VI. AUDITION DU JEUDI 14 JUIN 2001

AUDITION DU PROFESSEUR JEAN-PIERRE BADER, GASTRO-ENTÉROLOGUE, CANCERS COLORECTAUX

Pr. Jean-Pierre BADER - Je me demande parfois si je ne deviens pas un peu obsessionnel, par rapport notamment aux difficultés que je rencontre dans la promotion de ce dépistage. Malgré tout, ces temps derniers, les choses ont beaucoup évolué. Personnellement, j'ai commencé à m'intéresser à ce dossier depuis à peu près treize ans. Alors que j'occupais des fonctions dans la Société de Gastro-entérologie, j'ai suggéré que l'on utilise le dépistage du cancer par le test Hémoccult, car des éléments de preuve quant à son efficacité apparaissaient.

M. Claude HURIET, président de la mission - Ce dépistage existait donc déjà à l'époque.

Pr. Jean-Pierre BADER - Il existait même bien auparavant : le test au gaiac a plus de vingt ans d'âge. Cependant, la manière dont il a été perfectionné et standardisé par le laboratoire américain qui le produit en fait un outil tout à fait intéressant. Ces événements ont donc eu lieu il y a treize ans. A cette époque, j'ai été chargé de la lecture , l'une des grandes leçons d'une heure, au congrès mondial de gastro-entérologie de Sao Paulo. Au cours de mon exposé, j'ai affirmé que l'on commençait à en savoir suffisamment pour conseiller l'utilisation du test dans le dépistage du cancer colorectal. Malheureusement, j'étais un des seuls à le penser. On m'a répondu qu'il ne fallait pas se lancer dans des opérations de dépistage à grande échelle sans avoir certaines garanties. Ainsi, le combat que je mène consiste à observer l'accumulation de preuves successives allant dans le même sens, mais cela n'a jamais conduit à des actions appropriées.

Les premières de ces preuves sont apportées par les études appelées « cas-contrôle » en épidémiologie : il s'agit de réaliser des tests à la fois sur des personnes atteintes d'un cancer et sur des sujets sains, afin d'évaluer l'influence du dépistage. Cette méthode, certes simpliste, a toujours confirmé l'efficacité de l'Hémoccult en termes de détection des lésions à leur début. Ensuite, en 1995 ou 1996, une vaste étude américaine a été dirigée par Mandel, un grand cancérologue de ce pays. Cette fois, on a formulé un ensemble de critiques : l'étude était américaine, ne concernait que des volontaires, etc.- pour conclure que cette méthode n'était pas intéressante. Des Danois et des Britanniques ont également, séparément et pendant dix ans, mis en oeuvre deux grandes études dont les résultats, publiés en 1997, convergent avec les résultats précédents. Enfin, à Dijon, l'enquête bourguignonne de Jean Faivre a présenté des résultats similaires en 1999.

Le résultat global est le suivant : le test, réalisé sur une population importante, de l'ordre de quelques centaines de milliers d'individus, amène à une participation d'à peu près 50 % et à une baisse de 15 % de la mortalité due au cancer colorectal. Ce taux est relativement faible, mais il renvoie tout de même à des milliers de vies humaines, étant donné que 15.000 à 16.000 personnes meurent chaque année de ce cancer.

Dans ce combat, je me suis heurté à toute une série de réticences, pour utiliser un euphémisme :

Les cancérologues n'ont considéré que récemment que ce cancer les concernait. Ils se préoccupaient essentiellement du cancer du sein, des leucémies ou d'autres affections de ce genre. Leur manque d'intérêt vis-à-vis du cancer colorectal était tel que, pendant très longtemps, il n'y eut pas de gastro-entérologue dans les centres anticancéreux.

Les épidémiologistes n'acceptent pas de se lancer dans des opérations qui ne sont pas totalement validées, car ils recherchent toujours des tests parfaits.

Parce qu'ils procèdent volontiers à une coloscopie devant la moindre suspicion de présence d'un cancer, les gastro-entérologues craignaient qu'on ne réduise leur activité en instaurant un test préliminaire. Depuis deux ans, c'est-à-dire depuis le congrès de Nice de la société de gastro-entérologie, leur position est radicalement différente. Les gastro-entérologues plaident désormais en faveur de ce test. Ils se sont engagés dans la bataille.

Voilà où nous en sommes. Alors que ce test se développe dans de nombreux pays (Etats-Unis, Allemagne, Australie, Israël, etc.), la France n'a absolument pas progressé vis-à-vis de la population cible, c'est-à-dire les 45-75 ans.

M. Claude HURIET, président de la mission - Cette priorité a pourtant été reconnue lors de la conférence nationale de santé en 1998-1999.

Pr. Jean-Pierre BADER - Je lis très régulièrement vos interventions interpellant le Gouvernement sur ce sujet. Je constate qu'on répond toujours la même chose. Il n'est plus possible de dire, depuis plusieurs années, que ce test n'est pas valable. On dit simplement que ce test est bon et qu'il sera prochainement mis en place. Voilà ce qu'on répond systématiquement depuis deux ans.

Je vais maintenant vous montrer quelques-unes des diapositives proposant des éléments chiffrés.

M. Claude HURIET, président de la mission - Comment expliquez-vous le revirement soudain des gastro-entérologues ?

Pr. Jean-Pierre BADER - Il s'explique par les conclusions de la conférence de consensus et les résultats de l'étude de Jean Faivre et peut-être aussi par la pression que j'exerce depuis des années. Lorsqu'en début de semaine j'ai rencontré Gilles Johanet avec le secrétaire général de la société, je lui ai demandé ce qu'il entendait faire et les raisons de leur inaction.

M. Claude HURIET, président de la mission - Que vous a répondu M. Johanet ?

Pr. Jean-Pierre BADER - Il a répondu que notre projet d'organisation n'est pas suffisamment performant.

M. Claude HURIET, président de la mission - Cela renvoie à la réponse qui m'est régulièrement apportée : il faut organiser la mise en place du test...

Pr. Jean-Pierre BADER - Je passe à la première diapositive. Comme vous le savez, en France, les statistiques de mortalité sont très médiocres. Les chiffres de 1998, que vous voyez ici, n'étaient pas disponibles avant la semaine dernière. Les chiffres de 1999 et de 2000 ne le sont pas encore. Ici, sont présentés les niveaux de mortalité par cancer du rectum, code (154), et du côlon, code (153), selon les statistiques officielles de l'INSERM. On observe que depuis douze ans -il n'y a aucune raison que l'évolution des deux dernières années soit différente- les chiffres oscillent entre 15.000 et 16.000 morts par an. Le plus important est de constater la constance de ces chiffres sur cette période, malgré les progrès de la chirurgie, de la chimiothérapie.

Je poursuivrai la présentation des diapositives avec l'incidence. Les chiffres ne datent pas de cette année, mais il n'ont guère évolué. Les morts sont au nombre de 15 à 16.000 ; il y a 33.500 nouveaux cas par an et le taux de survie (41 %) est mauvais. On constate également une prévalence de 5 %o, ce qui signifie que, sur 200 individus âgés de 45 à 75 ans, on découvrira une personne atteinte d'un cancer si l'on procède à un dépistage.

Comment s'explique cette situation ? Le cancer colorectal se caractérise tout d'abord par une longue période asymptomatique. Des symptômes apparaissent ensuite : saignements, maux de ventre, troubles de transit, anémie. En plus de se manifester tardivement, aucun de ces symptômes n'est spécifique. Ce à quoi j'en viens maintenant est, à mon avis, la clef du problème. Il nous faut nous référer aux statistiques détaillées produites par des pays comme les Etats-Unis, le Danemark ou l'Angleterre, qui ont étudié des dizaines de milliers de sujets pendant des années. Il faut d'ailleurs noter qu'aucun test de dépistage n'a autant été étudié dans le monde car, lorsque nous additionnons ces différentes études, nous obtenons des résultats portant sur des centaines de milliers d'individus. Ces études montrent la nécessité du dépistage et nous permettent de comprendre la raison pour laquelle la seule intervention sur les symptômes condamne à mort 50 % des malades dans un délai de cinq ans. En effet, au moment où les symptômes apparaissent, la forme débutante du cancer, ou Dukes A -on entend par là que le cancer n'a pas encore traversé la paroi- représente 11 % des cas au Danemark comme en Grande-Bretagne. En d'autres termes et a contrario, le cancer a généralement déjà traversé la paroi au moment où le symptôme apparaît.

La fiche suivante me paraît très intéressante. Actuellement, deux méthodes sont employées : la coloscopie et le test Hémoccult, consistant à rechercher du sang dans les selles. En France, nous faisons par an plus d'1 million de coloscopies, ce qui est beaucoup par rapport aux autres pays. Lorsque nous procédons à une coloscopie, suite à des symptômes banals (maux de ventre, personnes craintives, etc.), un cancer est détecté 1 fois sur 200. Si nous sommes en présence d'un facteur de risque plus important (des antécédents familiaux, par exemple), la probabilité d'être atteint par un cancer double, c'est-à-dire qu'elle est de l'ordre de 1 %. En revanche, devant un Hémoccult positif, un cancer est découvert toutes les 8 à 10 coloscopies. La différence est donc énorme.

Je conclurai ce volet scientifique en insistant sur le fait que le cancer colorectal est très fréquent. On continue à mourir dans un délai de cinq ans dans 50 % des cas. Par ailleurs, c'est un cancer dont l'évolution précédant l'apparition des symptômes est très longue. Pour améliorer les statistiques de survie, il est donc indispensable de dépister les cas avant la manifestation des symptômes. Le dépistage systématique se présente donc comme la solution la plus appropriée. Pour le réaliser, la coloscopie paraît inadaptée car nous ne pouvons pas faire subir cet examen à des millions de personnes.

Que s'est-il passé ces dernières années ? Comme je l'ai indiqué précédemment, les gastro-entérologues ont d'abord été un peu réticents. Cette tendance s'est progressivement renversée grâce à la multiplication des preuves d'efficacité du test. Cela a permis de faire basculer un grand nombre de spécialistes dans le camp des partisans du test. Lors du congrès de Nice, ils ont affirmé vouloir à tout prix prendre la tête des opérations. Ils se sont tournés vers les ministres et la DGS, où ils ont vu se succéder deux directeurs généraux. J'avais par le passé déjà alerté le premier sur ce sujet. Il m'avait répondu de ne pas m'inquiéter : le dépistage serait mis en place. Six mois plus tard, il m'annonçait par une note manuscrite que cela ne serait pas possible, bien qu'il soit convaincu de la légitimité de mon combat. Lorsque j'ai à nouveau présenté la situation à son successeur, celui-ci a créé un groupe de travail constitué de gastro-entérologues et d'autres spécialistes. Malheureusement, nous n'avons pas beaucoup progressé depuis deux ans, car nous nous heurtons à des difficultés méthodologiques, techniques et psychologiques.

Le cahier des charges prévoit que l'on procède par étapes, plutôt que de généraliser brutalement le test. Il est nécessaire de trouver des départements qui acceptent de se plier à un cahier des charges. Aujourd'hui, vingt départements sont candidats, mais le cahier des charges est en cours d'élaboration depuis deux ans. Cependant, nous pouvons considérer que ce cahier existe de facto depuis quatre ou cinq ans déjà, grâce aux études sur l'Hémoccult menées par exemple dans le Calvados, en Aquitaine ou dans le Nord-Pas-de-Calais au début des années 90.

M. Claude HURIET, président de la mission - Comment expliquez-vous ce retard ?

Pr. Jean-Pierre BADER - C'est probablement dû à une forte réticence de la Caisse. J'ai eu un entretien d'une heure et demie avec Gilles Johanet , Hubert Allemand et Jean-Pierre Etienne, qui préside le Conseil scientifique de la CNAMTS. Ils sont obsédés par l'idée que le système puisse comporter des failles. Ils insistent sur la nécessité de respecter le principe d'égalité des chances, ce qui nécessite la création de listings, la mise en place de surveillances, etc. Ils insistent aussi sur les risques d'une coloscopie proposée à un sujet « sain ».

M. Claude HURIET, président de la mission - Celles-ci sont de toute façon réalisées.

Pr. Jean-Pierre BADER - Non seulement elles sont réalisées, mais elles le sont en grand nombre. En France, nous avons vu actuellement, le nombre de coloscopies s'élever à plus d'un million. J'ai calculé que 200.000 coloscopies seraient suffisantes pour tous les Hémoccult positifs de la population. Les arguments portant sur la multiplication abusive des coloscopies liées au seul test Hémoccult ne sont pas valables.

M. Claude HURIET, président de la mission - Au niveau de la mise en oeuvre, le nombre d'Hémoccult négatifs à prendre en compte en faisant abstraction des faux négatifs ne représente-t-il pas un obstacle ?

Pr. Jean-Pierre BADER - Il y a grosso modo 50 % de faux négatifs.

M. Claude HURIET, président de la mission - Combien faut-il prévoir de tests Hémoccult, dans un laps de temps donné, pour s'assurer que chacun pourra en bénéficier ? Quelle fréquence doit être retenue pour ces tests ?

Pr. Jean-Pierre BADER - Il est très important de le savoir lorsqu'on fait une campagne. Par exemple, à l'issue des dix ans de surveillance de la population danoise, il a été constaté que le nombre d'individus atteints d'un cancer est à peu près aussi important dans la population testée que dans celle qui ne l'a pas été. En d'autres termes, la moitié des cancers a échappé aux tests. D'autre part, la baisse de mortalité observée dans la population testée résulte de la détection précoce d'un cancer. Par ailleurs, les derniers travaux américains de Mandel, qui s'étalent sur plus de dix ans, ont permis d'observer une baisse d'incidence au terme de la douzième année. Autrement dit, le nombre de cancers apparus au sein de la population testée a baissé tardivement, grâce aux éradications de polypes.

M. Claude HURIET, président de la mission - Les chances de réaliser un diagnostic précoce dépendent-elles alors du nombre de tests ? En d'autres termes, faut-il considérer qu'un seul test Hémoccult négatif ne permet pas d'exclure un diagnostic positif. Les chances de réaliser un diagnostic fiable augmentent-elles si l'on procède à deux tests Hémoccult en l'espace d'un mois ? Faut-il envisager d'en faire trois ?

Pr. Jean-Pierre BADER - Cette question a été très étudiée. En fait, le test Hémoccult consiste en la mise en oeuvre de trois tests successifs en trois jours. Nous avons d'ailleurs remarqué que la qualité s'accroît proportionnellement au nombre de jours de tests. Cela a toutefois l'inconvénient de multiplier également le nombre de faux positifs. Il est donc nécessaire de trouver un point d'équilibre entre les différentes alternatives.

M. Claude HURIET, président de la mission - Cela peut-il constituer un argument pour freiner la généralisation du test ?

Pr. Jean-Pierre BADER - Bien sûr que non. Nous ne pouvons nous fonder que sur les résultats statistiques, qui sont similaires dans les trois grandes études nationales déjà menées : en réalisant un test tous les deux ans auprès des personnes cibles (les asymptomatiques de 45 à 75 ans) on parvient à réduire la mortalité de 30 % au sein de la population ayant accepté le test.

M. Claude HURIET, président de la mission - Quel est le coût de ce dépistage en comparaison de celui du cancer du sein ?

Pr. Jean-Pierre BADER - Statistiquement, les coûts du dépistage sont à peu près équivalents pour ces deux cancers. En ce qui concerne le cancer du sein, il est à noter qu'une mammographie positive ne fait que marquer le début du travail de dépistage.

M. Gilbert CHABROUX - Qu'est-ce qui est prévu sur ce sujet ? Quel est l'avis de Bernard Kouchner ?

M. Claude HURIET, président de la mission - Nous l'ignorons. Le point débattu est celui sur lequel j'ai déjà posé plusieurs questions. Cela correspond à la priorité qui a été reconnue par la Conférence nationale de santé en 1998-1999. Il a été affirmé que le dépistage du cancer par Hémoccult devait être mis en place.

Pr. Jean-Pierre BADER - Je me suis souvent entretenu de ce problème avec Bernard Kouchner. Il est lui-même gastro-entérologue et il partage, je pense, mon point de vue. Je pense que ni Bernard Kouchner ni M. Abenhaïm ne sont responsables du blocage. Celui-ci est, me semble-t-il, davantage le fait de la CNAMTS. Un problème humain s'est greffé sur le débat médical. Il faut reconnaître que la CNAMTS s'était complètement engagée dans la mise en place de ce dépistage au début des années 90 : elle a procédé à plusieurs expériences dans le Nord, l'Aquitaine, le Calvados, etc. La CNAMTS a fait preuve de beaucoup de bonne volonté, mais elle a échoué car elle a initié une opération à une échelle démesurée. Elle a transmis des lettres à l'ensemble des assurés sociaux sans prévenir leurs médecins au préalable. Ces derniers se sont trouvés dans l'incapacité de répondre aux questions posées par leurs patients. La stratégie mise en oeuvre était mauvaise : la CNAMTS a souhaité mettre en place un système très complexe qui n'a pas fonctionné.

De cette expérience, les responsables de la CNAMTS conservent une certaine amertume. Il faut également signaler que les points de vue de MM. Spaeth et Gaymard divergeaient fortement à l'époque où ce dernier exerçait les fonctions de ministre. M. Spaeth considérait alors que le test n'avait aucune valeur et que les centres d'examens de santé devaient cesser de l'acheter et de l'utiliser. Il devenait ensuite délicat de faire marche arrière dès lors que des positions aussi tranchées avaient été exprimées. L'idée selon laquelle un meilleur test finira par voir le jour me semble fondée, mais cela adviendra avec un certain délai. Actuellement, je connais un test australien récemment accrédité aux Etats-Unis et qui consiste également à rechercher une présence occulte de sang dans les selles. Ce test me semble plus performant que l'Hémoccult, mais encore quelque temps sera nécessaire à sa validation dans le dépistage. Plus tard encore, des tests de type génétique devraient voir le jour. Il s'agit, d'une façon spectaculaire et presque futuriste, d'analyser l'ADN dans les selles. Enfin, il a beaucoup été question de coloscopie virtuelle, mais cela n'est pas du tout adapté à ce type de dépistage.

M. Claude HURIET, président de la mission - Dernièrement, Bernard Kouchner a décidé d'instaurer une forme de dépistage plus efficace de l'Hépatite B. Cette décision est certainement bonne. J'ai entendu dire qu'elle était très coûteuse au regard des diagnostics habituels. Sur ce sujet, il s'est montré volontaire et il a eu raison. Nous ne comprenons pas vraiment ses réticences concernant la question qui nous préoccupe.

Pr. Jean-Pierre BADER - Bernard Kouchner est très embarrassé parce qu'il partage, je pense, notre point de vue, mais il rencontre de fortes oppositions.

M. Claude HURIET, président de la mission - Nous disposerons vraisemblablement de procédés permettant un dépistage de plus en plus précoce. Ces avancées seront nécessairement soumises à des choix de financement quant aux cancers sur lesquels devront porter les efforts et aux méthodes privilégiées. Finalement, la décision sera fonction des coûts et des bénéfices. Le choix est difficile : il convient en effet d'utiliser une méthode qui ne soit pas contestable par d'autres experts.

Pr. Jean-Pierre BADER - J'insisterai malgré tout sur un point. Plus d'1 million de coloscopies sont actuellement effectuées par an, pour un coût unitaire élevé. Bien qu'aucune étude n'ait été menée à ce sujet, je suis convaincu que beaucoup de ces coloscopies procèdent d'une suspicion ou d'une crainte de cancer colorectal sans facteur de risque particulier. Sans un tri préalable par le test Hémoccult, leur chance de trouver un petit cancer ou un gros polype est souvent faible.

M. Claude HURIET, président de la mission - Ces coloscopies tiennent-elles lieu de dépistage systématique ? Les utilise-t-on dans des situations asymptomatiques ?

Pr. Jean-Pierre BADER - Quelquefois. Certains Américains prônent d'ailleurs la réalisation d'une coloscopie tous les dix ans pour les sujets âgés de plus de 50 ans.

M. Gilbert CHABROUX - Comment interviennent les antécédents familiaux ?

Pr. Jean-Pierre BADER - Les antécédents familiaux multiplient le risque par deux. En cas d'antécédents familiaux, on peut d'emblée opter pour une coloscopie ou effectuer au préalable un test Hémoccult si cet antécédent était le fait d'une personne âgée.

J'ai été ravi de m'exprimer devant vous et je reste à votre disposition.

Il est dans la vocation de la Commission des Affaires sociales du Sénat de se saisir des grands dossiers de société notamment dans le domaine de la santé publique.

Après avoir pris l'initiative des textes conduisant à la prise en charge de la douleur et, en 1999, de la loi concernant la mise en oeuvre des soins palliatifs désormais admis comme un droit pour chaque citoyen, la commission a jugé indispensable d'évaluer notre politique de lutte contre le cancer.

La mission d'information qu'elle a constituée, partant des critiques sévères formulées par la Cour des Comptes, propose les voies et moyens de doter notre pays d'une politique coordonnée efficace et respectueuse des malades.

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