2. Des tâches de plus en plus lourdes

Votre rapporteur a constaté que les TGI étaient confrontés à un alourdissement croissant de leurs tâches. D'abord la loi précitée du 15 juin 2000 a une incidence non négligeable sur l'activité de ces juridictions aussi bien au niveau du siège que du parquet 11 ( * ) . D'une manière générale, les missions des magistrats se sont accrues au fil des ans, notamment celles du parquet. Aujourd'hui, les magistrats sont de plus en plus impliqués dans des commissions dans lesquelles leur rôle est discutable et qui les détournent de leurs missions essentielles.

a) Les conséquences de la loi du 15 juin 2000

Les conséquences de la loi du 15 juin 2000 au tribunal de grande instance de Mulhouse

Le bilan d'étape de l'application de la loi du 15 juin 2000, pour le service du juge des libertés et de la détention, fait apparaître une baisse des mandats de dépôt. Toutefois, ce phénomène est compensé par un formalisme plus lourd qui accroît la charge de travail des greffes pénaux.

Les services du parquet ont ainsi enregistré une augmentation substantielle de leur charge de travail dans le cadre de la gestion des délais de retour des enquêtes menées par les services de police judiciaire ou de gendarmerie. A la date du 19 juillet 2001, 163 procédures transmises pour enquête étaient à reproduire, impliquant la saisine des magistrats sur les suites à donner à la procédure en matière de rappel de l'entité initialement saisie (police, gendarmerie, SRPJ etc). Compte tenu du nombre d'enquêtes en cours (plus de 6.000 à la date du 25 juillet 2001), la gestion des alertes est susceptible de poser des problèmes au niveau de l'organisation et de l'activité du parquet.

Certaines dispositions de la loi précitée induisent en outre l'obligation de fournir des renseignements recueillis sur une base informatique sur les éventuelles périodes de garde à vue des personnes à l'encontre desquelles les enquêtes sont diligentées ainsi que sur les éventuelles constitutions de parties civiles au stade de l'enquête. Or, la mise en oeuvre de ces dispositions est contraignante dans la mesure où ces diligences requièrent plus d'attention lors de l'enregistrement, impliquant notamment la vérification dans la procédure, de la mention de ces divers éléments.

Il est ainsi possible d'évaluer à un temps plein le surcroît de travail généré par ce formalisme. Par ailleurs, le développement de la police de proximité s'accompagne de l'affectation d'un magistrat dans les locaux de la maison de justice et du droit pour exécuter des alternatives aux poursuites. Il doit cependant être assisté d'un greffier. Un demi poste doit être consacré à cette nouvelle fonction.

Pour les greffes des cabinets d'instruction, deux nouvelles obligations vont alourdir les tâches, en particulier dans les dossiers où interviennent de nombreuses victimes : l'obligation, d'une part, d'aviser les victimes de la possibilité pour elles de se constituer partie civile et, d'autre part, de les informer tous les six mois de l'état d'avancement de leur dossier. Un formalisme très lourd est donc instauré en faveur des parties civiles, accroissant les avis et notifications effectués par les greffiers.

Toutes les décisions susceptibles de remettre en cause la liberté individuelle ont été transférées au juge des libertés et de la détention, notamment le contentieux des étrangers de l'article 35 bis de l'ordonnance de 1945 et les décisions prises par le juge délégué en matière de mandat de dépôt. Or, pour le 1 er semestre 2001, ces deux types de constatations ont représenté respectivement 89 et 23 procédures. Le greffe chargé d'assister le juge de la liberté et de la détention va donc voir sa charge de travail alourdie et il est vraisemblable qu'un poste et demi au moins sera nécessaire pour assister ce magistrat.

S'agissant de l'application des peines, les dispositions de la loi du 15 juin 2000 sur la libération conditionnelle vont induire une charge considérable pour le magistrat et le greffier qui l'assiste en raison de l'instauration de débats contradictoires, de la tenue de dossiers individuels pour les détenus, de l'appel des jugements et des ordonnances rendues par le juge de l'application des peines. Il s'agit d'une mutation profonde de la conception du travail de celui-ci.

Il a été reconnu que l'assistance du magistrat lors des débats, les convocations, les notifications, les relations quotidiennes avec le milieu fermé nécessitaient un poste de greffier à temps plein. Un bilan d'étape devra être effectué au terme du premier semestre d'application de ces dispositions pour en mesurer les effets et pouvoir appréhender de manière plus pertinente la charge de travail supplémentaire et les besoins nécessaires à la bonne marche du greffe.

Source : TGI de Mulhouse

Ce constat dépasse largement les conditions de travail des magistrats du TGI de Mulhouse. Tous les magistrats et les personnels de greffe des TGI rencontrés ont été unanimes pour estimer que la mise en oeuvre de la loi du 15 juin 2000 avait accru leur charge de travail.

Ainsi, au TGI de Colmar, on constate que la juridictionalisation de l'exécution des peines a multiplié par deux ou par trois le temps consacré à chaque dossier en vue de la réunion de la commission d'application des peines. En outre, ces réunions ayant été transformées en de véritables audiences, elles nécessitent désormais la présence d'un greffier.

* 11 Dans son rapport sur l'examen des crédits du ministère de la justice pour 2001, votre rapporteur spécial s'était inquiété de la relative désaffection dont faisait l'objet le parquet. En effet, les magistrats du parquet sont soumis à de très fortes contraintes en matière d'horaires et de disponibilité tandis que la médiatisation de leurs fonctions conduit à une remise en cause fréquente de leurs décisions.

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