2. Arrivée massive de migrants irréguliers sur les rivages de l'Europe du Sud

L'Assemblée a procédé à un débat d'urgence sur l'arrivée massive, sur les côtes européennes, de migrants originaires d'Afrique, dans des conditions souvent tragiques. Les délégués ont rappelé que les pays d'accueil doivent impérativement respecter les Droits de l'Homme à leur égard, et bien différencier les demandeurs d'asile des migrants économiques. Ils ont appelé la communauté internationale à démanteler les réseaux de passeurs, à favoriser les accords de réadmission et à accroître l'aide publique au développement.

M. Jean-Marie Bockel (Haut-Rhin - Soc) s'est exprimé dans ce débat.

M. Jean-Marie Bockel, sénateur :

« Merci, monsieur le Président, d'avoir été sensible aux protestations de nos collègues, nous permettant ainsi d'aller au terme du débat.

Beaucoup a été dit sur la description des drames qui sont vécus. Responsables politiques que nous sommes, nous devons imaginer dans l'urgence des solutions humaines à des destinées bouleversées par l'exil. Cependant nous devons aussi prendre en compte l'impact sur nos sociétés de l'arrivée de dizaines de milliers de migrants « sans papiers », auxquels nous devons trouver des logements, du travail et des écoles pour leurs enfants.

J'approuve notre rapporteur quand il demande le plein respect des traités internationaux, en particulier de nos conventions. Je l'approuve aussi quand il rappelle le droit des États européens de réprimer l'action des passeurs. Ils doivent être traités comme les criminels qu'ils sont puisqu'ils font courir un danger de mort aux candidats à l'immigration après leur avoir fait subir les pires situations. La faute n'incombe pas à une prétendue « Europe forteresse » qui ne fait que se protéger.

À l'échelle des Vingt-sept, a fortiori des Quarante-six, l'Europe accueille sans doute plus d'un million de migrants réguliers chaque année. Je cite ces chiffres pour rappeler que nos États ne peuvent accueillir sans aucun contrôle tous les candidats à la migration économique.

Notre rapporteur nous invite à «examiner les causes profondes des migrations» pour trouver des solutions durables. Le chantier est immense. Nous en connaissons désormais les éléments déterminants. On sent bien, sur tous les bancs, que des accords s'esquissent. Il s'agit de négocier et de mettre en oeuvre des accords de partenariat entre les États de départ et les États d'arrivée. Il est d'ailleurs souhaitable d'inscrire ces accords dans le cadre plus large d'une politique européenne commune de l'immigration.

Une fois établie une règle du jeu claire et concertée, encore faut-il la faire connaître et s'associer pour qu'elle soit respectée.

Cette coordination s'impose également à l'égard des mesures de régularisation massive évoquées par certains de nos collègues. La France naguère, l'Italie, l'Espagne y procèdent aujourd'hui. Il ne faut pas «jouer perso» en la matière. Une fois régularisés dans l'espace Schengen, les migrants s'installent où bon leur semble. On voit bien alors que les mesures au coup par coup, sans coordination, fonctionnent comme un appel d'air. C'est la raison pour laquelle il faut aller au-delà.

Il faut également « mettre le paquet », si je puis dire, sur une politique de codéveloppement entre États du Nord et États du Sud de la Méditerranée. Pour être efficace, elle doit s'attaquer à plusieurs freins.

D'abord, il convient d'assurer une meilleure transparence dans l'allocation des crédits publics. Il n'est plus possible que seulement un quart des aides publiques au développement soit effectivement dépensé pour les objectifs prévus et que les trois quarts soient plus ou moins détournés.

Ensuite, il faut privilégier une concentration des aides au profit de l'amélioration de la santé, et surtout, de l'éducation, celle des filles devant bénéficier du même effort. C'est le seul facteur qui favorise aujourd'hui la diffusion de l'alphabétisation et, par conséquent, le maintien sur place des professions indispensables au développement.

Ce qu'on appelle volontiers la « bonne gouvernance » est indiscutablement la condition du redressement des économies africaines, de leurs progrès démocratiques ; c'est aussi la seule perspective durable qui, redonnant espoir à ces populations dont la moitié a moins de vingt ans, les encouragera ainsi à développer leur propre pays plutôt qu'à grossir les rangs des déracinés de nos banlieues.

Voilà ce qui me paraît être, de manière concertée, la priorité des priorités. »

A l'issue du débat, l'Assemblée a adopté une Résolution (n° 1521) et une Recommandation (n° 1767) .

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