2. Une mise en oeuvre restée confidentielle

Les formules passerelles sont restées cependant peu nombreuses et reposent sur la bonne volonté des différents partenaires et des professionnels concernés. Elles ont été mises en oeuvre de manière assez dispersée au gré d'initiatives locales.

En 2000, leur nombre était estimé à environ 60 classes réparties dans 25 départements. Selon les informations fournies par le ministère de l'éducation nationale à vos rapporteurs, leur chiffrage actuel est en diminution.

a) Une variété de formules

La mise en oeuvre de ces actions passerelles peut prendre différentes formes :

- les actions convergentes : ce sont des actions légères de collaboration entre enseignants et professionnels de la petite enfance pour préparer la première entrée à l'école maternelle. Ainsi, à Vaulx-en-Velin, les puéricultrices sont mobilisées pour préparer l'enfant à son entrée à l'école ; tous les parents d'enfants de deux ans susceptibles d'être scolarisés en septembre reçoivent une lettre d'invitation à participer à des activités ;

- les lieux passerelles sont de petites structures à côté de l'école, souvent installées dans des appartements de fonction recyclés, qui accueillent à mi-temps ou à plein temps 12 à 15 enfants de dix-huit mois à quatre ans. L'enfant est accueilli avec ses parents par une équipe mixte. La gestion est municipale ou associative ;

- la classe passerelle , à l'intérieur de l'école, est une classe à effectif réduit prise en charge conjointement par un éducateur de jeunes enfants souvent à mi-temps, l'enseignant de la classe et l'ATSEM. Cette forme de structure passerelle a été développée notamment dans la ville de Roubaix. Les classes passerelles sont généralement situées dans des zones d'éducation prioritaires (ZEP) ou des réseaux d'éducation prioritaire (REP).

b) Des compétences professionnelles associées

Les enseignants d'école maternelle forment le personnel référent de ces classes passerelles. Interviennent également des éducateurs de jeunes enfants, des agents territoriaux spécialisés d'école maternelle (ATSEM), des auxiliaires de puériculture.

Les rapports d'activité des classes passerelles montrent à la fois la variété des activités proposées aux enfants mais aussi partagées avec les parents, sous la forme d'échanges réciproques de savoirs et la construction de connaissances communes.

Ce dispositif recouvre des formules souvent fragiles ou précaires qui tiennent au volontarisme d'un ou plusieurs partenaires . La difficulté repose sur le fait que ces pratiques sont rarement formalisées.

Le cas de la passerelle des deux ans dans la ZEP sud de Saint-Jean de la Ruelle

Cette initiative est née d'une réflexion commune entre enseignants et service petite enfance de la ville. Elle part des constats suivants sur le profil d'élève de ZEP dans les années 1980 : une maîtrise de la langue peu assurée, des difficultés d'apprentissage de la lecture en CP. Les objectifs sont centrés sur la problématique de la séparation entre la mère et l'enfant, la connaissance pour les parents des rôles pédagogiques et éducatifs de l'école maternelle et l'accompagnement dans la découverte de l'univers scolaire.

L'inscription des enfants dans cette structure se fait par repérage de ceux qui n'ont jamais quitté le milieu familial et qui sont susceptibles de rencontrer des problèmes de langage. Il s'agit de leur permettre de vivre une socialisation collective avant d'entrer à l'école maternelle.

La « passerelle » a été ouverte en septembre 1991. Cette structure a fait l'objet d'une convention signée par la ville et l'inspection académique dans le cadre d'un projet éducatif et pédagogique. Elle est située dans un logement de fonction aménagé, près d'une des écoles maternelles ; quinze enfants y sont reçus quatre matins par semaine. L'équipe d'accueil est composée d'une enseignante, d'une éducatrice de jeunes enfants et d'une auxiliaire de puériculture. Chaque enfant est progressivement intégré à la maternelle dès que son temps d'adaptation est terminé ; il est alors accompagné dans la classe d'accueil de son école.

Chaque intervenant dans la « passerelle » a un rôle bien défini. L'éducatrice de jeunes enfants est chargée de l'accueil de la famille avec son histoire, sans jugement porté. Elle a un rôle d'accompagnement et de lien entre les différentes institutions école-passerelle-famille. L'enseignante assure le lien pédagogique entre les parents et l'équipe scolaire, entre les activités menées dans la passerelle et le travail de liaison avec l'école. Le rôle de l'auxiliaire de puériculture est de veiller à la sécurité physique des enfants. Cette organisation a permis de travailler le rôle de l'ATSEM par rapport à l'enseignant, qui doit être un co-éducateur.

Les inscriptions des enfants ont lieu à l'incitation des enseignants, par le biais de la PMI ou des assistants sociaux à la discrétion d'une commission qui doit tenir compte de critères hiérarchisés, tels que la connaissance du milieu familial.

Il apparaît que les enfants qui ont fréquenté la « passerelle » progressent plus rapidement sur le plan langagier et dans les activités scolaires. Le recul est de dix ans pour tenter d'établir un bilan. Une évaluation en termes d'efficacité scolaire avait été réclamée auprès des services du ministère de l'éducation nationale.

Lorsque la première cohorte d'élèves ayant fréquenté l'école à deux ans a atteint la classe de CE2, il est apparu que les résultats aux évaluations étaient meilleurs que les années précédentes, sans que l'on puisse en tirer des conclusions. Il est à noter qu'il n'y a pas eu de suivi de cohorte sur cette question. Ce suivi est d'autant plus difficile que la population des ZEP est très mobile.

Intervention de Mme Sylvie Chevillard, conseillère pédagogique,
membre de l'équipe de recherche ESCOL (Paris-VIII) devant le groupe de travail

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page