2. ... implique de développer la couverture assurantielle du risque dépendance...

Le développement d'un financement mixte du risque dépendance, faisant intervenir les assurances, les mutuelles et les institutions de prévoyance aux côtés de la solidarité nationale, suppose que différentes actions soient menées.

A cet égard, la mission dégage trois grandes orientations : une meilleure information du public ; un réaménagement de certains dispositifs existants, notamment en matière d'épargne ; enfin, un développement des contrats de prévoyance.

a) En renforçant l'information du public

Le premier impératif consiste à améliorer l'information dont dispose le public, ce qui recouvre en réalité deux types d'informations distinctes mais complémentaires.

En effet, il faut tout d'abord mettre à la disposition de nos concitoyens des informations claires sur les enjeux de la dépendance , en précisant ce que cette notion recouvre, comment elle peut être prise en charge (maintien à domicile, accueil en établissement) et à quel niveau de prise en charge publique la personne peut prétendre.

Le public devrait également être informé des garanties privées auxquelles il peut souscrire, en complément de la prise en charge publique. Ceci suppose une réelle lisibilité et une meilleure comparabilité des produits d'épargne et de prévoyance offerts sur le marché, afin de permettre à chacun d'avoir une idée claire du schéma de financement global et des options qui se présentent à lui.

Ces informations pourraient être diffusées dans le cadre de campagnes d'informations spécifiques mais requièrent également la mise en place d'un outil d'information simple et clairement identifié , sur le modèle de ce qui a été accompli en matière de retraites avec la création du « Gip Info Retraite ». Ce dernier pourrait lui-même être utilisé à cette fin et aider, très en amont, à fournir des indications permettant aux personnes intéressées de connaître le montant évaluatif de leur retraite et de définir le niveau de protection dépendance qu'il leur faudra envisager de dégager compte tenu de leurs ressources et de leur patrimoine prévisibles 231 ( * ) .

b) En réaménageant certains dispositifs existants, en particulier en matière d'épargne

La deuxième orientation de la mission consiste à utiliser certains dispositifs existants, en particulier des produits d'épargne, afin de permettre une meilleure prise en compte du risque dépendance.

Trois formules ont plus particulièrement retenu l'attention de la mission : l'assurance-vie, l'épargne retraite et le mécanisme de prêt viager hypothécaire.

Ces aménagements auraient un coût relativement limité pour les finances publiques car ils seraient mis en oeuvre dans le cadre des enveloppes existantes.

• Permettre aux personnes qui le souhaitent d'orienter une part des sommes souscrites en assurance-vie vers une garantie dépendance

La première option envisagée par la mission, s'agissant de l'assurance-vie, est celle de la réorientation de certains contrats vers la couverture du risque dépendance.

Cette transformation devrait pouvoir s'effectuer sans qu'elle soit considérée comme une novation fiscale , c'est-à-dire sans coût ou pénalité pour l'assuré. Le but est de parvenir à ajouter une option dépendance aux contrats en cours sans conséquence sur l'antériorité des contrats.

On pourrait alors s'inspirer du mécanisme prévu pour la transformation - dite « transformation Fourgous » 232 ( * ) - de contrats monosupports en contrats multisupports investis pour une part en unités de compte, cette transformation n'entraînant pas les conséquences fiscales d'un dénouement du contrat.

Deux modalités pourraient être envisagées : d'une part, la possibilité de modifier le contrat pour y inclure une sortie en rente en cas de dépendance ; d'autre part, la possibilité d'utiliser tout ou partie des sommes inscrites sur le contrat afin de payer une prime permettant de souscrire à un contrat de prévoyance dépendance, les primes exigées étant d'autant plus élevées que la souscription est tardive.

Ces dispositions seraient de nature à optimiser l'utilisation des sommes investies en assurance-vie - dont l'encours total a atteint 1 146,4 milliards d'euros en 2007 233 ( * ) - et apporteraient également une réponse aux personnes plus âgées qui n'ont pas pu souscrire des contrats de prévoyance .

Elles pourraient, en outre, contribuer à allonger la détention des sommes investies en assurance vie , ce qui apparaît souhaitable à la mission, d'un point de vue macroéconomique.

Par ailleurs, une autre mesure, dont le coût n'est pas chiffré à ce stade, a été évoquée par certains interlocuteurs de la mission. Elle viserait à étendre la possibilité, aujourd'hui prévue par l'article 125 0-A du code général des impôts, en cas de dénouement du contrat résultant de l'invalidité du bénéficiaire 234 ( * ) . Un tel mécanisme nécessiterait toutefois une étude d'impact dont la mission ne dispose pas à ce stade.


Le dispositif prévu par l'article 125 0-A du code général des impôts
en cas d'invalidité du bénéficiaire

Le I de l'article 125 0-A du code général des impôts dispose que, de manière générale, les produits attachés aux bons ou contrats de capitalisation ainsi qu'aux placements de même nature souscrits auprès d'entreprises d'assurance établies en France sont, lors du dénouement du contrat, soumis à l'impôt sur le revenu .

Des exceptions à ce principe sont toutefois prévues. Ces produits sont notamment exonérés, quelle que soit la durée du contrat , lorsque le dénouement de ce dernier résulte de l'invalidité du bénéficiaire ou de celle de son conjoint, sous certaines conditions.

Cette disposition ne s'applique en effet, suivant la classification retenue par l'article L. 341-4 du code de la sécurité sociale, qu'aux invalides absolument incapables d'exercer une profession quelconque, ainsi qu'aux invalides qui, étant absolument incapables d'exercer une profession, sont, en outre, dans l'obligation d'avoir recours à l'assistance d'une tierce personne pour effectuer les actes ordinaires de la vie. En revanche, elle ne bénéficie pas aux invalides capables d'exercer une activité rémunérée.

• Aménager le dispositif applicable au plan d'épargne retraite populaire (Perp)

La mission juge également nécessaire d'adapter le cadre actuel de l'épargne retraite, qui a récemment fait l'objet d'une analyse d'ensemble effectuée par le président de la mission 235 ( * ) , afin de corréler davantage couverture du risque vieillesse et couverture du risque dépendance.

Le financement de la couverture du risque dépendance serait ainsi anticipé en même temps que les besoins pour la retraite. La personne aurait la faculté de constituer, pendant sa période d'activité, une épargne globale et de long terme en vue d'assurer le financement de ses besoins, quels qu'ils soient, pouvant se manifester pendant toute la durée de sa retraite. La cohérence de ce schéma est donc grande.

L'article 163 quatervicies du code général des impôts a prévu la déductibilité fiscale, dans la limite d'un double plafond 236 ( * ) , des cotisations versées aux différents régimes d'épargne retraite, dont le plan d'épargne retraite populaire (Perp), qui couvre, fin 2007, près de deux millions de personnes 237 ( * ) . Or il apparaît que ce plafond est aujourd'hui loin d'être saturé.

Dans ces conditions, il est envisageable de permettre la déductibilité des cotisations dépendance versées sur un contrat adossé à un contrat d'épargne retraite, dans les mêmes conditions et sous les mêmes limites que les versements sur le contrat d'épargne retraite.

Ce dispositif consisterait à majorer les cotisations de base, sur un contrat d'épargne retraite, de cotisations complémentaires dépendance. En contrepartie, le bénéficiaire disposerait d'une rente plus élevée (ou du versement d'un capital supplémentaire, dans l'hypothèse d'une sortie en capital) en cas de survenance du risque dépendance. Ce complément de ressources permettrait de faire face aux besoins de financement entraînés par la dépendance.

Le contrat dépendance serait couplé au contrat d'épargne retraite, mais juridiquement distinct de celui-ci : le couplage de deux contrats distincts est, en effet, rendu nécessaire par l'obligation de cantonnement spécifique à l'épargne retraite. Le risque dépendance serait alors adossé à l'actif général de l'entreprise d'assurance.

Le même plafond de déductibilité fiscale que celui aujourd'hui en vigueur pour l'épargne retraite s'appliquerait pour les cotisations d'épargne retraite et les cotisations dépendance.

A long terme, la mesure serait autofinancée, puisque la déductibilité des cotisations sur un contrat d'épargne retraite a comme contrepartie l'imposition des rentes versées.

Contrairement aux propositions précédentes visant à optimiser les sommes investies en assurance vie, cette mesure s'adresserait prioritairement à des actifs encore relativement jeunes et qui ne songeraient pas spontanément à constituer une telle couverture s'ils n'y étaient pas incités au travers de mécanismes de retraite complémentaire.

• Permettre un meilleur recours au prêt viager hypothécaire

Il semble également possible de progresser sur le terrain des emprunts hypothécaires inversés, en créant une garantie d'Etat qui permettrait de réduire leur coût. Les conditions actuelles ne sont, en effet, pas satisfaisantes, seul le Crédit foncier pratiquant des prêts de ce type, mais à des taux prohibitif (de 7 % à 8 %). La mission estime donc nécessaire de créer un environnement plus concurrentiel et de prévoir des garanties publiques apportées par l'Etat au moyen de structures du type du fonds de garantie à l'accession sociale (Fgas).

* 231 A titre d'exemple, les assurés nés en 1950 ou 1951 recevront en 2008 leur première estimation indicative globale et ceux nés en 1958 ou 1963 recevront leur premier relevé de situation individuelle.

* 232 Instaurée par l'article 1 er de la loi n° 2005-842 du 26 juillet 2005 pour la confiance et la modernisation de l'économie.

* 233 Total des provisions mathématiques et de la provision pour participation aux bénéfices lié aux contrats d'assurance vie et de capitalisation. Source : FFSA, rapport annuel, « L'assurance française en 2007 ».

* 234 Ce mécanisme s'applique également lorsque le contrat se dénoue par le versement d'une rente viagère. Outre les cas d'invalidité, l'article 125 0-A du code général des impôts vise également les situations où le dénouement résulte du licenciement du bénéficiaire des produits ou de sa mise à la retraite anticipée.

* 235 Philippe Marini, « L'épargne retraite, un facteur décisif pour la réforme des retraites » -rapport d'information n° 308 (2007-2008).

* 236 Il est retenu le plus favorable des deux plafonds suivants pour la personne imposable :

- 10 % des revenus d'activité professionnelle de l'intéressé ;

- 10 % du plafond annuel de la sécurité sociale (soit 3 328 euros en 2008), les revenus d'activité professionnelle n'étant retenus que dans la limite de huit fois le plafond de la sécurité sociale (266 208 euros en 2008), soit une déductibilité maximale de 26 621 euros.

* 237 Les encours du Perp atteignaient 3,4 milliards d'euros fin décembre 2007, compte tenu du versement de 1,06 milliard d'euros de cotisations en 2007 (soit une hausse de 8 % par rapport à 2006). 132 000 nouveaux Perp ont été souscrits en 2007.

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