigences fondamentales d'efficacité socio-économique.

La politique de recherche , qui regroupe la plus grande partie des crédits de politique interne, prête également le flanc à la critique en ce qu'elle tend à doublonner celle menée par les Etats, et ne se concentre pas suffisamment sur les synergies potentielles et sur la coopération des équipes nationales de recherche, bien que des efforts aient récemment été engagés. Votre rapporteur considère que la mise en oeuvre des crédits européens devrait être notamment conditionnée par la collaboration d'équipes de plusieurs Etats. Il estime également que les réseaux transeuropéens de transports, dont les externalités positives ne sont plus à démontrer , devraient se concentrer sur des projets emblématiques sur les plans politique, géographique et économique. Il a remis cette année une proposition à la Commission et aux ministres français de l'Agriculture et des Transports, tendant à renverser la perspective du cofinancement des axes transalpins, en particulier l'axe Lyon-Turin . Il ne s'agirait plus de concevoir le financement européen comme subsidiaire, mais comme désormais majoritaire, sur des projets comportant de nombreuses implications sur la protection de l'environnement, le rapprochement de l'Europe du nord et de l'Europe méditerranéenne, et l'optimisation des flux économiques.

Comme il a été exposé dans la deuxième partie de la présente note, les crédits d'actions structurelles et d'actions extérieures font l'objet d'une sous-consommation chronique, se traduisant par des restes à liquider massifs en 2001 (50,16 milliard d'euros pour les fonds structurels et 13,22 milliards pour les actions extérieures). De même la mise en oeuvre des nouveaux instruments de préadhésion est lente, la Cour des comptes européenne relève ainsi que les bénéficiaires finaux du programme SAPARD n'ont perçu qu'un million d'euros en 2001... Dans ses deux derniers rapports annuels, la Cour a également relevé, entre autres, les carences suivantes :

- un recouvrement de créances insatisfaisant sur le FEOGA-Garantie (deux milliards d'euros de créances fin 2000), 450 millions d'euros de dépenses annuelles inutiles au sein du régime d'aide au blé dur, et une aggravation du manque de rigueur de la Commission dans la gestion des virements de crédits ;

- l'inachèvement du système de gestion intégré , de telle sorte que la fiabilité des déclarations des pays bénéficiaires des aides agricoles et structurelles demeure partielle 23( * ) ;

- des retards dans l'application des contrôles sur les fonds structurels , l'imprécision des objectifs du FEDER et le saupoudrage des financements de l'initiative communautaire URBAN (objectifs trop ambitieux et peu concrets) ;

- une amélioration de la gestion des politiques internes (fondée sur le principe de la déclaration de dépenses et l'absence de sanctions contractuelles), mais qui ne permet pas de dissuader les risques de surdéclaration de coûts réels 24( * ) . La Cour n'a délivré qu'une déclaration d'assurance limitée pour le 5 e PCRD, du fait de l'absence de manuel officiel de procédures et des dysfonctionnements du service d'audit ;

- une forte concentration en fin d'année des engagements sur les actions extérieures, en particulier pour les programmes relatifs à l'Asie, l'Amérique latine et MEDA.