2. ... alors la sécurité sociale finance déjà les trente-cinq heures, à la différence de l'Etat

« L'idée d'une participation de la sécurité sociale au financement de la RTT n'a jamais été acceptée par les partenaires sociaux. C'est la raison pour laquelle nous avons dû opérer par transferts de recettes au moyen de la « tuyauterie » mise en place dans le cadre des LFSS pour 2000 et 2001. » La note de la Direction de la sécurité sociale du 24 janvier 2001 ne manque pas de franchise.

De fait, sur l'exercice 2000, la sécurité sociale contribue à hauteur de 11 milliards de francs au financement des trente-cinq heures. Ses recettes, qui ont été détournées au profit du FOREC représentent 18,6 % des ressources de ce fonds (59 milliards de francs).

Sur l'exercice 2001, la « participation » de la sécurité sociale est de 18,5 milliards de francs (droits alcools + droits tabacs soustraits de la CNAMTS) sur les 79,3 milliards de francs attendus, soit 23,3 % du total.

Cette participation dépasse ainsi largement ce qui était initialement prévu, puisque la sécurité sociale était censée financer un tiers des nouvelles aides pérennes et incitatives (donc en dehors des 40 milliards de francs de la ristourne Juppé), participation qui pouvait être évaluée à 7 milliards de francs en 2000 (soit un équivalent de 11 % des recettes) et 11 milliards de francs en 2001 (soit 13,9 %).

Ce qui veut dire que, malgré l'opposition des partenaires sociaux et du Sénat, la sécurité sociale participe d'ores et déjà au financement des trente-cinq heures bien au-delà d'une quote-part pourtant elle-même inacceptable : près de 30 milliards de francs en 2000-2001 contre 18 milliards de francs exigés au titre de la clef de répartition établie par le ministre de l'Economie et des Finances.

Parallèlement et simultanément, l'Etat s'est exonéré lui-même de la théorie des retours : il ne finance plus rien des trente-cinq heures. Certes, il a perdu des recettes (tabacs, taxes sur les conventions d'assurance, taxe sur les véhicules de sociétés), mais en contrepartie de diminution de dépenses (ristourne Juppé, allégement de Robien).

En outre, le Gouvernement a mis en place des « tuyauteries » lui permettant de substantielles économies budgétaires au dépens des comptes sociaux : transfert à la CNAF de la majoration de l'allocation de rentrée scolaire et au FSV du financement de la dette contractée à l'égard de l'ARRCO et de l'AGIRC.

Source : rapport Sénat n° 67 (2000-2001) tome I.

Ainsi, en 2001, la loi de financement de la sécurité sociale, devenue « loi de financement des trente-cinq heures », prévoyait les transferts financiers suivants :

Modifications d'affectations de recettes et d'imputations de dépenses
Les « tuyauteries » de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001

(en millions de francs)

Organismes

Mesures

Recettes

Dépenses

CNAMTS

Baisse fraction droits sur les tabacs

-7 096

Disparition fraction prélèvement social de 2 %

-920

Relèvement du taux de la CSG maladie

7 515

CHAA - CHRS

54

Total

-501

54

SOLDE

-555

CNAF

Disparition fraction prélèvement social de 2 %

- 1.495

Majoration allocation rentrée scolaire

4 100

Fraction majorations retraite 3 enfants

2 910

FASTIF

-1 100

Total

-1 495

5 910

SOLDE

-7 405

FSV

Perte des droits sur les alcools

-5 669

Affectation prélèvement social 2 %

2 300

Baisse taux CSG

-7 515

Fraction majorations retraite 3 enfants

-2 910

AGIRC - ARRCO

2 884

Cessation anticipée d'activité

130

Total

-10 884

104

SOLDE

-10 988

ETAT

Taxe sur conventions d'assurance

-3 986

Vignette véhicules des sociétés

-4 000

CHAA - CHRS

-54

MARS

-4 100

FASTIF

1 100

Droits tabacs

-3 138

Suppression contribution Etat au FOREC

-4 300

Cessation anticipée d'activité

-130

AGIRC - ARRCO

-2 884

Débudgétisation de Robien + exos

-3630

Total

-11 124

-13 998

SOLDE

2.874

FOREC

Affectation droits sur les alcools

5 669

Fraction taxe sur les conventions d'assurance

3 986

Vignette véhicules sociétés

4 000

Droits tabacs

10 234

Suppression contribution Etat

-4 300

Dépenses de Robien + exos familiales

3 630

Total

19 589

3 630

SOLDE

15 959

Fonds de réserve

Affectation prélèvement social 2%

115

TOTAL DES SOLDES

- 4.300

- 4.300

Au total, la sécurité sociale a déjà été ponctionnée lourdement et au-delà de ce qu'exigeait l'application d'une théorie qui est désormais ramenée à ce qu'elle n'a jamais cessé d'être : l'habillage d'une confiscation des excédents sociaux.

Et pourtant, face aux déficits persistants du FOREC, le Gouvernement entend, semble-t-il, aller plus loin encore au nom du « bon équilibre pour financer les trente-cinq heures ».

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page