IV. REVOIR LE CHAMP ET LES PROCÉDURES DE DELIVRANCE DE L'AGRÉMENT

A. UNIFIER LE SEUIL DE L'AGRÉMENT

Le montant d'investissements au delà duquel l'obligation d'obtenir un agrément s'impose varie aujourd'hui selon que l'agrément est réalisé dans un secteur « sensible » ou dans un secteur « non sensible » 52 ( * ) , et selon que l'agrément est réalisé par un investisseur « professionnel » (participant à l'exploitation de l'entreprise) ou « non professionnel » (qui se contente d'investir dans une structure de type SNC). La distinction « professionnel »/« non professionnel » recoupe grosso modo la distinction entre la défiscalisation « en direct » et la défiscalisation « externalisée ».

Selon les informations communiquées à votre rapporteur, environ 10 % des investissements défiscalisés seraient aujourd'hui réalisés directement par les entreprises ultramarines. Bien que la défiscalisation « en direct » doive être encouragée 53 ( * ) car elle permet d'apporter aux entreprises locales une baisse plus importante du montant de leurs investissements, le maintien d'un seuil d'agrément distinct de celui applicables aux investissements « externalisés » ne se justifie plus aujourd'hui.

La distinction entre le seuil applicables aux investissements en direct et le seuil applicable aux investissements « externalisés » s'explique historiquement par la volonté, d'une part, d'alléger les contraintes imposées à ceux qui participent directement à l'exploitation des entreprises de l'outre-mer et, d'autre part, de mieux contrôler les conditions du partage de l'avantage fiscal entre monteurs, investisseurs métropolitains et opérateurs locaux.

Aujourd'hui, le marché de la défiscalisation est suffisamment concurrentiel pour que ce partage n'aboutisse ni à la spoliation des investisseurs, ni à celle des opérateurs locaux.

En revanche, l'agrément reste utile, d'une part, pour évaluer la pertinence économique et sociale de la réalisation d'un investissement, et, d'autre part, pour mettre à jour des pratiques telles que la surfacturation. Or, dans les deux cas, l'opportunité de la soumission à la procédure de l'agrément est la même quelle que soit la forme juridique du financement de l'investissement (« en direct » ou « externalisée »).

De même, la pertinence d'un contrôle administratif, en particulier lorsqu'il s'agit de vérifier la « moralité » du projet, est la même selon que l'investissement est réalisé dans un secteur dit « sensible » ou dans un secteur dit « non sensible ». Il n'y a donc pas de raison d'exiger un agrément au premier franc pour les secteurs « sensibles » et un agrément à partir d'un seuil plus élevé pour les autres secteurs.

Le montant au delà duquel un agrément est nécessaire mériterait donc d'être fixé de manière uniforme . Il pourrait s'établir à 450.000 euros . Ce nouveau seuil, qui correspond à environ 3 millions de francs, serait supérieur au seuil actuel applicable aux secteurs « sensibles », mais inférieur au seuil aujourd'hui applicable aux secteurs non sensibles (760.000 euros). L'objectif recherché à travers le choix, évidemment arbitraire, d'un seuil de 450.000 euros est à la fois d'exempter un nombre plus important de projets réalisés dans les secteurs sensibles afin de décharger les services fiscaux et de donner de la souplesse aux financements de « petits projets », tout en soumettant au contrôle administratif des projets dont le montant n'est pas négligeable et qui échappent aujourd'hui à tout contrôle.

La fixation d'un seuil unique permettrait d'ailleurs d'améliorer la lisibilité des statistiques de l'agrément tenues par l'administration fiscale et retracées chaque année dans le rapport au Parlement. Aujourd'hui, leur interprétation est troublée par l'impossibilité de définir la réalité qu'elles décrivent : elles comprennent à la fois l'ensemble des investissements réalisés dans les SNC qui réalisent plus de 300.000 euros d'investissement par an, l'ensemble des investissements de plus de 150.000 euros réalisés dans les secteurs « sensibles » (les investissements de moins de 150.000 euros étant soumis à l'agrément seulement s'ils sont réalisés par une SNC réalisant plus de 300.000 euros d'investissements par an), l'ensemble des investissements réalisés dans les secteurs non sensibles de plus de 760.000 euros (les investissements réalisés dans ces secteurs étant agréés seulement s'ils sont réalisés par les « grosses » SNC précitées). Un échantillon aussi hétérogène est peu susceptible de produire des résultats faciles à interpréter.

* 52 Dès lors que, comme le propose votre rapporteur, le bénéfice de la défiscalisation serait étendu à l'ensemble des secteurs d'activité, la distinction entre secteurs sensibles et non sensibles devrait logiquement disparaître (à moins que l'ensemble des nouveaux secteurs soient considérés comme non sensible et que le « noyau dur des secteurs « sensibles » soit maintenu).

* 53 Voir le E du V ci-après.

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