M. Claude HAUT

II. LE PROGRAMME 161 « INTERVENTION DES SERVICES OPÉRATIONNELS »

A. LES PRINCIPALES ÉVOLUTIONS DE CRÉDITS DU PROGRAMME

Le programme « Intervention des services opérationnels » regroupe les crédits destinés à la mobilisation des moyens nationaux de sécurité et de défense civiles visant à protéger la population en cas de catastrophe naturelle ou technologique. Il regroupe quatre actions fonctionnelles qui correspondent à quatre situations différentes dans lesquelles l'Etat est susceptible d'avoir à mettre ses moyens de secours à disposition des préfets, à savoir :

- les feux de forêts,

- les autres catastrophes naturelles ou technologiques (inondations, pollutions industrielles, etc.),

- les secours par hélicoptère

- et la neutralisation des engins explosifs.

Dans chacune de ces situations, les moyens de l'Etat s'articulent avec ceux des départements, l'intervention de l'Etat étant rendue nécessaire lorsque les coûts des technologies et du savoir-faire nécessaires sont trop élevés pour qu'ils soient financés par les seules collectivités territoriales.

Ce programme est doté dans le présent projet de loi de finances de 564,4 millions d'euros de crédits en AE et 240,7 millions d'euros en CP , soit respectivement 77,1 % et 57,5 % des crédits de la mission. En incluant les fonds de concours, le montant des CP s'élève à 241,75 millions d'euros.

Par rapport aux crédits ouverts en loi de finances initiale pour 2007, les AE font plus que doubler , puisqu'ils étaient inférieurs à 270 millions d'euros. Les CP, quant à eux, n'augmentent que de 0,7 %.

La hausse des AE s'explique uniquement par la multiplication par quatre des dépenses de fonctionnement . Les autres dépenses diminuent : celles de personnel (titre 2) de 12,2 % et celles d'investissement sont divisées par deux, passant de 42 à 20 millions d'euros.

Il est à noter que les actions du programme bénéficient de la ventilation de crédits d'autres programmes, essentiellement, comme le montre le tableau ci-après, de l'autre programme de la mission, « Coordination des moyens de secours », qui lui reverse 18,45 millions d'euros. Ce programme comprend en effet l'action « Soutien à la politique de sécurité civile » qui rassemble l'ensemble des crédits des fonctions de soutien de la mission.

Répartition des crédits entre les actions du programme, avant et après ventilation
(en incluant les fonds de concours)

(en millions d'euros)

Actions

Crédits de paiement avant ventilation

Crédits de paiement après ventilation

Participation de l'Etat à la lutte contre les feux de forêts

109,55

118,43

Interventions spécialisées sur les autres catastrophes naturelles et technologiques

30,91

35,59

Secours à la personne par hélicoptère

69,40

73,94

Neutralisation des engins explosifs

31,89

36,02

Ensemble

241,75

263,98

+ 22,23 millions d'euros

Crédits en provenance du programme "Coordination des moyens de secours" (Sécurité civile) : 18,45 millions d'euros

Crédits en provenance du programme « Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur » (AGTE) : 3,39 millions d'euros

Crédits en provenance du programme « Police nationale » (Sécurité) : 0,38 million d'euros

Source : projet annuel de performances annexé au présent projet de loi de finances.

1. Le renouvellement d'un contrat de maintenance

Le niveau des dépenses de fonctionnement s'explique par l'arrivée à terme, le 30 septembre 2008, du contrat de maintenance 2004-2008 de l'ensemble des avions de la sécurité civile . Le renouvellement prévu de ce contrat explique le montant élevé des AE en dépenses de fonctionnement dans le présent projet de loi de finances, d'autant plus qu'il est prévu de mettre en oeuvre la recommandation de l'audit de modernisation sur la maintenance des aéronefs de la sécurité civile qui préconise le passage de 4 à 10 ans des contrats de maintenance . Cet allongement devrait permettre d'une part de baisser le coût de la maintenance et d'autre part d'inciter davantage de sociétés à participer aux appels d'offre, renforçant ainsi la mise en concurrence. Le contrat de renouvellement englobera par ailleurs la maintenance des appareils Dash, ce qui n'était pas le cas jusqu'à présent. Il devrait ainsi s'établir à 350 millions d'euros . Cela explique aussi que le montant des AE de la mission soit largement supérieur, pour 2008, au montant des CP.

Par ailleurs, il convient de signaler que la DDSC évaluera, dans le cadre du renouvellement de ce contrat de maintenance, une autre préconisation de l'audit de modernisation, qui vise à ce que les pourcentages de disponibilité des appareils, fixés dans les contrats de maintenance, soient réduits, notamment hors « saison feux ». Cette baisse, associée aux autres préconisations de la mission, doit, selon l'audit de modernisation, permettre de réaliser des économies de l'ordre de 6 à 9 millions d'euros . Votre rapporteur spécial, dans le prolongement de ses travaux antérieurs, et précités, de contrôle, sera attentif aux économies effectivement réalisées lors de la passation de ce nouveau contrat de maintenance.

2. La diminution des dépenses de personnel

La diminution de 12,2 % des dépenses de personnel du programme ne résulte pas d'une baisse d'effectifs, puisque celle-ci est faible, à hauteur de 23 ETPT, à comparer aux 2.116 demandés en 2008 pour le programme. Elle trouve son origine dans la baisse de près de 30 % des crédits affectés aux cotisations et contributions sociales, qui résulte d'une meilleure prise en compte des dépenses réellement exécutées .

En effet, par rapport à l'exécution 2006, les dépenses de personnel augmentent de 1,8 %. On constate que les dépenses de personnel de ce programme ont fait l'objet, en 2006 comme en 2007, de sur-budgétisations puis d'annulations importantes de crédits en cours d'année. Votre rapporteur spécial se réjouit donc de voir, après plusieurs années de sur-budgétisations , qui avaient d'ailleurs fait l'objet de remarques de votre rapporteur spécial dans ses précédents rapports, que les dépenses de personnel correspondent davantage aux besoins réels du programme et que la période d'incertitudes résultant de la mise en place de la LOLF touche à sa fin.

3. La diminution des dépenses d'investissement

Enfin, la division par deux des dépenses d'investissement entre le projet de loi de finances initiale pour 2007 et le présent projet de loi de finances s'explique par l'acquisition, en 2007, de trois hélicoptères EC 145 , qui avaient représenté 22,5 millions d'euros en AE.

Aucun investissement de cet ampleur n'est prévu pour 2008.

B. LES QUATRE ACTIONS DU PROGRAMME

Le programme comprend quatre actions, la plus importante en termes budgétaires étant la première « Participation de l'Etat à la lutte contre les feux de forêts ».

Répartition des crédits du programme par action

(en millions d'euros)

Intitulé de l'action

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Pourcentage des autorisations d'engagement du programme

Pourcentage des crédits de paiement du programme

Participation de l'Etat à la lutte contre les feux de forêts

448,6

109,6

79,5 %

45,5 %

Interventions spécialisées sur les autres catastrophes naturelles et technologiques

31,9

30,5

5,6 %

12,7 %

Secours à personne par hélicoptère

51,2

69,1

9,1 %

28,7 %

Neutralisation des engins explosifs

32,7

31,5

5,8 %

13,1 %

Total

564,4

240,7

100 %

100 %

Source : projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2008

1. L'action 1, « Participation de l'Etat à la lutte contre les feux de forêts »

Cette action représente, dans le présent projet de loi de finances, près de 80 % des crédits du programme en AE, soit 448,6 millions d'euros , qui eux-mêmes sont à 86 % constitués de dépenses de fonctionnement.

Les moyens de l'Etat dans la participation à la lutte contre les feux de forêts viennent s'ajouter à ceux des SDIS. Ils sont à la fois terrestres et aériens mais il convient de noter qu'en termes de moyens aériens, ils représentent la quasi-totalité des moyens disponibles, puisque seuls quelques départements disposent, durant la période estivale, de leurs propres moyens aériens légers.

L'Etat dispose quant à lui à Marignane d'une flotte d'avions bombardiers d'eau de 23 appareils : 2 bombardiers d'eau aériens Dash 8, 12 Canadair CL-415 (le 12 ème , acquis en 2006, ayant été livré en mai 2007) et 9 bombardiers terrestres Tracker 8 ( * ) .

Outre le renouvellement du contrat de maintenance , évoqué ci-dessus, qui explique la hausse des dépenses de fonctionnement, cette action est celle pour laquelle la diminution des dépenses de personnel est la plus marquée. Celles-ci passent de 64,7 à 50,1 millions d'euros, soit une diminution de 22,6 % qui s'explique par une meilleure évaluation prévisionnelle des dépenses. Elle se rapproche en effet des 47,9 millions d'euros de crédits effectivement consommés en 2006.

2. L'action 2, « Interventions spécialisées sur les autres catastrophes naturelles et technologiques »

Cette action recouvre 40 % de l'effectif des formations militaires de la sécurité civile, ce qui correspond à la part des interventions spéciales.

Elle est d'un montant relativement faible au sein du programme, dont elle ne représente que 12,7 % des crédits de paiement, essentiellement des dépenses de titre 2.

3. L'action 3, « Secours à personne par hélicoptère »

Cette action correspond aux activités d'entretien, de mise à disposition et d'intervention par hélicoptère du groupement des moyens aériens de la sécurité civile. L'échelon central du groupement d'hélicoptères (ECGH) se trouve à Nîmes et s'articule avec 22 bases opérationnelles sur le territoire.

L'action représente 69,1 millions d'euros en CP dans le présent projet de loi de finances, soit 28,9 % des crédits du programme. La baisse de 30 % des AE parallèlement à la hausse de 21 % des CP s'explique essentiellement par l'acquisition, en 2007, de trois hélicoptères EC 145 , dont le financement avait été couvert en AE dans la loi de finances initiale pour 2007 mais qui nécessite d'être couvert en CP en 2008.

4. L'action 4, « Neutralisation des engins explosifs »

Elle regroupe trois types de missions : la neutralisation des engins de guerre retrouvés sur le territoire, celle des colis suspects et la sécurisation, permanente ou temporaire, de certains sites. Elle est d'un montant relativement faible au sein du programme, dont elle ne représente que 13,1 % des crédits .

On remarque que les dépenses de personnel de cette action diminuent de 5 millions d'euros , soit une baisse de 22,1 %, par rapport à 2007. Leur montant est de 22,5 millions d'euros dans le présent projet de loi de finances, ce qui se rapproche de leur montant en exécution, inscrit dans la loi de règlement pour 2006. De ce point de vue, la même remarque que pour l'action 1 « Participation de l'Etat à la lutte contre les feux de forêts » peut être formulée et il convient de se réjouir du fait que les évaluations de dépenses de personnel soient mieux budgétisées que les années précédentes .

C. UNE MESURE DE LA PERFORMANCE SATISFAISANTE, MAIS QUI PEUT ÊTRE PERFECTIONNÉE

1. Une mesure de la performance de qualité

Les objectifs du programme révèlent clairement la nécessité de concilier deux impératifs : l'efficacité dans le soutien à la lutte contre certains risques, ce que vise notamment l'objectif 1 « Assurer un appui aérien à la lutte contre les feux de forêts », tout en limitant le coût de ces missions, qui peuvent s'avérer particulièrement onéreuses, comme le montre l'objectif 5 « Optimiser le coût d'exploitation de la flotte du Groupement d'Hélicoptères de la Sécurité Civile (GHSC) ».

Votre rapporteur spécial tient à souligner la qualité des indicateurs du programme « Intervention des services opérationnels ». Ils sont pertinemment réalisés et convenablement renseignés.

Il est à noter que l'indicateur 2 de l'objectif 6 « Délai moyen d'intervention sur colis piégé », introduit en 2007, a été séparé en deux sous-indicateurs selon que l'intervention est le fait d'une équipe de déminage pré-positionnée ou non. Votre rapporteur spécial s'en félicite . Cela permet en effet d'avoir une vision plus claire et objective du temps d'intervention lorsqu'une équipe n'est pas pré-positionnée sur le site. Il salue par ailleurs le travail remarquable des équipes de déminage qu'il a eu l'occasion de rencontrer à Toulon .

2. Les améliorations à apporter

La prise en compte des recommandations de la mission d'audit du comité interministériel d'audit des programmes (CIAP) avait été effective en conduisant en 2007 à la création d'un indicateur relatif au « délai moyen d'intervention sur colis piégé » . Toutefois, cet indicateur ne présente toujours aucune prévision de réalisation au titre de l'année 2007 qui pourrait être comparée à la prévision pour 2008. Votre rapporteur regrette que ce retard ne lui permette pas de disposer des premiers éléments d'analyse.

Par ailleurs, votre rapporteur spécial renouvelle ses remarques, déjà formulées dans le rapport spécial sur le projet de loi de finances pour 2007, sur l'objectif visant à assurer l'appui aérien, qui, selon lui, relève davantage des moyens que d'un véritable objectif . Son indicateur sur la disponibilité des appareils résulte en effet principalement de la maintenance de « type 1 », très règlementée puisqu'elle consiste essentiellement en une maintenance « normale », préconisée par le constructeur, et effectuée à coût fixe sur la base d'une prestation forfaitaire. Tout en étant conscient des contraintes de l'exercice, il avait suggéré de mesurer les efforts réels des services quant à la maintenance dite de « type 2 », c'est-à-dire celle résultant des dégradations de matériels qui ne peuvent être prévues à l'avance .

Votre rapporteur constate à nouveau que cette recommandation, qui rejoignait celles de l'audit de modernisation du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, n'a toujours pas été suivie.

Les principales observations de votre rapporteur spécial
sur le programme 161 « Intervention des services opérationnels »

La hausse exceptionnelle des autorisations d'engagement du programme résulte exclusivement du renouvellement d'un contrat de maintenance , dont votre rapporteur spécial se félicite qu'il suive les préconisations du comité interministériel d'audit des programmes en passant d'une durée de 4 ans à une durée de 10 ans.

Votre rapporteur salue par ailleurs l'effort de rationalisation des dépenses de personnel qui, après plusieurs années de sur-budgétisations, ayant d'ailleurs fait l'objet de remarques de votre rapporteur spécial dans ses précédents rapports, correspondent davantage aux besoins réels du programme et en permettent ainsi une analyse plus claire.

Aucun investissement de grande ampleur n'est prévu cette année, ce qui explique la baisse des dépenses d'investissement par rapport à l'année dernière, où trois hélicoptères EC 145 avaient été acquis.

Tout en reconnaissant la grande qualité du travail effectué par le ministère sur les indicateurs, votre rapporteur spécial regrette qu'un certain nombre d'indicateurs n'aient pas été mis à jour et que certaines de ses préconisations formulées dans son rapport d'information 9 ( * ) n'aient pas été suivies d'effets.

* 8 A ce sujet, voir le rapport d'information n° 452 (2005-2006) de votre rapporteur spécial, « Flotte aérienne de lutte contre les incendies : se donner les moyens de vaincre le feu ».

* 9 Rapport d'information n° 452 (2005-2006), « Flotte aérienne de lutte contre les incendies : se donner les moyens de vaincre le feu ».