C. LA PLACE DES RESSOURCES PROPRES DANS LES RESSOURCES DES COLLECTIVITÉS LOCALES EN DÉBAT

Votre rapporteur général a déjà eu l'occasion de souligner toute l'importance, pour les collectivités locales, de disposer de ressources fiscales, de préférence aux dotations de l'Etat.

En effet, les vingt dernières années ont été marquées par une détérioration du lien fiscal qui unit les collectivités locales et les contribuables locaux , ce qui a mené à la situation paradoxale que le contribuable national est devenu le premier financeur des collectivités territoriales.

Ce constat a fait apparaître toute la pertinence de l'inscription dans la Constitution des dispositions permettant de préserver l'autonomie financière des collectivités , seule apte à garantir un lien durable entre celles-ci et les contribuables. Ainsi, la Constitution dispose désormais, en son article 72 tel qu'il résulte de la loi constitutionnelle n° 2003-276 du 28 mars 2003 que « Les collectivités territoriales de la République sont les communes, les départements, les région, les collectivités à statut particulier et les collectivités d'outre-mer régies par l'article 74. Toute autre collectivité territoriale est créée par la loi, le cas échéant en lieu et place d'une ou de plusieurs collectivités mentionnées au présent alinéa.

« Les collectivités territoriales ont vocation à prendre les décisions pour l'ensemble des compétences qui peuvent le mieux être mises en oeuvre à leur échelon.

« Dans les conditions prévues par la loi, ces collectivités s'administrent librement par des conseils élus et disposent d'un pouvoir réglementaire pour l'exercice de leurs compétences (...) ».

La loi constitutionnelle précitée a notamment introduit deux grands principes qu'il convient de rappeler :

- le principe de juste compensation des transferts, créations et extensions de compétences : « Tout transfert de compétences entre l'Etat et les collectivités territoriales s'accompagne de l'attribution de ressources équivalentes à celles qui étaient consacrées à leur exercice. Toute création et extension de compétences ayant pour conséquence d'augmenter les dépenses des collectivités territoriales est accompagnée de ressources déterminées par la loi » (quatrième alinéa de l'article 72-2 de la Constitution) ;

- le principe d'autonomie financière des collectivités territoriales : d'une part, « [les collectivités territoriales] peuvent recevoir tout ou partie du produit d'impositions de toute nature. La loi peut les autoriser à en fixer l'assiette et le taux dans les limites qu'elle détermine » ; d'autre part, « Les recettes fiscales et les autres ressources propres des collectivités territoriales représentent, pour chaque catégorie de collectivités, une part déterminante de l'ensemble de leurs ressources. La loi organique fixe les conditions dans lesquelles cette règle est mise en oeuvre ».

La part des ressources fiscales dans les ressources des collectivités territoriales

(en %)

Source : informations transmises par le gouvernement dans le cadre de la discussion du projet de loi organique relatif à l'autonomie financière des collectivités territoriales

Dans ce contexte, la discussion actuellement en cours du projet de loi organique relatif à l'autonomie financière des collectivités territoriales revêt une importance toute particulière.

Les débats qui ont eu lieu au Sénat, le 2 juin 2004, autour de la définition à donner aux « ressources propres », particulièrement riches, ont permis d'éclairer les enjeux. Lors de ces débats, votre rapporteur général avait souligné les multiples difficultés qui se posaient au législateur organique : « A ce stade de la discussion, nous avons trois problèmes à résoudre : un problème juridique, un problème financier et un problème politique.

« Le problème juridique est celui de la conformité à la Constitution. M. le ministre et M. Gélard se sont exprimés très clairement à ce sujet. L'article 72-2 de la Constitution comporte le mot « peuvent », ce qui induit, en ce qui concerne la notion de ressources propres, une situation de fait que nous devons prendre en compte.

« En ce qui concerne le problème financier, la proposition de loi constitutionnelle de M. le président Poncelet, en 2000, s'inscrivait, je souhaitais le rappeler, dans un contexte différent de celui qui prévaut aujourd'hui. En effet, il s'agissait des compétences détenues à cette époque par les collectivités. Cette proposition n'anticipait pas sur d'éventuels transferts de compétences de nature à modifier la structure des dépenses comme la structure des ressources.

« Mes chers collègues, si vous avez des idées précises et concrètes sur des impôts d'Etat modulables dans le respect du droit communautaire et susceptibles d'être transférés à nos collectivités territoriales, faites-nous, de grâce, des propositions !

« Vous savez ce qu'il en est du débat sur la TIPP et vous savez que le Gouvernement a vraisemblablement obtenu, après avoir beaucoup argumenté, la capacité de moduler le taux au niveau régional pour les seules utilisations non professionnelles du carburant.

« C'est le maximum que l'on puisse faire dans le respect du droit communautaire, et encore avec une interprétation que l'on peut, à certains égards et par rapport à certains précédents, considérer comme bienveillante. »

« [...] Mes chers collègues, nous pouvons nous interroger sur la marge de manoeuvre dont peuvent bénéficier les gestionnaires de budgets locaux. Personne ne souhaite mettre en oeuvre une gestion standardisée qui soit la même partout. Il faut que des choix s'expriment dans les budgets locaux, et c'est bien sur la part déterminante que l'on doit pouvoir appliquer des politiques différentes.

« En même temps, nous avons tous voulu inscrire dans la Constitution le principe quelque peu antinomique de péréquation. Il faut être conséquent avec ce que nous avons voté et avec ce que nous avons, les uns et les autres, proclamé.

« J'en viens maintenant au problème politique. Nous le savons tous, mes chers collègues, les maires, les présidents d'intercommunalité, les conseillers généraux, les présidents de départements, les conseillers régionaux, les présidents de conseils régionaux expriment de vives inquiétudes.

Naturellement, lors de la négociation sur les transferts de compétences et les ressources correspondantes, il faudra trouver un juste équilibre ».

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page