Rapport d'information n° 65 (2000-2001) de MM. Joseph OSTERMANN et Gérard BRAUN , fait au nom de la commission des finances, déposé le 7 novembre 2000

Disponible au format Acrobat (516 Koctets)

N° 65

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2000-2001

Annexe au procès-verbal de la séance du 7 novembre 2000

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) sur la situation, la gestion et les rémunérations des personnels du ministère de l'emploi ,

Par MM. Joseph OSTERMANN et Gérard BRAUN,

Sénateurs.

(1) Cette commission est composée de : MM. Alain Lambert, président ; Jacques Oudin, Claude Belot, Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. Roland du Luart, Bernard Angels, André Vallet, vice-présidents ; Jacques-Richard Delong, Marc Massion, Michel Sergent, François Trucy, secrétaires ; Philippe Marini, rapporteur général ; Philippe Adnot, Denis Badré, René Ballayer, Jacques Baudot, Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM. Roger Besse, Maurice Blin, Joël Bourdin, Gérard Braun, Auguste Cazalet, Michel Charasse, Jacques Chaumont, Jean Clouet, Yvon Collin, Jean-Pierre Demerliat, Thierry Foucaud, Yann Gaillard, Hubert Haenel, Claude Haut, Alain Joyandet, Jean-Philippe Lachenaud, Claude Lise, Paul Loridant, Michel Mercier, Gérard Miquel, Michel Moreigne, Joseph Ostermann, Jacques Pelletier, Louis-Ferdinand de Rocca Serra, Henri Torre, René Trégouët.

Fonctionnaires et agents publics.

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Au cours de l'année 1998, votre commission des finances a été destinataire de la copie d'un référé du Premier président de la Cour des comptes, M. Pierre Joxe, en date du 28 juillet 1998, adressé à la ministre de l'emploi et de la solidarité, Mme Martine Aubry, attirant son attention sur trois dysfonctionnements affectant la gestion des personnels de son ministère.

M. Pierre Joxe écrivait en effet : " à l'occasion d'un contrôle des effectifs budgétaires et du régime indemnitaire des services déconcentrés du ministère chargé du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle, qui a porté sur les exercices 1992 à 1995, et après avoir examiné les réponses au relevé de constatations provisoires adressé à ce propos au directeur de l'administration générale et de la modernisation des services, la Cour a relevé que les effectifs dont disposait le ministère étaient éloignés des prévisions et autorisations de la loi de finances initiale. Une amélioration de leur gestion prévisionnelle lui paraît dès lors indispensable. Le non-respect des dispositions régissant le régime des indemnités accessoires des agents de catégorie C conduit enfin à poser la question de leur refonte ".

Votre rapporteur spécial du budget de l'emploi a eu l'occasion d'interroger la ministre sur ce point lors de l'examen des crédits de l'emploi pour 2000, au Sénat, le 6 décembre 1999.

Or, en janvier dernier, la Cour des comptes a publié un rapport particulier relatif à La fonction publique de l'Etat , qui consacre notamment un chapitre aux personnels du ministère de l'emploi et de la solidarité.

Ce rapport est globalement accablant, et votre rapporteur spécial des crédits de la fonction publique est intervenu lors du débat d'orientation budgétaire pour 2001, le 6 juin dernier, afin de demander au gouvernement quelles mesures il comptait prendre pour améliorer la gestion des personnels de l'Etat, auxquels 40 % du budget de ce dernier sont consacrés.

C'est dans de contexte que, sur la recommandation du président de votre commission des finances, vos rapporteurs ont décidé d'entreprendre une mission de contrôle sur pièces et sur place, conformément aux prérogatives qu'ils tiennent de l'article 164-IV de l'ordonnance n° 58-1374 du 30 décembre 1958 portant loi de finances pour 1959, relative à la situation, la gestion et les rémunérations des personnels du ministère de l'emploi.

Par ailleurs, la loi de finances pour 2000 prévoit la création de 130 emplois supplémentaires au bénéfice des services du ministère de l'emploi, alors que la gestion de ses effectifs s'est révélée défaillante, et que ces créations étaient présentées par la ministre comme indispensables à la mise en oeuvre de la réduction du temps de travail que le gouvernement a imposée aux entreprises.

Il apparaissait donc nécessaire à vos rapporteurs que la représentation nationale soit éclairée sur l'efficience des dépenses ainsi engagées.

Il convient en effet de souligner que les effectifs réels des administrations de l'Etat diffèrent sensiblement des emplois budgétaires. Il est extrêmement difficile de connaître le nombre exact des premiers, déconnecté de celui des seconds, d'autant plus que chaque département ministériel a des pratiques de gestion de ses effectifs très différentes.

Ces différences sont liées, notamment, au temps partiel, un emploi à temps plein pouvant servir à rémunérer plusieurs agents à temps partiel, aux gels d'emplois, aux personnels recrutés sur crédits, en particulier les contractuels, ou encore à la pratique des surnombres.

Pourtant, le Parlement, afin d'assurer la maîtrise des recrutements et des dépenses de personnel, accorde une double autorisation, sur les emplois d'une part, sur les crédits d'autre part.

L'ordonnance n° 59-2 du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances comporte plusieurs dispositions relatives aux emplois budgétaires.

Son article 1 er , alinéa 5, précise que " les créations et transformations d'emplois ne peuvent résulter que de dispositions prévues par une loi de finances ". Son article 32 prévoit que le projet de loi de finances est accompagné d'annexes explicatives faisant notamment connaître " les crédits afférents aux créations, suppressions et transformations d'emplois ". Quant à son article 43, il indique que les créations, suppressions et transformations d'emplois effectuées par la loi de finances ne peuvent résulter que des modifications de crédits correspondantes " dûment explicitées par les annexes ".

Les dotations en emplois figurent ainsi, au stade du projet de loi de finances, dans les annexes dudit projet, appelées " bleus budgétaires ", et après son vote, dans les annexes aux décrets de répartition, dites " verts budgétaires ". Ces documents décrivent donc les emplois budgétaires.

Si le Parlement, parce qu'il le vote, connaît le nombre des emplois budgétaires, totaux mais aussi ceux alloués à chaque département ministériel, il manque d'informations pertinentes sur les effectifs réels mais aussi sur les rémunérations des agents de l'Etat.

Le présent rapport tend à améliorer cette information, en ce qui concerne les personnels de la section emploi du ministère de l'emploi et de la solidarité.

Vos rapporteurs se sont attachés à analyser non seulement la gestion de ces personnels, mais aussi à obtenir des informations concernant leurs rémunérations et, surtout, à estimer l'adéquation des moyens du ministère de l'emploi en personnels à ses missions.

Il convient d'ailleurs de rappeler que la gestion, en particulier dans ses aspects financiers, des personnels du ministère de l'emploi n'a encore jamais constitué un sujet d'inspection à part entière de l'Inspection générale des affaires sociales. En outre, les questions de personnels ne sont pas prédominantes dans les préoccupations des responsables des services du ministère.

A cet égard, vos rapporteurs souhaitent procéder à un rappel de l'organisation des services du ministère.

La gestion des emplois du ministère de l'emploi et de la solidarité est confiée à deux directions distinctes au sein de l'administration centrale, les directions régionales du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle (DRTEFP) et les directions départementales (DDTEFP) relevant de la compétence de la direction de l'administration générale et de la modernisation des services (DAGEMO).

Les missions des directions régionales et des directions départementales sont définies par l'instruction ministérielle du 17 janvier 1995, annexée au présent rapport.

A l'instar de l'ensemble des services déconcentrés de l'Etat, les directions régionales et départementales du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle sont placées sous l'autorité du préfet de région ou du préfet de département du lieu de résidence, à l'exception des sections de l'inspection du travail, qui relèvent directement du ministre et de la direction des relations du travail du ministère, leur indépendance dans l'établissement d'un procès-verbal sanctionnant la méconnaissance du droit du travail étant garantie par la convention 81 de l'Organisation internationale du travail.

La direction départementale est l'échelon opérationnel des services déconcentrés, la direction régionale jouant un rôle d'intermédiaire consistant à :

- rendre compte à l'administration centrale de la situation constatée en matière d'emploi, d'état des relations sociales, ou d'application sur le terrain des textes, directives ou circulaires de l'administration centrale ;

- animer et coordonner l'action des services déconcentrés en matière d'emploi, de travail et de formation professionnelle.

Cette dernière mission implique un lien hiérarchique qui revêt un caractère largement implicite, garant d'une cohérence minimale et de l'application uniforme dans chaque département des différents textes et des politiques de l'emploi.

Pour des raisons liées à l'efficacité de l'organisation, les directions régionales constituent un échelon arbitral en matière de répartition des crédits de fonctionnement.

Il peut également exister des spécificités locales d'organisation. Ainsi la direction régionale du Nord-Pas-de-Calais a-t-elle créé, à titre expérimental, un poste de secrétaire général dans le but de renforcer l'efficacité des services déconcentrés en matière de gestion des crédits et des moyens.

En ce qui concerne la gestion des personnels, ce lien hiérarchique est plus prononcé, puisque le directeur régional est le notateur final de l'ensemble des fonctionnaires accomplissant leurs missions au sein des services déconcentrés du ministère. De plus, les décisions importantes sont négociées, débattues et arrêtées par le comité technique régional et interdépartemental (CTRI), présidé par le directeur régional.

Toutefois, une part importante de cette gestion échappe au directeur régional, d'une part, parce que l'affectation des personnels au sein d'un service ne relève initialement que de la seule administration centrale, et, d'autre part, parce que les orientations données par la direction régionale laissent toute latitude aux directeurs départementaux de décider parallèlement des moyens à mettre en oeuvre pour y répondre.

Vos rapporteurs ont d'abord adressé un questionnaire à la ministre de l'emploi et de la solidarité afin d'obtenir des informations sur la façon dont le ministère gérait ses personnels.

Ils ont ensuite procédé à l'audition d'une dizaine de personnalités concernées plus ou moins directement par les moyens alloués à la mise en oeuvre de la politique de l'emploi, qu'ils appartiennent au service public de l'emploi, ou non. Le compte-rendu de ces auditions figure en annexe au présent rapport.

Ils ont également effectué plusieurs déplacements au sein des services déconcentrés du ministère, dans les directions régionales du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle en l'occurrence, où ils ont rencontré de nombreux agents du ministère. Au cours de ces déplacements, ils ont aussi souhaité s'entretenir avec les trésoriers-payeurs généraux afin de savoir comment la paye des fonctionnaires était assurée, et les emplois contrôlés.

Enfin, ils se sont rendus à la DAGEMO, puis au ministère de la fonction publique, où ils ont rencontré le directeur général de l'administration et de la fonction publique.

Vos rapporteurs souhaitent remercier l'ensemble de leurs interlocuteurs qui, à l'exception de certains hauts fonctionnaires plutôt désinvoltes à l'égard de la représentation nationale, les ont très bien accueillis.

Ils ont pu mesurer les grandes qualités professionnelles de ces fonctionnaires dont le sens du service public est exemplaire et leur maîtrise des dossiers parfaite. Ils souhaitent adresser des remerciements particuliers à Mme Marie-Caroline Bonnet-Galzy, directeur de la DAGEMO, qu'ils ont rencontrée à deux reprises, d'abord au Sénat puis au ministère, qui a manifesté un grand intérêt à la conduite de cette mission, que confirme notamment la qualité exceptionnelle des réponses qu'elle leur a apportées.

Après avoir rappelé le contexte du budget de l'emploi, et la place des dépenses de personnel en son sein, vos rapporteurs ont tenté d'analyser les affirmations du ministère concernant sa pénurie d'effectifs, puis ont examiné la façon dont ces derniers sont gérés.

CHAPITRE PREMIER

LA TRÈS FORTE CROISSANCE DU BUDGET DE L'EMPLOI

Vos rapporteurs ont déjà exposé à plusieurs reprises leur souhait de voir réformer les missions et le format de l'Etat.

Cette question recouvre une réalité très concrète, celle du poids des dépenses publiques dans le produit intérieur brut de la France, notre rapporteur général, M. Philippe Marini, ayant montré, notamment à l'occasion du dernier débat d'orientation budgétaire, que notre pays est une exception en ce domaine au sein de l'Union européenne.

Le secteur de l'emploi constitue un exemple particulièrement révélateur du poids considérable des dépenses publiques en France. La forte augmentation des crédits qui lui sont alloués depuis le début des années 1990 démontre un interventionnisme croissant de l'Etat sur un marché souffrant déjà de multiples rigidités, même si une faible part de ces crédits est dévolue aux personnels du ministère de l'emploi.

I. LE DEUXIÈME BUDGET CIVIL DE L'ÉTAT

La Cour des comptes, dans son rapport relatif à l'exécution des lois de finances pour 1998, a consacré, pour la première fois, une monographie au budget de l'emploi au cours de la période 1994 à 1998.

De cette analyse, il ressort que le budget de l'emploi a connu une dynamique telle qu'il est devenu aujourd'hui le deuxième budget civil de l'Etat, traduisant ainsi l'intervention croissante de la sphère publique dans la politique de l'emploi, et, plus généralement, dans la vie économique.

En outre, le budget de l'emploi ne retrace pas la totalité des crédits alloués à la politique de l'emploi.

A. LA QUESTION DU PÉRIMÈTRE DU BUDGET DE L'EMPLOI ...

La monographie précitée donne à la Cour des comptes l'occasion de rappeler le contexte budgétaire de la politique de l'emploi depuis quelques années.

Elle a par ailleurs été amenée à faire un certain nombre de remarques et d'observations sur la gestion de ces crédits.

1. Des crédits en forte augmentation

La Cour des comptes relève que le budget de l'emploi est le deuxième budget civil de l'Etat , après celui de l'enseignement scolaire, et observe que, depuis 1994, il a connu une croissance considérable de ses dotations, de + 36,2 %.

Les crédits inscrits sur ce fascicule s'établissaient, en 1998, à 112,6 milliards de francs.

Le titre III, qui comprend notamment les dépenses de personnel, a, en comparaison de l'ensemble du budget, évolué modérément (2,1 % en moyenne annuelle). Toutefois, les crédits alloués à l'ANPE ont fortement crû, de 17 % entre 1993 et 1998.

Le titre IV a, lui, connu une évolution beaucoup plus importante, puisqu'il a progressé de 39,3 % entre 1994 et 1998. Les crédits de la 4 ème partie de ce titre (" Action économique ") sont à l'origine de cette forte croissance : ils sont passés de 42,8 à 69,5 milliards de francs.

Il convient de rappeler que, jusqu'en 1999, il existait un chapitre 44-75 " Mesures exceptionnelles en faveur de l'emploi et de la formation professionnelle " du budget des charges communes, qui était doté de montants considérables :

Ce chapitre permettait notamment d'assurer le financement de la ristourne dégressive sur les bas salaires, dite " ristourne Juppé ", pour un montant d'environ 40 milliards de francs.

La Cour des comptes a été amenée à élaborer un budget consolidé de l'emploi comprenant non seulement les crédits du budget du ministère de l'emploi proprement-dit mais aussi les dotations du chapitre 44-75 du budget des charges communes.

La prise en compte de ce dernier chapitre porte la progression des crédits de la politique de l'emploi à + 51 % de 1994 à 1998.

Le tableau ci-après montre que les crédits de l'emploi ont progressé de près de 11 % par an en moyenne de 1994 à 1998.

L'existence de ce budget consolidé a permis de mettre en évidence un certain nombre de pratiques ayant fait l'objet de critiques de la part de la Cour des comptes, s'agissant notamment de modifications intervenues en cours de gestion.

2. De nombreuses modifications intervenues en cours de gestion

La Cour des comptes a constaté de fréquentes adaptations du budget de l'emploi par des décrets d'avance. Les crédits ouverts ont notamment concerné des dispositifs nouveaux, à deux reprises : le financement des emplois de ville en 1996, pour 200 millions de francs, et celui des emplois-jeunes en 1997, pour 2 milliards de francs.

Elle observe que les annulations de crédits ont relativement épargné les moyens d'intervention .

Surtout, la Cour relève que " le budget de l'emploi compte parmi les budgets faisant l'objet des ouvertures de crédits par voie de fonds de concours les plus importantes ". Deux sources sont principalement à l'origine des rattachements : les concours du Fonds social européen (FSE), et la contribution des entreprises aux dispositifs de retrait d'activité. Ainsi, entre 1994 et 1998, les majorations d'autorisations budgétaires par fonds de concours ont-elles augmenté de 47,2 %, cette progression étant due, pour l'essentiel, à celle des concours du FSE. Ces derniers alimentent directement les programmes financés sur le budget de l'emploi, à hauteur d'environ un milliard de francs.

La Cour note également des modifications de la répartition des crédits tenant largement à la " dissociation entre le budget de l'emploi et le budget des charges communes " .

En outre, elle constate de nombreux mouvements de crédits, dans les deux sens, entre le budget du ministère de l'emploi et le chapitre 44-75 du budget des charges communes, ces mouvements compliquant inutilement la gestion des crédits. Elle se félicite, dès lors, de la suppression du chapitre 44-75 en 1999, et de l'inscription des dotations correspondantes sur le budget de l'emploi, considérant qu'il s'agit d'" une simplification appréciable au dispositif budgétaire de l'emploi ".

La Cour des comptes relève également des taux de reports considérables sur l'ensemble de la période, notamment en ce qui concerne les dépenses en capital. Elle estime qu'il faut y voir " une difficulté manifeste à consommer les dotations ouvertes " .

Enfin, la Cour considère que le budget de l'emploi fait l'objet de " marges de gestion non négligeables " . Elle observe que des modifications de la sous-répartition des crédits en cours d'exécution ont été très importantes sur certains chapitres, notamment les chapitres 44-74 " Fonds national pour l'emploi " et 44-78 " Exonérations de cotisations sociales en faveur de l'emploi ".

Elle estime que le principe de la spécialité budgétaire lui-même est affecté par ce phénomène, l'assouplissement de la spécialité des crédits élargissant les marges de manoeuvre des gestionnaires. Ces derniers bénéficient également de " la surabondance de certaines dotations ", notamment celles destinées aux contrats initiative-emploi (CIE) et aux dispositifs de préretraite.

3. Un effort de maîtrise des dotations insuffisant

La Cour des comptes a également estimé que " l'élaboration des lois de finances montre un effort pour maîtriser la croissance des dotations, effort d'une ampleur insuffisante par rapport à la tendance constatée ", ajoutant que cet effort s'est principalement manifesté dans la révision des services votés figurant dans le projet de loi de finances.

En 1998, par exemple, les meures d'ajustement ont été négatives de 4,5 milliards de francs, les réductions l'emportant largement sur les ajustements positifs.

Les principales réductions de crédits ont porté sur :

- les contrats initiative-emploi (CIE), pour 4.801 millions de francs ;

- les dispositifs en faveur des retraits d'activité - allocations spéciales du FNE et préretraites progressives - pour un montant de 1.786 millions de francs ;

- la suppression des emplois de ville, soit 430 millions de francs.

Parmi les majorations de crédits, figuraient notamment une forte augmentation des dotations destinées au dispositif d'incitation à la réduction du temps de travail (loi de Robien), pour 1.323,5 millions de francs, et l'inscription d'une dotation de 708 millions de francs pour la subvention à l'association pour la gestion de la structure financière.

Les moyens nouveaux étaient particulièrement élevés (10,7 milliards de francs) :

- 8,35 milliards de francs pour le programme en faveur de l'emploi des jeunes, financé en 1997 par décret d'avance ;

- la revalorisation, à hauteur de 539,7 millions de francs, de l'allocation spécifique de solidarité (ASS) ;

- les crédits destinés aux stages de chômeurs de longue durée, majorés de 571,7 millions de francs pour l'ouverture de 30.000 places supplémentaires en stage d'initiation et de formation à l'emploi (SIFE) ;

- 200 millions de francs pour un nouveau dispositif d'encouragement au développement d'entreprises nouvelles par les jeunes.

La révision des services votés ne s'élevait, en 1998, qu'à 1,3 milliard de francs, soit le montant le plus faible sur la période examinée.

La Cour des comptes conclut que, sur les quatre années sous revue, s'est affirmée constamment " une sorte de dialectique entre l'enregistrement obligé des charges liées aux dispositifs existants ou aux nouvelles interventions mises en place, et la recherche d'économies, par la suppression ou le recadrage de certains dispositifs " . Mais elle ajoute : " toutes les mesures d'économies prévues ne sont pas nécessairement entrées en vigueur ", tandis que d'autres " n'ont pu être mises en oeuvre que de façon différée ".

4. Des résultats d'exécution biaisés par des défauts méthodologiques

Selon la Cour des comptes, l'analyse des résultats d'exécution du budget de l'emploi impose de prendre des précautions d'ordre méthodologique.

D'une part, la nomenclature budgétaire ordinaire doit être dépassée .

La Cour des comptes observe que " le budget de l'emploi, pour ce qui est des interventions, manque de lisibilité " : quelques grands chapitres sont gérés comme de larges enveloppes de crédits dont la ventilation est donnée à titre indicatif dans les fascicules budgétaires annexés au projet de loi de finances initial. Cette situation ne peut que nuire à la clarté et au suivi des crédits de l'emploi.

Elle ajoute que la portée essentiellement juridique de la nomenclature budgétaire traditionnelle explique l'insuffisance de cette dernière à décrire correctement la politique de l'emploi. Elle estime donc nécessaire, pour apprécier l'évolution des dépenses de ce budget sur plusieurs années, de les regrouper selon la nomenclature par agrégats, qui constitue, selon elle, " le cadre naturel pour le rapprochement des prévisions et des résultats ".

D'autre part, il conviendrait d'améliorer la portée des dépenses budgétaires.

La Cour des comptes constate que, " le plus souvent, la dépense constatée en matière d'interventions pour l'emploi n'est pas la dépense finale et ne rend pas compte du coût budgétaire des actions menées au cours de l'exercice ".

Il conviendrait, selon elle, de distinguer trois notions ayant une incidence budgétaire distincte : la déconcentration des crédits, la déconcentration de la décision, et la délégation à des organismes tiers de gestion de certaines procédures.

La mise en relation des dépenses budgétaires et des résultats physiques doit donc être entreprise avec de grandes précautions. La Cour note en effet : " Il est notamment malaisé de déterminer avec précision, pour chaque dispositif, le coût unitaire des mesures individuelles pour l'Etat à partir des seules données budgétaires ".

La Cour des comptes tire trois conclusions de son examen des crédits de l'emploi :

- le budget de l'Etat ne retrace qu'une partie des financements publics de la politique de l'emploi et de la formation professionnelle ;

- le budget de l'emploi est soumis à une inertie qui en rend la réorientation difficile ;

- les dépenses d'intervention en matière d'emploi traduisent de nouvelles priorités : l'allégement du coût du travail et la prise en charge des cotisations sociales sur les bas salaires par l'Etat, des mesures en faveur des jeunes et la réduction du temps de travail.

B. ... CONTINUE DE SE POSER

Les dotations du chapitre 44-75 du budget des charges communes ont été intégrées au fascicule budgétaire de l'emploi par la loi de finances initiale pour 1999 , ce qui a porté le montant des crédits alloués à la politique de l'emploi dans le budget de l'Etat à 162 milliards de francs.

Il s'agissait d'une demande maintes fois renouvelée de la Cour des comptes, qui fut ainsi satisfaite.

Toutefois, la loi de finances pour 2000 a " sorti " du budget de l'Etat la dotation allouée au financement de la ristourne dégressive, soit 39,49 milliards de francs, et l'a affectée au fonds de financement de la " réforme " des cotisations patronales de sécurité sociale (FOREC), échafaudé par le gouvernement pour financer la réduction autoritaire du temps de travail, et créé par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000.

Le budget de l'emploi s'en est trouvé mécaniquement minoré d'autant, pour s'établir à 122 milliards de francs, soit une progression, à périmètre constant, de 2,3 %.

Ainsi est-il probable que la Cour des comptes adressera au FOREC les mêmes critiques que celles qu'elle formulait à l'égard du budget de l'emploi, en termes de manque de lisibilité de l'effort budgétaire consenti en faveur de la politique de l'emploi.

Dans un souci de consolidation des comptes publics, vos rapporteurs estiment qu'une connaissance réelle de cet effort nécessite d'ajouter aux dotations budgétaires les dépenses assurées par le FOREC.

Or, ces dernières sont considérables : 64,5 milliards de francs en 2000 et 105 milliards de francs à terme, lorsque l'ensemble des entreprises sera passé aux 35 heures.

En effet, afin de " sauver " les 35 heures, le gouvernement a décidé d'étendre la ristourne Juppé de 1,3 SMIC à 1,8 SMIC, alors qu'il n'avait pas manqué de mettre en doute les effets sur l'emploi des exonérations de charges sociales. Cette mesure représente un coût de 7,5 milliards de francs en 2000, et de 25 milliards de francs à terme.

Au total, le coût de la baisse des charges sociales s'établit à 47 milliards de francs en 2000, et à 65 milliards de francs à terme, le financement direct des 35 heures s'élevant quant à lui à 17,5 milliards de francs en 2000 et à 40 milliards de francs à terme.

Le tableau ci-après retrace le financement des 35 heures prévu par le gouvernement pour 2000 :

Or, ce financement n'est plus assuré depuis que le Conseil constitutionnel a annulé l'article 5 de la loi n° 2000-37 du 19 janvier 2000 relative à la réduction négociée du temps de travail 1 ( * ) . Sa décision a pour effet de supprimer l'une des ressources du FOREC, en l'occurrence le produit de la taxation des heures supplémentaires, évalué à 7 milliards de francs.

Il n'est pas davantage assuré pour l'avenir, comme le montre le tableau ci-après :

Lorsque le dispositif sera pleinement opérationnel, à partir de 2002, il manquera environ 20 milliards de francs par an.

Ainsi, le coût de la politique de l'emploi, qui prend en compte les dotations du budget de l'Etat mais aussi les dépenses supportées par le FOREC, s'élève à 182,2 milliards de francs en 2000.

En outre, il convient de rappeler que, au-delà de ces crédits, la dépense totale consacrée à l'emploi comporte également :

- 140 milliards de francs, versés par le régime conventionnel de l'assurance-chômage ;

- 70 milliards de francs au titre de la formation professionnelle, dont 55 milliards de francs versés par les entreprises, et 15 milliards de francs par les collectivités territoriales ;

- environ 19 milliards de francs, représentant le coût des exonérations de charges sociales non compensées.

La dépense totale consacrée à l'emploi s'élève donc à environ 390 milliards de francs, auxquels il conviendrait d'ajouter les dépenses fiscales, soit 4,5 % du PIB.

Les dépenses de personnel du ministère de l'emploi ne représentent qu'une part très faible de cette masse considérable de crédits.

II. LE FAIBLE POIDS DES DÉPENSES DE PERSONNEL

A. LES DÉPENSES DE PERSONNEL : UNE TRÈS FAIBLE PART AU SEIN DU BUDGET

1. Les rémunérations et charges sociales

Les dépenses liées aux rémunérations et charges sociales s'élèvent, en 2000, à 2,1 milliards de francs, soit 21,2 % des crédits du titre III, et 58,9 % hors subvention aux établissements publics.

L'ensemble des dépenses de personnel, c'est-à-dire les rémunérations d'activité, les charges sociales et les pensions, représentent 2,07 % des crédits du budget de l'emploi.

Cette part est très faible , et n'est bien entendu pas comparable à la part que représentent les dépenses de personnel dans certains ministères comme l'éducation nationale.

Il convient toutefois de constater que, sur la période 1980-2000, les crédits de rémunérations ont été multipliés par près de 4,3.

Le ministère de l'emploi et de la solidarité a indiqué que " l'augmentation des crédits de rémunération sur la période est pour près de 50 % due au transfert d'emplois en provenance des services communs au moment de la partition " des services du ministère.

S'agissant des dépenses de charges sociales, seuls les crédits qui concernent les agents contractuels sont inscrits sur le budget du ministère, les crédits relatifs aux titulaires étant inscrits sur le budget des charges communes. Depuis 1997, ces crédits sont transférés en cours de gestion sur le budget du ministère.

Le chapitre 33-90 " Cotisations sociales " a été sous-doté de 1994 à 1998, l'exécution s'étant traduite en déficit au cours de cette période. La loi de finances pour 1999 l'a abondé de 15 millions de francs afin de mettre en adéquation la dotation avec la dépense.

2. Les pensions

Le montant des dotations allouées aux pensions est inscrit sur le chapitre 32-97 et s'élève, en 2000, à 420,1 millions de francs, soit une progression de 1 % par rapport à l'année précédente.

La direction de l'administration générale et de la modernisation des services (DAGEMO) du ministère de l'emploi a indiqué à vos rapporteurs que " l'estimation de leur évolution est malaisée. Le ministère des finances avait proposé une évolution très prononcée et ce, dès les cinq prochaines années. Le ministère de l'emploi a contesté ce rythme d'évolution qui correspond à celui prévu pour l'ensemble de la fonction publique 2 ( * ) car les grandes vagues de départs en retraite le concernant seront plus tardives et se situent plutôt à partir des années 2008 à 2010 ".

Les graphiques ci-après confirment cette affirmation, les départs en retraite des agents de catégorie A étant toutefois plus proches et mieux répartis dans le temps que ceux des agents des catégories B et C :

3. L'impact des plans de revalorisation

La Cour des comptes note, dans son rapport précité sur l'exécution des lois de finances pour 1998, que " pour ce qui est des rémunérations, le budget de l'emploi a essentiellement enregistré les augmentations générales de la fonction publique et des mesures catégorielles générales (rénovation de la grille de la fonction publique principalement) ".

En effet, les agents titulaires et certains agents non-titulaires du ministère de l'emploi ont bénéficié des mesures prévues par le protocole Durafour à partir de 1990, puis de celles découlant de l'accord salarial du 10  février 1998.

Le protocole d'accord du 9 février 1990, dit Durafour, visait à rénover la grille des classifications et des rémunérations des trois fonctions publiques. Sa mise en oeuvre s'est étalée sur sept tranches annuelles, dont les deux premières ont été inscrites dans la loi de finances pour 1991 et la dernière dans la loi de finances pour 1996, avec une tranche complémentaire en loi de finances pour 1997.

Les corps spécifiques au ministère de l'emploi ont été restructurés en application des dispositions prévues par le protocole :

- le corps des inspecteurs de la formation professionnelle (catégorie A) : les deux premières classes du grade d'inspecteur ont été fusionnées, le grade d'inspecteur principal a été scindé en deux classes, et l'indice terminal du corps a été porté à l'indice bonifié 966 ;

- le corps des contrôleurs du travail (catégorie B) : une nouvelle structure à trois grades a été mise en place : le premier grade nouveau est issu de la fusion des deux premiers grades avec relèvement des débuts de carrière, le deuxième grade nouveau, revalorisé, a été pyramidé à 25 %, et un troisième grade a été créé ; pour ce seul corps, le coût de la transposition des mesures prévues par le protocole est de l'ordre de 18 millions de francs.

La nouvelle bonification indiciaire (NBI), qui visait à apporter une logique fonctionnelle à la fonction publique, a également été mise en oeuvre au ministère de l'emploi.

L'enveloppe de points annuellement distribuée pour chacune des sept tranches avait été fixée à 2.482, à répartir entre les emplois éligibles de l'administration centrale et des services déconcentrés. Le coût annuel complet de ce dispositif est proche de 6 millions de francs. L'attribution du bénéfice de la NBI a permis notamment de valoriser les agents titulaires de catégorie A exerçant des fonctions de chef de bureau.

Le coût de l'application du protocole Durafour au ministère de l'emploi s'est élevé à 70,13 millions de francs.

L'accord salarial du 10 février 1998, quant à lui, visait à permettre un accroissement du pouvoir d'achat des fonctionnaires, renforcé pour les salaires les moins élevés. Son coût s'est établi à 62,7 millions de francs au ministère de l'emploi.

Au total, les plans de revalorisation interministériels ainsi que les plans de revalorisation des rémunérations et du point de la fonction publique constituent une part substantielle de l'augmentation des crédits de rémunération, soit 30 %.

Ainsi, depuis 1991, les divers plans de revalorisation des rémunérations publiques se sont traduits, au ministère de l'emploi, par un accroissement des crédits de plus de 1,2 milliard de francs.

B. LES RÉMUNÉRATIONS ET INDEMNITÉS

1. Les rémunérations principales

Les rémunérations principales sont calculées en fonction de la grille indiciaire des corps des fonctionnaires du ministère de l'emploi.

Les tableaux ci-après présentent le déroulement de carrière des corps de l'inspection du travail et de l'inspection de la formation professionnelle pour la catégorie A, et du corps des contrôleurs du travail pour la catégorie B :

Les crédits alloués aux rémunérations principales des agents de l'administration centrale sont inscrits sur le chapitre 31-61 article 02. Ils s'établissent à 157,89 millions de francs en 2000.

90 % de ces crédits sont engagés en début d'année. La notification de cet engagement est adressée à la paierie qui peut payer mensuellement dans la limite de ces crédits. Un ajustement est réalisé en fin d'année sur la base des " pré-ventilations budgétaires " du mois de décembre. La paierie indique alors à la DAGEMO le montant des crédits nécessaires pour clore la gestion, paye de décembre comprise. Un engagement complémentaire est alors effectué.

En ce qui concerne les services déconcentrés , les crédits destinés aux rémunérations principales figurent au chapitre 31-61 article 10, et s'élèvent à 1,35 milliard de francs.

En début d'année, le montant des crédits est déterminé, à l'intérieur de l'enveloppe votée par le Parlement, à partir des crédits consommés au cours de l'exercice écoulé, service par service. Au début du mois d'octobre, les services sont interrogés afin de connaître leurs besoins pour atteindre la fin de l'année, 80 % des besoins demandés faisant alors l'objet d'une délégation de crédits. En novembre, les services sont une nouvelle fois interrogés, et la totalité des crédits demandés est versée.

Un tableau de la consommation des crédits est tenu à jour au niveau de chaque service, une synthèse régionale étant ensuite réalisée. Ces informations sont transmises à la DAGEMO chaque fois qu'il y a une augmentation de la valeur du point indiciaire et, d'une manière générale, trois ou quatre fois par an, notamment en avril et en septembre. Selon la DAGEMO, " l'écart entre le montant des crédits consommés et la prévision de consommation est très faible, de l'ordre de trois à quatre millions de francs ".

2. Les rémunérations accessoires

En matière indemnitaire, un effort très important a été accompli dans le cadre des lois de finances pour 1999 et 2000, puisque ce sont au total 50,6  millions de francs de mesures nouvelles qui ont été consacrés à l'harmonisation des situations comparables à l'intérieur du ministère de l'emploi et à la revalorisation générale des régimes indemnitaires des agents de ce département.

a) En administration centrale

Les agents de l'administration centrale peuvent prétendre au versement de quatre types de rémunérations accessoires :

- une prime de rendement, pour les fonctionnaires ;

- une indemnité forfaitaire pour travaux supplémentaires de droit commun, pour les agents des catégories A et B ;

- une indemnité pour travaux supplémentaires spécifique aux agents contractuels ;

- une indemnité pour heures supplémentaires, pour les agents de catégorie C.

Le tableau ci-dessous présente les indemnités forfaitaires pour travaux supplémentaires des agents de l'administration centrale :

Le régime juridique des primes attribuées individuellement, tant aux titulaires qu'aux contractuels, est déterminé par des textes réglementaires publiés au Journal officiel. Ces textes fixent des taux moyens et prévoient dans quelles conditions ils peuvent être dépassés.

Base juridique des indemnités versées aux agents de l'administration centrale

Indemnité forfaitaire pour travaux supplémentaires :

- décret du 19 janvier 1963 relatif aux indemnités pour travaux supplémentaires allouées aux personnels titulaires des administrations centrales des ministères

- lettre des ministères du budget et de la fonction publique du 15 décembre 1972 relative à l'aménagement du régime indemnitaire des administrateurs civils et de certains emplois de direction des administrations centrales

- arrêté du 18 novembre 1999 portant attribution d'indemnités pour travaux supplémentaires aux agents contractuels de l'administration centrale et des services déconcentrés du ministère de l'emploi et de la solidarité

Prime de rendement :

- décret du 6 août 1945 relatif aux primes de rendement pouvant être attribuées aux fonctionnaires des finances

- décret du 6 février 1950 relatif à certaines indemnités dans les administrations centrales

- lettre des ministères du budget et de la fonction publique du 15 décembre 1972 précitée

- note de la direction du budget du 16 décembre 1975 relative à la prime de rendement des attachés d'administration centrale et des agents supérieurs

- note du secrétaire d'Etat au budget du 19 octobre 1999

Indemnité horaires pour travaux supplémentaires :

- décret du 6 octobre 1950 modifié par le décret du 13 août 1991 fixant le régime d'indemnités horaires pour travaux supplémentaires susceptibles d'être accordées aux personnels civils de l'Etat

- décret du 12 novembre 1999 portant majoration à compter du 1 er décembre 1999 du traitement afférent à l'indice de base de la fonction publique

Indemnités pour travaux supplémentaires

- arrêté du 18 novembre 1999 précité

L'ensemble de ces textes a été communiqué à vos rapporteurs.

Ainsi, pour les administrateurs civils, le montant des indemnités est fixé sur la base d'une autorisation expresse du ministre du budget, à défaut d'un texte réglementaire fixant des taux jugés " réalistes " par le ministère.

Il conviendrait donc de mettre un terme à cette anomalie, et de se mettre en conformité avec la circulaire des ministres du Budget et de la fonction publique du 1 er octobre 1999 relative à l'élaboration des textes indiciaires et indemnitaires.

La proportion des indemnités augmente fortement avec le niveau de rémunération principale des agents titulaires, de 17 % pour ceux de catégorie C à 36 % pour les agents de catégorie A supérieure. Cette situation se retrouve dans l'ensemble de la fonction publique de l'Etat.

Les agents contractuels sont placés dans une situation différente dans la mesure où leur rémunération principale permet, en principe, de mieux tenir compte de leurs diplômes et de leur expérience professionnelle. La réalité est toutefois différente, notamment pour les contractuels relevant du statut de 1978.

Les crédits correspondant aux rémunérations accessoires figurent au chapitre 31-62 article 02, et s'élèvent à 44,52 millions de francs en 2000. Ils font l'objet d'un engagement trimestriel.

b) Dans les services déconcentrés

Les agents titulaires des catégories A et B des services déconcentrés bénéficient d'une prime spécifique, la prime d'activité. Quant aux agents de catégorie C, la prime d'heures supplémentaires leur est versée.

Les agents contractuels bénéficient d'une indemnité particulière de travaux supplémentaires.

La proportion des primes au sein de la rémunération totale est moins importante qu'en administration centrale, et est davantage concentrée, de 11 % à moins de 20 %.

Base juridique des indemnités versées aux agents des services déconcentrés

Outre les textes réglementaires cités plus haut, les textes propres aux indemnités des agents des services déconcentrés sont les suivants :

- décret du 13 septembre 1999 portant attribution d'une prime d'activité aux fonctionnaires du corps de l'inspection du travail, et arrêté du même jour fixant les montants annuels de ladite prime

- décret du 13 septembre 1999 portant attribution d'une prime d'activité aux fonctionnaires du corps de l'inspection de la formation professionnelle, et arrêté du même jour fixant les taux moyens annuels de ladite prime

- décret du 6 janvier 1995 relatif à l'attribution d'une indemnité de fonction aux fonctionnaires occupant un emploi de directeur régional du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle, et arrêté du même jour fixant les taux de ladite indemnité

- arrêté du 13 septembre 1999 portant déplafonnement de la prime d'activité allouée aux fonctionnaires du corps de l'inspection du travail et de la formation professionnelle et déplafonnement de l'indemnité de fonction attribuée aux fonctionnaires occupant un emploi de directeur régional du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle

- décret du 26 mai 1997 portant attribution d'une prime d'activité aux fonctionnaires du corps des contrôleurs du travail, et arrêté du même jour fixant les montants moyens annuels de ladite prime

- décret du 28 mars 1990 fixant les cadres, la rémunération, le statut et les attributions du personnel de l'inspection médicale du travail et de la main-d'oeuvre et portant attribution d'une indemnité spéciale à ce personnel, et arrêté du 13 juin 1994 fixant les taux moyens de ladite indemnité

- décret du 13 septembre 1996 portant attribution d'une indemnité de technicité au personnel de l'inspection médicale du travail et de la main-d'oeuvre

L'ensemble de ces textes a été communiqué à vos rapporteurs.

Les crédits relatifs aux rémunérations accessoires des agents des services déconcentrés figurent au chapitre 31-62 article 10, pour un montant de 234,88 millions de francs en 2000.

Une enveloppe régionale est calculée, en relation avec les DRTEFP, chaque semestre sur la base des effectifs de référence de l'année et les effectifs réels au premier jour du semestre.

Le montant des crédits est calculé sur la base d'un taux moyen pondéré indemnitaire correspondant au corps considéré multiplié par les effectifs de référence. Si les effectifs réels sont supérieurs aux effectifs de référence, les crédits sont calculés sur la base des premiers. Les crédits sont ensuite délégués service par service, au cours du premier mois de chaque semestre.

3. Les vacations

Les crédits de vacation de l'administration centrale figurent au chapitre 31-96 article 02, et s'établissent à 18,71 millions de francs en 2000.

Depuis cette année, la gestion est effectuée au niveau de l'article et non plus des paragraphes de manière à réduire le montant des crédits non consommés en fin d'année.

Dans les services déconcentrés, les crédits de vacation sont inscrits au chapitre 31-96 article 10, pour un montant de 39,72 millions de francs.

L'ensemble des crédits est délégué en début d'année, à l'exception d'une réserve de 8 millions de francs, constituée en début d'année pour faire face à des imprévus.

La dotation globale de ces crédits est calculée à l'échelon régional mais les délégations ont lieu service par service.

Elle comprend deux enveloppes :

- l'enveloppe de base, dont les critères d'attribution sont les effectifs de référence et les vacances d'agents de catégorie C, servent à rémunérer le personnel administratif et d'entretien ;

- l'enveloppe des médecins, dont les critères d'attribution sont la population active et le nombre de dossiers, contribuent à financer les COTOREP.

Une enveloppe complémentaire de 1,2 million de francs est destinée à faire face aux décharges syndicales et aux congés de formation qui donnent lieu à des remplacements partiels.

CHAPITRE DEUX

LE MINISTÈRE DE L'EMPLOI SOUFFRE-T-IL VRAIMENT DE MOYENS EN PERSONNELS INSUFFISANTS ?

La faiblesse des dépenses de personnel eu égard au montant total des crédits du budget de l'emploi accrédite la thèse, défendue par le ministère, d'une insuffisance de ses effectifs, d'autant plus affirmée que les missions de l'Etat dans le domaine de l'emploi se sont considérablement développées, en particulier depuis le début des années 1990.

Le ministère de l'emploi considère donc comme fondées ses revendications en matière de créations d'emplois. Et il est un fait qu'il a obtenu de substantiels résultats depuis 1997.

Pourtant, une analyse de la situation des agents de ce ministère ainsi qu'un regard global sur la politique de l'emploi, en particulier l'appréhension de l'ensemble de ses intervenants, conduisent vos rapporteurs à nuancer fortement l'affirmation selon laquelle le ministère de l'emploi souffrirait de moyens en personnels insuffisants.

I. LA THÈSE DU MINISTÈRE : UNE PÉNURIE D'EFFECTIFS

A. LES EFFECTIFS DU MINISTÈRE DE L'EMPLOI ...

1. Les statuts

Le ministère de l'emploi dispose de cinq corps de fonctionnaires spécifiques, dont un est en voie d'extinction et deux sont de création récente.

Par ailleurs, il n'existe pas de corps administratifs tels que attachés ou secrétaires administratifs dans ses services déconcentrés. Une réforme du statut des attachés est d'ailleurs en cours afin de permettre leur affectation dans ces services.

a) Le corps de l'inspection du travail

Le corps de l'inspection du travail est un corps technique de catégorie A supérieure. Il constitue depuis 1998 le seul corps de ce type dans les services déconcentrés du ministère de l'emploi, et est compétent dans le contrôle de l'application de la législation du travail, la mise en oeuvre des politiques de l'emploi, et le contrôle de la formation professionnelle.

Il s'agit d'un corps interministériel géré par le ministère en charge du travail mais dont les membres peuvent être également affectés dans les services du ministère des transports et de celui de l'agriculture.

Ses principales caractéristiques statutaires résultent du décret n° 75-273 du 21 avril 1975 modifié portant statut particulier de l'inspection du travail. Le ministère de l'emploi estime que ce statut n'est plus adapté : " c'est la raison pour laquelle une réforme importante est en cours pour une mise en oeuvre au 2 ème semestre 2000 [, se traduisant par le ] passage à trois grades au lieu de six actuellement ".

En raison du positionnement de ce corps dans la catégorie A supérieure, le détachement de fonctionnaires de catégorie A n'y est pas possible, le ministère précisant que " ceci explique en partie la difficulté à pourvoir les emplois vacants ".

Le malaise des inspecteurs du travail

Tous les responsables des services déconcentrés que vos rapporteurs ont rencontrés ont souligné l'existence d'un " malaise " des inspecteurs du travail travaillant au sein de sections d'inspection. Ce malaise, très bien exposé par le président de l'association Villermé 3 ( * ) , résulte de la transformation du ministère du travail en ministère de l'emploi.

En effet, la mission initiale de l'inspection du travail consistait à faire respecter le droit étatique, et, depuis 1981-1982, à contrôler les conventions collectives, même si la prépondérance du droit étatique par rapport au droit conventionnel constitue une spécificité de l'inspection du travail française.

Or, le chômage de masse a orienté les priorités des pouvoirs publics vers la promotion de l'emploi, au détriment du respect de la législation du travail.

Dans ces conditions, certains inspecteurs du travail considèrent qu'ils doivent se replier strictement sur le droit, et plus particulièrement sur ses aspects les moins négociables, c'est-à-dire la santé et la sécurité au travail. Ainsi, un malaise ne manque pas d'apparaître lorsque certains dispositifs de la politique de l'emploi entrent en contradiction avec le respect du droit du travail.

1.366 emplois d'inspecteurs du travail sont inscrits au budget 2000. Il convient de noter la forte croissance des effectifs depuis 1985, date à laquelle le nombre d'emplois budgétaires était de 819.

Le Journal Officiel du 5 août 2000 a publié deux décrets du 1 er août 2000, le décret n° 2000-747 portant statut particulier du corps de l'inspection du travail, et le décret n° 2000-748 relatif aux règles de nomination et d'avancement applicables aux emplois de directeur régional et départemental du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle et de directeur du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle des départements d'outre-mer. Quatre arrêtés ont également été publiés.

Ces textes visent à la revalorisation de la carrière des inspecteurs du travail. Le corps ne comprend plus désormais que trois grades au lieu de six : directeur du travail, directeur-adjoint du travail et inspecteur du travail. Les inspecteurs du travail bénéficient par ailleurs d'une augmentation indiciaire de 100 points (indice brut 450 pour le 1 er échelon, 852 pour le 10 ème échelon).

Les directeurs départementaux du travail disposent désormais d'un véritable statut d'emploi favorisant leur mobilité professionnelle. Les directeurs régionaux et départementaux sont nommés dans leur emploi pour une durée de cinq ans, éventuellement renouvelable pour trois ans au plus dans le même emploi.

Par ailleurs, les membres de l'IGAS parvenus au moins au grade d'inspecteur peuvent être détachés dans le grade de directeur du travail. Quant aux administrateurs civils justifiant de quatre ans au moins de services effectifs en cette qualité peuvent être détachés dans le grade de directeur-adjoint du travail ou de directeur du travail.

b) Le corps de l'inspection de la formation professionnelle

Le corps de l'inspection de la formation professionnelle a été placé en extinction par le décret n° 98-42 du 19 janvier 1998 modifiant le décret n° 85-1115 du 16 octobre 1985 portant statut particulier des inspecteurs de la formation professionnelle, en raison de l'intégration des services de la formation professionnelle dans ceux du travail et de l'emploi opérée en 1994.

56 emplois d'inspecteurs de la formation professionnelle sont encore inscrits dans la loi de finances pour 2000.

c) Le corps des contrôleurs du travail

Le corps des contrôleurs du travail est un corps technique de catégorie B constituant le seul corps de cette catégorie dans les services déconcentrés du ministère de l'emploi. Régi par les dispositions du décret n° 97-364 du 18 avril 1997 portant statut particulier du corps des contrôleurs du travail, il est compétent pour l'ensemble du champ d'intervention du ministère.

Il s'agit d'un corps interministériel géré par le ministère en charge du travail et de la formation professionnelle. Les membres du corps peuvent également être affectés, comme les inspecteurs du travail, dans les services des ministères des transports et de l'agriculture.

En application du protocole Durafour, il a bénéficié, à compter de 1995, de la revalorisation de l'ensemble des corps de catégorie B. En outre, un plan de requalification des emplois consistant en la transformation de 350 emplois de contrôleur en emplois d'inspecteur a été mis en oeuvre.

2.747 emplois de contrôleurs du travail sont inscrits au budget 2000. Leur évolution a été contrastée depuis 1985 : ils étaient 2.700 à cette date, puis leur nombre a diminué à la fin des années 1980 pour croître assez fortement depuis 1998 (+ 247).

d) Les statuts d'emploi de chefs de services déconcentrés

Depuis 1994, il existe un statut de directeur régional, institué par le décret n° 94-1167 du 28 décembre 1994 relatif aux conditions de nomination et d'avancement dans l'emploi de directeur régional du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle.

Comme tous les statuts d'emploi, il repose sur un détachement dans l'emploi pour une période de cinq ans au plus renouvelable.

Le décret susmentionné prévoit un accès aux fonctions de directeur régional à des agents n'appartenant pas au corps de l'inspection du travail. Il a permis une revalorisation des fonctions de chef des services déconcentrés du ministère.

Pour les mêmes raisons, il est prévu de créer en 2000 un statut d'emploi de directeur départemental.

Le ministère estime en effet que ce projet " permettra de corriger une anomalie dans la mesure où les autres chefs des services déconcentrés de l'Etat bénéficient d'un tel statut, et de revaloriser la fonction de directeur départemental ".

2. Les emplois budgétaires

a) L'évolution des emplois budgétaires depuis 1994

Le nombre des emplois budgétaires du ministère de l'emploi a évolué de la façon suivante entre 1994 et 1998 :

Ces chiffres, établis par la Cour des comptes, montrent que les emplois budgétaires du ministère de l'emploi ont diminué de 1,1 % entre 1994 et 1998. Sur la même période, et au sein de cette évolution globale, l'évolution du nombre des titulaires et de celui des contractuels est divergente : - 3,5 % pour les premiers, et + 36,3 % pour les seconds.

b) L'importance des contractuels : une situation peu satisfaisante érigée en système

Il convient en effet de souligner l'importance du nombre d'agents contractuels au ministère de l'emploi.

Les agents contractuels constituent environ 10 % des effectifs budgétaires du ministère de l'emploi, ce qui est considérable.

Surtout, leur proportion au sein de l'ensemble des personnels s'est accrue au cours des dernières années : elle est passée de 5,9 % des effectifs en 1994 à 6,3 % en 1997 puis à 10,2 % en 2000.

Il existe deux catégories de contractuels au ministère de l'emploi.

Les agents contractuels recrutés pour une durée indéterminée avant l'entrée en vigueur de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires sont au nombre de 288. Ils bénéficient d'un statut résultant du décret n° 78-457 du 17 mars 1978 fixant les conditions applicables aux agents contractuels de l'administration centrale et des services extérieurs du ministère du travail et du ministère de la santé et de la sécurité sociale. Ce décret fait bénéficier ces contractuels d'un statut similaire à celui des agents titulaires.

En revanche, les agents contractuels recrutés postérieurement, soit 755, sont régis par la loi du 11 janvier 1984 et par le décret du 17 janvier 1986. Ils sont recrutés pour une période de trois ans maximum renouvelable sans restriction.

Pour l'essentiel, soit 852 agents, ils sont affectés dans les services déconcentrés du ministère.

La DAGEMO a indiqué à vos rapporteurs que " cette forte proportion de contractuels résulte, pour une part importante, de la nécessité de mettre en oeuvre rapidement des actions gouvernementales en matière d'emploi et de formation professionnelle, et de la difficulté à pourvoir dans des délais brefs les emplois par le recrutement d'agents titulaires. C'est le cas notamment de 400 coordonnateurs emploi-formation ".

Or, la gestion de ces contractuels comporte des dysfonctionnements , qui ont d'ailleurs conduit le contrôleur financier central auprès du ministère de l'emploi à adresser une note à la DAGEMO, d'abord le 6 janvier 1999, puis une nouvelle fois le 14 décembre suivant, afin d'appeler son attention sur ce dossier.

• Dans sa note du 6 janvier 1999, le contrôleur financier central déplore ainsi " une pseudo-carrière de fait des contractuels ", qui engendre de nombreuses insatisfactions, alors que les propositions du ministère constituent " un pas supplémentaire vers l'instauration d'un statut " de contractuel, ce qui est évidemment contraire à la réglementation en vigueur. Pourtant, " les spécificités techniques de ce ministère ne sont pas telles en effet qu'un usage aussi important de personnel contractuel soit justifié ".

De surcroît, " la gestion des contractuels est une source d'augmentation non maîtrisée des dépenses : les contrats sont toujours reconduits à la hausse, jusqu'à présent en général à l'indice immédiatement supérieur " . Alors que le contrôleur financier central rappelle que " les avantages octroyés aux contractuels ne doivent pas être supérieurs à ceux des fonctionnaires placés dans des situations équivalentes ", il est contraint de constater que " les avancements accélérés qu'il m'est demandé d'accepter sont tous beaucoup plus rapides que ce que peuvent espérer les agents titulaires ". Enfin, " la gestion de ces personnels souffre d'un encadrement et d'une visibilité insuffisants qui poussent les dépenses à la hausse ".

• Dans sa note du 14 décembre 1999, il relève que " la pratique au sein du secteur emploi du ministère est depuis longtemps que les CDD (loi de 1984) sont alignés sur la grille de 1978 des contractuels sous CDI, pour le classement à l'entrée, après examen du niveau de diplôme, de l'expérience professionnelle, ainsi que, le cas échéant, par référence au salaire antérieur. La même grille sert ensuite à l'évolution de la " carrière " pour la durée et le niveau indiciaire à chaque renouvellement de contrat ". Or, " cette coutume [est] contraire à la loi ".

Il insiste également pour que, " à l'avenir, tous les éléments conduisant à la prise de décision [lui] soient spontanément fournis dans des propositions motivées et justifiées plutôt que d'avoir à les réclamer ".

3. Les principales caractéristiques des effectifs

a) La répartition des effectifs

Les 927 emplois budgétaires affectés à l'administration centrale (section emploi) sont répartis de la façon suivante :

La DAGEMO, qui est notamment chargée de la gestion des personnels, comprend un quart des emplois affectés à l'administration centrale. Il convient de souligner que la direction des relations du travail (DRT), qui est en charge des activités " régaliennes " du ministère de l'emploi, n'en emploie que 18 %. Enfin, on notera le poids des effectifs administratifs affectés au cabinet, soit 11 % des personnels de l'administration centrale (hors conseillers ministériels).

Vos rapporteurs n'ont d'ailleurs pas eu communication du nombre de conseillers ministériels : il leur a simplement été indiqué que ce nombre variait beaucoup dans le temps en raison du mode de fonctionnement du cabinet, la ministre semblant faire appel à des hauts fonctionnaires en fonction des besoins du moment, qui, une fois les dossiers traités, rejoignent leur administration d'origine.

Les personnels des services déconcentrés exercent leurs tâches essentiellement au sein des directions départementales, ce qui paraît conforme avec leurs missions consistant à veiller au respect de la réglementation du travail et à mettre en oeuvre les politiques de l'emploi sur le terrain :

b) Des personnels plus qualifiés

En dépit du fait que le ministère de l'emploi déplore sa carence en personnels d'encadrement, il convient de noter la progression de la qualification de ses agents depuis le milieu des années 1980 :

Ainsi, les agents de catégorie A représentent aujourd'hui le quart de l'ensemble des personnels du ministère, contre 12 % en 1984. Sur la même période, la catégorie C a vu ses effectifs décroître, passant de 59 % à 45 %. Ces personnels restent toutefois nombreux au sein des services de ce ministère. La catégorie B est stable.

Logiquement, les agents de catégorie A sont majoritaires à l'administration centrale, ce qui est conforme avec ses missions de conception et d'impulsion.

C'est la délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle (DGEFP) qui compte le plus grand nombre d'agents de catégorie A. La forte proportion d'agents de catégorie C au cabinet s'explique par l'importance des tâches de secrétariat et celles liées à la logistique.

La répartition des personnels des services déconcentrés est conforme à la moyenne nationale, et se caractérise donc par l'importance du nombre de fonctionnaires de catégorie C, en particulier au sein des directions départementales, les directions régionales, en raison de leurs missions, comprenant surtout des personnels d'encadrement :

c) Un personnel très majoritairement féminin

Le personnel des services du ministère de l'emploi est très majoritairement composé de femmes, à 72 % :

Les effectifs de l'administration centrale comprennent toutefois, proportionnellement, plus d'hommes que ceux des services déconcentrés :

Le temps partiel est très répandu puisqu'il concerne près du quart des agents du ministère de l'emploi, cette proportion atteignant presque le tiers (31 %) chez les agents de catégorie C :

Il est logiquement moins important à l'administration centrale (12 %) qu'au sein des services déconcentrés (26 %) :

La comparaison avec l'ensemble des agents de l'Etat met parfaitement en exergue le poids du travail à temps partiel au ministère de l'emploi, puisque l'écart est de 1 à 2,7 :

En outre, toutes les catégories des personnels du ministère de l'emploi sont concernées, y compris les agents de catégorie A qui sont deux fois plus nombreux que dans l'ensemble de la fonction publique à travailler à temps partiel.

d) Le temps de travail dans les services du ministère de l'emploi

En février 1999, M. Jacques Roché, conseiller-maître à la Cour des comptes, a remis au ministre de la fonction publique et de la réforme de l'Etat de l'époque, M. Émile Zuccarelli, un rapport consacré au temps de travail dans les trois fonctions publiques.

En ce qui concerne les services du ministère de l'emploi, le rapport note que " l'horaire collectif fixe [y] reste encore largement appliqué ". Il estime par ailleurs que " la durée hebdomadaire maximum est de 38h08 ".

Le rapport souligne également que " le système des horaires variables tend à s'étendre ", mais rappelle que la DAGEMO " estime qu'il convient d'être vigilant quant au lien entre réduction des horaires et extension de la durée d'ouverture des services, de façon à ce que l'objectif de la réorganisation du travail ne soit pas uniquement la RTT ".

Il constate que l'importance du temps partiel dans les services du ministère de l'emploi " a parfois des conséquences très néfastes sur l'accueil du public. La hiérarchie éprouve beaucoup de difficulté à s'opposer aux demandes de temps partiel ". Vos rapporteurs ont fait la même observation au cours de leurs déplacements.

Au-delà des jours de congés réglementaires, les agents bénéficient d'une 6 ème semaine supplémentaire de congé, dite " semaine d'autorisation exceptionnelle d'absence " ou " semaine d'hiver ", qui existe depuis 1968, " sans fondement juridique ".

Enfin, le rapport Roché note que " la DAGEMO n'exclut pas que certaines initiatives locales conduisent, au-delà, à l'attribution de jours supplémentaires malgré ses rappels réguliers de la réglementation ".

B. ... SERAIENT EN NOMBRE INSUFFISANT POUR REMPLIR SES MISSIONS

1. Moins d'emplois budgétaires

La DAGEMO a indiqué à vos rapporteurs que " le nombre de créations d'emplois budgétaires n'a pas suivi l'accroissement continu des missions du ministère ".

Par ailleurs, elle avait également noté que les créations d'emplois n'expliquait que 8 % de l'accroissement des dépenses de personnel depuis 1980.

La thèse du ministère de l'emploi consiste en effet à déplorer la pénurie de ses effectifs.

La ministre a d'ailleurs également insisté sur cet aspect lors de la présentation des crédits de son département ministériel au Sénat, le 6  décembre 1999 : " L'effort de renforcement du service public de l'emploi concerne aussi les services du ministère, dont les moyens en personnels ne sont pas à la hauteur des missions " 4 ( * ) .

Des propos ministériels à relativiser

Il est habituel que les ministres aient tendance à exagérer leurs besoins. Ainsi, Mme Martine Aubry avait estimé, lors de l'examen au Sénat des crédits de l'emploi pour 1998, qu'il était impossible de réduire les crédits du titre IV, s'élevant avec véhémence contre la volonté du Sénat de réaliser des économies sur ceux-ci pour un montant de 9,30 milliards de francs.

Or, en cours de gestion, les crédits du titre IV ont fait l'objet d'une annulation totale de 7,44 milliards de francs ! Soit un montant relativement proche de celui des économies préconisées par le Sénat. Ce qui était sacrilège hier est devenu tout à fait normal aujourd'hui, et a d'ailleurs permis au gouvernement de mettre en avant sa capacité à réaliser d'importantes économies, lesquelles résultent pourtant de la seule bonne tenue de la conjoncture !

Il convient donc de faire preuve de circonspection face aux propos d'un ministre argumentant avec brio sur l'insuffisance des dotations de son ministère...

La " thèse de la pénurie ", qui est la position officielle du ministère telle qu'elle s'exprime, notamment, dans une note de la ministre en date du 29 septembre 1999 5 ( * ) , s'appuie notamment sur une évolution du nombre des emplois budgétaires apparemment défavorable.

L'administration centrale a vu passer le nombre de ses emplois budgétaires de 932 en 1994 à 927 en 2000, soit une diminution de 5 emplois ( - 0,5 %).

Il s'agit plus d'une stabilité des effectifs que d'une réelle diminution, d'autant plus que, dans le cadre de la réforme de l'Etat, les effectifs de certaines administrations centrales ont connu une décrue certaine, au ministère de l'éducation nationale par exemple, ce qui a d'ailleurs été l'occasion de réaliser de substantielles économies.

En outre, une analyse plus fine montre que cette stabilité globale s'est accompagnée d'une nette augmentation du nombre d'agents de catégorie A, ce qui est d'ailleurs cohérent avec les missions d'une administration centrale. Dans le même temps, le nombre d'agents de catégorie C s'est globalement stabilisé, même si l'année 2000 semble marquer une rupture avec leur diminution par rapport au milieu des années 1990. Surtout, le nombre de contractuels a diminué, de même que celui des emplois au cabinet du ministre.

Cette situation se retrouve en ce qui concerne les emplois budgétaires alloués aux services déconcentrés du ministère, qui sont passés de 9.362 en 1984 à 9.188 en 2000, soit une diminution de 1,9 % en 16 ans.

Pourtant, ici encore, l'évolution est favorable en ce qui concerne la catégorie A, le nombre de ses emplois étant presque multiplié par deux, ce qui marque l'amélioration de l'encadrement du ministère et l'enrichissement des qualifications de ses agents. En revanche, le nombre de fonctionnaires de catégorie C a nettement diminué sur la période, de près de 25 %, tandis que la catégorie B était stable. Le nombre des contractuels a fortement progressé, d'environ 160 %.

ÉVOLUTION DES EMPLOIS BUDGÉTAIRES DEPUIS 1984

SERVICES DÉCONCENTRÉS

1984

1985

1986

1987

1988

1989

1990

1991

1992

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

2000

Totaux

Catégorie A

813

819

826

801

801

801

1 003

1 102

1 187

1 329

1 399

1 399

1 399

1 399

1 414

1 424

1 444

Créations

15

56

15

10

20

116

Suppressions

-4

-24

86

85

143

Transformations

10

10

-1

95

85

-15

184

Transfert

-3

187

4

188

Total

6

7

-25

202

99

85

142

70

15

10

20

631

Catégorie B

2 733

2 700

2 686

2 528

2 528

2 588

2 736

2 687

2 616

2 563

2 508

2 508

2 508

2 496

2 526

2 661

2 749

Créations

60

23

7

85

88

263

Suppressions

-23

-158

-2

-12

-195

Transformations

-10

-10

-39

-45

-56

-55

30

50

-135

Transfert

-4

127

-10

-26

-4

83

Total

-33

-14

-158

60

148

-49

-71

-53

-55

-12

30

135

88

16

Catégorie C

5 492

5 430

5 340

4 987

4 864

4 737

4 652

4 494

4 360

4 320

4 352

4 352

4 352

4 333

4 278

4 158

4 154

Créations

17

30

26

73

Suppressions

-55

-87

-354

-129

-127

-85

-84

-80

-18

-42

-100

-26

-1 187

Transformations

-7

3

-73

-40

-40

-42

-30

-50

-4

-283

Transfert

-3

-2

6

-1

-14

74

-1

59

Total

-62

-90

-353

-123

-127

-85

-158

-134

-40

32

-19

-55

-120

-4

-1 338

Contr. & INSEE

324

310

301

283

283

283

285

307

302

412

424

451

453

453

638

828

841

Créations

1

100

1

2

185

190

9

488

Suppressions

-14

-8

-13

-35

Transformations

1

17

5

10

11

27

4

75

Transfert

-1

-5

5

-10

-11

Total

-14

-9

-18

2

22

-5

110

12

27

2

185

190

13

517

TOTAUX

9 362

9 259

9 153

8 599

8 476

8 409

8 676

8 590

8 465

8 624

8 683

8 710

8 712

8 681

8 856

9 071

9 188

Créations

60

39

163

1

2

217

315

143

940

Suppressions

-96

-95

-549

-129

-127

-87

-84

-80

-30

-42

-100

-26

-1 445

Transformations

-7

2

1

5

-1

27

27

Transfert

-11

-7

6

314

-2

-50

-4

59

-1

304

Total

-103

-106

-554

-123

-67

267

-86

-125

159

59

27

2

-31

175

215

117

-174

2. Des services déconcentrés dans une situation parfois très délicate

Au-delà de l'évolution des emplois budgétaires, le ministère fonde également sa " thèse de la pénurie " sur la situation difficile de certains services déconcentrés.

Vos rapporteurs ont obtenu que leur soit communiqué un rapport de l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) relatif à l'évaluation du fonctionnement de la DDTEFP de Seine-Saint-Denis, réalisé en septembre 1998.

Il s'agit d'une direction départementale importante, bénéficiant d'un effectif de référence de 166 agents, ce qui la situe au sixième rang national. En 1997, elle a géré 100 millions de francs de crédits d'intervention, mais près de 6 milliards de francs si l'on considère l'ensemble des dépenses d'intervention réalisées en matière d'emploi et de formation professionnelle, à l'exception du RMI et des mesures relevant du dispositif de protection sociale.

L'IGAS, au cours de son inspection, a relevé " un réel problème de sous-effectif ", caractérisé par une différence importante entre les effectifs de référence (166) et les effectifs réels (138,4), soit un déficit de plus de 27 agents. Ce déficit est particulièrement marqué pour les catégories A et B, pour lesquelles il se situe à environ 25 % du niveau de référence.

Toutefois, l'IGAS note " une situation à peu près satisfaisante pour les effectifs " dédiés " ", la direction privilégiant les services pour lesquels l'effectif théorique est déterminé par une norme ou par l'usage tels que le service du contrôle de la recherche d'emploi ou que l'inspection du travail qui " demeure largement épargnée par la situation de sous-effectif ".

Si elle constate une " réelle faiblesse de l'encadrement ", il convient toutefois de relever que cette situation ne résulte pas de l'absence des emplois budgétaires correspondants mais de dysfonctionnements dans la gestion des personnels : vacances de postes, gestion des effectifs encore trop administrative, procédure de notation peu discriminante...

Ainsi, la pénurie des moyens en personnels constituerait un obstacle à l'accomplissement des missions du service public de l'emploi.

Toutefois, il convient d'apporter de nombreuses nuances à la " thèse de la pénurie " des effectifs.

II. DES EFFECTIFS EN RÉALITÉ NOMBREUX, MAIS SOUVENT MAL EMPLOYÉS

En fait, la " thèse de la pénurie " dissimule mal une réalité qui réside dans l'accroissement continu et important du budget de l'emploi, traduisant lui-même l'intervention croissante de l'Etat en matière d'emploi. Dans le même temps, ses missions régaliennes, notamment le contrôle de la législation du travail, celui des fonds de la formation professionnelle ou la médecine du travail, ont indéniablement pâti de ce phénomène.

Au fond, l'évolution des effectifs ne parvient pas à suivre cet interventionnisme de plus en plus prégnant depuis quelques années, et manifestement depuis 1997, qu'il s'agisse des emplois-jeunes ou de la réduction autoritaire du temps de travail.

Le ministère de l'emploi peut ainsi revendiquer légitimement la création d'emplois afin de faire face à ses missions nouvelles sans cesse croissantes : il lui faut plus d'effectifs pour pouvoir réglementer davantage le marché du travail.

Mais une analyse de la situation montre que les pouvoirs publics ne sont pas démunis en moyens en personnels, contrairement à ce qu'affirme le ministère.

A. DE NOMBREUSES CRÉATIONS D'EMPLOIS DEPUIS 1998

1. Davantage de moyens en personnels

En fait, le ministère de l'emploi a bénéficié d'un nombre substantiel de créations d'emplois depuis trois ans.

Depuis 1989, 967 emplois budgétaires ont été créés au ministère de l'emploi. Or, 696 d'entre eux l'ont été depuis 1998, soit 72 % du total. Parmi ceux-ci, la catégorie A a bénéficié de 437 emplois budgétaires, soit 63 % des emplois créés depuis trois ans.

Cette situation a donc permis de rattraper le niveau de 1984, à une époque où, il est vrai, le budget de l'emploi était beaucoup moins élevé, ce qui peut donner l'impression que la part des dépenses de personnel était plus importante.

Il convient pourtant de rappeler une réalité aujourd'hui trop souvent oubliée mais que de nombreux interlocuteurs de vos rapporteurs leur ont rappelée : le ministère de l'emploi - on parlait alors du ministère du travail - a été créé comme un ministère régalien, chargé de veiller à la bonne application du droit du travail.

Le respect de la législation, et la sanction de sa transgression, sont des compétences essentielles de l'Etat. Les moyens dont disposait alors le ministère du travail étaient logiquement réduits, l'inspection du travail en représentant l'essentiel.

La situation actuelle est complètement différente, l'essentiel des moyens du ministère de l'emploi étant constitué de crédits d'intervention : 111,5 milliards de francs sur 122 milliards de francs en 2000, soit 91,4 %.

Le développement du chômage est évidemment à l'origine de ce phénomène, la puissance publique ayant été amenée à intervenir afin de soutenir l'emploi. Cela s'est notamment observé depuis le début des années 1990, et n'a fait que s'accentuer, comme le montre l'exemple des emplois-jeunes, dont le coût s'élève à 21,3 milliards de francs en 2000 ou bien encore le passage aux 35 heures, dont le coût prévu est de 64 milliards de francs mais qui devrait finalement s'avérer plus élevé.

Vos rapporteurs estiment dès lors qu'il est erroné d'établir une corrélation quasi-automatique entre les effectifs du ministère de l'emploi et le montant des crédits qu'il gère, cette corrélation transparaissant des propos de la ministre ou de son administration.

2. Une inflation des tâches liée à la logorrhée réglementaire

Certains dysfonctionnements observés dans les services déconcentrés du ministère de l'emploi chargés de mettre en oeuvre ces politiques résultent directement de cet interventionnisme grandissant, les personnels étant soumis à de fortes contraintes de leur administration centrale.

Ils sont en effet appelés à appliquer, parfois dans la précipitation, des mesures nouvelles, sans que d'autres, plus anciennes, ne soient supprimées, et sans qu'aucune réflexion n'ait été engagée sur les moyens à mobiliser pour les mettre en oeuvre, sans compter le développement des activités interministérielles telles que la politique de la ville. Un dispositif de la politique de l'emploi nécessite de recruter, de former, et d'encadrer des personnels, ce qui prend du temps.

Face à ces contraintes, et dans un contexte marqué par l'empilement de dispositifs successifs, les services déconcentrés du ministère se voient souvent obligés, pour exercer leurs missions, de recourir au " bricolage ". Cette situation s'est largement accentuée avec les emplois-jeunes, comme avec les 35 heures.

a) Les emplois-jeunes : " faire du chiffre " au détriment des autres missions des services

Dans le rapport précité de l'IGAS sur la direction départementale de Seine-Saint-Denis, est analysée la façon dont celle-ci a mis en oeuvre le programme des emplois-jeunes.

L'Inspection note que " dès l'origine du programme, le DDTEFP a été très présente dans le processus et se trouve actuellement fortement mobilisée ". Elle relève toutefois que " la situation apparaît difficilement tenable dans la durée, compte tenu des moyens disponibles ". Ainsi les coordonnateurs emploi-formation " consacrent environ 95 % de leur temps aux emplois-jeunes ", qu'il s'agisse de l'aide au montage des projets, de l'instruction des conventions ou encore du suivi de ces dernières.

En outre, cette mission nouvelle s'effectue nécessairement au détriment d'autres missions pourtant non moins importantes. L'IGAS note ainsi : " avec la mise en place des emplois-jeunes, ces agents [les coordonnateurs emploi-formation] sont, depuis la mi-1997, peu disponibles pour l'ensemble des autres travaux qui leur incombent. Elles estiment ne plus pouvoir assumer certaines tâches. Ainsi, les activités relevant de la délégation de compétence du conseil régional sont négligées ou encore la participation à la préparation du programme globalisé en faveur des chômeurs de longue durée auquel ils n'ont pas été associés comme ils l'auraient dû " .

En outre, les tâches administratives prennent aux agents beaucoup de leur temps, comme le souligne l'Inspection : " le temps qu'ils consacrent à la mise en forme des projets de conventions est soustrait à ce qui devrait constituer leur métier ". " La situation déjà tendue va devenir impossible " conclut le rapport. A tel point que le préfet, à qui le directeur départemental a signalé le problème, " est intervenu auprès du cabinet de la ministre " !

Quand le ministère de l'emploi crée lui-même ses propres problèmes...

b) Les 35 heures : " la pire mesure qu'on ait jamais eue "

Vos rapporteurs ont pu constater le même phénomène au cours de leurs déplacements dans les services déconcentrés en ce qui concerne leur adaptation au passage des entreprises aux 35 heures.

La réduction du temps de travail a considérablement accru les tâches administratives et de statistiques des services.

En outre, la loi sur la réduction négociée du temps de travail, dite " Aubry II ", apparaît extrêmement complexe aux services chargés de veiller à sa bonne application, d'autant plus que de nouveaux problèmes apparaissent au fur et à la mesure de sa mise en oeuvre. Ils sont également amenés à apporter leur expertise technique aux entreprises contraintes de réduire le temps de travail de leurs salariés, mais également, dans certains cas, à la justice, lorsqu'il s'agit de contribuer à la résolution des conflits collectifs engendrés par la loi.

Du reste, les décisions prises par les services peuvent être à l'origine d'une certaine insécurité juridique, notamment en matière d'exonérations de charges sociales. Ce volet de la loi occasionne des contentieux parfois importants avec les URSSAF, en ce qui concerne l'appréciation du délai du dépôt des dossiers qu'il convient de respecter afin de bénéficier des allégements de charges prévus par la loi.

La direction départementale de Paris a ainsi indiqué à vos rapporteurs que la loi Aubry I entraînait une modification de la fonction des agents afin de tenir compte du traitement des dossiers liés à la réduction du temps de travail, notamment en ce qui concerne le conventionnement et la tenue des statistiques hebdomadaires relevant de la compétence du service d'aide à la modernisation des entreprises. Quant au service des conventions et accords d'entreprises, il avait atteint à la mi-avril 2000 un volume d'enregistrement équivalent à celui d'une année ordinaire. Cette direction a également précisé que l'activité de l'inspection du travail s'était considérablement accrue suite au vote de la loi Aubry II, 60 % des questions auxquelles les agents de contrôle de ce service répondent actuellement concernant le temps de travail.

Par ailleurs, la direction départementale de Paris s'est vu contrainte de multiplier les modules d'information et de formation des agents de ses services, mais aussi de développer les interventions en entreprise, afin de " vendre " les 35 heures. Du reste, la loi Aubry II a " nécessité un effort sans précédent " pour s'en approprier les dispositions, d'autant plus que " les services de l'administration centrale alertés n'ont pas communiqué d'informations sur le dispositif dans les délais répondant aux besoins des services et des entreprises ".

Or, cette direction départementale estime, à bon droit, ne pas disposer d'effectifs suffisants pour faire face à cette charge de travail accrue, étant précisé que " l'activité du service de l'aide à la modernisation des entreprises restera soutenue ". Quant au service des conventions et accords collectifs, il remplit ses missions, mais " au détriment du travail de codification transmis à la direction régionale ".

La direction départementale du Nord-Valenciennes a créé un service d'appui technique afin de coordonner le travail des cinq sections d'inspection du travail intervenant à l'occasion de la mise en place de la réduction du temps de travail, et composé de trois agents : deux contrôleurs du travail et un agent de catégorie C. Or, ce service spécialisé a été créé à effectifs constants, et, surtout, au détriment d'autres activités de la direction départementale. Ainsi, le contrôleur, qui était précédemment chargé de la lutte contre le travail illégal n'a pas été remplacé. Quant aux deux autres postes, ils ont fait l'objet de permutations internes au détriment du service du contrôle de recherche d'emploi. En outre, il a été précisé à vos rapporteurs que " les services renseignements ont à répondre à des questions de plus en plus délicates par rapport à la mise en place des 35 heures ", d'autant plus qu'est " à observer un regain des conflits liés aux 35 heures " . Du reste, la direction régionale du Nord-Pas-de-Calais a conclu que " la mise en place des 35 heures tant dans les services que dans les entreprises privées, ne peut qu'alourdir la charge de travail des services déconcentrés ".

• La direction régionale de Midi-Pyrénées a précisé, en ce qui la concerne, que " la loi relative à la réduction du temps de travail a entraîné une très forte mobilisation des services régionaux qui ont dû faire face, à effectif constant, à de multiples tâches nouvelles et à une amplification de celles existantes ", et que l'accomplissement de ces missions " a imposé de différer l'accomplissement d'autres tâches ". En outre, " la complexité du dispositif statistique mis en place n'a pas, en particulier, facilité le travail ". Interrogée sur la façon dont elle envisageait son rythme d'activité futur, la direction départementale a indiqué que " l'extension du champ d'application de la réduction du temps de travail à l'ensemble des entreprises devrait provoquer l'arrivée d'un nombre massif d'accords que les services ne pourront absorber à effectif constant ".

• La direction régionale de Corse a estimé que " si la suppression du conventionnement pour l'accès aux exonérations de charges sociales [avec la loi Aubry II] va alléger la charge des services " emploi ", le contrôle même a posteriori des accords signés dans les petites entreprises sans de réelles structures syndicales va mobiliser fortement l'inspection du travail ". Dès lors, " le temps nécessaire sera pris sur d'autres tâches de contrôle ".

Et un chef de service d'une direction régionale de conclure : en matière de complexité d'application, la loi sur les 35 heures " est la pire mesure qu'on ait jamais eue "...

Il apparaît ainsi que la réduction du temps de travail a été imposée de façon autoritaire, non seulement aux entreprises, mais également aux services déconcentrés du ministère de l'emploi lui-même, qui sont obligés d'adapter leur fonctionnement à une décision venue de l'administration centrale qui, non contente d'exiger " du chiffre ", peut ensuite légitimement arguer de la charge de travail très lourde de ses services déconcentrés pour demander la création d'emplois nouveaux.

B. UN MINISTÈRE " GOURMAND "

1. Des demandes d'augmentation notables des effectifs

Vos rapporteurs ont obtenu communication d'un document très intéressant qui compare les demandes exprimées par le ministère de l'emploi lors des conférences budgétaires intervenant lors de la préparation du projet de loi de finances en matière de créations d'emplois, d'une part, et les résultats effectivement obtenus, d'autre part.

La lecture de ce document met en exergue deux principaux faits :

- le ministère de l'emploi se révèle, depuis 1990, relativement " gourmand " au regard des créations d'emplois qu'il demande au cours des conférences budgétaires : au total, depuis cette date, il a exprimé le souhait de voir créer à son profit 4.020 emplois budgétaires, ses demandes étant du reste grandissantes avec le temps : alors qu'il demandait la création de 121 emplois pour 1990, il a souhaité en obtenir 429 en 1997, 442 en 1998, et 633 en 1999, l'augmentation de ces demandes étant à rapprocher du nombre toujours croissant de ses missions ;

- le ministère de l'emploi obtient bien davantage satisfaction depuis trois ans qu'au cours des années antérieures : il a vu ses effectifs budgétaires diminuer en 1990, 1991 et 1992, ou rester inchangés comme en 1994 ; en 1997 encore, 50 emplois budgétaires ont été supprimés ; au contraire, il a obtenu la création de 170 emplois en 1998, de 218 emplois en 1999 et de 130 emplois en 2000.

En outre, il semble que de nombreuses créations d'emplois sont prévues pour l'avenir.

2. La programmation des effectifs

En 1999, l'élaboration des plans pluriannuels de modernisation (PPM) et de programmation des effectifs (PPE) a conduit à une nouvelle évaluation des besoins en effectifs sur trois ans, jusqu'en 2002.

La DAGEMO a indiqué à vos rapporteurs que " le PPE du secteur emploi récuse le scénario de stabilité des effectifs présenté par le ministère des finances en tant qu'incompatible avec l'évolution des missions du ministère ".

Elle a ainsi été amenée à proposer un scénario libre dont les principaux axes sont les suivants 6 ( * ) :

- augmenter les effectifs du ministère de 780 emplois sur trois ans, notamment en matière de contrôle, d'expertise et de conception, de pilotage et d'évaluation des politiques mises en oeuvre par le ministère ;

- développer les capacités d'encadrement, la DAGEMO déplorant " un sous-encadrement chronique " ;

- requalifier les emplois de catégorie C ;

- améliorer la situation indemnitaire des agents en réduisant les inégalités entre services centraux et services déconcentrés, en rapprochant les régimes indemnitaires des corps comparables entre les secteurs emploi et santé, et en réduisant les écarts constatés par rapport à d'autres ministères mieux dotés ;

- consolider l'ensemble des situations de mises à disposition non remboursées, soit 310 agents.

Ce " scénario libre ", qui repose sur une estimation d'une progression des effectifs de 2,35 % par an pendant trois ans, soit la création de 780 emplois, engendrerait un coût total de 565 millions de francs sur la période 2000-2002.

Lors de son audition devant vos rapporteurs, Mme Marie-Caroline Bonnet-Galzy, directeur de la DAGEMO, a indiqué que l'évolution des missions du ministère conduirait à recruter des agents à l'administration centrale, en particulier des juristes et des techniciens de la communication.

Dans les services déconcentrés, quatre types de besoins apparaissent : le renforcement des effectifs de l'inspection du travail, d'autant plus nécessaire avec la mise en place des 35 heures, le contrôle de la formation professionnelle, la santé au travail, et le renforcement de l'administration générale.

Les 780 emplois que le ministère estime nécessaires à l'accomplissement de ses missions se répartissent de la façon suivante :

- 110 emplois d'inspecteurs du travail et 350 emplois de contrôleurs du travail afin de renforcer les sections d'inspection ;

- 40 emplois d'inspecteurs du travail et 100 emplois de contrôleurs de manière à renforcer le contrôle des fonds de la formation professionnelle ;

- 77 emplois de catégorie A et 10 emplois de secrétaires administratifs dans le but de renforcer les effectifs de l'administration centrale ;

- une centaine d'emplois concernant des métiers spécifiques tels que attachés d'administration centrale, administrateurs civils, contrôleurs et attachés de l'INSEE, médecins-inspecteurs, assistantes sociales, agents contractuels ingénieurs de sécurité, informaticiens...

C. DES EMPLOIS POTENTIELS NON NÉGLIGEABLES

Il convient également de noter que le ministère de l'emploi dispose également d'un nombre non négligeable d'emplois potentiels, sous la forme d'agents bénéficiant d'une mise à disposition, d'un détachement ou d'une décharge syndicale.

Certes, ces diverses positions administratives sont prévues par les dispositions du statut de la fonction publique de 1983-1984, mais, outre qu'elles doivent respecter un certain nombre de conditions, on pourrait s'attendre à ce que le ministère de l'emploi, qui déplore le nombre trop faible de ses effectifs, ne souffre que très peu, voire pas du tout, de ces " pertes en ligne ". Or tel n'est pas le cas.

1. Les mises à disposition

Le ministère de l'emploi, selon les chiffres qu'il a fournis à vos rapporteurs, a mis à disposition d'autres administrations 23 fonctionnaires de son administration centrale, sans compter les 12 contractuels.

Les fonctionnaires de l'administration centrale mis à disposition sont essentiellement des agents de catégorie A, soit 15 sur 23. Curieusement, 6 d'entre eux sont mis à disposition de l'administration centrale de la section solidarité du ministère, ce qui n'est guère cohérent avec l'existence de deux parties distinctes au sein du ministère : pourquoi avoir instauré cette distinction si c'est pour utiliser des fonctionnaires de l'emploi à des tâches relevant de la partie solidarité ?

Quant aux agents des services déconcentrés, ils sont 72 à être mis à disposition d'une autre administration. Les agents de catégorie B sont les plus nombreux, suivis de près par ceux de catégorie A. 20 fonctionnaires sont mis à disposition des centres interministériels de renseignements administratifs, les CIRA. Ici encore, comme pour l'administration centrale, on retrouve un nombre non négligeable de fonctionnaires (14) de la partie emploi du ministère travailler pour sa partie solidarité.

En outre, le contrôleur financier central auprès du ministère de l'emploi a indiqué qu'environ 70 agents affectés à la direction régionale d'Ile-de-France travaillaient, en réalité, pour l'administration centrale. Cela permet à cette dernière de contourner la réduction de ses effectifs au milieu des années 1990, qui la privait de fonctionnaires de catégorie A.

Au total, ce sont donc 95 emplois du ministère de l'emploi qui sont mis à disposition d'autres administrations.

2. Le détachement et la disponibilité

208 agents du ministère, soit 13 de l'administration centrale et 195 des services déconcentrés, sont en disponibilité, ce qui représente un chiffre relativement important, même s'ils ne sont pas intégrés au calcul du nombre d'emplois dont bénéficie le ministère de l'emploi. Toutefois, ces agents pourraient, un jour ou l'autre, réintégrer leur emploi.

Il convient de noter que 143 agents, soit 27 en administration centrale et 116 dans les services déconcentrés, sont en position de détachement, c'est-à-dire qu'ils n'ont plus rien avoir avec leur corps d'origine : ils ne sont plus rémunérés par le ministère de l'emploi ni comptabilisés parmi ses effectifs. Les agents d'encadrement en constituent une proportion importante (72, soit la moitié).

3. Les décharges syndicales

Enfin, les décharges syndicales se sont établies comme suit :

Ces chiffres montrent que, si les représentants du personnel des agents du ministère de l'emploi bénéficient de 155 demi-journées de décharges syndicales, seules 131 sont utilisées, ce qui correspond à 65 jours entiers, soit plus de trois mois de travail.

Il s'agit toutefois de chiffres officiels, et donc a minima , qui ne prennent pas en considération le temps consacré aux diverses réunions syndicales qui ne donnent pas lieu à décharges, et donc au calcul du temps de travail ainsi passé.

Au total, et sans prendre en compte les décharges syndicales, ce sont donc 446 emplois qui, au titre de différentes positions administratives, ne sont pas dévolus aux activités du ministère de l'emploi. Ce chiffre est à rapprocher du nombre d'emplois budgétaires de ce département ministériel en 2000, soit 10.115.

Les " pertes en ligne " représentent donc environ 4,5 % des effectifs du ministère de l'emploi, soit une proportion qui ne paraît pas déraisonnable mais qu'il faut conserver à l'esprit lorsqu'il déplore la faiblesse de ses moyens en personnels.

D. DÉPASSER LA NOMENCLATURE BUDGÉTAIRE

Le ministère de l'emploi ne gère pas seul l'ensemble des dispositifs de la politique de l'emploi : il en délègue une partie parfois importante à de multiples intervenants, qu'ils participent au service public de l'emploi ou qu'ils interviennent comme ses " sous-traitants ".

Il convient donc, comme l'a relevé la Cour des comptes dans son rapport sur l'exécution des lois de finances pour 1998, de dépasser la nomenclature budgétaire ordinaire qui ne permet pas de décrire correctement la politique de l'emploi. Cette observation est valable tant pour les interventions que pour les personnels.

Afin d'appréhender les moyens en personnels alloués à la mise en oeuvre de la politique de l'emploi, il convient de prendre en compte les effectifs d'autres organismes qui ne figurent pas sur le budget de l'emploi. Cela permet ainsi d'obtenir une vision plus réaliste, et donc plus sincère, du nombre d'agents exerçant des activités liées aux missions de la sphère publique dans le domaine de l'emploi.

1. Le service public de l'emploi

a) L'ANPE

Aux termes de l'ordonnance n° 67-578 du 13 juillet 1967, l'Agence nationale pour l'emploi (ANPE) est un établissement public national qui " participe à la gestion du service public de l'emploi " . Elle est placée sous la tutelle du ministère de l'emploi. Ce dernier est présent au conseil d'administration de l'Agence et détermine ses grandes orientations stratégiques et ses objectifs.

En 2000, l'ANPE compte 16.990 emplois budgétaires, soit une progression de plus de 42 % depuis 1990 et de plus de 91 % depuis 1980. 5.494 emplois budgétaires ont été créés depuis 1990, et 1.527 depuis 1997. Le dernier contrat de progrès signé avec l'Etat en 1999 prévoit d'accorder à l'Agence d'importants moyens en personnels, soit la création de 500 emplois par an pendant cinq ans.

Le nombre de ses effectifs physiques s'élève à 17.200 agents en contrat à durée indéterminée et 630 agents en contrat à durée déterminée, soit 17.830 agents au total. Il convient d'y ajouter 690 agents temporaires, 1.390 contrats emploi-solidarité et 50 contrats emploi-consolidé, 480 emplois-jeunes et 200 appelés du contingent.

Ce sont donc plus de 20.500 personnes qui participent, dans le cadre des tâches qu'ils effectuent à l'ANPE, à la gestion du service public de l'emploi.

Le total de ses dépenses de personnel s'établit à 4,29 milliards de francs en 2000. L'évolution de ces dépenses résulte en partie, au-delà des créations d'emplois proprement-dites, des orientations des contrats de progrès successifs.

b) L'AFPA

L'Association nationale pour la formation professionnelle des adultes (AFPA), créée le 1 er janvier 1966, s'est vue attribuer par ses textes constitutifs une mission de service public, dénommée à l'AFPA mission d'intérêt général. Elle est placée sous la tutelle du ministère de l'emploi, et soumise au contrôle économique et financier de l'Etat qui est représenté dans ses instances délibérantes et qui fixe ses grandes orientations ainsi que les objectifs qu'elle doit atteindre chaque année.

Ainsi, ses missions sont déterminées chaque année au travers d'une commande de l'Etat pour laquelle elle doit rendre compte.

Pour les remplir, l'AFPA dispose de moyens qui consistent en une subvention de l'Etat s'élevant à 4,33 milliards de francs en 2000 et en une dotation de 10.640 emplois.

Les missions de l'AFPA

Les missions de l'AFPA sont déclinées par le dernier contrat de progrès portant sur la période 1998-2003 entre l'Etat et l'Association :

- développer l'orientation professionnelle au travers de l'aide à l'élaboration d'un projet professionnel en complémentarité avec l'ANPE ;

- permettre l'accès à la formation qualifiante des actifs, et principalement des demandeurs d'emploi qui en sont démunis, prioritairement des adultes afin de favoriser leur accès à l'emploi ;

- ancrer plus fortement l'activité de l'Association dans les objectifs et les priorités des politiques publiques pour la formation professionnelle et l'emploi ;

- renforcer les liens avec les deux autres composantes du service public de l'emploi : les services déconcentrés du ministère de l'emploi et l'ANPE ;

- assurer par délégation du ministère de l'emploi la mise en oeuvre de la politique de certification des organismes de formation ;

- assurer la restauration et l'hébergement des stagiaires pour lesquels le recrutement est national ;

- affirmer et clarifier les modes de relations avec les régions et les branches professionnelles et travailler avec les entreprises au plus près du terrain.

c) Les autres organismes

Le ministère de l'emploi exerce également sa tutelle sur plusieurs établissements publics plus ou moins importants en effectifs, tels que le Centre d'études sur l'emploi (CEE), l'Agence nationale pour l'amélioration des conditions de travail (ANACT) ou encore le Centre d'études et de recherche sur les qualifications (CEREQ).

Le tableau ci-après récapitule les emplois budgétaires affectés au service public de l'emploi mais qui n'apparaissent pas dans le budget de l'emploi puisqu'ils sont supportés par le budget de l'établissement concerné :

Ainsi, le service public de l'emploi bénéficie de 27.796 emplois budgétaires, auquel il convient bien entendu d'ajouter les 10.115 emplois inscrits sur le budget de l'emploi, soit un total de 37.911 emplois budgétaires.

Il est indispensable de prendre ces emplois en considération afin de mesurer d'une façon objective les moyens en personnels permettant de gérer les crédits alloués à la politique de l'emploi.

Cette analyse plus complète permet de relativiser la " thèse de la pénurie " des effectifs, d'autant plus que d'autres intervenants, avec leurs moyens, participent à la mise en place des dispositifs de la politique de l'emploi en qualité de " sous-traitants " du ministère.

2. Les " sous-traitants " du ministère de l'emploi

a) L'UNEDIC et les ASSEDIC

L'Union nationale interprofessionnelle pour l'emploi dans le commerce et l'industrie (UNEDIC) et le réseau des Associations pour l'emploi dans le commerce et l'industrie (ASSEDIC) sont des associations de droit privé, régies par les dispositions de la loi de 1901.

Ces associations assurent la gestion paritaire de l'assurance-chômage 7 ( * ) .

Les ASSEDIC sont chargées d'affilier les employeurs, d'encaisser les contributions des entreprises et des salariés, d'inscrire, depuis le 1 er janvier 1998, les demandeurs d'emploi, et de verser des prestations aux chômeurs.

Elles versent ainsi, au titre de l'assurance-chômage relevant du régime conventionnel, l'allocation unique dégressive (AUD), l'allocation formation-reclassement (AFR), l'allocation chômeurs âgés (ACA), et les aides au reclassement du Fonds social.

Mais les ASSEDIC interviennent également pour le compte de l'Etat. Elles assurent le versement des allocations du Fonds de solidarité : l'allocation de solidarité spécifique (ASS) aux salariés privés d'emploi qui ont épuisé leurs droits à l'assurance-chômage, l'allocation d'insertion à certaines catégories de chômeurs tels que les apatrides ou les anciens détenus, ainsi que les aides spécifiques aux chômeurs âgés comme l'allocation spécifique d'attente (ASA), la préretraite licenciement et la préretraite progressive.

Il s'agit là d'autant de missions que l'Etat n'a pas à assumer directement alors qu'elles relèvent de ses compétences traditionnelles, la solidarité nationale en l'occurrence.

Le coût de cette fonction de prestataire de service de l'Etat pour le paiement de certaines allocations s'établit à environ 18  milliards de francs, dont 15 milliards de francs au titre de l'ASS.

Les effectifs de l'UNEDIC et du réseau des ASSEDIC s'élèvent à 14.259 personnes. S'il n'est guère aisé d'individualiser le nombre de ces agents intervenant pour le compte de l'Etat, il est possible de procéder à une estimation rapprochant le montant des crédits gérés par l'assurance-chômage, soit environ 110 milliards de francs au titre de l'indemnisation, auxquels il convient d'ajouter les 18 milliards de francs au titre de la solidarité nationale, et ses effectifs totaux.

Ce sont ainsi environ 2.000 agents de l'UNEDIC et des ASSEDIC qui exercent leurs activités pour le compte de l'Etat.

b) Le CNASEA

Les activités du Centre national pour l'aménagement des structures des exploitations agricoles (CNASEA) traduisent bien le fort accroissement de la politique de l'emploi et la sous-traitance dont elle a fait l'objet.

Le CNASEA a été créé en 1966, avec pour mission d'assurer le paiement d'aides essentiellement financées par le ministère de l'agriculture et destinées à la modernisation des exploitations agricoles. Il est d'ailleurs placé depuis l'origine sous la tutelle du ministère de l'agriculture. Rien ne le prédisposait par conséquent à s'investir dans le domaine de l'emploi et de la formation professionnelle.

Mais à partir du début des années 1980, ses actions en la matière se sont développées.

En matière d'emploi, le CNASEA est chargé du versement aux employeurs de l'aide de l'Etat attachée aux dispositifs visant à développer l'emploi dans le secteur non marchand : contrats emploi-solidarité, contrats emploi consolidé, emplois de ville, puis emplois-jeunes (à l'exception de ceux recrutés par l'éducation nationale et par le ministère de l'intérieur)...

En matière de formation professionnelle, il rémunère par convention avec le ministère de l'emploi et par convention avec chacune des régions à l'exception de Languedoc-Roussillon les stagiaires de la formation professionnelle.

Il est associé par le ministère de l'emploi à l'élaboration des textes concernant les procédures de paiement relatives aux mesures qui lui sont confiées.

Il est amené à élaborer des logiciels pour gérer les aides dont le paiement lui est confié. Il met en oeuvre des logiciels spécifiques de transmission d'information ou des serveurs reliés à ces bases de données. Par ailleurs, il a acquis une compétence dans le domaine de l'élaboration de documents de demande d'aide.

Cette activité croissante du CNASEA en matière d'emploi et de formation professionnelle explique la modification en cours de ses statuts qui le placeront à l'avenir sous la tutelle conjointe du ministère de l'agriculture et de l'emploi.

Le CNASEA est intervenu à l'origine comme prestataire de services du ministère de l'emploi , cette activité étant matérialisée par convention : la convention du 28 janvier 1992 lie ainsi le CNASEA à l'Etat, et est modifiée par avenant chaque fois qu'une action nouvelle lui est confiée. A cet égard, il a indiqué à vos rapporteurs que " lorsque le ministère du travail, qui ne souhaitait pas développer ses services pour verser de telles aides, a recherché un organisme public capable de lui servir de sous-traitant, il s'est adressé au CNASEA [...] et a progressivement chargé le CNASEA d'activités nouvelles ".

Pour mener à bien ses missions, le CNASEA dispose de 1.462 emplois budgétaires en 1999, dont 920 exercent leurs activités dans le domaine de l'emploi et de la formation professionnelle, soit 63 % du total.

Ainsi, en 1999, il a pris en charge 189.335 stagiaires de la formation professionnelle pour le compte de l'Etat, les rémunérations versées s'élevant à 2,48 milliards de francs.

Il a payé 440.846 CES, pour un montant de 9,93 milliards de francs, 127.277 CEC, pour un montant de 4,04 milliards de francs, et 123.122 emplois-jeunes, ce qui représente 8,39 milliards de francs. Du reste, pour chaque dispositif dont le paiement lui est confié, un cahier des charges est élaboré par le demandeur d'ordre et le CNASEA agit conformément à ses exigences : la décision de verser une aide, en effet, est prise par le financeur, en général l'Etat, et le Centre paie au vu de cette décision, puis gère les présences et assure le recouvrement des indus.

Au total, il apparaît que le ministère de l'emploi, qui a pu ne pas souhaiter assurer lui-même certaines tâches de gestion qui lui paraissaient pouvoir être mieux remplies par un organisme spécialisé, a fait appel à des prestataires de services intervenant comme sous-traitants, pour son compte, de la politique de l'emploi.

Si ce phénomène a permis au ministère de l'emploi de se recentrer sur l'aspect régalien de ses activités, en particulier la mise en place d'un dispositif ou le suivi et l'évaluation des politiques publiques en la matière, il a également bénéficié des moyens en personnels de ses sous-traitants.

Ainsi peut-on estimer le nombre des agents qui interviennent dans la gestion de la politique de l'emploi de la façon suivante :

- effectifs budgétaires du ministère de l'emploi : 10.115

- effectifs du service public de l'emploi : 27.796

- effectifs de l'UNEDIC : environ 2.000 au titre de la solidarité nationale

- effectifs du CNASEA : 920 au titre de ses activités liées à l'emploi et à la formation professionnelle

Soit un total de plus de 40.800 emplois.

c) L'ACOSS

A ces effectifs, il conviendrait également d'ajouter ceux de l'Agence centrale des organismes de sécurité centrale (ACOSS) qui gèrent les mesures comportant des exonérations de cotisations sociales qui constituent aujourd'hui le principal instrument de la politique de l'emploi, notamment depuis que l'allégement des charges a permis au gouvernement de " sauver " les 35 heures.

Vos rapporteurs n'ont pas entendu de responsables de l'ACOSS au cours de leur mission, mais s'en remettent sur ce point au rapport de nos collègues Charles Descours, Jacques Machet et Alain Vasselle consacré à l'application de la loi de financement de la sécurité sociale 8 ( * ) .

Nos collègues ont en effet consacré une partie de leur rapport à la gestion des exonérations de cotisations de sécurité sociale, dont il existe aujourd'hui 35 mécanismes différents.

Le montant des exonérations compensées par l'Etat représente environ 80 milliards de francs en 2000, pour le seul régime général, dont 63 milliards de francs sont gérés par le fonds de financement de la " réforme " des cotisations patronales de sécurité sociale (FOREC), au titre de l'allégement de charges sur les bas salaires et de la réduction du temps de travail. 23 milliards de francs sont supportés par le budget de l'Etat, les différentes mesures étant gérées par l'ACOSS et les URSSAF.

Comme l'ont relevé nos collègues, " les gestionnaires ne sont que très peu associés à la conception des mécanismes d'exonération ". Par ailleurs, ils ont noté que " le travail en réseau entre URSSAF et directions déconcentrées du ministère de l'emploi est aujourd'hui quasiment inexistant ".

La gestion des exonérations de cotisations sociales ne faisait pas partie des missions originelles de la branche du recouvrement. Il faut également y voir le résultat d'une croissance des politiques publiques en faveur de l'emploi. Il convient d'ailleurs de noter que cette politique d'exonération de charges sociales explique 70 % de l'augmentation du budget de l'emploi, ce qui montre bien que le rapprochement mécanique de l'évolution des effectifs du ministère de l'emploi et celle de son budget n'est pas pertinent.

Le schéma ci-après retrace, dans un circuit de paiement global, l'ensemble des intervenants qui gèrent, en 2000, les crédits dont dispose la politique de l'emploi. Il permet de faire apparaître les six structures, sans compter le Fonds social européen, qui supportent le financement d'un ou plusieurs dispositifs de la politique de l'emploi. Au fonds, le Trésor public ne prend à sa charge que 39 milliards de francs, soit moins du tiers du total du budget de la politique de l'emploi. En outre, le FOREC ne figure pas dans ce schéma, ce qui réduirait encore la part du financement réellement mise en oeuvre par les services de l'Etat.

Circuits de paiement loi de finances 2000

(en milliards de francs)

ACOSS

23

CNASEA

38

UNEDIC

18

TRÉSOR

39

ANPE

3

AFPA

1

+ Fonds de concours : 8,3 (dont Fonds social européen : 5,2)

Il convient donc de prendre en considération l'ensemble des personnels des différentes structures appelées à mettre en oeuvre les dispositifs de la politique de l'emploi.

Cela permet ainsi d'apporter de sérieuses nuances à la " thèse de la pénurie " des effectifs du ministère de l'emploi, les services de ce dernier ne gérant qu'une faible part de l'ensemble des crédits alloués à l'emploi.

CHAPITRE TROIS

UNE GESTION DES PERSONNELS EN VOIE D'AMÉLIORATION MAIS ENCORE PERFECTIBLE

Malgré la petite taille des effectifs du ministère de l'emploi, leur gestion a révélé des dysfonctionnements importants, mis en exergue par la Cour des comptes dans son rapport particulier relatif à La fonction publique de l'Etat , publié en janvier 2000.

L'ensemble des interlocuteurs que vos rapporteurs ont rencontrés au cours de leur mission, soit au Sénat soit au sein des services du ministère, leur ont assuré que ces dysfonctionnements étaient aujourd'hui régularisés ou en voie de l'être.

La DAGEMO, pour sa part, estime que la pénurie des effectifs est la cause essentielle de la gestion parfois défaillante des personnels, la nécessité de faire face à des besoins croissants ayant conduit les gestionnaires à recourir à des pratiques parfois irrégulières.

Toutefois, vos rapporteurs considèrent que la forte centralisation de la gestion des personnels n'a pu qu'accentuer ces dysfonctionnements, et ne permet pas, aujourd'hui encore, d'assurer la sincérité de l'autorisation budgétaire votée par le Parlement, c'est-à-dire de connaître avec précision le nombre des fonctionnaires du ministère de l'emploi.

I. LES DYSFONCTIONNEMENTS DANS LA GESTION DES PERSONNELS SERAIENT RÉGULARISÉS OU EN VOIE DE L'ÊTRE

A. LES IRRÉGULARITÉS RELEVÉES PAR LA COUR DES COMPTES ...

L'étude de la Cour des comptes a porté sur les directions régionales et directions départementales du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle, sur la période 1992-1995.

La Cour des comptes a mis en évidence trois faits relatifs à la gestion des personnels des services déconcentrés du ministère de l'emploi :

- des carences dans la gestion des emplois budgétaires ;

- la méconnaissance des effectifs réels ;

- des infractions aux règles relatives à la gestion des personnels.

1. Les carences de la gestion des emplois budgétaires

a) Il existe des écarts entre les emplois budgétaires et les effectifs réels

Les effectifs réels occupant les emplois figurant en loi de finances initiale ne correspondent pas à la prévision budgétaire.

Ce constat peut revêtir trois formes :

Les modifications liées aux blocages et aux surnombres

Les mouvements (transferts, blocages, surnombres et régulation budgétaire) affectant les personnels et constatés en cours de gestion, dont certains se compensent, résultent de trois phénomènes :

- des retards dans l'application des mesures de gestion des personnels : un important retard a été pris dans l'application du protocole d'accord du 9 février 1990 sur la rénovation de la grille indiciaire de la fonction publique (le protocole Durafour) aux catégories B et C, ce qui a entraîné des surnombres dans certains grades et des blocages de carrière dans d'autres ;

- l'abandon de mesures statutaires ou la non inscription des crédits budgétaires correspondants : en 1993, avait été annoncé un projet d'unification de l'inspection du travail, mais le projet a été abandonné en 1997, alors que ce corps est doté d'un statut interministériel ;

- la régulation budgétaire : dans le cadre de la régulation des dépenses publiques décidée chaque année par le gouvernement, certains emplois devenus vacants sont " gelés " et ne peuvent donner lieu à recrutement (96 emplois ont été " gelés " dans les directions régionales et départementales en 1992, et 258 en 1995).

La sous-occupation chronique de certaines catégories d'emplois

Les vacances d'emplois (le taux d'occupation des emplois ouverts en loi de finances initiale était de 96 % en 1992 et de 93,5 % en 1995 dans les directions régionales et départementales) résultent soit des décisions gouvernementales de gel d'emplois au titre de la régulation budgétaire, soit d'un excès d'emplois gagés en compensation de surnombres autorisés en gestion et de transferts, soit d'une gestion aléatoire des flux d'entrants et de sortants des corps.

Cette situation ne concerne pas que les services déconcentrés. L'administration centrale a également à souffrir de vacances d'emplois : 97 % des emplois budgétaires de l'administration centrale étaient occupés en 1998, 95 % en 1999 et 92 % en 2000, comme le montre le tableau ci-après.

La rémunération par les services déconcentrés d'agents n'y exerçant pas

Parmi les agents comptés au nombre des effectifs des services déconcentrés, certains n'y servent pas : en 1996, ils étaient 304 dans les directions régionales et départementales. Il s'agit de fonctionnaires en stage de formation initiale, en décharge syndicale ou mis à disposition d'autres services.

Or, près du tiers de ces mises à disposition est irrégulier. En 1996, 83 agents des services déconcentrés du travail (essentiellement des fonctionnaires de catégorie A) étaient en fait employés à l'administration centrale, alors que la procédure normale serait le transfert des emplois budgétaires correspondants sur les chapitre et article budgétaires appropriés de l'administration centrale.

b) L'outil de suivi des emplois aux niveaux national et local connaît de nombreuses limites

Le suivi du stock d'emplois et de ses variations nécessite la tenue d'une comptabilité contradictoire entre la direction de l'administration centrale en charge de la gestion des emplois et des personnels, et le contrôleur financier.

Or, la Cour des comptes a relevé des faiblesses et des confusions dans la comptabilisation et la répartition des emplois, même s'il convient de noter que, contrairement à la situation prévalant dans les directions régionales et départementales des affaires sanitaires et sociales, la comptabilité des emplois existe dans les DRTEFP et les DDTEFP.

La majorité des emplois est répartie entre les services déconcentrés sur la base d'un " effectif théorique de référence " censé permettre d'adapter les moyens en personnels aux besoins des différents services.

Toutefois, cet outil de gestion présente des faiblesses, selon la Cour des comptes :

- en l'absence d'une politique volontariste d'affectation, l'écart entre l'effectif réel des personnels et l'effectif de référence se pose de façon durable au plan géographique et au niveau du type de personnel ; ce n'est qu'au terme de plusieurs années qu'une adéquation semble possible ;

- la pertinence de l'effectif de référence se trouve altérée du fait que la DAGEMO se borne à répartir les seuls emplois budgétaires, alors qu'elle devrait prendre en compte les effectifs réellement en fonction dans les services déconcentrés.

c) La gestion prévisionnelle des effectifs est inexistante

Entre 1991 et 1994, le ministère a conduit dans les directions régionales et départementales une importante opération de transformation d'emplois de contrôleurs et d'agents administratifs en 350 emplois d'inspecteurs du travail.

Or, aucune étude prévisionnelle n'a été faite pour mesurer les conséquences de la modification de la pyramide du corps, ce qui n'a pas manqué d'entraîner un problème de déroulement de carrière.

En outre, la gestion prévisionnelle des personnels est handicapée par l'absence d'un outil de gestion moderne, la base de gestion informatisée des personnels étant techniquement obsolète.

2. Les limites de la connaissance des effectifs réels

Les agents titulaires et les contractuels rémunérés sur des emplois budgétaires représentaient, en 1996, 83 % des effectifs des directions régionales et départementales. Les autres agents sont des agents non titulaires rémunérés sur des crédits de vacations, des agents mis à disposition gratuitement ou contre remboursement, et des collaborateurs de statut divers.

a) Il est difficile de dénombrer avec précision les effectifs sur emplois budgétaires

Cette situation résulte de deux phénomènes :

L'obsolescence de l'outil en place

Le suivi des effectifs suppose de connaître les mouvements et changements de position modifiant la quotité de temps de travail des agents.

Il doit donc être adapté au niveau de la déconcentration de la gestion des personnels des services déconcentrés, dans la mesure où certains actes de gestion d'un corps de personnel relèvent de la compétence du ministre et d'autres de celle du chef du service déconcentré.

La DAGEMO dispose d'une base informatique de la gestion des personnels implantée à l'administration centrale, et qui peut être consultée par les directions régionales et départementales.

La majorité des actes de gestion est préparée et éditée à partir de cette base.

Toutefois, cette dernière ne couvre pas la totalité des actes de gestion. Jusqu'en 1996, elle ne permettait pas l'édition automatisée des arrêtés de démission, d'affectation des stagiaires, de mutation et de détachement, ce qui nécessitait des opérations manuelles complémentaires.

La confusion entre effectifs rémunérés et effectifs opérationnels

Tous les agents rémunérés sur emploi, recensés par la DAGEMO au titre des services déconcentrés, n'y exercent pas effectivement.

En 1996, 304 agents rémunérés par les DRTEFP et les DDTEFP étaient dans une telle situation. Il s'agit essentiellement d'agents mis à disposition d'autres administrations ou organismes, bénéficiant d'une décharge syndicale ou placés en stage de formation initiale dans une école d'application 9 ( * ) .

Une telle confusion ne permet pas de connaître avec précision les effectifs réels des services déconcentrés.

b) Le suivi des autres effectifs est tout aussi délicat

Environ 15 % des effectifs des services déconcentrés du ministère de l'emploi ne sont pas recrutés sur des emplois budgétaires.

L'initiative de leur recrutement appartient, soit aux services déconcentrés, notamment pour les agents non titulaires et certains mis à disposition, soit à une ou plusieurs directions de l'administration centrale.

L'absence d'outil commun de recensement est à l'origine de trois principaux dysfonctionnements :

- un dénombrement tardif et imprécis des agents non titulaires , au moins jusqu'en juin 1996, lorsque débutèrent les travaux sur la résorption de l'emploi précaire dans la fonction publique ;

- des incertitudes sur le nombre des agents mis à disposition des services déconcentrés : la DAGEMO bénéficiait, en 1996, de 54 mises à disposition de fonctionnaires d'autres ministères ou collectivités (24) et d'agents issus d'organismes rattachés au ministère tels que le CNASEA, l'ANPE ou l'AFPA (30).

Mais le nombre des mises à disposition, au sens du statut général de la fonction publique, dont bénéficie le ministère de l'emploi, n'est pas représentatif de l'ensemble des effectifs qui y exercent à titre temporaire ou occasionnel, car il convient de prendre en considération le recours à diverses autres catégories de collaborateurs ;

- un accroissement de l'emploi précaire : la DAGEMO bénéficie de l'appui de collaborateurs divers, souvent permanents ; on dénombrait ainsi, en 1996, dans les directions régionales et départementales, 53 objecteurs de conscience, 3 appelés du contingent et 345 agents embauchés sur un contrat emploi-solidarité (CES).

Or, une telle situation est contraire aux règles relatives à l'exécution des dépenses de l'Etat, et suscite le développement du travail précaire au sein de la fonction publique, ce qui pose, à terme, le problème de l'intégration de ces agents dans les cadres.

3. Les infractions aux règles relatives à la gestion des personnels

a) Des personnels permanents sont rémunérés sans support budgétaire durable

Il existe deux principaux problèmes concernant les agents des DRTEFP et des DDTEFP :

- les crédits de rémunération des cadres pour l'emploi ont été inscrits dans la loi de finances initiale pour 1996 sans que les emplois correspondants aient été créés, ce qui est contraire aux dispositions de l'article 1 er de l'ordonnance organique de 1959 ;

- les agents qui gèrent les dossiers du Fonds social européen sont rémunérés sur des crédits d'assistance technique (titre IV) dont la pérennité n'est pas assurée.

Par ailleurs, la question des collaborateurs rémunérés sur contrats emploi-solidarité demeure pour partie non résolue. Les services déconcentrés, en effet, ont eu recours de façon irrégulière à des organismes supports tels que des associations ou des établissements publics pour bénéficier de l'affectation d'agents sur contrats emploi-solidarité et contrats emploi-consolidé.

b) La réglementation est appliquée de manière irrégulière

Les dysfonctionnements constatés, s'agissant des personnels des services déconcentrés du ministère de l'emploi, sont de deux types :

La mise à disposition de fonctionnaires de l'Etat

En 1996, 86 fonctionnaires des directions régionales et départementales étaient en position de mise à disposition.

Or, des irrégularités ont été constatées :

- l'arrêté de mise à disposition de ces agents ne mentionne aucune durée de service, alors que la réglementation en prévoit (3 ou 6 ans maximum selon le cas) ;

- ces arrêtés ne sont pas publiés ;

- la situation des personnels mis à disposition n'est pas suivie par le service gestionnaire.

En outre, à la même date, 9 agents de l'inspection du travail étaient mis à disposition de centrales syndicales, 7 d'entre eux ne bénéficiant d'aucun mandat syndical. Une telle situation est contraire au statut général de la fonction publique d'Etat qui prévoit que les syndicats bénéficient, non pas de mises à disposition, mais de détachements, d'autorisations spéciales d'absence ou de décharges d'activité de service.

Enfin, 12 agents des services déconcentrés étaient mis à disposition de la Mutuelle générale des affaires sociales, ce qui revient à faire rémunérer par l'Etat des agents qui exercent des activités privées.

Le régime des rémunérations accessoires des agents de catégorie C

Le décret n° 50-1248 du 6 octobre 1950 a fixé le régime des indemnités horaires pour travaux supplémentaires appliqué aux agents de catégorie C.

En pratique, le ministère de l'emploi gère ces accessoires de salaire comme les indemnités forfaitaires des agents des catégories A et B : le mode de calcul repose sur une part fixe et sur des parts variables attribuées selon le grade, et non sur les heures supplémentaires effectuées.

Le principe, fondamental dans le droit de la fonction publique, du service fait est donc systématiquement méconnu en l'espèce.

Vos rapporteurs ont pu constater, à l'occasion de leurs déplacements au sein des services déconcentrés, que ce problème perdure.

Le décret de 1950 précité prévoit que l'indemnité horaires pour travaux supplémentaires est attribuée en fonction d'un nombre d'heures effectives de travaux supplémentaires. Elle ne peut donc être forfaitisée. Or, les circulaires ministérielles annuelles relatives aux modalités de gestion et de répartition des rémunérations accessoires font référence à une somme forfaitaire attribuée selon les mêmes modalités que pour les autres catégories d'agents 10 ( * ) .

Concrètement, le montant de la prime forfaitaire est ainsi " transformé " en heures supplémentaires, afin de respecter formellement les dispositions du décret de 1950, ce qui aboutit à attribuer aux agents de catégorie C un nombre d'heures supplémentaires considérable.

Le bulletin de paye ci-joint illustre le cas d'un adjoint administratif de la direction régionale d'Alsace qui aurait effectué 25 heures supplémentaires en décembre 1999 et en janvier 2000, et 22 heures supplémentaires en février 2000, sans compter deux heures de travail le dimanche en décembre 1999 !

Vos rapporteurs estiment qu'il n'est que temps de mettre un terme à ce système absurde, en adaptant un texte réglementaire vieux de plus de 50 ans.

La ministre de l'emploi et de la solidarité avait d'ailleurs appelé l'attention du ministre de la fonction publique, par un courrier en date du 24  juillet 1998, sur son souhait d'expérimenter dans l'ensemble de ses services la réforme de l'attribution des primes à l'attention des agents bénéficiant d'indemnités horaires pour travaux supplémentaires.

Toutefois, le ministre de la fonction publique, par un courrier du 11 septembre 1998, opposait une fin de non recevoir à cette proposition, arguant qu'il était prématuré de traiter cette question avant que M. Jacques Roché ne rende ses conclusions sur le temps de travail dans les fonctions publiques, et qu'une concertation ne soit engagée avec les syndicats sur le temps de travail et les heures supplémentaires. Le ministre proposait " non plus d'expérimenter mais de généraliser une nouvelle pratique dès le second semestre 1999 ".

Le rapport Roché a été rendu public en février 1999, les négociations en vue de parvenir à un accord national tendant à instituer les 35 heures dans la fonction publique ont échoué, mais le régime des indemnités des agents de catégorie C n'a toujours pas été réformé.

B.  ... RÉSULTERAIENT DE LA NÉCESSITÉ DE FAIRE FACE À LA PÉNURIE DES EFFECTIFS...

Le ministère de l'emploi fonde les dysfonctionnements relevés par la Cour des comptes dans la gestion de ses personnels sur la nécessité de recourir à des " expédients " rendus indispensables par la pénurie en effectifs dont il souffrait et qui l'empêchait d'assumer ses missions.

En réponse à vos rapporteurs, la DAGEMO a ainsi indiqué que, pour faire face à ses missions , " le ministère a été contraint, avec l'accord de la direction du Budget, de développer des recrutements d'agents sur crédits et sans supports en emplois ainsi que de faire appel à des mises à disposition par divers organismes, principalement l'ANPE et l'AFPA, situations qu'il a fallu régulariser par la suite ".

Cela a notamment été le cas des :

- coordonnateurs emploi-formation : ils avaient été recrutés sur des crédits d'intervention de la formation professionnelle en 1989 et 1990 afin de mettre en place le crédit formation individualisé ;

- 100 contractuels chargés, en 1993, de préparer et de suivre, en collaboration avec le service public de l'emploi, la réinsertion des personnes en contrat emploi-solidarité ;

- 100 contractuels recrutés en 1995 pour occuper la fonction de cadres pour l'emploi, adjoints aux commissaires pour l'emploi.

C. ... MAIS APPARTIENDRAIENT AU PASSÉ

Tant le ministère de l'emploi que celui des finances ont indiqué à vos rapporteurs que les situations irrégulières mises en exergue par le rapport particulier de la Cour des comptes, portant sur la période 1992 à 1995, ont trouvé une solution ou sont en voie de le faire.

1. Les solutions apportées...

La ministre de l'emploi et de la solidarité, dans sa réponse aux observations de la Cour des comptes insérée dans le rapport particulier de cette dernière consacré à La fonction publique de l'Etat , expose les efforts de régularisation entrepris afin de mettre un terme aux dysfonctionnements auxquels la gestion des personnels a donné lieu.

Cette régularisation a été entreprise à partir de 1997.

La situation des coordonnateurs emploi-formation a ainsi été régularisée. La ministre indique que " 400 CEF sont désormais rémunérés sur la base d'emplois budgétaires créés en loi de finances 1998 et 1999. Cette mesure a également permis d'intégrer les cadres pour l'emploi dont l'effectif résiduel au 1 er janvier 1999 est de trois ".

Quant aux agents vacataires, le plan de résorption de la précarité aura permis la titularisation de 81 agents à la fin de l'année 1999. La loi de finances pour 2000 a prévu l'inscription de 26 emplois, " ce qui est cependant encore insuffisant pour résorber totalement la précarité ".

La ministre ajoute qu' " une politique volontariste de résorption de la précarité a été poursuivie. Des instructions strictes ont été données aux services par note du 20 mars 1998 afin de mettre un terme aux pratiques génératrices de situations précaires. Par ailleurs, une présentation annuelle de l'évolution de ce dossier est effectuée en comité technique paritaire et permet de mesurer l'application de ces instructions. Il a été constaté la suppression du recours aux CES dans les services ".

La ministre souligne également que " les fonctions de secrétaire de coordonnateur emploi-formation sont pérennisées et leur situation sur les plans juridique et budgétaire est en phase de régularisation ".

Les irrégularités relevées en matière de mise à disposition d'agents auprès des organisations syndicales sont en voie de correction, " à l'exception de deux d'entre elles en cours d'examen ".

2. ...sont toutefois incomplètes

Il existe en effet des dossiers qui n'ont pas encore été régularisés.

La situation des 200 secrétaires de CEF, qui sont des agents de catégorie C, ne peut être régularisée que dans le cadre de la loi Perben. La direction du Budget avait ainsi accordé la transformation en emplois de 96 de ces contrats de secrétaires, ces dernières devant passer le concours administratif réservé de la loi Perben pour être titularisées. Toutefois, le ministère de la fonction publique s'est opposé à cette solution pour les secrétaires préalablement embauchées sur un contrat de droit privé. Suite à un recours, le tribunal administratif de Grenoble a décidé la requalification en contrat de droit public du contrat des agents concernés. La DAGEMO a obtenu, dans la loi de finances pour 2000, les crédits nécessaires à la rémunération de ces personnels, mais pas les postes budgétaires, alors qu'elle disposait déjà des crédits mais pas des postes. Cette question, qui concerne encore 140 agents, n'est donc toujours pas résolue et fait l'objet d'une saisine interministérielle.

Le cas de 110 agents recrutés au titre de l'assistance technique du Fonds social européen pose également problème. La ministre a rappelé " l'absence de cadre réglementaire adapté pour la gestion de ces crédits (interdiction de financer par le biais de postes de titulaires et recours à des recrutements assurés par l'intermédiaire d'organismes supports) ". Elle indique attendre du groupe de travail mis en place sur ce point, sous la présidence de la DATAR, " des propositions de solutions adaptées pour la gestion de la prochaine programmation européenne ".

C'est le cas également du régime indemnitaire des agents de catégorie C, exposé plus haut.

Elle a, enfin, insisté sur " la complexité [de la situation juridique des médecins rémunérés sur vacations intervenant dans les COTOREP] qui fait l'objet actuellement d'une étude approfondie par [ses] services ".

3. Les surnombres

La Cour des comptes avait mis en évidence l'existence de surnombres.

La DAGEMO a apporté à vos rapporteurs une explication de l'existence de ces surnombres qui tient en quatre points.

Ainsi les surnombres résulteraient de :

- la suppression d'emplois : à l'exception du collectif budgétaire de juillet 1986 où la totalité des emplois vacants a été supprimée, soit 24 emplois de catégorie A, 158 emplois de catégorie B, 354 emplois de catégorie C et 13 emplois de contractuels, les suppressions au titre des économies ou du redéploiement de crédits ont été effectuées en quasi-totalité sur les premiers grades de la catégorie D ;

- les transformations d'emplois : les délais d'élaboration des textes sur l'application du protocole Durafour aux contrôleurs du travail, liée à la fusion des corps de la formation professionnelle et du travail n'ont pas permis de reclasser les agents au cours de l'année de transformation des emplois ; la transformation des emplois de contrôleurs a commencé en 1995 alors que les textes réglementaires n'ont été publiés qu'en 1997 ;

- le plan de titularisation des contractuels des 4 ème et 3 ème catégories : la totalité des agents de ces catégories n'a pas réussi ou n'a pas souhaité passer l'examen professionnel ouvert ; or, les emplois de titulaires correspondants sont gagés ;

- le recrutement de contractuels sur postes gagés de titulaires : il s'agit d'assistants techniques FSE, d'une part : les instructions de la direction du Budget d'octobre 1997 prévoyaient la régularisation de la situation des personnels de l'assistance technique par leur prise en charge sur contrat type de l'Etat en gageant progressivement les emplois correspondants, la part du ministère de l'emploi étant fixée à 25 (23 postes sont actuellement gagés : 7 inspecteurs du travail et 16 contrôleurs) ; et de travailleurs handicapés, d'autre part : 27 emplois de titulaires sont actuellement gagés afin de permettre la rémunération des contractuels recrutés pour une durée d'un an éventuellement renouvelable avant titularisation.

La situation actuelle des surnombres

Deux corps connaissent actuellement des emplois en surnombre.

L'inspection de la formation professionnelle d'une part. L'intégration des inspecteurs de la formation professionnelle dans le corps de l'inspection du travail est en cours sur les emplois transformés au 1 er janvier 2000. Toutefois, l'examen d'intégration, ouvert pour 35 emplois d'inspecteurs du travail, n'a permis d'inscrire sur la liste des candidats admis que 24  inspecteurs de la formation professionnelle. Le surnombre au titre de ce grade sera donc de 11, auxquels il convient d'ajouter 2 agents détachés ne libérant pas l'emploi.

Les agents administratifs d'autre part. Un plan de transformation d'emplois d'agents en adjoints est en cours depuis 1999. La liste d'aptitude au titre de 1999 est complète. Mais le concours réservé de 1999 n'a pu avoir lieu qu'en février 2000, reportant d'autant les nominations. Les textes d'application pour 2000 n'ont pas encore été publiés, alors que 498 emplois du corps des adjoints administratifs sont gagés.

La DAGEMO a également indiqué à vos rapporteurs que des surnombres concernant 189 agents des services techniques allaient être résorbés en cours d'année. En effet, le budget 2000 a prévu la transformation d'emplois d'agents des services techniques en agents administratifs. La commission administrative paritaire devant examiner les demandes de détachement dans le corps des agents administratifs émanant d'agents des services techniques exerçant des fonctions administratives s'est réunie au début du deuxième trimestre.

Il convient de préciser que, tant que les commissions administratives paritaires compétentes pour décider des avancements dans un corps, ne se sont pas réunies, il existe des grades en surnombre.

Enfin, il subsiste des surnombres au sein des services, et cela pour au moins deux raisons :

- la mise en place et l'actualisation des effectifs de référence ont conduit à des surnombres dans les services pour lesquels l'allocation de moyens se trouvait diminuée, même si, en 2000, un lissage a été effectué afin de neutraliser les écarts relativement faibles ;

- la nomination sur place des candidats reçus aux concours internes ou sur liste d'aptitude de contrôleurs, soit 168 en 1998-99, et 64 en 2000, ou aux concours réservés dans le cadre de la résorption de l'emploi précaire, soit 53 en 1999, ont engendré des surnombres provisoires dans certains services.

Les surnombres sont résorbés, soit par le non-remplacement des agents quittant naturellement les cadres, soit par la non-création d'emplois qui serait normalement consécutive à la modification des effectifs de référence, comme cela a été le cas de l'emploi budgétaire ouvert dans chacune des directions départementales en 1999 au titre de la réduction du temps de travail.

II. UNE GESTION DES PERSONNELS ENCORE PERFECTIBLE

A. UNE GESTION TRÈS CENTRALISÉE

L'ensemble des personnels du ministère de l'emploi est géré depuis l'administration centrale, ce qui ne va pas sans poser de problèmes.

1. La détermination des effectifs de référence

Le ministère a mis en place des effectifs de référence en administration centrale et dans les services déconcentrés, en vue de favoriser une meilleure allocation des ressources mais aussi de rapprocher les effectifs réels des effectifs budgétaires.

En administration centrale, la répartition des effectifs de référence prend en compte la totalité des effectifs, qu'il s'agisse des effectifs budgétaires, sur crédits, des agents des services déconcentrés ou des agents mis à disposition. La répartition a été effectuée initialement de manière empirique à partir d'une situation historique constatée.

Le ministère a indiqué qu' " il n'a pas en effet été possible d'arrêter des critères précis à partir d'une analyse des charges, compte tenu des rôles et des attributions extrêmement différents des directions de l'administration centrale ". Une réflexion entre les directions serait toutefois actuellement en cours afin d'intégrer les créations ou les modifications d'emplois obtenues en loi de finances, en prenant en compte l'évolution des missions ainsi que les problèmes particuliers rencontrés.

Dans les services déconcentrés, le ministère s'est engagé, dès les années 1994-1995, dans la détermination d'un cadrage des effectifs en vue de faciliter la mobilité des agents mais aussi de mener une meilleure gestion et une politique plus qualitative des emplois. Des effectifs de référence déterminés sur la base des effectifs budgétaires ont été créés par direction, en prenant en compte un certain nombre d'indicateurs tels que la population, le nombre de demandeurs d'emplois, le nombre de dossiers COTOREP traités...

Une actualisation des effectifs a lieu tous les ans, dans le cadre d'un groupe de travail présidé par un directeur régional, afin de tenir compte de l'évolution des missions des services déconcentrés et des modifications d'emplois obtenues en loi de finances. Ainsi, pour 2000, ces effectifs de référence ont été actualisés en vue de privilégier les actions de contrôle de la formation professionnelle et de renforcer les sections d'inspection du travail qui connaissent une charge de travail accrue résultant essentiellement de la mise en place des 35 heures.

L'actualisation des effectifs de référence en 2000

Afin d'atteindre les objectifs que le ministère de l'emploi s'est assignés en 2000, les indicateurs de répartition de ses effectifs de référence ont été adaptés.

Pour les directions régionales : un emploi de chef de service du contrôle de la formation professionnelle a été ajouté aux fonctions spécifiques.

Indicateurs retenus et appliqués aux agents des catégories A, B et C :

- directions départementales de la région 1/7

- établissements 1/7

- salariés 1/7

- DEFM 1/7

- DEFM de moins de 25 ans 1/7

- organismes de formation. 2/7 70 %

- crédits CPER 2000-2006 30 %

Pour les directions départementales :

- séparation des critères afférents aux sections de ceux des autres missions, et affectation de moyens préalables : 2 agents de catégorie B et 1,5 agent de catégorie C pour 33.000 salariés, et réserve centrale de 0,5 agent de catégorie B et 0,5 agent de catégorie C par site détaché ;

- maintien de l'emploi de catégorie B attribué en 1999 au titre de la réduction du temps de travail ;

- autres missions : nouvelle prise en compte des COTOREP.

Indicateurs retenus :

- population active. pour 30 %

- sans emploi pour 30 %

chômeurs de longue durée 40 %

DEFM indemnisés 40 %

bénéficiaires du RMI 20 %

- établissements pour 20 %

+ de 50 salariés pour les A ; en totalité pour les B et les C

- dossiers COTOREP pour 10 %

- forfait pour 10 %

Des difficultés ont été rencontrées lors de la mise en place des effectifs de référence. Elles ont concerné :

- le choix d'indicateurs permettant de mesurer précisément les charges de travail réelles et ainsi de répartir au mieux les emplois budgétaires ; des critères tels que celui du nombre de dossiers traités n'ont pas été retenus car difficilement mesurables, alors que des critères plus facilement quantifiables et objectifs comme la population ou le nombre de demandeurs d'emploi l'ont été ; une actualisation annuelle de ces critères a lieu pour tenir compte de l'évolution des missions du ministère ;

- la nécessité de ne pas appliquer de manière rigide les indicateurs définis au risque de conduire à des suppressions de postes ou à des augmentations minimes ou au contraire importantes au sein d'une direction d'une année sur l'autre : c'est ainsi qu'en 2000, un lissage a été effectué avec pour objectif de neutraliser tout écart relativement faible et de limiter en conséquence l'ampleur maximale de l'ensemble des dotations ;

- la définition d'une méthode globale pour l'administration centrale compte tenu des attributions très différentes des directions.

Il convient de relever le caractère relativement technocratique et piloté depuis l'administration centrale de la définition des effectifs de référence.

Surtout, en l'état actuel, le ministère de l'emploi n'est pas en mesure de connaître précisément le nombre de ses fonctionnaires, faute d'un système de contrôle performant des emplois.

2. L'absence de réel contrôle des emplois

a) Le contrôle des emplois ne concerne pas le ministère de l'emploi...

Vos rapporteurs, au cours de leurs déplacements, se sont rendus à la trésorerie générale, où ils ont rencontré le trésorier-payeur général et le contrôleur financier en région. Il convient de rappeler que le contrôle financier déconcentré a été institué par le décret du 16 juillet 1996 et l'arrêté du 29 juillet 1996.

Ces derniers leur ont indiqué que le ministère de l'emploi n'était pas encore concerné par le contrôle des emplois mis en place par le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie.

La désinvolture de certains hauts fonctionnaires à l'égard de membres de la représentation nationale

Vos rapporteurs ont été vivement surpris de la désinvolture que certains hauts-fonctionnaires qu'ils ont rencontrés au cours de leurs déplacements ont manifestée à leur endroit.

Leur réticence à délivrer une information de qualité était manifeste, au regard du contenu des réponses écrites qu'ils ont apportées au questionnaire qui leur avait été préalablement adressé. L'un deux a même prétendu ne pas avoir reçu ce questionnaire. Le même a exprimé avec insistance son souhait de ne pas se rendre dans les locaux de la trésorerie générale, préférant s'en tenir à un entretien rapide avec vos rapporteurs dans les salons de la préfecture où ils avaient été aimablement conviés à déjeuner par le préfet.

Mais le sommet de cette désinvolture, qui a, en l'espèce, frôlé le mépris, a été atteint par un haut-fonctionnaire rencontré à Paris.

En effet, ce dernier, après avoir déclaré que ses services ne pouvaient contrôler les effectifs du ministère de l'emploi en raison de la centralisation de leur gestion au niveau de l'administration centrale, a pourtant bien dû reconnaître - mais la commission d'enquête du Sénat sur la gestion des personnels du ministère de l'éducation nationale l'avait déjà amplement démontré - qu'il ne pouvait connaître avec précision le nombre d'enseignants, dont la gestion est pourtant déconcentrée.

Après avoir longuement expliqué, en recourant parfois à des anecdotes personnelles sans rapport avec le sujet et dont vos rapporteurs s'interrogent encore sur la finalité, que " la paye des fonctionnaires n'était pas toujours correcte " et que " les rémunérations accessoires n'étaient pas toujours bien fondées ", il a fini par conclure sur l'absence d'irrégularités en la matière !

Il a ensuite raillé, devant des parlementaires précisément mandatés à cette fin, la volonté de connaître avec précision le nombre de fonctionnaires de l'Etat, les dépenses de la fonction publique, qui représentent plus de 40 % du budget de l'Etat, étant pourtant autorisées par le Parlement.

Estimant que les propos du ministre de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, M. Michel Sapin, qui avait récemment déclaré qu'il ne savait " même pas combien de personnes travaillaient pour l'Etat ", ne faisaient que colporter des rumeurs - vos rapporteurs lui ont rappelé que les rumeurs en question constituaient le coeur du récent rapport de la Cour des comptes sur la fonction publique de l'Etat - il a déclaré que ce rapport constituait " un tissu d'exagérations et d'approximations, indigne d'une grande institution ", laquelle, faut-il le rappeler, est chargée, en application de l'article 47 de la Constitution, d'assister le Parlement dans le contrôle de l'exécution des lois de finances, et dont on connaît la rigueur et la prudence dans l'analyse. Sans doute faut-il voir dans ces propos les rancoeurs d'un haut fonctionnaire appartenant à un corps dont la Cour des comptes n'a pas manqué de mettre en exergue les errements, l'extravagance des rémunérations en particulier.

Enfin, il a laissé sans réponse le questionnaire complémentaire que vos rapporteurs lui ont adressé.

En l'état actuel des choses, le contrôle des emplois n'est opérationnel que pour les personnels du ministère de l'équipement ; il n'est que partiellement opérationnel pour le ministère de l'éducation nationale.

En effet, la gestion des personnels titulaires du ministère de l'emploi n'est pas déconcentrée et reste de la responsabilité de l'administration centrale. Il n'y a donc pas de contrôle des emplois au niveau de la région de la part des services de la trésorerie générale.

L'affectation administrative est prononcée par le ministère, et le département informatique prend en charge en tant que comptable la paye des agents. Le contrôle financier en région n'est à aucun moment saisi pour ces affectations. Les actes juridiques sont élaborés et visés par le contrôleur financier central, et les crédits de rémunération sont délégués après un engagement réalisé par l'administration centrale. Seul le contrôleur financier central intervient en matière de contrôle financier.

Ainsi, la connaissance des " pertes en ligne ", c'est-à-dire les fonctionnaires bénéficiant d'une mise à disposition, d'un détachement ou d'une décharge syndicale, ne peut être appréciée compte tenu du mode de gestion centralisée. Il en est de même des surnombres qui ne sont pas identifiés au niveau local. Ainsi, puisqu'il n'existe pas de délégation d'emploi, comme c'est le cas pour les agents du ministère de l'éducation nationale, il ne peut y avoir mise en relation des effectifs réels et des effectifs budgétaires.

b) ... à l'exception de ses agents non titulaires

Il en va différemment, toutefois, pour les personnels non titulaires ou vacataires, en particulier les médecins de la COTOREP. Pour ces derniers, les recrutements sont effectués au niveau local et soumis au visa préalable du contrôle financier en région, ce dernier ayant été chargé par la circulaire de la direction du Budget du 28 septembre 1998 d'exercer le contrôle sur tous les non titulaires rémunérés sur crédits de l'ensemble des ministères.

A cette occasion est effectué un contrôle de la régularité de l'acte, du respect des dispositions régissant les emplois non titulaires de l'Etat et de la disponibilité des crédits (cf. les pièces ci-jointes). Il convient toutefois de noter que le nombre de personnes concernées est faible, et qu'elles sont recrutées pour des durées très brèves.

Le contrôle des emplois des agents non titulaires peut être l'occasion de relever certaines irrégularités comme le montre l'exemple de la région Rhône-Alpes, où le trésorier-payeur général a attiré l'attention du directeur départemental du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle sur la nécessité de donner pour base un emploi budgétaire à un agent chargé du ménage et de l'entretien des locaux 11 ( * ) .

• Le contrôle des rémunérations principales et accessoires des personnels relevant du ministère de l'emploi est effectué, comme pour l'ensemble des personnels de l'Etat, par le service liaison-rémunérations du département informatique de la trésorerie générale, dans le cadre réglementaire défini par le décret n° 65-845 du 4 octobre 1965 portant sur l'organisation de la paye des agents de l'Etat sans ordonnancement préalable.

Ce contrôle consiste à vérifier la présence des pièces justificatives pour chaque demande de création ou de modification des éléments de la rémunération d'un agent.

En effet, l'ordonnateur transmet au comptable plusieurs documents :

- des documents de liaison, soit sur support papier soit sur support informatique : fiches de prise en charge, fiches de liaison (cf. la fiche de liaison ci-contre) pour prendre en compte les modifications à apporter à la situation des agents dans les fichiers de paye telles que les avancements d'échelon, les mutations, les mises à la retraite...

- les pièces justificatives prévues par la circulaire de la direction du Budget du 12 avril 1995 fixant la nomenclature des pièces justificatives des dépenses de l'Etat : arrêté de nomination (cf. l'arrêté de nomination ci-contre), décision d'attribution et état liquidatif pour les indemnités...

Le contrôle sur les rémunérations principales s'exerce essentiellement lors de la prise en charge de l'agent (statut, cotisations sociales, quotité de temps de travail, imputation budgétaire...).

Lors de la mise en paiement des rémunérations accessoires, le service s'assure que les informations présentées sur les pièces justificatives sont conformes à la réglementation en vigueur (conditions d'attribution, respect des plafonds, taux, incompatibilités entre certaines indemnités...).

Le comptable transmet chaque fin de mois aux ordonnateurs les situations de la paye, de telle sorte que ces derniers peuvent mettre à jour leur compatibilité administrative au vu du récapitulatif des sommes mises en paiement au cours du mois et suivre la consommation de leurs crédits. Au total, il apparaît qu'une trésorerie générale ne connaît que le nombre d'agents qu'elle rémunère (cf. le récapitulatif ci-contre) mais qui ne correspond pas nécessairement au nombre de fonctionnaires au sens budgétaire du terme, puisqu'il n'y a pas mise en relation entre les effectifs réels et les emplois budgétaires.

Vos rapporteurs estiment par conséquent qu'il est indispensable d'étendre à l'ensemble des agents de l'Etat, et donc aussi à ceux du ministère de l'emploi, le contrôle des emplois qui, seul, peut lui permettre de connaître le nombre de ses agents.

B. ACCÉLÉRER LA RÉFORME DE L'ÉTAT AU MINISTÈRE DE L'EMPLOI

Le ministère de l'emploi a élaboré un programme pluriannuel de modernisation (PPM) à l'automne 1999, conformément aux conclusions du comité interministériel à la réforme de l'Etat du 13 juillet 1999.

Ce document, communiqué à vos rapporteurs, est fort intéressant et montre la grande lucidité du ministère sur les faiblesses de son organisation.

Vos rapporteurs se permettent de renvoyer à ce document.

Le programme pluriannuel de modernisation du ministère de l'emploi

Lors du séminaire des directeurs d'administration centrale et des établissements publics des 25 et 26 janvier 1999 consacré à l'analyse des missions de l'Etat en matière de travail, d'emploi et de formation professionnelle, la réflexion a été engagée autour de l'élément constitutif du service public qu'est la satisfaction des besoins des usagers.

Sept missions ont ainsi été dégagées :

- le développement de l'emploi ;

- l'entretien et le développement des compétences et des qualifications ;

- la fluidité du marché du travail ;

- la lutte contre la sélectivité du marché du travail ;

- la protection dynamique des salariés ;

- la stimulation du dialogue social ;

- l'information et l'accueil des publics.

Ces missions structurent le sens des interventions du ministère, ses actions et ses objectifs.

Cinq axes stratégiques prioritaires ont été dégagés : adapter l'action du ministère aux besoins des usagers ; renforcer et professionnaliser le contrôle ; promouvoir un management par objectif ; assurer un pilotage partagé et coordonné ; développer une capacité d'anticipation et d'influence.

Vos rapporteurs souhaitent toutefois insister sur trois axes de réforme qu'ils estiment prioritaires, notamment au regard de leurs observations consécutives aux déplacements qu'ils ont effectués au sein de services déconcentrés du ministère de l'emploi.

1. Accroître la rémunération au mérite

Vos rapporteurs estiment que, d'une manière générale, il convient d'accroître au sein de la fonction publique les éléments de rémunération au mérite, ce qui ne peut que dynamiser la gestion des personnels et améliorer la qualité du service rendu aux usagers.

Or, cette orientation ne semble pas retenue au ministère de l'emploi, comme le montre l'annexe à une note de service adressée par la DAGEMO aux services déconcentrés, reproduite ci-contre.

Cette annexe à la note de service DAGEMO/BGRH 2000-01 concerne les modalités de versement des indemnités.

Elle précise que " les abattements [au versement des rémunérations accessoires] pour des absences justifiées liées à l'un des motifs ci-après sont à proscrire ". Or, ces motifs sont extrêmement nombreux et couvrent, en fait, la quasi-totalité des cas d'absences, comme l'ont d'ailleurs regretté les responsables des services déconcentrés que vos rapporteurs ont rencontrés.

La DAGEMO a indiqué que les chefs de service devaient attribuer les indemnités de façon réaliste, au vu de l'examen objectif de la façon de servir des agents.

Vos rapporteurs estiment que cette indication n'est guère satisfaisante, dans la mesure où l'administration centrale ne peut s'en remettre à la responsabilité des chefs de service, alors que, par note de service, elle les invite à limiter au maximum l'individualisation de la rémunération grâce à la modulation des indemnités, dans un souci évident de paix sociale, les organisations syndicales étant traditionnellement peu favorables à la rémunération au mérite.

2. S'accorder sur une définition de l'absentéisme des agents

Il convient de constater qu'il n'existe pas de définition de l'absentéisme des agents au ministère de l'emploi.

Or, vos rapporteurs, au cours de leurs déplacements, ont constaté que certaines catégories de personnels présentaient parfois de nombreuses absences dont la justification est pour le moins douteuse.

L'absence de définition de l'absentéisme rend délicate toute tentative de comptabilisation ainsi que toute comparaison entre services déconcentrés.

Toutefois, quelques chiffres sont éloquents.

Ainsi, à la direction régionale d'Ile-de-France, l'ensemble des agents a totalisé 1.538,5 jours d'absence en 1999, dont 984 jours au titre du congé maladie " ordinaire ", soit un taux d'absentéisme de près de 5 %. Il convient également de mentionner 20 jours au titre d'une " absence exceptionnelle " et 133 jours au titre d'un " congé exceptionnel ", sans que de plus amples précisions ne soient données.

Pour le début de l'année 2000, un agent a été absent une journée sans qu'il ne produise le moindre certificat médical.

Du reste, le directeur régional a précisé que ces chiffres étaient à prendre avec beaucoup de précaution car ils ne concernent que les absences réellement comptabilisées, certains chefs de service fermant les yeux sur des absences peu ou pas motivées.

En région Midi-Pyrénées, sur 10.080 jours de présence théoriques au mois de janvier 2000 (21 jours ouvrés x 480 agents), 983 n'ont pas été assurés, soit un taux d'absentéisme de 9,7 %. Sur ce total, ont été accordées des " autorisations d'absences " représentant 99 jours.

Dans le Nord-Pas-de-Calais, le taux d'absentéisme en 1999 s'est élevé, au titre des seules absences pour " maladie ordinaire ", à 7,45 % à la direction régionale, à 5,57 % à la direction départementale Nord-Lille, à 9,76 % à la direction départementale Nord-Valenciennes, et à 2,40 % à celle du Pas-de-Calais. Toutefois, le détail de ces jours d'absence n'a pas été présenté, de même que leur motivation.

La direction régionale d'Alsace a présenté ses informations de manière tout à fait intéressante, sous la forme d'un tableau établissant un taux de dépassement des droits à congé pour l'année 1999.

Il apparaît ainsi que ce taux de dépassement s'établit à 19,85 % pour les agents de catégorie A, à 28,16 % pour les agents de catégorie B et à 57,40 % pour ceux de catégorie C ! Ces derniers ont ainsi présenté 201 jours d'absence supplémentaires par rapport aux 350 jours de congé dont ils bénéficient en vertu de la réglementation en vigueur.

3. Développer la gestion prévisionnelle des effectifs

La DAGEMO a indiqué à vos rapporteurs que " le ministère de l'emploi et de la solidarité ne dispose pas à ce jour d'un outil informatique performant permettant de suivre et de gérer au mieux ses agents ".

Lors de son audition au Sénat, Mme Jeannine Barberye, inspecteur général des affaires sociales, a d'ailleurs indiqué que certains instruments de gestion restaient archaïques, la gestion manuelle étant encore fréquente, de telle sorte que les dossiers des personnels sont parfois traités de manière erratique et aléatoire. Les services doivent donc parfois recourir à des " bricolages " internes.

Cette situation se traduit, par exemple, par une très grande difficulté d'anticiper les départs des agents et de les remplacer immédiatement : un poste peut ainsi rester vacant pendant six mois, voire un an.

Il convient toutefois de noter que ce phénomène est aussi largement lié à l' " image " que peuvent avoir certaines régions françaises auprès des agents. Ainsi, le Nord-Pas-de-Calais, bien qu'il ne soit pas mal loti en termes d'effectifs de référence, éprouve de réelles difficultés à pourvoir l'ensemble de ses postes, alors que d'autres régions, plus méridionales, présentent des sureffectifs. La mobilité des agents doit donc être encouragée.

Le ministère a toutefois passé, à la fin de l'année 1999, un marché d'environ 35  millions de francs, avec un prestataire de services en vue de se doter d'un nouveau système de gestion des ressources humaines dénommé " Synergie RH ", destiné à remplacer le système actuel.

Le projet Synergie RH

Pour répondre au besoin de disposer d'un outil de gestion plus intégré et évolutif, le ministère de l'emploi a acquis en septembre 1999, suite à une procédure d'appel d'offre sur performance, la licence d'utilisation d'un progiciel de gestion des ressources humaines.

Il s'agit du logiciel PeopleSoft dans sa version 7.5 secteur public. Son adaptation aux besoins du ministère et sa mise en service nécessitent trois ans de travail en collaboration avec des acteurs diversifiés, qu'ils soient internes à l'administration tels que des gestionnaires de l'administration centrale ou des services déconcentrés, ou externes tels que des sociétés de service chargées d'accompagner le projet.

Le projet Synergie RH poursuit plusieurs objectifs :

- mettre en oeuvre l'ensemble des fonctions assurées par le système actuel ainsi que les nouvelles fonctions identifiées dans le noyau dur dans le cadre des obligations réglementaires et statutaires de la fonction publique d'Etat ;

- permettre la prise en charge progressive des évolutions organisationnelles, notamment la déconcentration de la décision et de la saisie des actes de gestion ;

- assurer la gestion prévisionnelle des effectifs et des crédits de personnel à l'aide des différents outils de simulation offerts par les progiciels ;

- assurer le pilotage de la fonction RH par la production automatique de tableaux de bord à l'aide d'instruments maîtrisables par le ministère ;

- permettre la génération automatique des éléments de rémunération à destination des trésoreries générales ;

- améliorer les méthodes de travail en évitant les doubles saisies et les incohérences qui en résultent ; le progiciel retenu permet notamment les importations et les exportations de données, en provenance ou vers les outils bureautiques standards.

Le contour fonctionnel de Synergie RH s'organise autour de la gestion des éléments suivants :

- données élémentaires individuelles : identifiant, données personnelles, données familiales, pièces justificatives ;

- éléments de carrière, des titulaires comme des contractuels ;

- absences et congés de toute nature, avec ou sans impact sur les rémunérations et sur la carrière ;

- grands moments de la carrière : titularisation, avancement, reclassement ;

- structures, affectations et mutations ;

- effectifs, supports budgétaires issus de la loi de finances et crédits de rémunération correspondants ; extraction de la base de données réelles de gestion nécessaires à la gestion prévisionnelle des crédits et des emplois sous forme de requêtes exportables sur des outils de gestion externes ;

- éléments de rémunération et alimentation automatisée des trésoreries générales des éléments de la paye ;

- appel de cotisation des agents détachés ;

- en matière d'action sociale, extraction d'informations vers des outils externes ;

- mise à disposition d'outils de gestion prévisionnelle des carrières et des compétences.

L'organisation du projet s'articule autour d'une équipe de projet chargée d'exprimer les besoins du ministère et de suivre la réalisation de l'intégration. Elle est constituée de représentants de la DAGEMO et de la DGAPB, qui gère les personnels de la partie solidarité du ministère, aidés par un prestataire extérieur chargé d'assister le ministère dans ses fonctions de maîtrise d'ouvrage. La charge des travaux d'intégration et d'adaptation du logiciel aux besoins spécifiques du ministère est assurée par un second prestataire.

L'implantation de ce nouveau dispositif est prévue pour 2001-2002.

La DAGEMO considère ainsi que le progiciel retenu permettra notamment d'assurer la gestion prévisionnelle des effectifs et des crédits de personnels.

Il convient toutefois de constater que peu d'agents de catégorie A sont intéressés par la gestion du personnel, préférant être affectés aux missions qui se trouvent au coeur de l'activité du ministère.

Vos rapporteurs considèrent toutefois que le vaste travail de définition des compétences entrepris au ministère de l'emploi est susceptible d'apporter de réelles améliorations à la gestion prévisionnelle de ses effectifs.

En outre, il conviendrait de donner davantage de souplesse et d'autonomie de gestion aux services déconcentrés, en matière de recrutement par exemple. De nombreux responsables de services déconcentrés se sont ainsi montré très intéressés par l'organisation de concours au niveau local, en particulier pour les agents de catégorie C.

EXAMEN EN COMMISSION

Au cours de sa séance du jeudi 2 novembre 2000, la commission des finances a entendu une communication de MM. Joseph Ostermann et Gérard Braun sur leur mission de contrôle relative à la situation, la gestion et les rémunérations des personnels du ministère de l'emploi.

Après que MM. Joseph Ostermann et Gérard Braun, rapporteurs, eurent présenté leurs conclusions, un débat s'est engagé.

M. Philippe Adnot a estimé qu'il était nécessaire, selon lui, d'ajouter à l'ensemble des personnels intervenant dans la mise en oeuvre de la politique de l'emploi, les effectifs des associations intervenant dans ce secteur, dont la création est souvent suggérée par le directeur régional ou départemental du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle, et auxquelles les collectivités territoriales versent des subventions. Il a considéré qu'il n'était pas condamnable pour un ministère de recruter des personnels contractuels, sauf si cela a pour objectif de masquer la progression réelle des effectifs.

M. Yann Gaillard s'est étonné de ce que l'absentéisme de certaines catégories de fonctionnaires soit aussi important et a souhaité obtenir des informations complémentaires. Il a déclaré partager l'analyse des rapporteurs concernant le malaise de l'inspection du travail, notant toutefois que ce malaise résultait de l'inadaptation de ces agents aux réalités sociales, rappelant que les inspecteurs du travail avaient été en conflit avec Martine Aubry et qu'ils prétendent échapper à toute autorité hiérarchique. Il a déploré la complexité croissante de la réglementation qui pose des problèmes aux services de l'Etat eux-mêmes. Enfin, il a rappelé que les ministères sociaux avaient très longtemps disposé de moyens extrêmement limités.

M. Alain Lambert, président , a considéré que, en raison d'un chômage toujours important dans notre pays, les services du ministère de l'emploi devaient être gérés de façon exemplaire. Il a estimé que l'inspection du travail avait souvent une conception extensive de ses compétences et qu'elle tendait à s'ériger en instance quasi-juridictionnelle. Puis il a souhaité obtenir des informations complémentaires sur les difficultés d'adaptation des services de l'Etat au passage des entreprises aux 35 heures, ainsi que sur les personnels du ministère mis à disposition.

M. Gérard Braun, rapporteur , a expliqué que le malaise de l'inspection du travail provenait de difficultés d'adaptation au changement d'orientation de leur administration, passée du contrôle de la législation du travail et de la sanction de sa transgression à la promotion de l'emploi. Il a indiqué que, au ministère de l'emploi, il n'existait pas de définition du taux d'absentéisme de ses agents. Des chefs de service rencontrés lui ont indiqué que certains agents, ceux de catégorie C notamment, pouvaient présenter un taux de dépassement des droits à congé annuel considérable, même si ces situations diffèrent en fonction de la personnalité du chef de service. Enfin, il a rappelé que, afin de contourner le principe consistant, à partir du milieu des années 1990, à réduire le nombre d'agents de l'administration centrale, environ 70 fonctionnaires de cette dernière ont été statutairement affectés dans les services déconcentrés d'Ile de France, alors que, en réalité, ils continuaient d'exercer leur activité à l'administration centrale.

M. Joseph Ostermann, rapporteur, a ajouté que le système des primes était géré de manière excessivement rigide, donnant de ce fait peu de marge aux chefs de service pour rémunérer leurs agents au mérite. Il a également rappelé que l'ensemble des personnels rencontrés au cours de ses déplacements s'était plaint de la lourdeur du travail engendré par la mise en oeuvre de la législation sur la réduction du temps de travail, qui se fait au détriment d'autres tâches, pourtant essentielles, du ministère. De surcroît, ces difficultés risquent d'être plus grandes encore au moment du passage des petites et moyennes entreprises aux 35 heures.

La commission a alors donné acte aux rapporteurs de leur communication et a décidé d'autoriser la publication de leurs conclusions sous la forme d'un rapport d'information.

LISTE DES ANNEXES

Pages

Annexe I

Personnes auditionnées par les rapporteurs au Sénat

123

Annexe II

Comptes-rendus des auditions

125

Annexe III

Personnes rencontrées par les rapporteurs au cours de leurs déplacements dans les services déconcentrés

179

Annexe IV

Situation des effectifs de l'administration centrale

181

Annexe V

Situation des effectifs des services déconcentrés

183

Annexe VI

Situation des effectifs par catégorie et par région

185

Annexe VII

Instruction ministérielle du 17 janvier 1995 relative à l'organisation des services déconcentrés

191

Annexe VIII

Lettre du secrétaire d'Etat au Budget du 19 octobre 1999 portant autorisation du déplafonnement des indemnités à l'administration centrale

199

Annexe IX

Circulaire ministérielle du 29 septembre 1999 relative aux moyens en personnels dans le budget 2000


201

Annexe X

Circulaire ministérielle du 28 janvier 2000 relative aux effectifs des services déconcentrés

205

Annexe XI

Lettre du directeur de cabinet de la ministre de l'emploi du 23 avril 1999 relative à la programmation pluriannuelle des effectifs

211

Annexe XII

Lettre de la ministre de l'emploi du 4 janvier 1999 relative à la gestion des heures supplémentaires des agents de catégorie C

215

Annexe XIII

Lettre du Trésorier-Payeur général de la région Rhône-Alpes du 20 mars 2000 relative au contrôle des emplois des agents non titulaires

217

ANNEXE I


Personnes auditionnées par les rapporteurs au Sénat

Pages

Mercredi 23 février 2000

M. Christian Rollet, chef de l'Inspection générale des affaires sociales, et Mme Jeannine Barberye, inspecteur général

125

Mercredi 8 mars 2000

M. Jean-Pierre Morelle, contrôleur financier au ministère de l'emploi et de la solidarité (section emploi)

Mme Marie-Caroline Bonnet-Galzy, directeur de la direction de l'administration générale et de la modernisation des services au ministère de l'emploi et de la solidarité

130

137

Mardi 14 mars 2000

M. Michel Bernard, directeur général de l'Agence nationale pour l'emploi

M. Georges Capdeboscq, conseiller-maître à la Cour des comptes, et M. Didier Guédon, conseiller référendaire

144

150

Mardi 28 mars 2000

M. Gilbert Hyvernat, directeur général de l'Association nationale pour la formation professionnelle des adultes

155

Mercredi 29 mars 2000

M. Didier Banquy, sous-directeur de la 6 ème sous-direction du Budget du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie

M. Dominique-Jean Chertier, directeur général de l'Union nationale pour l'emploi dans l'industrie et le commerce

160

164

Mercredi 10 mai 2000

M. André Barbaroux, directeur général du Centre national pour l'aménagement des structures des exploitations agricoles

168

Mardi 4 juillet 2000

M. Bernard Grassi, inspecteur du travail, président de l'association Villermé

173

ANNEXE II


Comptes-rendus des auditions

Christian ROLLET, chef de l'Inspection générale des affaires sociales, accompagné de Mme Jeannine BARBERYE,
inspecteur général
- Mercredi 23 février 2000 -

M. Christian Rollet a rappelé que les missions de l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) étaient fixées par la loi du 28 mai 1996, qui trouve son origine indirecte dans une initiative sénatoriale. Son article 42-1 prévoit que l'IGAS est chargée de contrôler et d'évaluer la mise en oeuvre des politiques publiques, dans le domaine de la sécurité sociale et de la santé, ainsi que du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle. Son champ de compétences est donc extrêmement large.

Un arrêté ministériel précise que certains inspecteurs sont chargés d'apprécier la manière de servir des chefs des services déconcentrés, c'est-à-dire les directeurs régionaux et départementaux du ministère de l'emploi et de la solidarité. Si la notation de ces personnels d'encadrement est une compétence du directeur des ressources humaines du ministère, l'IGAS participe toutefois au processus de leur notation et promotion. Les inspecteurs concernés s'entretiennent d'ailleurs chaque année avec l'ensemble des directeurs des services déconcentrés.

L'IGAS dispose, depuis le 1 er janvier 2000, de 105 emplois budgétaires d'inspecteurs, au lieu de 101 avant cette date. Il convient d'y ajouter 25 personnels administratifs. La seule ligne budgétaire individualisée au profit de l'IGAS concerne les frais de déplacement des inspecteurs, soit 2,09 millions de francs inscrits au chapitre 34-98 article 30 du budget de l'emploi. Les autres crédits ne sont pas isolés, l'IGAS bénéficiant de dotations inscrites sur plusieurs lignes de crédits du ministère. En effet, elle ne bénéficie pas de l'autonomie de gestion, ses personnels, notamment, étant gérés par la direction de l'administration générale, du personnel et du budget (DAGPB) du ministère. Toutefois, une modification des statuts de l'IGAS est en projet, afin de lui donner une autonomie dans la gestion du corps, mais non sur le plan financier.

M. Joseph Ostermann a voulu savoir si cette situation était source de difficultés pour l'IGAS dans l'accomplissement de ses missions.

M. Christian Rollet a estimé que ce n'était pas le cas, même si la gestion d'une inspection générale présente des spécificités, tenant notamment à la forte mobilité de ses membres, environ 25 % d'entre eux quittant ou réintégrant chaque année l'inspection. Il a toutefois jugé indispensable cet état de fait, gage de diversification des tâches des inspecteurs et de leur bonne connaissance des administrations qu'ils seront amenés, par la suite, à contrôler et évaluer. Il s'est cependant déclaré très favorable à l'autonomie de gestion envisagée.

Il a indiqué qu'environ 85 % de l'activité de l'IGAS relevait de saisines décidées en fonction de sujets d'actualité. Elle consacre, par conséquent, le reste de son temps à l'exécution du programme de travail qu'elle propose au ministre. Cette spécificité explique que ses membres doivent faire preuve de disponibilité et de réactivité, ce qui peut toutefois les amener à moins s'investir dans une mission en cours. A la différence de la Cour des comptes, l'IGAS ne peut s'autosaisir, ni consacrer la plus grande part de son activité à accomplir un programme de travail. Elle est, en revanche, amenée à rendre plus rapidement ses conclusions.

M. Joseph Ostermann a voulu savoir si un préfet pouvait saisir l'IGAS d'un problème porté à sa connaissance.

M. Christian Rollet a répondu que, formellement, la saisine de l'IGAS était seulement ministérielle, précisant que tout ministre pouvait la saisir, en raison de sa vocation interministérielle. Il a toutefois ajouté que, en pratique, l'IGAS nouait des relations avec les préfets, en amont d'une inspection qui ne peut être décidée que par le ministre.

M. Joseph Ostermann s'est interrogé sur l'existence d'inspecteurs spécialisés.

M. Christian Rollet a considéré que l'IGAS bénéficiait, sur ce point, d'une organisation originale, associant des généralistes et des professionnels spécialisés dans un secteur précis. Cette situation résulte, d'une part, de la fusion, opérée en 1990, des trois inspections, de la santé, de la sécurité sociale, et du travail, en IGAS, et, d'autre part, des modalités de recrutement des membres de cette dernière, les anciens élèves de l'Ecole nationale d'administration constituant les généralistes, et le recrutement au tour extérieur, qui fait de l'IGAS l'inspection générale la plus ouverte aux fonctionnaires provenant d'autres corps, permettant de bénéficier de spécialistes. Par ailleurs, les missions d'inspection sont conduites, le plus souvent, par des équipes mixtes, comprenant à la fois des généralistes et des spécialistes.

Abordant les conséquences des inspections de l'IGAS, il a indiqué qu'était constituée, au sein de cette dernière, une commission des suites, chargée de mesurer l'impact des rapports et des travaux de l'inspection. Environ une année après la publication du rapport, les représentants du service ayant fait l'objet d'un contrôle et les auteurs du rapport se réunissent pour faire le point sur les évolutions éventuellement intervenues depuis l'inspection. Cette réunion donne lieu à un compte-rendu écrit, adressé au ministre. Il convient toutefois de garder à l'esprit que l'IGAS ne dispose pas de pouvoirs de sanction et que les travaux de la commission des suites relèvent de l'information. Ils n'en sont pas moins particulièrement importants. Les observations ou recommandations de l'IGAS, en effet, se traduisent, notamment dans le cas d'une inspection ciblée sur une institution particulière, par de réelles évolutions et réformes. L'impact des rapports de l'IGAS, en revanche, est plus difficile à apprécier lorsqu'ils portent sur une politique publique générale, le gouvernement, principal destinataire du rapport, pouvant décider de ne pas lui donner suite. Enfin, toute mission d'inspection ne donne pas systématiquement lieu à la réunion de la commission des suites.

Mme Jeannine Barberye a indiqué avoir effectué plusieurs missions d'inspection dans les services déconcentrés du ministère de l'emploi, trois missions au cours de l'année 1998 et quatre autres en 1999. Ces missions, qui s'inscrivent dans le cadre du programme de travail annuel de l'IGAS, l'ont amené à prendre en compte la gestion des personnels, même si cette dernière n'était pas le thème central des inspections qu'elles a effectuées. Le management des équipes et l'adéquation entre les besoins des services et les moyens et capacités des personnels sont appréciés comme un aspect de l'efficacité du service et de la mise en oeuvre des politiques publiques. Toutefois, la gestion des personnels n'a pas constitué, à ce jour, un sujet d'inspection à part entière, dans ce secteur du ministère.

Elle a précisé que les inspections qu'elle avait effectuées s'attachaient à analyser les effectifs de référence d'un service, déterminés par la direction de l'administration générale et de la modernisation des services (DAGEMO) du ministère. Le contrôle porte notamment sur l'évolution à la fois des effectifs de référence, des effectifs présents, physiques et en équivalents temps plein, et des effectifs rémunérés, sur la composition du personnel par catégorie, sur l'examen des écarts éventuellement observés entre ces données, et, surtout, sur les conséquences de ces différents paramètres sur la mise en oeuvre d'une politique publique. En revanche, ces inspections n'ont pas porté sur la gestion financière des personnels, à la différence des travaux de la Cour des comptes.

M. Christian Rollet a précisé qu'il serait tout à fait possible que l'IGAS soit chargée d'une mission générale d'évaluation de la gestion des personnels. Par exemple, elle a été amenée récemment à évaluer le service des ressources humaines de la DAGPB.

Mme Jeannine Barberye a expliqué que l'IGAS, sur ces sujets, était attentive à quatre éléments : les rémunérations accessoires, c'est-à-dire les primes, ainsi que l'évaluation, la notation et la formation des personnels. Le taux d'opérationalité des agents, notamment, est examiné avec attention, en particulier la pertinence de l'organisation du service, l'absentéisme des agents ou leur respect des horaires. Il convient toutefois de constater que ces questions ne sont généralement pas prédominantes dans les préoccupations des responsables des services.

Elle a pourtant constaté qu'il existait des décalages permanents entre les effectifs de référence et les effectifs présents au sein des services, même si ces écarts ne prennent pas de proportions inquiétantes, sauf dans certaines directions comme en Seine-Saint-Denis. Elle a toutefois indiqué que les écarts observés entre les effectifs de référence et les effectifs " logés ", c'est-à-dire présents au sein des services, s'établissaient couramment à 20 %, en raison notamment du nombre conséquent de personnels du secteur solidarité du ministère travaillant dans les services des COTOREP. Par ailleurs, il apparaît que des personnels rémunérés par le CNASEA travaillent effectivement pour la gestion des interventions du Fonds social européen. Elle a également indiqué qu'il existe des mises à disposition, celles-ci étant apparues généralement justifiées par les besoins des services à rendre, par exemple dans les centres interministériels de renseignements administratifs (CIRA).

Elle a toutefois affirmé ne pas avoir rencontré de dysfonctionnements majeurs, et a estimé excessive l'affirmation selon laquelle le ministère ne connaîtrait pas précisément le nombre de ses agents. Elle a rappelé que la période couverte par le rapport de la Cour des comptes sur la fonction publique se terminait en 1996, alors que les contrôles de l'IGAS ont été effectués en 1998 et 1999, et a considéré que la DAGEMO, au cours de cette période, avait apporté de réelles améliorations à la gestion des personnels.

M. Christian Rollet a jugé que la gestion comptable des personnels n'était pas le problème le plus délicat auquel sont confrontés les services du ministère de l'emploi. Il a notamment cité, outre les sous-effectifs, les difficultés à coordonner les sections de l'inspection du travail avec le fonctionnement d'ensemble des services déconcentrés, en raison de leur forte tradition d'autonomie.

Mme Jeannine Barberye a ajouté que le problème des sous-effectifs était récurrent, notamment en Ile-de-France : ainsi 15 postes étaient-ils vacants en 1999 à Paris, tandis que 25 % des postes de catégories A et B en Seine-Saint-Denis n'étaient pas pourvus en 1998. Par ailleurs, certains instruments de gestion apparaissent encore archaïques, la gestion manuelle étant encore fréquente, de telle sorte que les dossiers des personnels sont parfois traités de manière erratique et aléatoire. Afin de faire face à ces problèmes, les services doivent parfois recourir à des " bricolages " internes. Enfin, il peut exister des problèmes de personnes qui ne sont pas sans conséquences sur le bon fonctionnement du service.

M. Jean-Pierre MORELLE, contrôleur financier au ministère de l'emploi et de la solidarité (section emploi), accompagné de M. Alain Paulmier
- Mercredi 08 mars 2000 -

M. Jean-Pierre Morelle a rappelé que le contrôle des dépenses engagées avait été institué par une loi de 1922, votée à l'initiative du Parlement, le gouvernement et le ministère des finances de l'époque n'y étant guère favorables. Le contrôleur financier central, nommé par arrêté du ministre du budget, a pour mission de tenir, de façon contradictoire avec le service gestionnaire, une comptabilité des engagements de dépenses du ministère auprès duquel il est placé, et de viser préalablement les documents ayant une incidence financière (engagements des dépenses, ordonnances de paiement, marchés, conventions, circulaires, etc.), cette mission étant toutefois tombée en désuétude du fait de l'évolution du travail interministériel. Il contrôle également les établissements publics qui lui sont rattachés, ainsi que les associations qu'il a éventuellement créées.

M. Gérard Braun a voulu savoir si le contrôleur financier avait des collaborateurs.

M. Jean-Pierre Morelle a indiqué que le contrôleur financier est le seul fonctionnaire du ministère du budget en poste au contrôle financier central. Les autres fonctionnaires sont mis à sa disposition par le ministère contrôlé, soit, au total, 13 agents pour le ministère de l'emploi. Il s'agit d'un contrôle financier central de dimension assez réduite, celui du ministère de la défense par exemple, comptant environ 30 agents.

Il a expliqué qu'aucune dépense ne pouvait être réalisée sans un double visa du contrôleur financier central, celui portant sur l'engagement de la dépense et celui concernant l'ordonnance de paiement. Si, dans certains ministères, des actes peuvent peut-être échapper au visa du contrôleur financier, ce n'est pas le cas au ministère de l'emploi.

Il a précisé que trois agents du contrôle financier contrôlaient les actes de gestion concernant les personnels. Les dépenses de personnel sont extrêmement faibles au ministère de l'emploi, dont l'essentiel des dépenses est consacré aux interventions. Les dépenses de personnel ne représentent que 23 % des dépenses de fonctionnement et 2,3 % de l'ensemble du budget de l'emploi. Il a estimé que, d'une manière générale, le ministère de l'emploi dispose de peu de personnels pour des raisons essentiellement historiques. Conçu comme un ministère régalien chargé de faire respecter la législation du travail, il était faiblement doté en personnels. Mais l'explosion de ses missions, au début des années 1990, ne s'est pas accompagnée de créations d'emplois suffisantes.

M. Gérard Braun a voulu savoir si le contrôle financier central était organisé de la même façon dans tous les ministères, et quels étaient les effectifs du ministère de l'emploi.

M. Jean-Pierre Morelle a répondu que le contrôle financier central reposait sur les mêmes principes dans tous les départements ministériels, mais qu'il devait s'adapter à leurs spécificités, l'importance des effectifs et le poids des dépenses de personnel au ministère de l'éducation nationale par exemple.

Il a expliqué que la direction du Budget avait, depuis une dizaine d'années, initié une évolution du contrôle financier, de manière à le rendre plus performant. Ainsi, en matière d'emplois, une expérience a été menée, consistant à comparer les effectifs gérés par le ministère et ceux payés par la direction générale de la comptabilité publique, cette opération n'étant pas si simple au regard de la multitude des statuts et des corps existant au sein de la fonction publique, dont certains sont en voie d'extinction. Il est donc possible, désormais, d'effectuer un rapprochement mensuel des effectifs gérés et des effectifs rémunérés, par catégorie de fonctionnaires ou selon leur statut. Au ministère de l'emploi, ce rapprochement permet de constater un très faible écart, inférieur à 1 % de la totalité des emplois budgétaires. En outre, de tels écarts apparaissent, selon les mois, sur des catégories de personnels différentes : cette situation ne traduit donc pas l'existence d'un problème spécifique à un groupe de fonctionnaires, mais tient plutôt à des aléas de gestion. L'étape suivante, qui, elle, n'est pas encore franchie, pourrait consister à fournir les fichiers des personnels tenus par l'agence comptable au service gestionnaire pour vérifier la nomenclature, analyser les écarts et rectifier les erreurs, le contrôle financier central se limitant à un contrôle contradictoire a posteriori .

M. Alain Paulmier a précisé que le ministère de l'emploi comptait 10.115 emplois budgétaires, dont 927 en administration centrale, et 9.188 dans les services déconcentrés.

M. Joseph Ostermann a interrogé ses interlocuteurs sur leur sentiment à l'égard des observations contenues dans le rapport de la Cour des comptes sur la fonction publique de l'Etat.

M. Jean-Pierre Morelle a considéré que les critiques que la Cour des comptes avait formulées à propos de la gestion des personnels des services déconcentrés du ministère de l'emploi n'étaient pas exagérées, mais qu'elles appartenaient maintenant, pour l'essentiel, au passé, la période examinée par la Cour couvrant les années 1992 à 1995. Il est exact qu'à cette époque, qui correspond à une forte progression du chômage, le ministère n'avait pas les moyens en personnels de sa politique d'intervention. Il a ajouté que des éléments structurels venaient aggraver ce contexte difficile, en l'occurrence l'extrême difficulté de l'Etat à supprimer des postes de fonctionnaires et à redéployer les personnels entre les départements ministériels. Le ministère de l'emploi a donc dû faire face à cette situation par des vagues de recrutements successives au sein de ses services déconcentrés : ainsi, 100  postes de chargés de mission contrats emploi-solidarité ont-ils été inscrits au budget, alors que la création de 100 postes de cadres pour l'emploi a été décidée sans que les crédits correspondants ne soient " budgétés ". Par ailleurs, 400 coordonnateurs emploi-formation, ainsi que 200 secrétaires, ont été rémunérés, non sur la base d'emplois budgétaires, mais sur des crédits d'intervention. Il a toutefois considéré que ces cas appartenaient au passé, celui des coordonnateurs emploi-formation ayant été régularisé en 1998 et 1999, tandis que celui des secrétaires est en cours en 2000. Il a ajouté qu'il était toujours possible que subsistent quelques contractuels payés sur des crédits d'intervention, notamment par le biais d'associations subventionnées par le ministère, mais que cette situation était difficile à apprécier, faute de remontées d'information. Par ailleurs, des personnes en contrat emploi-solidarité ont pu occuper des postes du ministère, alors que telle n'était évidemment pas leur vocation d'origine, parce que des associations embauchant des CES ont mis ces derniers à disposition du ministère de manière irrégulière.

M. Gérard Braun s'est enquis de la situation des emplois-jeunes.

M. Jean-Pierre Morelle a rappelé que le ministère de l'emploi avait conduit une très forte campagne de promotion de ce dispositif, notamment auprès des collectivités locales et des associations, mais a assuré qu'à sa connaissance, aucun emploi du ministère n'était occupé par un emploi-jeune.

M. Gérard Braun a reconnu ne pas bien comprendre la raison pour laquelle l'Etat ne connaissait pas parfaitement le nombre de ses fonctionnaires puisqu'il les paie.

M. Jean-Pierre Morelle a indiqué que les fonctionnaires étaient payés par la Paierie générale du Trésor et, en région, par les départements informatiques du Trésor. Il a toutefois insisté sur la difficulté qu'il y a à connaître exactement le nombre de fonctionnaires en raison des approches différentes retenues par le ministère des finances et par celui qui gère les effectifs. Les fichiers tenus par les agences comptables sont très précis mais ne prennent en considération que les emplois payés, occupés à un moment donné et pour une quantité de travail et un indice. Ces derniers ne correspondent pas parfaitement à la réalité des effectifs présents au sein des services au même moment. Il existe en permanence des changements qui modifient les données budgétaires détenues par les agences comptables (promotions, retraites, recrutements, temps partiel, etc.) de par les décalages de gestion.

M. Gérard Braun a voulu savoir si le contrôleur financier central exerçait un pouvoir hiérarchique sur les contrôleurs financiers en région.

M. Jean-Pierre Morelle a répondu par la négative, rappelant que le contrôle financier déconcentré avait été institué dans les années 1972-1973, mais qu'il avait fallu attendre 1995 pour la mise en place opérationnelle de contrôleurs financiers en région. Le contrôle financier local vise toutes les dépenses déconcentrées : fonctionnement, investissement et interventions par exemple.

M. Joseph Ostermann a voulu savoir si d'éventuelles irrégularités, constatées par le contrôleur financier local, étaient signalées au trésorier-payeur général ou au contrôleur financier central.

M. Jean-Pierre Morelle a répondu par l'affirmative. Il a précisé que les trésoriers-payeurs généraux pouvaient, le cas échéant, prendre en considération le contexte économique ou social local lorsqu'il s'agissait pour eux de donner suite à une irrégularité constatée, mais que leur approche est généralement rigoureuse et respectueuse des textes.

M. Gérard Braun s'est interrogé sur la nature du contrôle effectué par le contrôleur financier central, notamment sur la part faite à la régularité et à l'opportunité.

M. Jean-Pierre Morelle a rappelé que la loi de 1922 ne mentionnait que l'existence d'un contrôle de régularité. Il a toutefois estimé que, dans la pratique, il existait des cas-limites qui peuvent amener le contrôleur financier à donner des conseils ou à émettre des mises en garde aux ordonnateurs. Il peut arriver qu'il décide de différer le visa jusqu'à l'obtention de compléments d'informations. Il a ajouté que la Cour des comptes était destinataire des notes d'observation établies par le contrôleur financier central.

M. Gérard Braun s'est demandé si le contrôle portait uniquement sur les crédits correspondant aux emplois ou s'il concernait les emplois eux-mêmes.

M. Alain Paulmier a indiqué que le contrôle financier exerçait un véritable contrôle des emplois. La dotation budgétaire annuelle détermine le nombre d'emplois qu'il n'est pas possible de dépasser. En cours d'année, les différents arrêtés et actes relatifs à la gestion des personnels sont communiqués pour visa au contrôle financier, qui les compare, tant en ce qui concerne les effectifs que les grades, avec la nomenclature budgétaire. C'est ainsi qu'est assuré le suivi contradictoire des emplois avec le service gestionnaire. Il suit les effectifs en stock, mais aussi en flux, de manière à assurer un minimum de gestion prévisionnelle à court terme des emplois et à éviter l'apparition de surnombres en fin d'année. En revanche, le contrôle financier n'exerce pas de contrôle sur la répartition locale des moyens en personnels, cette activité relevant de la seule compétence du gestionnaire.

M. Gérard Braun a voulu savoir si le contrôle financier entretenait des relations suivies avec la DAGEMO.

M. Jean-Pierre Morelle a indiqué que des réunions se tenaient régulièrement entre le contrôle financier et la DAGEMO, l'ordre du jour pouvant concerner des questions d'ordre général ou être axé sur un sujet spécifique. Il a précisé que l'ensemble des actes individuels concernant la gestion des personnels de l'administration centrale étaient visés par le contrôleur financier, et que les actes de gestion mineurs concernant les personnels des services déconcentrés remontaient dans une base informatique centrale.

M. Joseph Ostermann a voulu connaître l'époque à laquelle avait été institué ce contrôle des emplois.

M. Alain Paulmier a expliqué que les vérifications effectuées en matière d'emplois existaient depuis très longtemps, mais que leurs modalités avaient changé, l'informatique ayant permis de réaliser des progrès notables en matière de connaissance des effectifs. Ainsi, avant 1994, les données sur les personnels étaient connues mensuellement, alors que, depuis cette date, elles peuvent l'être à chaque instant.

M. Gérard Braun s'est interrogé sur les problèmes les plus récurrents en matière de gestion des personnels.

M. Jean-Pierre Morelle a indiqué que les coordonnateurs emploi-formation avaient suscité des problèmes au moment de leur régularisation, en particulier parce qu'ils avaient été rémunérés, de façon disparate, sur des crédits d'intervention. La création de ces catégories de personnels avait dû faire l'objet d'un choix politique, sans doute arbitré ou toléré à haut niveau, sans qu'il n'en subsiste de traces écrites. Toutefois, leur situation a, depuis lors, été régularisée, les emplois nécessaires ayant été inscrits au budget.

M. Gérard Braun s'est enquis de la situation des personnels mis à disposition, détachés ou bénéficiant de décharges syndicales.

M. Jean-Pierre Morelle a observé que la loi de finances initiale pour 2000 a prévu une dotation de 12 millions de francs afin de régulariser la situation des personnels mis à disposition de façon non conforme à la réglementation en vigueur. Il a confirmé que le contrôleur financier aurait connaissance, grâce au contrôle des emplois qu'il exerce, des situations irrégulières en matière de position administrative des agents. Il vise en effet les arrêtés de mises à disposition contre remboursement, qui concernent notamment l'ANPE et l'AFPA, ainsi que les actes accordant des décharges syndicales. Il subsisterait néanmoins un ou deux cas de décharges syndicales irrégulières parmi les personnels du ministère. Par ailleurs, il a indiqué qu'environ 70 fonctionnaires de la direction régionale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle d'Ile-de-France étaient mis à disposition de l'administration centrale. En effet, dans le milieu des années 1990, les administrations centrales ont eu pour consigne de réduire leurs effectifs de 10 % en trois ans au profit des services déconcentrés, ce qui les privait de facto de fonctionnaires de catégorie A. Le ministère de l'emploi, particulièrement mal loti sur ce plan, a cherché à pallier son manque de personnel d'encadrement par des mises à disposition de fonctionnaires préalablement affectés dans les services déconcentrés.

M. Gérard Braun a voulu savoir si le contrôleur financier exerçait un contrôle sur les postes mis aux différents concours organisés par le ministère.

M. Jean-Pierre Morelle a indiqué que le contrôle financier s'exerçait également sur les postes mis aux différents concours et, plus largement, sur les besoins de recrutement. Il a estimé que le ministère de l'emploi, contrairement peut-être à d'autres ministères, ne pratiquait pas le " surcalibrage " des concours. La tendance observée est même inverse. Ainsi a-t-il rappelé que, par exemple, 57 postes étaient ouverts au dernier concours d'inspecteur du travail, mais que le ministère n'en avait demandé que 53, pour n'en retenir finalement que 48.

M. Joseph Ostermann a demandé si le ministère de l'emploi pratiquait la gestion prévisionnelle des emplois.

M. Jean-Pierre Morelle a répondu par la négative, regrettant que le ministère ne savait pas bien exploiter la pyramide des âges dans une optique de gestion à moyen terme. Il a ajouté que peu de fonctionnaires de catégorie A étaient intéressés par la gestion du personnel, préférant être affectés aux missions qui sont au coeur de l'activité du ministère. Toutefois, ce dernier est en cours d'exécution d'un marché public, d'un montant d'environ 35 millions de francs, devant permettre de rénover l'outil informatique de gestion des personnels. En outre, un vaste travail de définition des compétences est à l'oeuvre au sein du ministère, dont il est beaucoup attendu.

M. Gérard Braun a voulu savoir si le contrôleur financier central entretenait des relations avec les services déconcentrés du ministère.

M. Jean-Pierre Morelle a répondu par la négative, précisant qu'il entretenait toutefois des relations avec les contrôleurs financiers en région, mais essentiellement en ce qui concerne les dépenses d'intervention.

M. Joseph Ostermann s'est interrogé sur la situation des personnels de l'administration centrale.

M. Jean-Pierre Morelle a rappelé que le ministère recouvrait les deux secteurs de l'emploi et de la solidarité, mais que le second gérait la plupart des corps de fonctionnaires, ce qui ne constitue pas une situation très satisfaisante, dans la mesure où la logique de la séparation administrative des deux parties du ministère n'a pas été menée jusqu'à son terme.

Il a par ailleurs indiqué que les contractuels étaient très nombreux à l'administration centrale, représentant la moitié des personnels de catégorie A. Il existe trois principales catégories de contractuels : ceux dits de 1978, qui bénéficient d'un quasi-statut, leur contrat étant à durée indéterminée ; ceux provenant du secteur de la formation professionnelle ; et ceux dits de 1984, qui sont des contractuels proprement-dits mais qui ne devraient plus exister que marginalement, la loi de 1984 ayant programmé la disparition progressive de la précarité au sein de la fonction publique. Or, ces personnels sont moins bien rémunérés que les titulaires, auxquels ils s'apparentent pourtant en raison de la nature de leurs tâches et de l'importance de leurs années de service dans le service public. Il a rappelé que la ministre avait souhaité la réduction graduelle du nombre de contractuels, et le recrutement de personnels titulaires. Il a d'ailleurs estimé que ce mouvement serait fortement favorisé par l'importance des départs à la retraite au cours des prochaines années et par la bonne conjoncture économique, les jeunes diplômés préférant alors travailler dans le secteur privé où les rémunérations sont plus attractives. Ce phénomène posera des problèmes à l'administration, tant en ce qui concerne les recrutements à venir que le déroulement de carrière des agents.

Enfin, il a confirmé que les effectifs du cabinet de la ministre étaient importants.

Mme Marie-Caroline BONNET-GALZY, directeur de l'administration générale et de la modernisation des services au ministère de l'emploi et de la solidarité
- Mercredi 08 mars 2000 -

Mme Marie-Caroline Bonnet-Galzy a d'abord rappelé que, depuis 1990, la direction générale de l'administration et de la modernisation des services (DAGEMO) gérait les personnels du secteur emploi, ceux du secteur solidarité relevant de la direction générale de l'administration, du personnel et du budget. Elle a tenu à exprimer sa conviction qu'il fallait accroître les moyens en personnels du ministère de l'emploi, l'accroissement de ses missions ne s'étant pas traduit par un renforcement suffisant de ses effectifs.

Elle a indiqué que, au cours des dix dernières années, avait eu lieu un important travail de consolidation des différents corps de fonctionnaires gérés par la DAGEMO, dont l'identité est très affirmée, mais qui sont, en définitive, peu nombreux : les inspecteurs, les contrôleurs et les contractuels. Elle a ensuite présenté les textes statutaires et indemnitaires de ces différents corps, ainsi que les évolutions qui ont pu les affecter.

M. Gérard Braun a voulu savoir si les contractuels, nombreux à l'administration centrale, avaient des perspectives de titularisation.

Mme Marie-Caroline Bonnet-Galzy a précisé que seuls les contractuels dits de 1978 étaient concernés par la titularisation ; ceux dits de 1984 ne le sont pas à ce jour. Elle a estimé que les missions nouvelles du ministère ne nécessitaient pas le nombre de contractuels en poste à l'administration centrale - environ un millier, dont 400 coordonnateurs emploi-formation -, les tâches pouvant être, pour une grande part, assumées par des personnels titulaires. C'est, du reste, l'orientation retenue en termes de gestion prévisionnelle.

Elle a indiqué que la valorisation des postes de chef de service, dans le cadre d'un statut d'emploi, avait pris du retard, en raison notamment de la position de l'inspection du travail, très attachée à son autonomie. Toutefois, des réformes sont intervenues, en 1995, avec la mise en place d'un statut d'emploi de directeur régional, et se préparent en 2000, grâce à la création d'un statut d'emploi pour les directeurs départementaux. Ces mesures statutaires ont permis de revaloriser la carrière des chefs de service qui, au ministère de l'emploi, étaient traditionnellement mal primés, les primes étant liées non aux fonctions exercées mais au corps d'appartenance. Aujourd'hui, l'ensemble des directeurs régionaux est issu du corps de l'inspection du travail. La situation est quasiment la même pour les directeurs départementaux, à l'exception de l'un d'entre eux, administrateur civil placé en position de détachement. Dans le même temps, l'emploi de directeur départemental sera ouvert aux cadres de l'ANPE. Il a également fait l'objet d'une revalorisation indiciaire.

M. Gérard Braun s'est enquis de l'influence de la mobilité des fonctionnaires sur le déroulement de leur carrière.

Mme Marie-Caroline Bonnet-Galzy a précisé que la carrière des inspecteurs du travail était d'autant plus rapide qu'ils faisaient preuve d'une plus grande mobilité. Toutefois, elle a regretté que cette dernière ne fasse pas l'objet d'incitations financières, contrairement à la situation qui prévaut dans d'autres départements ministériels. A cet égard, elle a assuré que l'ensemble des indemnités dont bénéficient les fonctionnaires du ministère de l'emploi avait une base juridique. Un effort indemnitaire en faveur des fonctionnaires des catégories B et C a été réalisé en 1991, puis un autre en 1995 au profit des administrateurs civils. De 1997 à 2000, la dotation budgétaire consacrée aux indemnités a ainsi progressé de 20 %, toutes les catégories en ayant profité. Toutefois, compte tenu du niveau de départ, il s'agit plutôt, selon elle, d'un rattrapage.

En ce qui concerne les emplois budgétaires, elle a indiqué que le ministère en comptait 10.115, dont 927 en administration centrale et 9.188 au sein des services déconcentrés. Toutefois, en y ajoutant les effectifs de l'ANPE et de l'AFPA, et des autres établissements publics, ils s'élèvent à 37.911. Elle a attiré l'attention sur le fait que les fonctionnaires de catégorie C étaient très nombreux, et que leur poids relatif n'était plus adapté aux missions nouvelles du ministère. Si des postes de catégorie C ont été supprimés, ils n'ont pas été remplacés, à même hauteur, par des créations de postes de catégorie B. Elle a estimé que la suppression, qu'elle a qualifiée d'" aveugle ", de tous les postes vacants en 1992 avait entraîné de graves conséquences au ministère de l'emploi.

Quant aux créations d'emplois, elles ont permis de régulariser la situation de personnes autrefois rémunérées sur crédits - comme les 400 coordonnateurs emploi-formation -, mais ne se sont pas traduites, pour l'essentiel, par des moyens supplémentaires. C'est ainsi qu'ont été créés 450 emplois entre 1997 et 2000. Toutefois, un effort est perceptible depuis quelques années, 300 emplois ayant été créés entre 1998 et 2000 (sur 500 depuis 1984), 15 en 1998, 150 en 1999 (10 inspecteurs et 140 contrôleurs), et 134 en 2000 (dont 20 inspecteurs et 90 contrôleurs).

M. Gérard Braun a souhaité obtenir des informations sur les effectifs de l'administration centrale.

Mme Marie-Caroline Bonnet-Galzy a indiqué que la réduction des effectifs des administrations centrales avait été présentée comme un axe prioritaire de la réforme de l'Etat. Elle a toutefois considéré que le ministère de l'emploi n'aurait qu'à pâtir d'une telle orientation, le besoin de qualifications nouvelles se faisant au contraire ressentir.

Elle a expliqué que les effectifs réels ne correspondaient pas aux effectifs budgétaires, car plusieurs personnes à temps partiel peuvent occuper un seul emploi budgétaire. Or, le temps partiel concerne 24 % des personnels du ministère de l'emploi, alors que la moyenne dans la fonction publique est de 13 %, essentiellement en raison de sa forte féminisation. Par ailleurs, le ministère bénéficie de personnels mis à disposition, qui viennent grossir ses effectifs stricto sensu . Ainsi, pour ces deux raisons, alors que les services déconcentrés comptent 9.188 emplois budgétaires, ce sont en réalité environ 10.600 personnes qui y travaillent. Il convient de mentionner également les 900 personnes mises à disposition, soit 200 en administration centrale et 700 au sein des services déconcentrés, dont plus de 600 au titre du secteur solidarité assurent le fonctionnement des COTOREP. Elle a précisé que les mises à disposition irrégulières au bénéfice d'organisations syndicales, relevées par la Cour des comptes, ne concernaient plus que 5 personnes, dont le cas est d'ailleurs en cours de régularisation. S'agissant des 9 mises à disposition de la Mutuelle générale des affaires sociales - point également mentionné par la Cour des comptes -, elle a estimé que la participation de fonctionnaires au fonctionnement d'une mutuelle, qui, en assurant des fonctions du régime de base de la sécurité sociale, poursuit des missions de service public, ne pouvait être qualifiée d'irrégularité.

Elle a observé que les surnombres se rencontraient essentiellement au sein de la catégorie C, qui compte deux corps, les adjoints et les agents administratifs, dont les tâches sont identiques, mais dont le mode de recrutement et, surtout, le niveau de rémunération, sont différents. Rappelant que l'ensemble des emplois d'agent du ministère des finances a été transformé en emplois d'adjoint, elle a indiqué que le ministère de l'emploi poursuivait l'objectif de transformer 700 emplois d'agent, soit 15 % du total, en emplois d'adjoint sur 1999 et 2000. Or, un plan de transformations d'emplois est décidé en loi de finances, mais il est mis en oeuvre tout au long de l'année, en raison des procédures juridiques à respecter ou des concours à organiser. Ce sont donc les réalités de la gestion elle-même qui expliquent l'inadéquation constatée entre les emplois budgétaires et la réalité des effectifs, l'apparition de surnombres en particulier. La même situation avait été constatée lors de la réforme et de la fusion des corps de contrôleurs en 1994.

Cette inadéquation résulte aussi d'un cas particulier, celui des assistants techniques FSE (Fonds social européen). La Commission européenne apporte des crédits dans le cadre de la politique communautaire des fonds structurels, ces crédits pouvant aussi servir à embaucher des contractuels gérant les actions ainsi financées. Le ministère de l'emploi a recruté environ une centaine de ces contractuels, mais ils sont beaucoup plus nombreux au niveau de l'ensemble des administrations de l'Etat. Ce système, s'il constitue une incitation à l'embauche de contractuels, ne peut être considéré comme un choix de gestion, mais bien comme une contrainte que subissent les administrations. Toutefois, la régularisation de leur situation est à l'étude au niveau interministériel.

Elle a ensuite abordé la question des effectifs de référence, qui sont établis depuis 1994 sur la base d'indicateurs objectifs tels que la population salariée, le taux de chômage, le nombre d'établissements ou l'importance des dossiers COTOREP... Il convient toutefois de garder à l'esprit que les effectifs de référence, en partie parce qu'ils sont adaptés régulièrement pour être le plus proche possible des réalités du terrain, sont des instruments qui ne sont jamais complètement stabilisés, et qu'ils proposent des objectifs qui ne sont jamais totalement atteints en gestion.

M. Gérard Braun s'est interrogé sur les éventuelles difficultés que ne doit pas manquer d'entraîner la détermination d'effectifs de référence.

Mme Marie-Caroline Bonnet-Galzy a abondé en ce sens, considérant que les effectifs de référence pouvaient, dans certains cas, conduire à réduire le nombre de personnels d'un service. Elle a toutefois précisé que les créations nettes d'emplois réalisées depuis trois ans facilitaient nettement la gestion des effectifs, même si, afin d'éviter de trop grandes variations entre services en matière d'affectation de personnels nouveaux, les résultats de l'application stricte du mécanisme retenu pour la détermination des effectifs de référence ont dû être écrêtés. En outre, si l'augmentation des personnels des catégories A et B est bien entendu très appréciée des chefs de service, ces derniers expriment leur mécontentement à voir diminuer le nombre de fonctionnaires de catégorie C, alors que les tâches du ministère exigent des qualifications nouvelles. Il ne faut toutefois pas perdre de vue que la pression des activités des services ne donne que peu de marges de manoeuvre aux gestionnaires pour réorganiser leurs services et tenir compte des nouvelles qualifications. Établir un effectif de référence en administration centrale, compte tenu de l'évolution récente de ses missions, est encore plus difficile. Par ailleurs, l'outil informatique de gestion des personnels est déficient. C'est pourquoi le projet " Synergie RH " vise à développer un progiciel permettant au ministère, en commun pour le secteur emploi et le secteur solidarité, - d'ailleurs choisi comme pilote de l'opération - de mettre en place une véritable politique des ressources humaines, le rendant capable de suivre les absences de ses agents, les opérations de formation ou encore les rémunérations accessoires, et de développer une véritable gestion prévisionnelle des emplois. Ce projet devrait être opérationnel à la fin de l'année 2001 ou au début de l'année 2002.

M. Gérard Braun a voulu connaître la situation des départs à la retraite des fonctionnaires du ministère de l'emploi.

Mme Marie-Caroline Bonnet-Galzy a rappelé que la moitié des fonctionnaires en France, aujourd'hui en poste, partira à la retraite d'ici 2012. Au ministère de l'emploi toutefois, les départs en retraite les plus importants auront lieu un peu plus tard, ce léger décalage de quatre ou cinq ans révélant la jeunesse relative de développement de ce ministère.

Elle a observé que les crédits de rémunération ne représentaient qu'une faible part, environ 2 %, du budget de l'emploi, et 50 % des crédits du titre III. Les créations d'effectifs n'expliquent la croissance du budget de personnel qu'à hauteur de 8 %. Les plans de revalorisation successifs et les accords salariaux intervenus dans la fonction publique ont eu un impact budgétaire important puisqu'ils expliquent l'augmentation du budget de personnel à hauteur de 30 %. Toutefois, elle a jugé que, sur les coûts des retraites et des charges sociales, la DAGEMO était " passive et contrainte ", la détermination de ses crédits relevant entièrement de Bercy. La direction a même bénéficié, dans le passé, d'une " rallonge " budgétaire indispensable pour lui permettre de terminer l'année pour financer les charges sociales.

M. Joseph Ostermann a souhaité connaître l'origine de ces dotations supplémentaires.

Mme Marie-Caroline Bonnet-Galzy a indiqué que, au cours des années 1995 et 1996, le ministère de l'emploi avait bénéficié de dotations budgétaires complémentaires sur la " ligne souple " des rémunérations, en raison de l'insuffisance des moyens que Bercy lui avait initialement alloués. Le ministère des finances impose en effet au ministère de l'emploi des contraintes budgétaires telles que sa gestion s'en trouve extrêmement serrée, la " ligne souple " étant souvent insuffisante, parfois même négative.

Elle a considéré que les besoins en personnels du ministère de l'emploi n'étaient pas suffisamment couverts eu égard à l'importance de l'évolution de ses missions. Cette insuffisance de moyens a conduit le ministère, dans le passé, à recourir à des expédients. Il a notamment procédé au recrutement de 400 coordonnateurs emploi-formation et de 200 secrétaires, rémunérés sur des crédits de rémunérations puis de fonctionnement. Cette situation a été régularisée de façon différente selon les cas. Celui des coordonnateurs, agents de catégorie A, a été le plus simple : 375 postes de contractuels ont été créés en 1998 et 1999 et 30 postes ont été redéployés. Celui des secrétaires, qui sont des agents de catégorie C, ne peut se régulariser que dans le cadre de la loi Perben. Au cours des arbitrages budgétaires interministériels, la direction du Budget avait accordé la transformation en emplois de 96 de ces contrats de secrétaires, ces dernières, pour être titularisées, devant passer le concours administratif réservé de la loi Perben. Or, le ministère de la fonction publique s'est opposé à cette solution pour les secrétaires préalablement embauchées sur un contrat de droit privé. Suite à un recours, le tribunal administratif de Grenoble a décidé la requalification en contrat public d'Etat du contrat de l'agent concerné. La DAGEMO a obtenu, dans la loi de finances pour 2000, les crédits nécessaires à la rémunération de ces personnels, mais pas les postes budgétaires, alors même qu'elle disposait déjà des crédits mais non des postes. Cette question sensible n'est donc pas résolue et fait l'objet de saisine interministérielle.

Par ailleurs, en 1993, le ministère a bénéficié de la création de 100  postes pour des chargés de mission CES. La même année, des crédits lui ont été accordés afin de rémunérer 100 cadres pour l'emploi, recrutés pour assurer les fonctions d'adjoints des commissaires à l'emploi, ces personnels n'étant pas embauchés sur postes budgétaires.

Enfin, le ministère prend appui sur des établissements publics placés sous sa tutelle, notamment l'ANPE, mais aussi l'ACOSS, de plus en plus impliquée dans les dispositifs de la politique de l'emploi axés sur l'exonération de charges sociales, ainsi que le CNASEA, qui assure la gestion administrative des CES, des CEC et des emplois-jeunes. Cette orientation permet au ministère de renforcer ses moyens par le biais de structures qui lui sont extérieures : ainsi, environ 1.000 emplois du CNASEA travaillent, indirectement, pour le compte du ministère de l'emploi. Il s'agit, en quelque sorte, d'une externalisation de ses tâches de gestion et de paiement des aides individuelles.

S'agissant des besoins de recrutements futurs, Mme Marie-Caroline Bonnet-Galzy a estimé qu'ils étaient réels au sein de l'administration centrale, en raison de l'évolution des missions du ministère. Les juristes et les techniciens de communication, notamment, sont particulièrement recherchés. Pour les services déconcentrés, quatre pôles de besoins apparaissent : les effectifs de l'inspection du travail en sections, soit 400 inspecteurs et 800 contrôleurs, sont insuffisants, notamment au moment où la réduction du temps de travail se met en place ; le contrôle de la formation professionnelle connaît de nombreuses carences en raison de l'inadéquation entre les 100 agents qui y sont affectés et les montants financiers en jeu ; la santé au travail nécessite un renforcement des moyens de la médecine du travail et de l'inspection hygiène et sécurité ; la formation relative à l'administration générale doit être développée : le ministère va ainsi créer une filière d'attachés en services déconcentrés.

Elle a rappelé qu'à l'été 1998, deux textes importants avaient été publiés : le premier est la circulaire du Premier ministre du 4 juin 1998 sur l'élaboration de programmes pluriannuels de modernisation au sein des ministères ; le second est une circulaire du ministre de la fonction publique et du secrétaire d'Etat au budget demandant aux différents départements ministériels de travailler sur leurs besoins en personnels sur la base de trois scenarii à cinq ans (effectifs constants, rémunérations constantes, rémunérations et pensions constantes). Le directeur de cabinet de la ministre de l'emploi et de la solidarité, dans sa réponse d'avril 1999, a développé le scénario souhaité de progression des moyens en personnel du ministère, à travers quatre demandes : le renforcement des effectifs du ministère de 2,35 % par an pendant trois ans, soit la création de 800  emplois sur trois ans pour le seul secteur de l'emploi - la loi de finances pour 2000 en a créé 130, soit la moitié des effectifs supplémentaires sollicités. Afin d'améliorer l'encadrement, le ministère va bénéficier de 12 postes d'administrateurs civils à la sortie de l'ENA et de 7 autres postes au tour extérieur. La requalification se traduira, à terme, par des créations de postes dans les catégories A et B et par la transformation chaque année de 50 postes de catégorie C en postes de catégorie B. Enfin, l'amélioration de la situation indemnitaire des agents du ministère est en cours pour les catégories B et C, une réflexion étant engagée afin de réduire l'écart important qui existait en matière indemnitaire entre les inspecteurs du travail et ceux des affaires sanitaires et sociales.

M. Joseph Ostermann a souhaité obtenir des informations sur les emplois affectés au cabinet de la ministre.

Mme Marie-Caroline Bonnet-Galzy a indiqué que 120 emplois assuraient la gestion logistique du cabinet, la situation d'un agent mis à disposition du cabinet par l'AFPA restant à régulariser. Ces effectifs ne comprennent pas les conseillers de la ministre, qui sont rémunérés en fonction des " points cabinet " à l'intérieur d'une enveloppe globale dont le montant est déterminé par le ministère des finances. Toutefois, cette dotation ne s'ajoute pas à la dotation en emplois des services du ministère : en raison de la cherté de ces emplois, elle est gagée par le gel de plusieurs emplois de catégorie C.

M. Michel BERNARD, directeur général de l'Agence nationale pour l'emploi, accompagné de MM. Louis Viatte et Moezally Rashid
- Mardi 14 mars 2000 -

M. Michel Bernard a rappelé que l'Agence nationale pour l'emploi (ANPE) avait une mission d'intermédiation entre les demandeurs d'emploi et les entreprises, l'Agence étant organisée en fonction de cette mission de services. Depuis une dizaine d'années, elle a développé une culture axée sur la satisfaction des besoins de ses " clients ".

Cette évolution s'est concrétisée par la signature de contrats de progrès entre l'ANPE, établissement public administratif placé sous la tutelle du ministère de l'emploi et de la solidarité, et l'Etat. Le premier contrat a couvert les années 1990 à 1993 : il marque une rupture, l'ANPE se positionnant comme une entreprise de services dans le cadre de sa mission de service public. Cette évolution s'est traduite par l'introduction, en 1992, de la pluricompétence des agents, qui a conduit à aborder le problème de l'emploi de manière globale, et par l'amélioration de l'accueil des clients de l'Agence. Les syndicats se sont montrés assez hostiles à cette orientation, estimant qu'elle entraînerait des changements dans les modalités d'exercice du métier préjudiciables à l'écoute des demandeurs d'emploi. Le deuxième contrat de progrès a porté sur les années 1994 à 1998, et était centré sur les efforts à réaliser en matière de recueil des offres d'emploi, qui sont passées de 1,2 million en 1993 à 3 millions en 1999. La spécialisation des agents par secteur d'activités a été renforcée. En outre, l'offre et la qualité des services ont été améliorées, l'Agence prenant des engagements précis, en matière d'accueil par exemple. Dans le même temps est conduite, depuis deux ans, une opération de qualification des agences locales, qui consiste à évaluer leurs performances, les enquêtes de satisfaction montrant que cette opération portait ses fruits auprès des clients de l'Agence. Enfin, le troisième contrat de progrès a été conclu en 1999 : il intervient dans un contexte économique favorable marqué par le retour de la croissance et par le recul du chômage. Il vise à mettre l'accent sur la consolidation de la qualité du service rendu par l'Agence, et sur une attention particulière portée aux chômeurs les plus en difficulté.

M. Joseph Ostermann a voulu connaître la part des offres d'emploi satisfaites par l'ANPE.

M. Michel Bernard a indiqué que 88,5 % des offres d'emploi recueillies par l'Agence étaient satisfaites, dont 60 % suite à la proposition d'un conseiller. Pour faire face au Service personnalisé pour un nouveau départ qui concernera environ 1,5 million de demandeurs d'emploi en difficulté et pour améliorer ses services, l'ANPE a bénéficié de moyens supplémentaires, en particulier la création de 500 emplois par an pendant cinq ans, ainsi que 500 emplois-jeunes. En outre, son budget de sous-traitance de prestations de service va passer de 500 à 1.600 millions de francs par an. Du reste, elle avait déjà vu croître ses moyens au début des années 1990, lorsque le taux de chômage avait considérablement progressé : elle a notamment obtenu environ 5.000 créations d'emplois sur l'ensemble de la période 1990-2000. Il convient toutefois de rappeler qu'elle dispose encore de moyens en personnels inférieurs à la moyenne européenne : ainsi, si l'ANPE, sur un périmètre d'activité identique, disposait des moyens de l'agence allemande, elle devrait compter 33.000  personnels au lieu de 20.000 actuellement, en y incluant ceux de ses partenaires (missions locales, APEC, etc.). Par ailleurs, son organisation a été nettement améliorée, de manière à pouvoir traiter avec une bonne qualité de service non seulement le stock des demandeurs d'emploi mais également les flux. Enfin, le statut du personnel a été réformé de manière à le rendre adapté à ses missions.

M. Joseph Ostermann a souhaité connaître les avantages liés à la mise en place d'un statut plus souple, notamment en matière de modulation des rémunérations.

M. Michel Bernard a expliqué que les personnels de l'ANPE n'étaient pas des fonctionnaires mais des contractuels de droit public, bien que leurs rémunérations soient calées sur une grille indiciaire analogue à celle de la fonction publique, qui s'applique également aux contractuels recrutés par l'Etat.

Il a ajouté que le réseau de l'ANPE avait dû s'adapter au caractère de plus en plus ciblé des dispositifs de la politique de l'emploi. Ses relations avec l'AFPA et les directions régionales et départementales du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle, autrefois complexes, étaient devenues plus simples et plus sereines. L'Agence a également noué des relations plus approfondies avec le réseau d'insertion, en particulier les comités locaux d'insertion, les missions locales et les permanences d'accueil, d'information et d'orientation, ainsi qu'avec les collectivités territoriales. Ainsi, l'ANPE est-elle implantée dans environ 1.200 lieux hors agences locales, notamment dans les communes, permettant d'offrir un meilleur service de proximité.

M. Joseph Ostermann a observé que les responsables d'agences locales s'exprimaient davantage que par le passé en termes de parts de marché du travail, qu'il s'agit, pour eux, de conquérir.

M. Michel Bernard ne s'est pas montré étonné par cette remarque, les responsables d'agences et, plus généralement, l'ensemble de leurs personnels ayant adopté un état d'esprit plus proche de celui des entreprises de service, tout en n'oubliant pas leurs missions de service public.

M. Gérard Braun a voulu savoir si l'ANPE se trouvait en concurrence avec les agences de travail intérimaire.

M. Michel Bernard a répondu de façon négative, ajoutant que l'Agence concluait plutôt des conventions avec les agences d'intérim. Il a rappelé que la population active occupée s'élevait aujourd'hui à environ 25 à 26 millions de personnes, l'intérim ne représentant que 500.000 à 600.000  emplois équivalent temps plein.

M. Gérard Braun s'est interrogé sur la manière dont le ministère de l'emploi et de la solidarité exerçait sa tutelle sur l'ANPE.

M. Michel Bernard a d'abord rappelé que la quasi totalité du budget de l'Agence provenait de subventions inscrites au budget du ministère de l'emploi et de la solidarité. Il a ensuite expliqué que le ministère était présent au conseil d'administration, qu'il déterminait les grandes orientations stratégiques et les objectifs de l'ANPE, et, enfin, qu'il en assurait le contrôle. Les relations entre le ministère et l'ANPE sont quasi-quotidiennes, l'Agence contribuant à nourrir le débat et les réflexions du ministère relatives aux évolutions législatives ou réglementaires qu'impose l'observation des réalités du terrain.

M. Gérard Braun s'est enquis du passage des personnels de l'Agence aux 35 heures.

M. Michel Bernard a indiqué qu'il n'avait, pour l'instant, reçu aucune instruction pour passer aux 35 heures. Les négociations tendant à conclure un accord-cadre de réduction du temps de travail dans la fonction publique ayant échoué, la question devra être réglée, avant le 1 er janvier 2002, au niveau de chaque ministère. Or, celui de l'emploi n'a encore fixé aucun cadre pour appliquer les 35 heures à ses personnels ainsi qu'à ceux des établissements publics placés sous sa tutelle. Estimant que, à l'ANPE, la réduction du temps de travail pourrait difficilement être réalisée à coûts constants, compte tenu du niveau de rémunération inférieur à celui des autres organismes participant au service public de l'emploi et d'une organisation performante ayant permis des gains importants de productivité, il a dit ne souhaiter engager les négociations que lorsque le cadre sera fixé clairement au niveau du ministère.

Il a ajouté que l'Agence continue à avoir des besoins importants en personnels, car elle doit traiter non seulement le stock des demandeurs d'emploi, mais aussi les flux. Il a rappelé, s'agissant des stocks, que les demandeurs d'emploi étaient classés en huit catégories, même si les commentaires portent essentiellement sur la première, c'est-à-dire les personnes qui recherchent un emploi en contrat à durée indéterminée et à temps plein, qui sont actuellement inférieurs à 2,6 millions. Toutefois, le nombre total de demandeurs d'emploi s'élèvent, en intégrant les inscrits des sept autres catégories à près de 4 millions. Par ailleurs, en ce qui concerne les flux, l'Agence doit également traiter environ 4,5 à 5 millions de nouvelles inscriptions chaque année.

M. Gérard Braun a voulu savoir si l'ANPE constatait une inadéquation entre les offres d'emploi proposées par les entreprises et les formations dispensées.

M. Michel Bernard a indiqué que des études sur ce sujet étaient en cours, afin de mesurer les tensions existant sur le marché du travail, au niveau des bassins d'emploi, l'objectif étant, à terme, de favoriser des rencontres permanentes entre les entreprises, les acteurs de la formation initiale et continue et les services de l'emploi. Par ailleurs, l'ANPE a noué des relations très étroites avec l'AFPA, et a même créé avec elle un service intégré. Ainsi, en 2001, 80 % de l'effort public de l'AFPA sera consacré à des demandeurs d'emploi envoyés par l'ANPE.

M. Gérard Braun a souhaité obtenir des informations sur les personnels contractuels à durée déterminée employés par l'ANPE.

M. Michel Bernard a indiqué que les personnes embauchées sur un contrat à durée déterminée ne pouvaient statutairement excéder 2 % du total des personnels de l'Agence. Cette norme, qui est aujourd'hui atteinte, permet d'introduire de la souplesse dans la gestion des effectifs, notamment pour assurer des remplacements ou pour occuper des emplois demandant une qualification très particulière. Avec les personnels mis à disposition d'autres organismes tels que les comités locaux d'insertion ou les missions locales, ainsi que les personnels en charge des adhérents aux conventions de conversion, l'ANPE compte environ 18.000 agents, et près de 20.000 avec les contrats emplois solidarité et les emplois jeunes. Ces 1.500 contrats emploi-solidarité, soit 750 emplois équivalent temps plein, ainsi que les 500 emplois jeunes, effectuent divers travaux au sein des agences locales. Les titulaires d'emplois jeunes seront, pour la grande majorité d'entre eux, intégrés sans gros problèmes parmi le personnel de l'Agence en se présentant aux concours.

Abordant la question du régime indemnitaire des agents, il a expliqué qu'il était conçu de manière à assigner un objectif spécifique à chacune des primes, dont le système est plus élaboré que celui de la fonction publique. Les primes sont non seulement modulables mais réellement modulées en fonction de la manière de servir et des résultats obtenus, le montant total des primes pouvant varier environ de 10 % pour les employés, 20 % pour les cadres et 30 % pour un directeur général-adjoint. Les primes sont intégrées au calcul de la retraite ; les agents cotisent au régime général de la sécurité sociale et sont affiliés à des régimes de retraite complémentaire tels que l'IRCANTEC. Il a ajouté qu'il existait également un système d'intéressement à la réalisation des objectifs collectifs, qui peut se traduire par un gain annuel supplémentaire pour les agents compris entre 2.500 et 3.000 francs. L'instauration de ce système de primes a indéniablement entraîné des conséquences positives pour l'Agence, ses personnels ayant adopté une culture de résultats et la satisfaction de ses clients s'en trouvant accrue.

M. Gérard Braun s'est enquis du rôle du contrôleur d'Etat placé auprès de l'ANPE.

M. Michel Bernard a indiqué que le contrôleur d'Etat était nommé par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, et que ses missions étaient différentes de celles d'un contrôleur financier : en particulier, il ne vise pas les dépenses, même s'il exerce un contrôle a priori sur certaines opérations telles que le passation de marchés publics et le respect des appels d'offre. En fait, il exerce surtout un contrôle a posteriori , et a également un rôle de conseil.

Il a ajouté que la Cour des comptes menait actuellement un contrôle sur la gestion de l'Agence au cours des années 1990 à 1998. Il a assuré que la Cour des comptes n'avait, à cette occasion, formulé aucune remarque particulière sur la gestion des personnels. Il a, du reste, affirmé que le système de contrôle des emplois mis en place était géré de façon centralisée et qu'il fonctionnait selon des principes simples. Le fichier national, qui regroupe les postes, les personnels et la paye, rend impossible la rémunération d'un agent qui n'occuperait pas un poste budgétaire existant. Il a également considéré que l'ANPE n'était pas concernée par le rapport de la Cour des comptes sur la fonction publique de l'Etat, mais que ses principales conclusions ne le surprenaient pas vraiment.

M. Gérard Braun a voulu savoir si l'ANPE avait des personnels mis à disposition du ministère de l'emploi.

M. Michel Bernard a indiqué qu'environ 40 agents de l'ANPE étaient mis à disposition d'autres organismes, par exemple à l'administration pénitentiaire ou dans des structures traitant des cas spécifiques (rapatriés, France Terre d'Asile, etc.). Le ministère de l'emploi peut également bénéficier de mises à disposition temporaires, en fonction de l'actualité législative ou sociale ou d'opérations ponctuelles. Mais, dans tous les cas, l'objet de la mise à disposition est spécifié dans la convention liant l'ANPE et l'organisme d'accueil.

M. Joseph Ostermann s'est interrogé sur le fait de savoir si l'ANPE sous-traitait des activités pour le compte du ministère de l'emploi.

M. Michel Bernard a estimé qu'une telle affirmation était excessive, voire erronée, même si le ministère de l'emploi pouvait parfois utiliser l'Agence pour gérer des dispositifs qui sont proches de son activité. Ainsi, lors de la loi de finances pour 2000, a-t-il, à juste titre, transféré à l'ANPE la ligne budgétaire correspondant aux centres interinstitutionnels des bilans de compétences, qu'il gérait auparavant.

M. Georges CAPDEBOSCQ, conseiller-maître à la Cour des comptes, et M. Didier GUÉDON, conseiller référendaire
- Mardi 14 mars 2000 -

M. Georges Capdeboscq a rappelé que la cinquième chambre de la Cour des comptes comptait parmi ses attributions le contrôle du budget de l'emploi. Elle est donc conduite à s'assurer de la régularité des opérations décrites dans la comptabilité de l'Etat sur ce sujet, étant rappelé que des crédits en faveur de l'emploi n'étaient pas inscrits au budget de l'emploi avant 1999 mais au budget des charges communes. Chaque année, elle examine l'exécution des lois de finances pour l'année écoulée en vue du règlement du budget. Le rapport de la Cour sur l'exécution des lois de finances pour 1998 a comporté d'ailleurs une importante monographie sur le budget de l'emploi 1994-1998. La 5 ème chambre juge également les comptes des établissements publics placés sous la tutelle du ministère, tels que l'ANPE, le Centre d'études de l'emploi ou le Fonds de solidarité. Son contrôle s'exerce aussi sur les organismes qui reçoivent des subventions du ministère de l'emploi, l'AFPA étant le plus important d'entre eux, ou - en application de la loi du 12 avril 1996 - des concours de l'Union européenne, notamment du Fonds social européen. La cinquième chambre contrôle en outre le régime conventionnel d'assurance-chômage (UNEDIC et ASSEDIC). Elle est également amenée à examiner l'activité des services de contrôle eux-mêmes, comme elle l'a fait récemment pour le contrôle par l'Etat des fonds de la formation professionnelle ; le résultat du contrôle a d'ailleurs fait l'objet d'une communication du Premier président aux commissions des finances des Assemblées, en date du 13 janvier 2000, comme l'y autorise l'article L.135-5 du code des juridictions financières. Il est rappelé enfin qu'une modification de l'article L.111-7 du code des juridictions financières présentement soumise au Parlement donnerait compétence à la Cour pour contrôler les organismes recevant des versements libératoires d'une obligation légale de faire, notamment dans le champ de la formation professionnelle.

Il a indiqué que les activités de la cinquième chambre s'inscrivaient dans le cadre des programmes pluriannuel et annuel des travaux de la Cour des comptes, arrêtés par le Premier président, à partir des propositions des présidents de chambre et après avis du procureur général. Le programme de travail de la chambre prend en compte, au besoin par modification du calendrier des travaux, les enquêtes éventuellement demandées à la Cour par les commissions parlementaires, ainsi que la préparation des réponses à leurs questions sur l'exécution des lois de finances.

Il a rappelé que, si la Cour des comptes vérifie la régularité des recettes et des dépenses décrites dans les comptabilités publiques, elle doit aussi s'assurer du " bon emploi des deniers publics " en vertu de l'article L.111-3 du code des juridictions financières. Elle est donc nécessairement conduite à se préoccuper de l'efficience de la dépense publique, comme elle l'a fait récemment à propos des contrats de retour à l'emploi auxquels ont succédé les contrats initiative-emploi, cette étude ayant fait l'objet d'une insertion dans son dernier rapport public.

Il a estimé que les dysfonctionnements les plus souvent signalés par la Cour dans ses observations publiées sur le budget de l'emploi sont de deux ordres : l'opacité et la complexité des mécanismes administratifs et financiers des mesures de la politique de l'emploi, et l'absence ou l'insuffisance de la fiabilité des informations sur les résultats de telle sorte qu'il peut exister des dépenses redondantes dits " effets d'aubaine ". Il a appelé l'attention sur la récente amélioration apportée à la lisibilité de la nomenclature du budget de l'emploi.

M. Gérard Braun a souhaité obtenir des informations sur le contrôle en cours à l'ANPE.

M. Didier Guédon a indiqué que ce contrôle révélait une évolution profonde de l'ANPE qui s'est modernisée et qui a adopté une démarche davantage orientée vers ses " clients ", demandeurs d'emploi et entreprises, favorisant la motivation de son personnel. Cette politique a permis à l'Agence de retrouver une crédibilité auprès des entreprises, l'objectif qu'elle s'était fixée, c'est-à-dire représenter 40 % du marché national des offres d'emploi, étant quasiment atteint. Par ailleurs, l'Agence suit l'évolution de son action auprès des demandeurs d'emploi et des entreprises au moyen d'études, notamment de satisfaction. Toutefois, elle rencontre des tensions pour faire face à la fois à la recherche d'un plus grand nombre d'offres d'emploi et à la satisfaction des demandeurs d'emploi, notamment ceux qui sont les plus en difficulté. Compte tenu de la complexité du contexte de la demande d'emploi, il apparaît plus difficile de mesurer l'impact de l'action de l'Agence sur la demande d'emploi que sur les offres d'emploi recueillies.

M. Gérard Braun a voulu savoir si la Cour des comptes avait été amenée à effectuer un contrôle sur le CNASEA.

M. Georges Capdeboscq a indiqué que le CNASEA a fait l'objet d'un contrôle relativement récent par la chambre compétente pour le secteur agricole. Une étude est toutefois prévue par la cinquième chambre sur ses activités relatives à la gestion des contrats aidés dans le cadre de la politique de l'emploi, les emplois-jeunes en particulier, comme elle en avait conduit pour les contrats emploi-solidarité en 1996.

M. Gérard Braun s'est interrogé sur les suites données par l'administration aux observations contenues dans les rapports de la Cour des comptes.

M. Georges Capdeboscq a souligné l'attention portée par le Premier président de la Cour des comptes aux suites données aux observations de celle-ci. A titre d'exemple, il a cité le cas des contrats emploi-solidarité qui avaient fait l'objet d'un premier contrôle, et sur lesquels la Cour est revenue dans son rapport public 1998. A cette occasion, elle a constaté que des améliorations avaient été apportées au dispositif, mais que la nature des emplois financés pouvait être encore améliorée. De même, une audition en 1999 des responsables de la délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle a fait ressortir une amélioration dans le suivi de l'exécution des conditions financières des plans sociaux, qui avaient été étudiés au rapport public de 1997.

M. Gérard Braun a voulu connaître les modalités des contrôles effectués par la Cour des comptes.

M. Georges Capdeboscq a indiqué que la chambre compétente délibérait sur le rapport d'instruction établi suite aux investigations des magistrats chargés du contrôle. Un relevé de constatations provisoires est alors rédigé et adressé à l'organisme contrôlé qui communique à la chambre les observations que ce document lui inspire. Il convient de préciser que les responsables du service ou de l'organisme contrôlé peuvent être auditionnés par la chambre. Un relevé de constatations définitives est établi ; il peut aussi faire l'objet d'une insertion dans le rapport public annuel de la Cour des comptes ou d'un rapport public particulier. Les observations du service ou de l'organisme contrôlé sont prises en compte s'il y a lieu, la Cour pouvant aussi prendre acte de ses engagements en indiquant qu'elle vérifiera ultérieurement leur mise en oeuvre effective.

M. Didier Guédon a rappelé que le Premier président de la Cour des comptes avait exprimé le souhait que la Cour effectue un contrôle très approfondi de la fonction publique. Le rapport relatif à la fonction publique de l'Etat constitue la première phase de ce travail. Il a indiqué s'être plus particulièrement intéressé à la gestion des personnels des services déconcentrés du ministère de l'emploi et de la solidarité, qui fait l'objet d'un chapitre dudit rapport. Ses investigations ont duré trois mois, et ont pris la forme de questionnaires, d'entretiens et d'un contrôle sur pièces et sur place dans les différents bureaux des directions de l'administration centrale compétentes, la gestion des personnels de ce ministère étant fortement centralisée de telle sorte que la plupart des pièces se trouvent à l'administration centrale, même si la lisibilité des emplois budgétaires est parfois rendue difficile par les modifications qui interviennent en cours de gestion. Il s'est également rendu dans certains services déconcentrés, en particulier à la direction départementale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle du Morbihan, et à la direction régionale d'Ile-de-France. Il a expliqué que les services déconcentrés appliquaient généralement les mêmes méthodes de travail et géraient leurs personnels de façon similaire. Il a indiqué que les critiques émises par la Cour des comptes concernaient davantage le secteur solidarité que celui de l'emploi. S'agissant des rémunérations des agents, le rapport ne contient pas de remarques particulières, à l'exception toutefois du mécanisme retenu pour la rémunération des heures supplémentaires des agents de catégorie C, qui sont, en fait, gérées comme un régime de primes.

M. Gérard Braun a voulu savoir si les rémunérations accessoires étaient prises en compte dans le calcul de la pension des agents.

M. Didier Guédon a noté que les crédits indemnitaires augmentaient plus rapidement que les crédits de rémunérations principales, la part des premières prenant une place plus importante dans les revenus des fonctionnaires. Cette situation peut trouver un éclairage dans le fait que les primes ne rentrent pas dans le calcul des pensions. En outre, les régimes indemnitaires sont différents entre l'administration centrale, où il est plus favorable, et les services déconcentrés, ce qui n'est pas sans conséquences lorsque l'on recherche la mobilité des agents.

M. Joseph Ostermann a souhaité obtenir des informations sur les crédits qui permettaient de rémunérer les heures supplémentaires, et sur leur transformation éventuelle en emplois budgétaires.

M. Didier Guédon a indiqué que la gestion des heures supplémentaires comme un régime indemnitaire concerne l'ensemble des ministères. Il n'a pas été constaté au cours du contrôle que les crédits d'heures supplémentaires, qui font l'objet d'une ligne budgétaire spécifique, venaient abonder d'autres lignes budgétaires.

Il a indiqué qu'un contrôle venait de débuter sur l'administration centrale du ministère de l'emploi et de la solidarité, et que, à ce stade des investigations, il n'était pas possible de faire des observations pertinentes.

M. Gérard Braun s'est interrogé sur le suivi du rapport de la Cour des comptes relatif à la fonction publique de l'Etat.

M. Didier Guédon a précisé qu'un questionnaire avait déjà été adressé au ministère de l'emploi et de la solidarité de manière à assurer le suivi des observations de la Cour des comptes sur les effectifs de ses services déconcentrés.

Concernant la démarche suivie, il a expliqué que le contrôle des emplois et des effectifs partait des informations figurant au " vert " budgétaire, traduction des emplois ouverts votés par le Parlement dans la loi de finances pour arriver aux effectifs réellement présents sur ces emplois et enfin aux effectifs réellement présents dans les services. Les écarts observés entre emplois budgétaires et effectifs réels sur ces emplois résultaient de gels, de surnombres et de blocages dus essentiellement pour ces deux dernières raisons, dans le cas des services déconcentrés du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle, au retard pris dans l'application du protocole d'accord sur la rénovation de la grille de la fonction publique du 9 février 1990, dit protocole Durafour, avec une traduction plus rapide dans la loi de finances que dans la réalité, mais aussi aux réformes de fond qui ont touché les emplois, plan de transformation d'emplois ou fusion de corps, par exemple. La gestion des effectifs disponibles était plutôt bien cernée avec un très faible taux de vacances à la fin de 1995.

M. Joseph Ostermann a voulu savoir si l'ensemble des crédits ouverts au budget de l'emploi étaient consommés.

M. Didier Guédon a répondu que, pour ce qui concernait les crédits de personnel, la quasi totalité des crédits étaient consommés et que les modifications en gestion portaient sur de faibles montants.

M. Gérard Braun s'est enquis de la situation des emplois au cabinet de la ministre.

M. Georges Capdeboscq a précisé que les emplois affectés aux cabinets successifs de la période considérée entraient dans le champ du contrôle que la Cour des comptes effectuait sur les personnels de l'administration centrale.

M. Didier Guédon a indiqué qu'à première analyse le régime juridique des emplois de cabinet semblait obsolète et que le contrôle permettrait de mesurer les emplois utilisés, notamment de personnels d'administration centrale.

M. Gilbert HYVERNAT, directeur général de l'Association nationale pour la formation professionnelle des adultes, accompagné de MM. Denis Plasse et Jean-François Danon
- Mardi 28 mars 2000 -

M. Gilbert Hyvernat a rappelé que l'Association nationale pour la formation professionnelle des adultes (AFPA) avait cinq principales missions. La première, et la plus importante, est relative à l'orientation et à la formation professionnelle des adultes, ce qui concerne chaque année de 90.000 à 100.000 demandeurs d'emploi et de 40.000 à 50.000 salariés. Il s'agit de formations professionnelles qualifiantes aboutissant à la délivrance de titres homologués par le ministère de l'emploi. Ensuite, l'AFPA participe au service public de l'emploi et, dans ce cadre, noue des relations avec les services déconcentrés du ministère de l'emploi et, depuis une date plus récente, avec l'ANPE. Il convient de noter qu'elle apporte son concours au travail du secrétariat d'Etat à la formation professionnelle. Elle assure aussi, par délégation du ministère, la certification des organismes de formation. Elle remplit par ailleurs une mission sociale considérable, grâce à ses capacités d'hébergement et d'accueil, soit 17.000 lits et environ 7 millions de repas servis chaque année à ses stagiaires, qui constituent parfois des publics en difficulté. Enfin, elle est amenée à travailler en relation avec les collectivités territoriales et les entreprises.

Il a indiqué que l'AFPA était une association de droit privé régie par les dispositions de la loi de 1901. Elle est placée sous la tutelle du ministère de l'emploi qui, en vertu de l'arrêté du 1 er février 1966, en assure le contrôle économique et financier : il siège au sein de son conseil d'administration avec droit de veto. Elle est liée avec l'Etat par un contrat de progrès, le second ayant été signé pour la période 1999-2003 : l'Etat y fixe les grandes orientations, ainsi que les objectifs annuels à atteindre. Un contrôleur d'Etat est placé auprès d'elle.

M. Gérard Braun a voulu savoir comment était composée l'assemblée générale, et si la présidence en était assurée de manière alternative.

M. Gilbert Hyvernat a expliqué que l'assemblée générale avait une composition tripartite, avec des représentants des syndicats de salariés, des syndicats d'employeurs et de l'Etat. La composition du bureau est déclinée sur celle de l'assemblée générale. La présidence de l'association est assurée soit par l'Etat, soit par les organisations syndicales patronales, ce qui est le cas actuellement.

Il a indiqué que le budget de l'AFPA s'établissait, en 1999, à 5,428 milliards de francs, dont 4,128 milliards de francs proviennent de la subvention de l'Etat, les autres ressources des entreprises ou encore du Fonds social européen. L'association compte 10.660 emplois équivalents temps plein, les effectifs ayant été maîtrisés malgré la hausse de 10 % en 10 ans du nombre d'heures travaillées par les stagiaires, soit 63 millions d'heures : ces résultats ont été obtenus grâce à la réalisation d'importants gains de productivité. Il a expliqué que la masse salariale résultait de l'obligation pour l'AFPA d'assurer l'équilibre entre ses dépenses et ses recettes, à la manière d'une entreprise, en fonction des commandes de formations bien spécifiques passées par l'Etat et donnant lieu à rémunérations.

M. Gérard Braun s'est interrogé sur l'existence d'une éventuelle inadéquation entre l'offre de formation et les besoins exprimés par le marché du travail.

M. Gilbert Hyvernat a expliqué que, pour éviter une telle inadéquation, l'AFPA entretenait un dialogue permanent avec l'Etat sur la manière de satisfaire les commandes de formation qu'il passait, le dispositif mis en place par l'Etat devant être en permanence évolutif, conformément aux principes du contrat de progrès.

Revenant sur la question des personnels, M. Jean-François Danon a indiqué que l'AFPA comptait, en 1999, 90 % de personnel à temps plein et 10 % à temps partiel.

M. Denis Plasse a indiqué que l'AFPA connaissait parfaitement non seulement le nombre de ses emplois équivalents temps plein mais aussi celui de ses effectifs réels, grâce à la publication, le 25 de chaque mois, de la situation du personnel : l'AFPA compte ainsi 10.020 personnes embauchées en contrat à durée indéterminée. La gestion de la quasi-totalité des personnels est décentralisée au niveau des établissements, le siège ne comptant que 600 employés. Il a observé que l'outil informatique avait permis de réaliser de grands progrès dans le contrôle de la paye.

M. Gilbert Hyvernat a ajouté que, à la fin des années 1980, les personnels embauchés en contrat à durée déterminée avaient occasionné quelque inquiétude en raison de la méconnaissance de leurs effectifs exacts. Toutefois, les améliorations apportées depuis lors à leur gestion permettent désormais d'en connaître avec précision les effectifs et la masse salariale.

Il a indiqué que les personnels de l'AFPA étaient composés à 59 % d'hommes et à 41 % de femmes, ces dernières étant toutefois majoritaires parmi les personnels à temps partiel et les psychologues. Il a ajouté que le taux d'absentéisme annuel était de 16 jours par agent, soit un taux d'absentéisme moyen de 4,7 %.

M. Gérard Braun s'est enquis de la situation de la pyramide des âges à l'AFPA.

M. Denis Plasse a indiqué que l'âge moyen des personnels de l'AFPA était de 42 ans. Il a précisé que la mise en oeuvre de l'ARPE avait suscité de nombreux départs en retraite, mais que les départs seraient très importants à partir des années 2002 et 2003, allant passer de 200 à 300 par an actuellement à 1000 vers 2004, ce qui n'ira pas sans poser des problèmes de recrutement.

M. Gilbert Hyvernat a ajouté que le contrat de progrès en cours accordait une place très importante à la qualification des personnels, et avait engagé une réflexion, suite à la mise en oeuvre du programme national d'action pour l'emploi, sur l'adaptation de l'AFPA à l'accueil et à l'accompagnement des stagiaires de la formation professionnelle, les publics les plus en difficulté notamment. Le contrat de progrès est également axé sur le renforcement des liens avec l'ANPE, par la mise en place de services intégrés destinés à mieux satisfaire les demandeurs d'emploi. Enfin, l'AFPA doit développer ses partenariats, notamment avec les collectivités territoriales, les conseils régionaux en particulier : c'est dans cet esprit qu'ont parfois était conçus des systèmes informatiques communs.

Il a ajouté que l'AFPA disposait, pour remplir ses missions, d'environ 400 implantations sur l'ensemble du territoire, même si, à la différence du réseau de l'ANPE, leur répartition n'était pas toujours suffisamment cohérente avec les bassins d'emploi. Il convient ainsi de mentionner l'existence de 180 centres de formation et de 250 centres d'orientation.

M. Gérard Braun a souhaité savoir si l'AFPA conduisait une réflexion sur la manière d'organiser un meilleur maillage du territoire.

M. Gilbert Hyvernat a indiqué qu'une telle réflexion était en cours et qu'elle visait à adapter le dispositif existant. Il a ajouté que des conventions tripartites entre l'Etat, les régions et l'AFPA avaient été signées dans 16  régions afin de mieux répartir les moyens. Il a fait remarquer que l'Etat avait souhaité que le maximum des personnels de l'AFPA soit au contact de ses usagers, et que les effectifs remplissant des tâches administratives soit limités. Par ailleurs, l'Etat a exprimé le souhait que l'accroissement des moyens de l'AFPA soit recherché en interne, par la réalisation de gains de productivité.

En matière de rémunérations des personnels, il a rappelé que l'accord du 4 juillet 1996 avait distingué le système applicable à l'AFPA de celui des arsenaux, auquel il était auparavant lié. La rémunération d'un agent de l'AFPA se décompose désormais en quatre parties : l'appointement individuel de base, qui représente 82 % de la rémunération totale, la prime d'expérience, liée à l'ancienneté et qui constitue le dernier élément de la rémunération présentant un caractère d'automaticité, soit 6,2 % de la rémunération, une prime d'un montant de 942,42 francs par mois, instaurée en 1968 afin de lisser les écarts de salaires, soit 4,8 % de la rémunération, et, enfin, une prime correspondant à un 13 ème mois, soit 7,7 % de la rémunération.

Il a rappelé qu'un contrôleur d'Etat, nommé par arrêté du secrétaire d'Etat au budget, était placé auprès de l'AFPA, afin de contrôler ses recettes et ses dépenses, mais que son rapport n'était pas adressé à la direction générale de l'association, seulement à Bercy.

M. Gérard Braun a voulu connaître l'état des négociations relatives au passage aux 35 heures au sein de l'AFPA.

M. Gilbert Hyvernat a indiqué qu'un accord de réduction du temps de travail avait été conclu le 24 décembre 1999, mais qu'il avait été signé, du côté des organisations syndicales, par la seule CFDT. Le passage aux 35  heures devrait néanmoins permettre la création de 520 emplois sur les années 2000 et 2001, dont 78 emplois-jeunes.

M. Denis Plasse a noté que le contrôle des emplois reposait sur une contractualisation avec les délégations régionales, qui permet de fixer un plafond d'effectifs, puis, dans le cadre de cette référence, d'adapter la gestion des personnels en cours d'année. Il a ajouté que ce contrôle des effectifs se doublait d'un contrôle financier réalisé par la commission interministérielle de contrôle des salaires. En 1999, l'évolution salariale moyenne avait été fixée par voie contractuelle à 1,2 %, mais elle s'est révélée, in fine , inférieure à ce taux, ce qui démontre la maîtrise de la masse salariale.

M. Gérard Braun a souhaité savoir si le système retenu pour déterminer le nombre des personnels au sein des délégations régionales engendrait des problèmes particuliers.

M. Gilbert Hyvernat a rappelé qu'il existait 22 contrats régionaux d'objectifs traduisant les arbitrages arrêtés en matière d'effectifs à partir des propositions et des demandes formulées par chacune des directions régionales de l'AFPA.

M. Denis Plasse a ajouté qu'il existait un phénomène d'héliotropisme qui peut être préjudiciable, en matière de gestion des personnels, aux régions du Nord de la France, dans lesquelles sont affectés de nombreux agents débutants, qui, ensuite, demandent leur mutation vers le Sud. Cette situation comporte des risques, tant pour le Nord, où des compétences peuvent être perdues suite à une forte mobilité des agents, que pour le Sud, où l'âge moyen des agents est plus élevé.

M. Gilbert Hyvernat a indiqué qu'aucun agent de l'AFPA n'était détaché auprès d'une autre administration ou organisme. 53 agents de l'association sont mis à disposition, essentiellement au profit de la délégation générale pour l'emploi et la formation professionnelle du ministère de l'emploi et de la solidarité, où ils bénéficient des mêmes conditions de rémunérations. Les décharges syndicales représentent 39 emplois équivalents temps plein, cette proportion étant conforme à l'accord du 16 avril 1997 sur le droit syndical.

Il a indiqué ne pas se sentir directement concerné par les critiques émises par la Cour des comptes dans son rapport sur la fonction publique. Il a rappelé que l'AFPA faisait régulièrement l'objet de contrôles de la part de la Cour des comptes comme de l'IGAS. Il a conclu en estimant que l'AFPA devait entreprendre une réflexion lui permettant d'être capable de renouveler en permanence ses compétences, face aux progrès rapides en matière de technologies de l'information par exemple, et continuer de réformer son organisation afin de dégager de nouveaux gains de productivité.

M. Didier BANQUY, sous-directeur de la 6 ème sous-direction du Budget au ministère de l'économie, des finances et de l'industrie
- Mercredi 29 mars 2000 -

M. Didier Banquy a rappelé que la direction du Budget comportait sept sous-directions, dont deux ont une compétence horizontale, la 1 ère sous-direction étant en charge de la définition et de la synthèse de la politique budgétaire, et la 2 ème gérant la politique salariale et les différents corps des trois fonctions publiques. Les cinq autres sous-directions se répartissent les budgets des différents départements ministériels, la 6 ème sous-direction étant compétente pour l'ensemble du secteur social : le budget du ministère de l'emploi et de la solidarité, de la formation professionnelle, mais aussi, d'une manière générale, l'ensemble des transferts et des comptes sociaux (assurance chômage, minima sociaux, régimes spéciaux de retraite, régimes complémentaires...). La 6 ème sous-direction comprend trois bureaux, soit 21 personnels de catégorie A et 5 de catégorie C. Ses activités sont axées sur le pilotage global des finances publiques dans son domaine de compétence, sur la participation à l'élaboration et au suivi des politiques sectorielles correspondantes, ainsi que sur la préparation du budget du ministère de l'emploi et de la solidarité.

Il a souligné que le Gouvernement souhaitait que chaque administration soit progressivement en mesure de préciser les quatre éléments d'information suivants : la définition des missions et des actions de chaque ministère ; la connaissance du coût de chacune de ces missions, qui implique d'adopter une comptabilité analytique ; les objectifs que se fixe chaque administration et les moyens de les atteindre ; l'analyse des résultats obtenus. C'est l'objet de la circulaire du Premier ministre du 21 février 2000. Les deux premières améliorations devraient être apportées prochainement avec la présentation de rapports de gestion accompagnant le projet de loi de règlement du budget 1999, et la réforme des agrégats budgétaires qui devrait intervenir à l'occasion de la présentation du projet de loi de finances pour 2001.

M. Didier Banquy a rappelé que le budget de l'emploi s'inscrivait dans un contexte marqué par l'apparition au cours des 30 dernières années d'un chômage de masse. La politique de l'emploi a dès lors progressivement privilégié un traitement différencié des différentes populations concernées, des dispositifs spécifiques étant élaborés pour chacune des grandes catégories de demandeurs d'emplois, salariés âgés, jeunes, chômeurs de longue durée... A partir du début des années 1990, cette politique de l'emploi s'est accompagnée d'une politique plus transversale reposant sur l'exonération de charges sociales, afin de réduire le coût du travail peu ou pas qualifié et d'enrichir la croissance en emplois. Cette voie reste privilégiée aujourd'hui, la mise en oeuvre de la réduction du temps de travail s'accompagnant de l'extension de l'allégement des charges sociales. En outre, il convient de souligner que la politique de l'emploi est de plus en plus soumise à un impératif de cohérence communautaire. C'est dans ce cadre qu'est élaboré le programme national d'action pour l'emploi qui rappelle les orientations des politiques de l'emploi nationales et qui mentionne les objectifs à atteindre. Ce programme est soumis au Conseil des ministres de l'Union européenne et fait l'objet d'un avis de la Commission européenne.

M. Gérard Braun a noté que les dirigeants européens évoquaient de plus en plus la convergence de leur politique de l'emploi, comme lors du récent sommet de Lisbonne, mais s'est demandé si cela avait des effets tangibles au niveau des administrations nationales.

M. Didier Banquy a confirmé que les échanges entre administrations nationales chargées de l'emploi étaient de plus en plus fréquents, les réflexions menées au niveau communautaire portant sur le coût du travail, sur la formation professionnelle ou encore sur la meilleure manière de favoriser le retour sur le marché du travail de personnes qui en ont été longtemps exclues.

Il a rappelé que la dépense totale consacrée à l'emploi s'élevait à environ 390 milliards de francs, soit 4,5 % du produit intérieur brut, répartis ainsi : 160 milliards de francs sont pris en charge par le budget de l'Etat (avant la création du fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale), 140 milliards de francs sont versés par le régime conventionnel de l'assurance-chômage, 70 milliards de francs interviennent au titre de la formation professionnelle - 55 milliards pour les entreprises et 15 milliards pour les collectivités territoriales -, et environ 15 milliards de francs représentent le coût des exonérations de charges sociales non compensées, car décidées avant la loi Veil de 1994, auxquels il conviendrait d'ajouter les dépenses fiscales. S'agissant du budget de l'emploi " stricto sensu ", c'est-à-dire des dépenses prises en charge directement par le budget de l'Etat, il a plus que doublé sur la période 1990-1999.

A cet égard, il a tenu à relativiser l'assertion selon laquelle l'évolution des effectifs du ministère de l'emploi n'aurait pas été corrélée à l'accroissement de ses missions, la qualifiant d'" erronée car partielle ". Il a estimé, en effet, que la corrélation entre les effectifs dont dispose le ministère de l'emploi et l'évolution des crédits d'intervention traduisant les politiques qu'il doit mettre en oeuvre ne revêtait aucun caractère automatique, en raison des activités du ministère qui sont " sous-traitées " aux personnels d'autres structures : ainsi, l'UNEDIC gère-t-elle les retraits d'activité, tandis que l'ACOSS assure une partie importante de la politique d'exonération de charges sociales, qui explique, en termes de crédits, 70 % de l'augmentation du budget de l'emploi. De même, l'essentiel de la mise en relation demande/offre d'emplois est géré par l'ANPE, et les actions de formation professionnelle sont assurées par des centres de formation. A l'inverse, certaines activités du ministère exigent des emplois alors qu'elles ne sont guère consommatrices de crédits, telles que la production de la réglementation applicable en matière de droit du travail, les tâches de l'inspection du travail, ou encore la mise au point de systèmes d'informations ou d'études internes au ministère. Dans ces conditions, le rapprochement mécanique de l'évolution des effectifs du ministère et de l'évolution du budget de l'emploi n'a guère de sens et de pertinence.

M. Didier Banquy a indiqué que les observations de la Cour des comptes concernant la gestion des personnels des services déconcentrés du ministère de l'emploi n'appelaient pas d'observations particulières, et a considéré que le rapport de la Cour des comptes posait, plus largement, le problème de la définition de l'emploi budgétaire, l'ordonnance de 1959 relative aux lois de finances ne mentionnant que la notion d'emploi. Il est donc impératif de mener une réflexion sur la définition des métiers de la fonction publique et la façon dont les emplois correspondants sont retracés dans les documents budgétaires. Il a néanmoins considéré que les écarts existant entre les emplois budgétaires inscrits en loi de finances et les effectifs réels étaient quasiment inévitables en raison des aléas intervenant en cours de gestion, et du poids des effectifs. Il est seulement possible d'expliquer ces écarts. Un contrôle des emplois plus efficace exige une responsabilisation accrue du service gestionnaire.

Il a ensuite présenté les trois phases de la préparation et de l'exécution du budget de l'emploi. La première phase est essentiellement interne à la direction du Budget : elle consiste, à partir d'une projection budgétaire à trois ans, d'analyser la façon dont les objectifs pluriannuels ainsi déterminés pourront être atteints, cette procédure découlant du programme pluriannuel de finances publiques que le Gouvernement élabore suite au Pacte de stabilité et de croissance ; dans le même temps, des discussions contradictoires sont menées avec le ministère de l'emploi à partir des résultats de l'exécution du budget de l'année précédente. La deuxième phase est celle des conférences budgétaires au cours desquelles les demandes du ministère sont examinées, puis les arbitrages arrêtés. Enfin, la troisième phase, dont l'importance est souvent sous-estimée, consiste à mettre en oeuvre le budget tel qu'il a été voté par le Parlement, ce qui recouvre les activités de gestion, la publication des textes réglementaires, la définition de procédures d'évaluation, ou encore les relations avec les partenaires du service public de l'emploi.

M. Gérard Braun a voulu savoir comment les dotations budgétaires allouées aux organismes participant au service public de l'emploi étaient déterminées.

M. Didier Banquy a noté que l'ANPE ou l'AFPA étaient étroitement associées aux discussions budgétaires, même si la direction du Budget essayait de réduire le nombre de ses interlocuteurs au cours de la phase d'élaboration du projet de loi de finances, dans la mesure où elle considère qu'un maximum d'arbitrages doivent être effectués au sein du ministère.

Il a indiqué que, en ce qui concerne les personnels, les priorités du budget de l'emploi étaient allées, au cours des dernières années, au renforcement des effectifs de l'inspection du travail et à la régularisation de situations anormales, en particulier la résorption de l'emploi précaire, de telle sorte que la plupart des dysfonctionnements constatés par la Cour des comptes dans son rapport avaient disparu ou étaient en voie de régularisation. Il a cependant regretté que le ministère ne procède qu'insuffisamment à une réflexion sur l'évolution de ses métiers et à l'adaptation de ses personnels à cette évolution.

M. Gérard Braun a voulu savoir quelles étaient les relations de la 6 ème sous-direction du Budget avec le contrôleur financier placé auprès du ministère de l'emploi et de la solidarité.

M. Didier Banquy a indiqué que le contrôleur financier adressait un rapport annuel à la 6 ème sous-direction, et qu'il participait aux conférences budgétaires organisées dans le cadre de l'élaboration du projet de loi de finances. Il vise notamment les ouvertures de postes mises aux concours organisés par le ministère. En tant que de besoin, le contrôle financier prend l'attache de la direction du budget, ou inversement.

M. Gérard Braun s'est interrogé sur le contrôle exercé par la 6 ème sous-direction du Budget sur les personnels du ministère de l'emploi mis à disposition, détachés ou bénéficiant d'une décharge syndicale.

M. Didier Banquy a indiqué que ce contrôle était effectué par le contrôleur financier et non par la 6 ème sous-direction. Il a toutefois ajouté que la diminution des effectifs de l'administration centrale était souvent compensée par le recours à des personnels affectés dans les services déconcentrés d'Ile-de-France, ou à des mises à disposition de personnels provenant d'établissements publics placés sous sa tutelle.

M. Dominique-Jean CHERTIER, directeur général de l'Union nationale pour l'emploi dans d'industrie et le commerce
- Mercredi 29 mars 2000 -

M. Dominique-Jean Chertier a rappelé que l'Union nationale interprofessionnelle pour l'emploi dans l'industrie et le commerce (UNEDIC) et les associations pour l'emploi dans l'industrie et le commerce (ASSEDIC) étaient des associations de droit privé régies par la loi de 1901. Il convient d'ajouter à cet ensemble les centres informatiques des ASSEDIC (CIA) et le groupement des ASSEDIC de la région parisienne (GARP). Les missions du régime d'assurance-chômage, telles qu'elles sont fixées par ses statuts, sont relativement larges : peuvent être cités la réalisation d'études et de recherches dans le domaine de l'emploi ; la détermination de mesures de nature à favoriser le reclassement des chômeurs ; le recouvrement des contributions des employeurs ; l'indemnisation des demandeurs d'emploi, soit le versement des allocations d'assurance-chômage, mais aussi, pour le compte de Etat, celui des allocations du Fonds de solidarité telles que l'allocation d'insertion, l'allocation spécifique de solidarité, l'allocation spécifique d'attente, l'allocation aux chômeurs créateurs ou repreneurs d'entreprise, ou encore les allocations de formation cofinancées par l'Etat, l'allocation de formation-reclassement en particulier ; la gestion de l'association de gestion des salaires (AGS).

Il a indiqué que l'UNEDIC était amenée à prendre plusieurs types de mesures. Il y a d'abord les mesures décidées par les partenaires sociaux, et notamment les trois conventions destinées à rétablir l'équilibre financier du régime d'assurance-chômage : la convention de 1991 a instauré un contrôle des demandeurs d'emploi, celle de 1992 a institué la dégressivité de l'allocation-chômage, et celle de 1993 a renforcé cette dégressivité, afin notamment d'inciter davantage les demandeurs d'emploi à reprendre une activité. Au cours de cette période l'UNEDIC a dû procéder à la restructuration de sa dette, qui s'établissait à 35 milliards de francs en novembre 1993, et qui l'obligeait à souscrire des emprunts sur le marché financier à des taux d'intérêt très élevés engendrant des frais financiers considérables. En janvier 1994, elle a donc souscrit un emprunt obligataire de 22 milliards de francs qui, complété par un plan de redressement drastique, a permis d'assainir sa situation financière. L'UNEDIC avait alors signé une convention avec l'Etat par lequel celui-ci s'engageait à rembourser la première tranche de cet emprunt, soit 10 milliards de francs. Après avoir vainement tenté de ne pas honorer ses engagements, l'Etat a fini par rembourser les 10 milliards de francs, au titre des " dépenses exceptionnelles " de la loi de finances rectificative pour 1999. Par ailleurs, les gestionnaires de l'UNEDIC peuvent adopter des mesures d'activation des dépenses : il convient de citer, par exemple, la convention de coopération ou l'ARPE. Enfin, les partenaires sociaux peuvent mettre en oeuvre des réformes fonctionnelles, qui ont beaucoup moins d'écho mais qui n'en sont pas moins importantes. C'est le cas de la centralisation de la gestion de la trésorerie des ASSEDIC, de la certification légale des comptes, qui constitue un élément important de normalisation des procédures de gestion, ou du développement de la polyvalence des agents. Il a ajouté que, suite aux recommandations d'un rapport de l'IGAS, l'inscription des demandeurs d'emplois est désormais effectuée, non plus par l'ANPE, mais par l'UNEDIC, cette modification de ses tâches ayant inévitablement suscité une réflexion en son sein sur la façon de gérer les flux et de dégager des gains de productivité. Les moyens d'accessibilité des services à distance ont également été développés, comme les bornes d'accueil ou les visioguichets installés dans les zones moins bien desservies.

M. Dominique-Jean Chertier a ensuite décrit les types de relations que l'UNEDIC entretenait avec le ministère de l'emploi. Ce dernier a une fonction essentielle en matière de réglementation, donnant son agrément aux textes établis par les partenaires sociaux. Pour 30 milliards de francs, l'UNEDIC a une fonction de prestataire de service de l'Etat pour le paiement de certaines allocations, dont l'allocation de solidarité spécifique (15 milliards de francs par an). Leurs relations sont également financières, l'Etat versant à l'UNEDIC des frais de gestion et des avances mensuelles au titre du paiement des allocations. Enfin, le régime d'assurance-chômage est à la source des premières informations sur l'emploi et le marché du travail, qui sont ensuite retraitées par le ministère. Il a toutefois rappelé que l'Etat imposait parfois à l'UNEDIC certaines mesures telles que le doublement de la contribution dite Delalande, dont le produit a alimenté les caisses de l'Etat à hauteur de plus d'un milliard de francs, mais dont le coût de recouvrement est à la charge du régime d'assurance-chômage. Le président de l'UNEDIC a d'ailleurs engagé un recours devant le Conseil d'Etat à la suite de cette décision.

Il a ensuite présenté les moyens dont disposent l'UNEDIC et les ASSEDIC. Leurs effectifs s'établissent à 14.259 personnes, dont moins de 4 % en contrat à durée déterminée. Le siège compte seulement 340 personnes, l'objectif étant d'éviter l'apparition d'un phénomène de bureaucratisation. Quant au budget de fonctionnement, il s'établissait à 7,66 milliards de francs en 1998. Les frais de personnels et les dépenses d'informatique représentent 70 % de ce budget, dont le montant doit être rapproché des masses financières considérables gérées par l'assurance-chômage.

Il a indiqué que l'UNEDIC faisait l'objet de nombreux contrôles, au niveau interne, y compris du contrôleur d'Etat, comme de la part de corps d'inspection, en particulier l'inspection générale des finances et l'inspection générale des affaires sociales. La Cour des comptes a elle aussi procédé à un certain nombre de contrôles : contrôle de certaines ASSEDIC, du système informatique, de la certification légale des comptes, de la gestion du personnel, ou des techniques de recouvrement des contributions, les conclusions de ce dernier contrôle ayant fait l'objet d'une insertion dans le dernier rapport public de la Cour. Il a toutefois estimé qu'un même sujet pouvait faire l'objet de plusieurs contrôles, et qu'une meilleure coordination de ces derniers mériterait d'être recherchée.

M. Dominique-Jean Chertier a ensuite indiqué que les salariés du régime de l'assurance-chômage avaient une durée de travail hebdomadaire de 37,5 heures. 10 % d'entre eux travaillent à temps partiel, et 62 % sont des femmes. Il a expliqué que le passage aux 35 heures sans diminution de salaire entraînerait un renchérissement de 6,5 % du coût de l'heure travaillée, ce qui ne manquerait pas d'engendrer une perte de productivité. Il a estimé que la réduction du temps de travail ne pourrait permettre que de préserver des emplois mais non d'en créer, compte tenu de l'amélioration de la situation de l'emploi qui entraînera une baisse d'activité dans le régime d'assurance chômage. Il a ensuite indiqué que l'ensemble des agents recevaient une rémunération égale à 14,58 mois de salaire (allocation de vacances comprise).

M. Gérard Braun a voulu savoir si ce système de rémunération était appliqué à l'ensemble des salariés du régime d'assurance-chômage.

M. Dominique-Jean Chertier a répondu par l'affirmative, à l'exception des directeurs, dont la rémunération annuelle totale leur est versée par douzième chaque mois. Il a précisé que la rémunération mensuelle brute moyenne d'un employé s'établissait à 10.348 francs, à 13.000 francs pour un agent de maîtrise et à 17.000 francs pour un cadre, le taux de prélèvement s'élevant à 24 % environ.

Il a assuré qu'aucun agent du régime de l'assurance-chômage n'était détaché dans la fonction publique, ni dans d'autres organismes ou établissements publics. Il a précisé qu'il existait des règles clairement établies de prêts de personnels internes, entre l'UNEDIC et les ASSEDIC, entre les ASSEDIC entre elles, ainsi que vers les centres de formation. Quant aux décharges syndicales, il a indiqué qu'elles étaient encadrées par la convention collective.

Il a souhaité ne pas commenter les observations figurant dans le rapport de la Cour des comptes sur la fonction publique de l'Etat, mais a simplement estimé que la France devait tirer des leçons des expériences étrangères, en particulier espagnole, allemande ou néerlandaise, en matière de suivi des demandeurs d'emploi, les organismes français chargés de ce suivi n'étant pas, selon lui, suffisamment coordonnés. Les partenaires sociaux se sont d'ailleurs engagés dans une réflexion sur ce sujet comportant de nombreux aspects de comparaison internationale, d'autant plus que la conjoncture économique favorable est propice à la mise en oeuvre de véritables réformes destinées à permettre aux personnes qui ont été durablement éloignées du marché du travail de reprendre une activité.

Enfin, il a estimé que la gestion des personnels du régime d'assurance-chômage devrait être améliorée par la mise en oeuvre d'un triple projet de modernisation portant sur l'organisation-réduction du temps de travail, la restructuration du réseau - le nombre des ASSEDIC devant être porté de 52 à 30 - et l'achèvement de la réforme informatique.

M. André BARBAROUX, directeur général du Centre national pour l'aménagement des structures des exploitations agricoles, accompagné de M. Jean-Marc Vallenet, directeur des actions de formation et d'emploi
- Mercredi 10 mai 2000 -

M. André Barbaroux a indiqué que le CNASEA, jusqu'à présent placé sous la tutelle du ministère de l'agriculture et de la pêche, allait également l'être sous celle du ministère de l'emploi et de la solidarité, le décret procédant à cette modification étant en cours de signature.

M. Jean-Marc Vallenet a expliqué que, en matière de formation et d'emploi, le CNASEA participait aux actions financées par l'Etat (ministères de l'emploi et de l'outre mer), mais aussi par les conseils régionaux. Jouant un rôle de payeur, il assure en particulier la rémunération des stagiaires de la formation professionnelle et le financement des centres de formation ainsi que le paiement des CES, CEC, emplois jeunes et CIA dans les DOM.

M. André Barbaroux a ajouté que le CNASEA avait géré les crédits du FSE dans le cadre des programmes LEADER I, destinés à promouvoir le développement local. Il était intervenu en matière d'assistance technique et financière dans le cadre du programme LEADER II, et devrait intervenir à nouveau comme gestionnaire des crédits dans le cadre de LEADER PLUS.

Abordant la question de l'origine du CNASEA, il a rappelé que les lois d'orientation sur l'agriculture de 1960-62, dites lois Debré-Pisani, avait mis en place un fonds d'aide et de soutien pour l'aménagement des structures des exploitations agricoles (FASASA), dont la vocation était de moderniser l'agriculture française, notamment par une aide apportée à la cessation d'activité des agriculteurs âgés et à la formation professionnelle. Ceci a été complété dans les années 1970 par une aide à l'installation et, dans les années 80, par une aide à la modernisation des exploitations. Ses crédits étaient gérés à l'origine par deux associations professionnelles (AMPRA et ANMER), mais, suite à des différends intervenus avec les organisations syndicales agricoles, ces deux associations ont été dissoutes, et leurs activités reprises par le CNASEA, créé par la loi de finances pour 1966 sous la forme d'un établissement public, dont la nature juridique n'était pas précisée, et géré de façon paritaire par l'administration et les représentants des organisations syndicales agricoles représentatives. C'est l'expérience acquise dans la rémunération des stagiaires de la formation professionnelle agricole qui a conduit le ministère du travail à faire appel à ses services à compter du début des années 80.

M. Gérard Braun a souhaité obtenir des précisions sur le statut du CNASEA.

M. André Barbaroux a indiqué que le CNASEA était, par nature, un établissement public administratif, mais que son décret constitutif de 1966 avait précisé que sa gestion financière et comptable relevait du régime des établissements publics industriels et commerciaux, ce qui lui donne une plus grande autonomie. Ainsi le CNASEA dispose-t-il, non d'un contrôleur financier, qui exercerait un contrôle a priori , mais d'un contrôleur d'Etat, dont le contrôle intervient a posteriori , sauf en ce qui concerne la gestion des personnels.

M. Gérard Braun, observant que le ministère de l'emploi confiait un nombre croissant de tâches à des intervenants extérieurs, s'est demandé jusqu'où pouvait aller ce phénomène.

M. André Barbaroux n'a pas contesté cette analyse, mais a estimé qu'il s'agissait d'une simple modalité d'organisation du service public et que les crédits restaient gérés par un comptable public. Il s'agit, en quelque sorte, pour le CNASEA, de sous-traiter des missions de service public pour le compte du ministère de l'emploi. Il a ainsi expliqué qu'il sous-traitait entièrement la mission de paiement, assumant tant l'instruction des dossiers que le paiement des stagiaires proprement-dit, les contrôles ou les éventuels contentieux.

Il a considéré que, selon lui, l'administration avait intérêt à centrer ses activités sur ses missions régaliennes, en l'occurrence la production des textes, la mise en oeuvre et l'évaluation des politiques publiques, le choix des sous-traitants. Confier des missions spécifiques à des organismes publics qui acquièrent ainsi une compétence spécialisée permet de développer performance et efficacité. Ainsi, un rapport de contrôle commun à l'inspection générale des finances, à l'inspection générale de l'agriculture et à l'inspection générale des affaires sociales, de même que de fréquents contrôles, d'origine nationale ou communautaire, avaient-ils conclu à la faiblesse des coûts de gestion du CNASEA et à la qualité du service rendu. En outre, cette sous-traitance permet de limiter le nombre de fonctionnaires tout en bénéficiant d'une plus grande transparence sur la réalité des effectifs, la gestion des personnels dans les établissements publics étant soumise à des contraintes moins lourdes. Il a précisé que l'administration devait exercer, en contrepartie, un strict contrôle sur les opérateurs qu'elle choisissait comme sous-traitants.

M. Gérard Braun a voulu savoir si, du fait de l'accroissement de ses missions, le CNASEA avait dû créer des emplois supplémentaires, notant qu'une telle sous-traitance devrait logiquement conduire, de façon concomitante, à la réduction du nombre des agents du ministère de l'emploi, ce qui n'est pas le cas.

M. André Barbaroux a estimé que, en l'absence de ces activités de sous-traitance, des emplois supplémentaires auraient dû être créés en plus grand nombre au ministère.

M. Gérard Braun a noté que les dépenses de rémunération du CNASEA avaient crû beaucoup plus rapidement que ses effectifs.

M. André Barbaroux a expliqué que l'augmentation de la masse salariale résultait, d'une part, de l'accroissement des missions du CNASEA, et, d'autre part, des augmentations de la valeur du point fonction publique sur lequel les rémunérations des personnels du centre sont indexées, du GVT et d'un nouveau statut depuis 1992.

M. Joseph Ostermann a souhaité connaître l'activité du CNASEA en ce qui concerne les emplois-jeunes.

M. Jean-Marc Vallenet a indiqué que le CNASEA gérait les emplois-jeunes, à l'exception des aides-éducateurs embauchés par le ministère de l'éducation nationale et des adjoints de sécurité du ministère de l'intérieur. Il assure leur rémunération et réalise des statistiques et des études relatives à ce type de contrats. Il a ajouté que le dispositif des emplois-jeunes demandait des exigences plus grandes en matière de contrôle : il a notamment conduit le CNASEA à concevoir une nouvelle chaîne informatique afin de réaliser des statistiques plus fines, mais aussi pour respecter les dispositions du cahier des charges (états de présences...).

Il a indiqué que ce dispositif était toujours dans une phase de montée en puissance, et a rappelé le nombre d'emplois-jeunes pris en charge par le CNASEA : 60.000 en 1998, 55.000 en 1999, 30.000 en 2000, et probablement en 2001, l'objectif assigné par le gouvernement restant de recruter au total 350.000  emplois-jeunes. Il a précisé que près de la moitié d'entre eux était embauchés par des associations, ce qui rendait d'autant plus important le contrôle de ce dispositif.

M. Gérard Braun a voulu savoir où se situait le siège du CNASEA.

M. André Barbaroux a indiqué que le siège se trouvait à Issy-les-Moulineaux, mais qu'il serait délocalisé à Limoges en 2003, après une longue procédure marquée par la mise en oeuvre puis l'abandon d'un premier projet, puis par le lancement d'un nouveau projet en 1997. Il était donc nécessaire d'assurer le reclassement des personnels qui ne souhaitaient pas quitter la région parisienne.

Il a ajouté que le CNASEA comptait 16 délégations régionales, certaines étant interrégionales. Les régions où il n'y a pas de délégation bénéficient, à la demande des conseils régionaux, de la présence d'un bureau consacré à la formation professionnelle et à l'emploi. Il existe également 4  délégations régionales dans les départements d'outremer, ainsi qu'une mission en Nouvelle-Calédonie et une autre à Mayotte.

M. Gérard Braun s'est enquis du statut du personnel.

M. André Barbaroux a indiqué que tous les personnels du CNASEA étaient des contractuels de droit public en vertu d'un décret de 1992, dont la rédaction est inspirée de celui fixant le statut des personnels de l'ANPE, sauf en ce qui concerne le régime indemnitaire, plus favorable au CNASEA et calqué sur celui des offices agricoles. Il a d'ailleurs rappelé que la majorité du personnel avait refusé la titularisation qui aurait fait d'eux des fonctionnaires en 1983. Celle-ci aurait sans doute donné moins de souplesse à l'établissement. Il a également précisé que le CNASEA comptait 19  fonctionnaires en détachement, ainsi que plusieurs personnels mis à disposition et donnant lieu à remboursement.

M. Gérard Braun a voulu savoir quelles étaient les perspectives de développement du CNASEA.

M. André Barbaroux a indiqué qu'elles étaient au moins doubles : l'aménagement du territoire d'une part, le CNASEA pouvant être amené à gérer les fonds structurels communautaires consacrés à cette politique, et l'environnement d'autre part, le centre allant instruire les dossiers et assurer le paiement des opérations entrant dans le champ de Natura 2000.

Après que M. Jean-Marc Vallenet eut présenté les flux d'entrée des différentes catégories de stagiaires rémunérés par le CNASEA, il a indiqué que celui-ci payait également les subventions aux centres de formation pour le compte des conseils régionaux, soit environ 3 milliards de francs. Le CNASEA, intervenant également pour les départements et les communes en matière de paiement des activités d'insertion, assure, au total, pour le compte des collectivités territoriales, des paiements d'un montant d'environ 6 milliards de francs.

Il a relevé que le respect de la réglementation des différents dispositifs de la politique de l'emploi dans lesquels le CNASEA était amené à intervenir était essentiellement assuré par les dispositions du cahier des charges et de la convention conclue entre les services du ministère de l'emploi et les publics concernés. Par ailleurs, ce respect est aussi assuré par un agent comptable détaché auprès du CNASEA, et par la mise en place de logiciels informatiques permettant d'effectuer un certain nombre de contrôles de cohérence.

M. André Barbaroux a ajouté que, le CNASEA étant amené à effectuer des paiements extrêmement nombreux et portant sur des sommes considérables, les contrôles mis en place devaient se montrer efficaces. C'est pourquoi les logiciels informatiques sont réalisés en liaison avec l'agent comptable et intègrent des processus de contrôle automatique. De même, afin d'enrichir les tâches et de se prémunir au maximum contre toute tentative de fraude, la polyvalence des agents est mise en oeuvre. Un système d'auto-contrôle consistant à organiser chaque jour sur la base de tirages au sort informatiques aléatoires des contrôles croisés des dossiers entre les agents a été mis en oeuvre. Enfin, il existe des contrôles inopinés prenant la forme de contrôles sur place effectués, pendant quelques jours, par une brigade constituée à cet effet et placée sous l'autorité de l'agent comptable. Celle-ci établit ensuite un rapport, transmis à l'inspection générale qui, à son tour, élabore un rapport annuel de synthèse et fait des recommandations sur les mesures ou améliorations de procédure à mettre en oeuvre. Il existe, en outre, un service d'audit interne certifié selon les normes internationales.

M. Bernard GRASSI, président de l'association Villermé
- Mardi 4 juillet 2000 -

M. Bernard Grassi a indiqué que l'association Villermé avait été créée à la fin de l'année 1981, mais que cette création mûrissait depuis plusieurs années, un projet en ce sens ayant échoué en 1976. Elle est née du besoin ressenti par les inspecteurs du travail de disposer d'un lieu de débat sur leurs pratiques professionnelles, que le ministère n'estimait pas opportun de devoir créer. Les propositions syndicales dans ce domaine n'étaient pas jugées adéquates en raison de leurs approches partisanes. Il a toutefois tenu à préciser qu'elle n'avait ni la vocation ni la fonction d'un syndicat.

Il a expliqué que l'objet de l'association Villermé avait évolué.

A l'origine, le propos de l'association visait à accroître l'efficacité des pratiques professionnelles dans le souci d'une meilleure effectivité du droit du travail, perçu comme un droit protecteur des salariés en développement. Mais à partir du milieu des années 1980, le droit du travail, dans ses principes, a commencé d'être contesté : c'est l'époque, par exemple, de la suppression de l'autorisation administrative de licenciement. L'objet de l'association s'est alors enrichi d'une fonction de témoignage sur les réalités sociales et de propositions réglementaires. L'association a rappelé l'importance de l'article R. 611-2 du code du travail qui dispose que les rapports relatant les constats et contenant les recommandations de l'inspection du travail doivent être publiés dans le souci de diffuser la connaissance des réalités sociales. Le ministère du travail, jusqu'à la veille de la Seconde Guerre mondiale, publiait ces rapports, puis a abandonné cette pratique par la suite, les rapports étant remplacés par des études statistiques sur les activités de l'inspection du travail. L'association Villermé s'est donc donné pour objectif de pallier ce qu'elle considère comme une carence du ministère en la matière.

Au milieu des années 1990, dans un contexte de chômage croissant, un dialogue s'est noué entre l'association et le ministère, afin de rendre plus cohérents le droit du travail et la politique de l'emploi. Pour les dirigeants de l'association de l'époque, il s'agissait de " moraliser " la politique de l'emploi grâce à la " culture travail ". De cette période de dialogue sont également issues des modifications réglementaires de première importance. C'est ainsi qu'un projet de loi avait été rédigé afin de donner à l'inspection du travail le pouvoir d'arrêter les travaux de construction de bâtiments dangereux. Cependant, la majorité des adhérents de l'association n'a pas suivi le conseil d'administration, en raison de ses fortes réticences à l'égard de la politique de l'emploi, jugée inefficace en termes d'emploi et déstabilisante pour le droit du travail.

En effet, les inspecteurs du travail regrettent que, trop souvent, la mise en oeuvre de la politique de l'emploi ne poursuive que la seule recherche de résultats chiffrés, en permettant toutes sortes d'abus vis-à-vis des salariés concernés, ce qui paraît difficilement acceptable et génère, des conflits au sein même des services déconcentrés. Le cas des contrats emploi-solidarité illustre bien cette contradiction : ce type de contrats aidés doit permettre à leurs titulaires, soit d'acquérir une qualification professionnelle, soit de trouver un emploi, mais, dans le même temps, son impact sur les chiffres de l'emploi est certain et son utilisation excessive conduit à remplacer des embauches ordinaires par des embauches aidées financièrement, dans une précarité qui conduit les salariés à plus de docilité et de soumission. Il convient, enfin, de regretter que les dispositifs de l'emploi ne donnent lieu qu'à des statistiques chiffrées et non à une réelle évaluation.

Par la suite, devant la mise en cause politique de la réglementation d'origine étatique et la volonté de l'Etat de donner plus de champ à la négociation, l'association a été amenée à reformuler son objet. Le recul de l'Etat a accentué sur le terrain le déséquilibre des relations sociales et a conduit à une dégradation sérieuse des conditions de travail. Face à cette évolution, l'association s'est fixée, en 1998, pour objectif de défendre et promouvoir les droits fondamentaux de l'homme au travail et à un emploi véritable, seul moyen de réintroduire un équilibre.

M. Gérard Braun a voulu connaître le nombre d'adhérents de l'association.

M. Bernard Grassi a indiqué que l'association Villermé comptait entre 220 et 240 membres, dont les deux tiers sont des inspecteurs du travail. Le tiers restant est constitué de contrôleurs du travail, de membres de la hiérarchie administrative ou d'universitaires et de magistrats. En 1999, l'association a reçu une subvention du ministère s'établissant à 50.000 francs. Elle constitue des groupes de travail thématiques en son sein, et est parfois consultée en tant qu'expert. Elle a récemment organisé plusieurs rencontres interrégionales et une réunion nationale, en juin 2000.

M. Gérard Braun a voulu savoir en quoi consistait exactement le " malaise " des inspecteurs du travail, qui avait été évoqué lors de ses déplacements dans les services déconcentrés.

M. Bernard Grassi a expliqué que ce malaise était perceptible à deux niveaux : au niveau de l'inspection du travail toute entière, et à celui des inspecteurs du travail en charge de la mission d'inspection au sens du corps des inspecteurs du travail.

Il d'abord indiqué que nombre d'inspecteurs du travail avaient mal vécu le désintérêt du ministère pour le droit du travail au profit de la politique de l'emploi. En outre, le ministère consacre à ce dernier des moyens considérables, tant en crédits budgétaires qu'en personnels, alors que ceux de l'inspection du travail ont stagné. Il affirme avoir doublé le nombre des inspecteurs du travail mais les effectifs affectés aux sections d'inspection sont restés stables depuis le milieu des années 1980, soit environ 450 inspecteurs, alors que leur charge de travail croissait très fortement. Par ailleurs, des " prélèvements " ont été opérés sur ces effectifs afin d'enrichir les moyens en personnels alloués à la mise en oeuvre des dispositifs de l'emploi, parfois même au détriment du bon fonctionnement des sections. Les inspecteurs ont également mal vécu le refus de leur administration de reconnaître la technicité croissante de leurs tâches, qualité qui est reconnue par presque tout le monde sauf par le ministère. Par ailleurs, l'administration centrale impose parfois des choix qui semblent aberrants tels que la décision de réduire le nombre de secrétaires au sein d'une section, en recourant à l'argument selon lequel l'informatique engendrerait des gains de productivité, alors que les secrétaires tiennent un rôle essentiel au sein des sections qui va bien au-delà de la dactylographie, dans l'interface entre le public et les agents de contrôle.

Le président de l'association Villermé a ensuite abordé la question des contrôleurs du travail. Il a indiqué qu'ils avaient acquis une autonomie de travail grandissante, et que, en dépit de leur technicité et de leurs responsabilités, ils restaient classés en catégorie B. En outre, le malaise s'accroît du fait que les contrôleurs affectés en inspection du travail voient leurs responsabilités s'accroître alors que celles des contrôleurs affectés aux politiques de l'emploi ont considérablement diminué avec la multiplication des cadres A dans ce secteur.

Il a enfin indiqué que le statut d'emploi de directeur départemental posait problème. En effet, un directeur départemental conserve des compétences en matière d'inspection du travail, alors que ce statut risque de l'exposer aux pressions de sa hiérarchie, celles du préfet, en particulier, qui est le supérieur hiérarchique de l'ensemble des chefs des services déconcentrés, ce qui posera problème vis-à-vis de l'indépendance.

M. Bernard Grassi a ensuite présenté le malaise du corps de l'inspection du travail lui-même. Sur le plan horizontal, la possibilité pour un inspecteur d'exercer " hors section " ou encore l'intégration d'inspecteurs de la formation professionnelle dans le corps des inspecteurs du travail ont altéré la " culture travail " de celui-ci, d'autant plus que les fonctions sont radicalement différentes, ce qui nuit même à la mobilité fonctionnelle. Il a en outre déploré l'inadaptation de leur formation.

Sur le plan vertical, les possibilités de promotion au sein des sections d'inspection sont quasiment inexistantes, au point qu'elles manquent d'une hiérarchie et qu'elles ne sont pas animées. Il existe par ailleurs un réel problème de rémunération, les inspecteurs du travail français étant les plus mal payés parmi leurs collègues de l'Union européenne, juste avant les grecs, alors que leur réputation en Europe est grande. Du reste, les comparaisons européennes montrent qu'il y a un inspecteur du travail pour 15.000 salariés en France, contre un pour 5.000 en moyenne communautaire. Enfin, l'évolution indiciaire du corps des inspecteurs du travail dans les autres fonctions a été beaucoup plus rapide que celle des inspecteurs en section. Ce malaise est tel aujourd'hui qu'il risque de démobiliser définitivement les inspecteurs du travail, et qu'il risque de se traduire par un abandon de compétences préjudiciable à la gestion des ressources humaines nécessaires à l'inspection du travail.

M. Bernard Grassi a précisé que l'association Villermé ne s'était jamais positionnée très clairement sur les orientations de la politique de l'emploi, beaucoup de ses membres estimant que porter un regard critique serait contraire à l'obligation de réserve des fonctionnaires. Il a toutefois ajouté que des positionnements internes avaient été pris, en particulier sur le fait que l'Etat finançait trop souvent des dispositifs excessivement coûteux en regard de leurs résultats en termes d'emplois et dangereux pour le droit du travail.

Il a rappelé que les politiques de l'emploi, depuis le plan Barre de 1977, visaient toutes à agir sur l'insertion des chômeurs. Or, les orientations prises en 1997 ont marqué une rupture, les emplois-jeunes et la réduction du temps de travail ayant pour objet de créer des emplois, ce qui est conforme aux recommandations de l'association Villermé. Il a toutefois estimé que les deux grands défauts des politiques de l'emploi conduites jusqu'à présent subsistaient : la précarité, avec les emplois-jeunes, et la flexibilité avec les 35  heures.

Il a considéré que le dynamisme actuel de l'emploi est en lien direct avec ces nouvelles orientations. Il a rappelé que, malgré ses imperfections, cette nouvelle politique a engendré environ 200.000 emplois jeunes et 100.000 emplois dus à la réduction du temps de travail, soit au moins 600.000 emplois, avec les effets induits, c'est-à-dire l'équivalent de la baisse du chômage. Ceci confirme le bien-fondé du positionnement de son association. Il regrette cependant l'absence de prise en compte des conditions de travail dans la réglementation de la réduction du temps de travail. Il a estimé dangereux de renvoyer ce sujet aux négociations en raison de la faiblesse de la présence syndicale dans la plupart des entreprises, à l'exception des plus grandes d'entre elles. Il a conclu en considérant que les modalités de mise en oeuvre des 35 heures engendreraient une dégradation des conditions de travail, en particulier un développement du harcèlement et de la souffrance mentale au travail, et du climat social général au sein des entreprises.

ANNEXE III


Personnes rencontrées par les rapporteurs au cours de leurs déplacements au sein des services déconcentrés du ministère

Jeudi 6 avril 2000

M. Christian Ville, directeur de la direction régionale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle de Rhône-Alpes

M. Louis Arbelot, Trésorier-Payeur général de la région Rhône-Alpes

Jeudi 4 mai 2000

M. Jean-Paul Chaze, directeur de la DRTEFP du Nord-Pas-de-Calais

M. Paul-Henry Watine, Trésorier-Payeur général de la région Nord-Pas-de-Calais

Jeudi 11 mai 2000

M. Louis Tribot, directeur de la DRTEFP d'Ile-de-France

M. Henri Baquiast, Payeur général du Trésor

Jeudi 18 mai 2000

M. Jean Nitkowski, directeur de la DRTEFP de Midi-Pyrénées

M. Jean-Claude Saffache, Trésorier-Payeur général de la région Midi-Pyrénées

Lundi 29 et
mardi 30 mai 2000

M. Jacques Morel, directeur de la DRTEFP de Corse

M. Alain Bonel, Trésorier-Payeur général de la région de Corse

Vendredi 30 juin 2000

M. Alain Vetterhoeffer, directeur de la DRTEFP d'Alsace

M. Dominique Abraham, Trésorier-Payeur général de la région Alsace

ANNEXE IV


Situation des effectifs de l'administration centrale

ANNEXE V


Situation des effectifs des services déconcentrés

ANNEXE VI


Situation des effectifs par catégorie et par région

ANNEXE VII


Instruction ministérielle du 17 janvier 1995 relative à l'organisation des services déconcentrés

ANNEXE VIII


Lettre du secrétaire d'Etat au Budget du 19 octobre 1999 portant autorisation du déplafonnement des indemnités à l'administration centrale

ANNEXE IX


Circulaire ministérielle du 29 septembre 1999 relative aux moyens en personnels dans le budget 2000

ANNEXE X


Circulaire ministérielle du 28 janvier 2000 relative aux effectifs des services déconcentrés

ANNEXE XI


Lettre du directeur de cabinet de la ministre de l'emploi du 23 avril 1999 relative à la programmation pluriannuelle des effectifs

ANNEXE XII


Lettre de la ministre de l'emploi du 4 janvier 1999 relative à la gestion des heures supplémentaires des agents de catégorie C

ANNEXE XIII


Lettre du Trésorier-Payeur général de la région Rhône-Alpes du 20 mars 2000 relative au contrôle des emplois des agents non titulaires

* 1 Décision 99-423 DC du 13 janvier 2000.

* 2 Il convient en effet de rappeler que 40 % de l'ensemble des fonctionnaires actuellement en activité partiront à la retraite d'ici 2010, et la moitié d'ici 2012.

* 3 Le compte-rendu de cette audition figure en annexe au présent rapport.

* 4 Journal officiel, Débats parlementaires, Sénat n° 94, page 6948 (1999-2000).

* 5 Cette note figure en annexe au présent rapport.

* 6 La note du directeur de cabinet de la ministre relative à la programmation pluriannuelle des effectifs figure en annexe au présent rapport.

* 7 Vos rapporteurs n'aborderont pas dans le cadre du présent rapport les négociations en cours entre les partenaires sociaux, dénommées " refondation sociale ", destinées à renouveler la convention d'assurance-chômage.

* 8 Rapport n° 356, Commission des affaires sociales, 1999-2000.

* 9 En particulier, l'Institut national du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle (INTEFP).

* 10 La note du 4 janvier 1999 relative à cette question, évoquant l'intervention d'une réforme prochaine mais prorogeant le système actuel, figure en annexe au présent rapport.

* 11 Ce cas a fait l'objet d'un courrier figurant en annexe au présent rapport.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page