B. L'IMPLICATION DES COLLECTIVITÉS DANS LES TRAVAUX RÉALISÉS PAR L'ETAT SUR L'ASSIETTE FISCALE

Dès le rapport d'étape, votre mission estimait qu'une réflexion devrait être engagée afin que certaines collectivités disposent de marges de décision plus importantes sur les assiettes d'imposition.

Cet axe de travail est conforté par le rapport récent de la Cour des comptes (cf. infra ), qui montre que « le processus d'établissement des bases cadastrales est d'une grande opacité, [...] extrêmement complexe, fragile et d'un coût mal cerné, [...] ce qui produit une situation obsolète et inéquitable ».

Les collectivités sont, hormis les contribuables eux-mêmes, les premières à être intéressées par un travail efficace et juste sur le calcul des assiettes des impositions qui leur sont destinées. Il semble en conséquence cohérent, face au désintérêt manifeste de l'Etat , de renforcer leur rôle, en leur permettant au minimum de collaborer plus étroitement , dans le cadre fixé par le législateur, aux actualisations opérées par les services fiscaux . Elles pourraient également avoir un pouvoir d'initiative pour inciter l'Etat à engager ces procédures. Elles y ont un intérêt direct et l'expérience de la décentralisation a montré que les collectivités sont tout à fait à même de mettre en oeuvre les moyens d'une telle politique.

Proposition de la mission

- Permettre aux collectivités territoriales de prendre toute leur part aux procédures de révision et d'actualisation des valeurs locatives, dans un cadre fixé nationalement par le législateur.

Au-delà des travaux réalisés sur le calcul des assiettes, la question peut également être posée, notamment pour les grandes collectivités, des modalités de recouvrement des impositions. Pour mémoire, l'Etat prélève des frais importants pour compenser le coût du recouvrement de l'impôt ; ils sont calculés en pourcentage du produit perçu, et non forfaitairement, et la Cour des comptes estime qu'ils sont « surfacturés » .

La question de la collectivité la plus à même de participer à ces travaux doit être regardée avec souplesse et la réponse apportée doit s'adapter au territoire. En effet, si les communes importantes ont la capacité technique et humaine suffisante, éventuellement au niveau intercommunal, les communes rurales ne le pourront certainement pas. Dans ce cas, les départements pourraient avoir un rôle décisif de soutien, mais également de coordination : il ne serait pas illégitime que l'actualisation des valeurs locatives soit réalisée sur un territoire relativement étendu, comme celui du département, pour éviter les distorsions et favoriser l'harmonisation des assiettes fiscales.

En outre, il peut être intéressant de rappeler que le deuxième alinéa de l'article 72-2 de la Constitution, introduit par la révision de 2003, prévoit que la loi peut autoriser les collectivités territoriales à fixer l'assiette et le taux des impositions qu'elles reçoivent, dans les limites fixées par le législateur. Il pourrait être pertinent, dans ce cadre constitutionnel, de confier aux collectivités la fixation de tout ou partie de l'assiette de certains impôts ou taxes.

Résumé du rapport de la Cour des comptes sur l'assiette des impôts locaux (mars 2009)

La chaîne des opérations permettant de déterminer la valeur locative d'un bien est longue et complexe, puisqu'elle comporte treize étapes. Son calcul revient à multiplier une surface pondérée par le tarif de la catégorie dans laquelle est classé le bien. L'administration dispose de moyens limités pour apprécier effectivement la valeur locative du bien ; le processus est entaché de nombreux points de fragilité et comporte un risque non négligeable d'erreurs matérielles ou d'appréciation.

Par ailleurs, le coût en est mal cerné par l'Etat : les effectifs qui y sont affectés ne sont plus identifiés et quantifiés depuis 2005 : à cette date, 3 020 agents environ, auxquels pouvaient être ajoutés les responsables de centres et une trentaine d'autres en administration centrale, assuraient les tâches dites fiscales.

En 2006, le coût de l'assiette et du contrôle de l'impôt a été évalué à 230 millions d'euros, celui du recouvrement à 202 millions, ce qui fait apparaître un taux de 1,75 %. Or, les impositions au titre de l'impôt foncier sont majorées de 4,4% pour frais d'assiette et de recouvrement. Pour la Cour des comptes, le coût de gestion de l'assiette est donc surfacturé par l'Etat . Les coûts réels des dégrèvements et admissions en non-valeur représentent en revanche pour l'Etat beaucoup plus que les 3,6% prélevés à ce titre. Pour autant, la Cour complète son analyse, en indiquant que cette situation est peu saine et que les collectivités territoriales ignorent le coût réel des dégrèvements et défauts de paiement des contribuables pris en charge par l'Etat.

En conclusion, la Cour des comptes souhaite que la réforme des valeurs locatives soit l'occasion pour l'Etat de revoir non seulement ses modes d'organisation, mais aussi ses méthodes de travail .

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