2. Le plan climat et la nécessaire promotion de solutions non technologiques

• Le plan climat 2004

Le plan climat adopté en 2004 par le Gouvernement a pour objectif de permettre à la France de respecter ses engagements d'ici à 2010 et à l'horizon 2050. Il est structuré en sept chapitres : sensibilisation, transport, bâtiment, industrie, énergie, agriculture et forêt et plans climat territoriaux et État exemplaire.

Dans le cadre des transports, une économie de 16,3 MteCO 2 est visée .

Les mesures 1 à 8 concernent directement l'automobile. Il s'agit de :

* la réduction des émissions des automobiles conformément aux engagements des constructeurs dans le cadre de l'ACEA, soit 3 MteCO 2 en 2010,

* la réduction de l'impact de la climatisation des véhicules : 4 MteCO 2 ,

* la mise en oeuvre de la directive biocarburants : 7 MteCO 2 ,

* la création d'une étiquette énergie : 0,2 MteCO 2 ,

* le bonus-malus à l'achat : 1 MteCO 2 ,

* le respect des vitesses autorisées : 3 MteCO 2 ,

* la sensibilisation à l'écoconduite lors du permis de conduire : 0,7 MteCO 2 ,

* la recherche - plan « véhicule propre ».

Parmi les mesures du plan climat, plusieurs sont en totalité ou pour partie de nature technologique : baisse de consommation, développement des biocarburants, climatisation, recherche, soit 14 MteCO 2 .

Elles seront d'ailleurs particulièrement difficiles à atteindre. Le respect de leurs engagements par les constructeurs est aujourd'hui incertain à l'horizon 2008 et surtout à l'horizon 2012.

L'application de la directive biocarburants est en bonne voie et a même été accélérée par décision du Premier ministre en septembre (voir ci-dessous).

En matière de recherche, le « plan véhicule propre » a été conforté par l'annonce, également en septembre, d'un programme de 100 M€ pour la réalisation d'une voiture familiale ne consommant que 3,5 l/100km. 20 M€ sont disponibles dès 2004.

Cependant, une grande partie de la réussite du plan climat repose sur des mesures non technologiques relevant des comportements individuels : utilisation de la climatisation, conduite économe, attitude à l'achat, respect des limitations de vitesse.

• Information des conducteurs

Un des axes importants est l'information des conducteurs lors de l'achat et de l'utilisation de leurs véhicules. Plusieurs mesures, approuvées par vos rapporteurs, sont mises en place : la formation à l'éco-conduite, la diffusion de bonnes pratiques, la mise en place d'une étiquette énergie.

- L'adoption d'une conduite souple permet des économies substantielles. L'ADEME estime qu'une conduite agressive en ville peut accroître de 40 % la consommation des véhicules. La plupart des entreprises de transport en commun ou de livraison forment désormais leurs conducteurs. L'impact est important lors des premières semaines suivant les formations puis s'estompe partiellement. Une formation continue et une évolution des comportements est donc nécessaire.

- La diffusion des bonnes pratiques auprès des automobilistes est également extrêmement utile car de nombreux gestes peuvent permettre des économies importantes. L'ADEME, en collaboration avec le CCFA, a diffusé 20 millions d'exemplaires d'une plaquette indiquant comment économiser cinq pleins de carburant par an. Intitulée « Dix conseils pour chasser le gaspi en voiture », elle s'intègre dans la campagne « Faisons vite, ça chauffe » sur le réchauffement climatique. Elle pointe comment, par l'entretien rigoureux de sa voiture (filtre à air, gonflage des pneumatiques) et l'adoption de certains comportements (diminution de la vitesse, usage modéré de la climatisation, suppression de la galerie), il est possible de réduire la consommation de 3 à 40 %.

- La mise en place d'une étiquette énergie dans les concessions, sur le modèle de celles existant pour l'électroménager, a été décidée par le Gouvernement sur proposition de la Commission interministérielle du véhicule propre et économe (CIVEPE). Seront ainsi transposés en France en 2006 des dispositifs existant d'ores et déjà dans plusieurs pays européens, notamment le Royaume-Uni, comme vos rapporteurs avaient pu le constater lors de leur mission dans ce pays.

En France cette étiquette permettra de classer les véhicules en sept classes, de A à G, en fonction de leurs émissions de CO 2 .

Classe

CO 2 en g/km

Part des ventes

2004 (%)

Couleur

A

<= 100

0,02

vert foncé

B

101-120

14

Vert

C

121-140

24

vert clair

D

141-160

34

Jaune

E

161-200

20

jaune-orangé

F

201-250

6

Orange

G

>250

2

Rouge

Classes d'étiquetage CO 2 des véhicules particuliers

Cette classification doit permettre d'influer sur la décision d'achat des automobilistes en leur fournissant une information claire et en leur délivrant un signal. Ils restent entièrement libres dans leur choix.

• Incitation des conducteurs

Au-delà de la simple information, il est nécessaire d'inciter les conducteurs à modifier leurs comportements pour les rendre plus compatibles avec le respect de l'environnement. Plusieurs mesures ont été proposées. Toutes n'ont pas été retenues.

Ainsi, un bonus-malus à l'achat avait été envisagé. Le Gouvernement a préféré moduler le coût de la carte grise de véhicules neufs à partir de 200 g de CO 2 /km. Ainsi, au-delà de 200 g, le prix de la carte grise est augmenté de 2 € par gramme et au-delà de 250 g de 4 €. Peu pénalisante, cette mesure se veut être un signal indiquant un achat peu « éco-compatible ». Au regard, de la réglementation européenne, il ne s'agit pas d'une taxe.

Vos rapporteurs sont favorables à l'extension de ce dispositif aux véhicules anciens mais aussi aux véhicules utilitaires légers et aux deux-roues.

Au niveau européen, la Commission européenne a publié, en juin 2005, un projet de directive sur la fiscalité basée sur les émissions de CO 2 des véhicules particuliers. Elle a indiqué sa préférence pour une taxe annuelle de circulation plutôt qu'une taxe unique à l'immatriculation. Il faut d'ailleurs relever que depuis la suppression, en 2001, de la « vignette », qui était en partie fondée sur les émissions de CO 2 (depuis 1998), la France est le seul pays européens à ne plus avoir de taxe à la circulation ou à l'immatriculation.

L'incitation à changer de comportement passe aussi par le respect des limitations de vitesse . Cette mesure à elle seule représente autant que le respect par les constructeurs de leurs engagements, en termes de réduction de consommation soit 3 MteCO 2 .

Une réduction de 10 km/h de la vitesse sur autoroute induirait une réduction supplémentaire de 2 MteCO 2 . Elle n'a pas été retenue par le Gouvernement qui préfère pérenniser l'évolution des comportements vis-à-vis des limitations de vitesse et mettre en place une « signalisation verte » incitant à diminuer sa vitesse de 10 km/h.

Par ailleurs, il faut rappeler que l'INRETS a montré que l'accroissement de la vitesse de pointe de 10 km/h à la construction d'un modèle se traduisait par une augmentation de consommation de 0,4 à 0,7 l/100 km en ville et de 0,2 à 0,3 l/km sur route . Les propositions commerciales des constructeurs et l'attitude des consommateurs sont donc très importantes.

Au-delà des mesures incitatives prévues par le plan climat, vos rapporteurs souhaitent que les mesures incitatives ne soient pas que des mesures négatives réduisant la liberté des conducteurs et accroissant les taxes .

Il est temps de promouvoir des mesures d'incitation positive donnant un avantage aux automobilistes ayant une attitude éco-compatible . Il leur semble que pourraient être utilement mises en avant : la gratuité du parking dans les centres urbains, la possibilité d'utiliser certaines voies réservées, la possibilité de ne pas réduire sa vitesse lors des pics de pollution, d'utiliser sa voiture en cas de circulation alternée...

• La gestion de la circulation

La gestion de la circulation automobile, notamment en milieu urbain est un facteur très important d'augmentation ou de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Si ce point n'entre pas directement dans le champ de ce rapport, il est important d'en connaître l'impact potentiel pour mesurer ce qui peut être gagné grâce à certains progrès ou peut être entièrement perdu par une mauvaise gestion du trafic ou une politique « anti-voiture » organisant la congestion.

L'exemple d'un poids lourds de 40 t sur un trajet de 10 km est une illustration frappante car l'énergie nécessaire à dépasser la force d'inertie est très importante.

Conditions

Consommation sur 10 km

Fluide

75 km/h constants

3,4 litres

Congestion moyenne

15 remises de vitesse de 0 à 30 km/h

16 litres

1 arrêt tous les 400 m en moyenne

15 remises de vitesse de 0 à 90 km/h

25 minutes au ralenti

Congestion forte

85 remises de vitesse de 0 à 30 km/h

15 remises de vitesse de 0 à 90 km/h

1 heure au ralenti

36 litres

• Les marchés d'émission

Enfin, vos rapporteurs estiment qu'une voie nouvelle devrait être explorée, celle de l'incorporation des véhicules particuliers dans le marché européen des émissions de CO 2 .

En effet, dans le cadre du protocole de Kyoto et de la « bulle européenne », la Commission a mis en place un marché d'échange de droits d'émissions de CO 2 . Celui-ci permet d'inciter les entreprises à diminuer leurs émissions tout en minimisant le coût pour chaque entreprise et l'économie européenne dans son ensemble. L'industrie automobile y est déjà soumise pour son activité de production.

La question se pose aujourd'hui de savoir quelles mesures devront être prises si, en 2008 ou en 2012, les constructeurs ne respectent pas leur engagement volontaire de réduire collectivement la moyenne des émissions des véhicules vendus en Europe.

Or, vos rapporteurs ont souligné que des progrès très importants ont été accomplis, mais qu'il serait très difficile d'atteindre les objectifs de 2008 et 2012 et que les constructeurs étaient dans des positions très différentes les uns par rapport aux autres.

Vos rapporteurs proposent donc que la Commission européenne lance les études préliminaires pour évaluer les impacts positifs et négatifs de l'incorporation des émissions des véhicules vendus dans le marché des émissions de CO 2 .

Si la participation des particuliers à ce marché est impossible, il est en revanche envisageable d'attribuer des quotas d'émission à chaque constructeur en fonction de la structure de ses ventes à partir d'une moyenne de consommation, de kilométrage et de durée de vie. Les constructeurs répercuteraient naturellement l'impact financier de ce dispositif sur les prix de vente. Cela permettrait d'influer à la fois sur les comportements d'achat et sur les choix des constructeurs, les moins vertueux étant pénalisés. Un tel dispositif permettrait de préserver la liberté des constructeurs et des automobilistes, tout en les responsabilisant, et d'éviter une nouvelle réglementation et un nouveau recours à la fiscalité.

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