Rapport d'information n° 554 (2008-2009) de M. Joël BOURDIN , fait au nom de la délégation du Sénat pour la planification, déposé le 16 juin 2009

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N° 554

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2008-2009

Rattaché à la séance du mardi 16 juin 2009

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la délégation du Sénat pour la Planification (1) sur l' évaluation des politiques publiques concernant les zones humides ,

Par M. Joël BOURDIN,

Sénateur.

(1) Cette délégation est composée de : M. Joël Bourdin, président ; MM. Pierre André, Bernard Angels, Mme Evelyne Didier, M. Joseph Kergueris, vice-présidents ; M. Yvon Collin, Mme Sylvie Goy-Chavent, secrétaires ; Mme Jacqueline Alquier, M. Gérard Bailly, Mme Bernadette Bourzai, MM. Jean-Luc Fichet, Philippe Leroy, Jean-Jacques Lozach, Jean-François Mayet, Philippe Paul

Mesdames, Messieurs,

Votre Délégation pour la planification a souhaité approfondir sa réflexion sur un sujet qui se situe au carrefour des problématiques économiques et environnementales, à un moment où « l'économie verte » est érigée en moyen prioritaire pour sortir de la crise.

En dépit d'un taux de population urbaine (77%) légèrement supérieur à la moyenne de l'Union européenne, la France conserve de vastes superficies rurales avec 295.000 km 2 de surface agricole utile et 15,5 millions ha de forêts. Cependant l'accélération de l'urbanisation engendre une consommation accrue de terrains à la périphérie des villes.

Dans ce contexte de transformation rapide, les zones humides focalisent l'intérêt des aménageurs, des naturalistes et des citoyens. Moult colloques et séminaires sur ce sujet se sont tenus depuis un an.

Cette mobilisation a suscité la curiosité de votre délégation dans le cadre de ses réflexions sur les évolutions à moyen et long termes de notre société.

Délibérément, nous nous sommes limités aux zones humides tempérées de métropole. En effet, outre-mer, les problématiques sont spécifiques. Bien qu'elle ne soit pas totalement inventoriée, l'exceptionnelle richesse biologique de la forêt tropicale humide, des forêts marécageuses et des mangroves est notoire ; mais les interrogations et les modes de gestion sont différents.

Après un rappel historique, nous tenterons d'expliciter les motifs du regain d'intérêt actuel pour les zones humides.

La complexité des règles juridiques applicables à ces territoires sera ensuite abordée.

En faisant le point des connaissances scientifiques sur les zones humides, on pourra vérifier la difficulté du dialogue entre science et droit, et entre l'idéal et le possible.

Après avoir vérifié la nécessité d'une gestion adéquate pour obtenir les « bénéfices écologiques » attendus, nous tenterons de faire le point des moyens publics mobilisés pour les zones humides.

I. L'ÉMERGENCE D'UN REGARD POSITIF SUR LES ZONES HUMIDES

A. DE L'ANATHÈME À LA RECONNAISSANCE

Historiquement, dans le vieux continent européen, les zones humides ont été perçues négativement.

En effet, dans les siècles passés, la première préoccupation de nos ancêtres est de se procurer de la nourriture. Chacun connaît l'impact des mauvaises récoltes dans le déclenchement des révolutions et des guerres et l'effet bénéfique de l'importation de certains végétaux tels que la pomme de terre - qui n'aurait pas dû quitter les rives du lac Titicaca selon les règles de l'écologie correcte - mais a permis d'éviter quelques famines aux Européens.

Le plus souvent impropres aux cultures dont la population tire sa subsistance, les zones humides sont également réputées insalubres du fait des insectes qui s'y développent et propagent la malaria.

Des communautés religieuses se voient parfois concéder ces terres pauvres pour entreprendre de les mettre en valeur.

L'assainissement des zones humides est encouragé sous l'Ancien Régime, pendant le Premier Empire, tout au long du XIXe siècle et jusqu'à la Seconde Guerre mondiale.

Sous l'impulsion de quelques scientifiques, des négociations engagées au niveau international conduisent à la signature en 1971 de la Convention relative aux zones humides d'importance internationale, dite « Ramsar ».

Les signataires de cette convention estimaient alors qu'il convient de préserver les zones humides pour réguler le régime hydraulique et protéger les habitats (faune et flore) écologiquement intéressants.

Simultanément, des programmes de recherche sont engagés sur les zones humides.

Au niveau national, ce revirement se concrétise par le vote de la loi du 10 juillet 1976 relative à la protection de la nature, il est confirmé par la loi n° 92-3 du 3 janvier 1992 sur l'eau qui officialise les zones humides et prescrit la préservation de ces espaces ; mais c'est bien plus tard que les aides financières de l'Etat à l'assainissement seront supprimées. D'aucuns prétendent que certains conseils généraux financeraient encore le drainage ; votre rapporteur n'a pu vérifier cette assertion.

En 1994, à l'initiative du Premier ministre, le comité interministériel de l'évaluation des politiques publiques engage - avec le Commissariat général du Plan - un vaste travail d'évaluation des politiques visant les zones humides. Ce travail est fondé notamment sur des fiches d'analyse de différents sites comportant des zones humides. Force est de constater le caractère souvent sommaire de ces fiches fondées sur des observations recueillies, semble-t-il, en prenant soin d'éviter de se rapprocher des gestionnaires des territoires.

A la suite du rapport de ce comité présidé par le préfet Paul Bernard, le ministre chargé de l'environnement engage un plan d'action, avec notamment la création d'un « observatoire national » chargé au sein de l'IFEN (Institut français de l'environnement), de l'analyse et du suivi scientifiques de 152 zones humides métropolitaines remarquables.

Certaines affirmations de ce rapport d'évaluation suscitent quelque perplexité. Ainsi, pour mettre en relief l'intérêt des zones humides du point de vue de la production de matière organique, on cite une étude nord-américaine, selon laquelle, certaines prairies à spartines des marais côtiers des États-unis produisent jusqu'à 40 tonnes de matière sèche/ha/an, mais on se garde bien de mentionner qu'à ce jour, nul n'a trouvé un moyen quelconque propre à valoriser la spartine du point de vue alimentaire ou industriel ; même les chèvres n'en veulent pas. Tout au plus peut-on mentionner qu'aux États-unis la spartine serait utilisée dans l'édification de remblais, alors qu'en France elle contribue à l'envasement de certains espaces maritimes remarquables et à la diminution de la biodiversité locale.

Au demeurant, en préconisant la préservation ou la reconstitution de zones humides, il faut se garder d'une vision romantique d'un « retour à la nature » idyllique et à un « âge d'or » fantasmagorique. D'ailleurs, sur le terrain, il est souvent difficile de dire avec certitude qu'un espace écologiquement intéressant est « naturel » dans un vieux continent où les terres sont exploitées depuis des millénaires (cf. Annexe I).

Simultanément, les autorités de l'Union européenne ont affiché clairement leur volonté de mener une politique active visant les zones humides. Les principes de cette politique ont été précisés en particulier dans une résolution du Parlement sur la communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen sur l'utilisation rationnelle et la conservation des zones humides, en date du 12 décembre 1996.

B. DES ZONES HUMIDES POUR QUOI FAIRE ?

1. Régulation des flux d'eau

Du point de vue quantitatif , leur utilité varie selon les surfaces en cause.

Les zones humides d'importance majeure retiennent prioritairement l'attention ; mais il serait dommageable d'ignorer l'intérêt des micro-zones humides.

A l'échelle d'un bassin versant, ces zones constituent l'outil prioritaire pour la régulation du débit d'un cours d'eau .

Ainsi les zones humides reliées à la Seine en amont de Paris sont réputées éviter l'inondation de la capitale dans des conditions économiques beaucoup moins coûteuses qu'un barrage destiné à éviter les crues.

Cependant, dans certaines contrées, des surfaces importantes de zones humides ont été conservées, en dépit de l'intensification culturale opérée dans quelques parcelles. Tel est le cas dans la vallée de l'Adour où des barthes situées en aval de Dax sont demeurées des zones inondables équipées d'ouvrages hydrauliques et gérées collectivement.

Grâce à ces zones, on peut éviter ou limiter les effets dommageables des crues dans les zones urbanisées. Hors période d'inondation, les barthes sont exploitées en prairie dans des conditions qui seront évoquées ultérieurement.

A contrario, les aménagements effectués en tête de certains bassins versants ont conduit à supprimer des zones humides et provoqué indirectement des inondations dans les Ardennes (Charleville-Mézières), en Bretagne (Redon) ou en Languedoc-Roussillon (Nîmes).

Selon une étude modélisée de la société SOGREAH Consultants relative à la Charente , du fait des aménagements supprimant des zones humides, une goutte d'eau parcourt en deux jours la distance préalablement parcourue en deux semaines. La présence de zones humides fonctionnelles réduit le niveau des cours d'eau de 15 cm et a un impact fort sur les dommages provoqués par une crue. Ainsi les inondations observées à Cognac et à Saintes en 1982 et 1994 ont dégradé respectivement 172 et 188 maisons 1 ( * ) .

Parallèlement, l'eau stockée dans les zones humides permet de soutenir les débits d'étiage, ce qui présente un intérêt majeur pour la faune piscicole et pour l'agriculture. Cet effet s'inscrit dans la liste des effets positifs des zones humides sur la qualité des milieux.

2. Amélioration de la qualité des eaux

Les zones humides constituent des espaces d' épuration des eaux usées et offrent des réserves vitales pour l' alimentation en eau potable .

Divers travaux réunis dans le cadre de la convention RAMSAR ont mis en évidence l'utilité des zones humides pour réduire l'eutrophisation de certaines masses d'eau et traiter des eaux usées.

Aux États-Unis, les marécages à cyprès de Floride sont réputés transformer 98 % de l'azote et 97 % du phosphore des eaux usées reçues dans les zones humides avant que celles-ci n'atteignent la nappe phréatique.

En Inde, à l'est de la ville de Calcutta, un territoire de 8000 ha, composé de canaux, de parcelles agricoles (cultures maraîchères et riziculture) et d'étangs piscicoles permet de traiter le tiers des eaux usées de cette mégalopole, avec le concours de 20.000 personnes.

Certaines plantes endémiques des zones humides sont dotées de capacités exceptionnelles pour fixer les métaux lourds ou des pesticides, à condition cependant que la concentration de ces produits toxiques ne soit pas trop élevée et cet effet n'est que temporaire (cf. infra).

Les zones humides de la vallée de la Saône peuvent stocker plus de 57 millions de m 3 d'eau disponibles pour la distribution d'eau potable. Tout aménagement modifiant le régime physique ou chimique de ces espaces remettrait en cause l'existence de cette ressource et le coût des équipements d'épuration de substitution pourrait, selon l'IFEN, être très élevé.

S'inspirant de cette philosophie, la commune de Royan (17) a entrepris de limiter l'extension de son urbanisation pour restaurer des zones humides épuratrices 2 ( * ) , en vue de se conformer aux normes communautaires relatives aux eaux de baignade sur les plages de cette commune où le tourisme constitue la première activité économique.

De multiples processus physico-chimiques contribuent à purifier l'eau des zones humides. Ainsi ces espaces retiennent les matières en suspension véhiculées par l'eau, avec une intensité variable propre à la géomorphologie de chaque site.


Quant à la dépollution de l'eau pendant son passage dans une zone humide, les analyses scientifiques confirment l'utilité des pratiques telles que le lagunage mis en oeuvre dans de nombreuses installations de traitement des eaux.

D'autre part, les zones humides forestières peuvent refiltrer l'eau sortie des stations d'épuration, à condition que cette fonction soit intégrée dans la sylviculture pratiquée dans les parcelles concernées.

Cependant le passage d'une eau polluée dans une zone humide ne peut être tenu pour une « solution miracle » , en particulier pour quelques produits particulièrement toxiques évoqués ci-après.

Certes une zone humide peut efficacement transformer l'azote par absorption (= stockage par les végétaux) soit par dénitrification microbiologique (= élimination en azote dans l'atmosphère).

Dans le cadre du programme national de restauration des zones humides, une analyse de résultats de dénitrification obtenus dans les zones de bas-fonds de Pleine-Fougères (35) a permis de mettre en évidence l'intérêt de la longueur de la connexion par rapport à la surface totale de la zone humide. On a pu ainsi définir une typologie fonctionnelle innovante de ce type de zone humide et établir une cartographie des zones potentielles de dénitrification. Cette expérimentation a mis en relief les variables du processus de dénitrification : saison, végétation, caractéristiques géomorphologiques du site, pratiques agricoles en amont.

Quant au devenir du phosphore, des travaux menés aux États-unis concluent que l'efficacité du processus d'élimination dépend du contexte hydrogéologique, du climat, de la saison, des communautés végétales présentes dans la zone humide concernée et du fait que cette dernière soit « ouverte » ou « fermée ».

Le fait le plus marquant est que les processus respectifs d'élimination de l'azote et du phosphore paraissent antagonistes.

A contrario, pour le traitement des métaux lourds , la zone humide ne constitue qu'une solution transitoire . En effet, ces produits sont fixés dans les sédiments, absorbés et concentrés par des plantes, mais relargués ultérieurement par les mêmes sédiments et lors de la décomposition des plantes ; on assiste à un phénomène comparable pour les micropolluants organiques , en particulier les pesticides, ces polluants suivant un cycle : piégeage, dégradation, relargage. En outre, la contamination de la flore et de la faune ne doit pas être négligée.

A une échelle plus réduite, les micro-zones humides permettent de réguler l'apport en eau essentiellement dans les prairies et garantissent la qualité du pâturage disponible pour le bétail.

3. Lieu privilégié de la biodiversité

Indépendamment de leurs fonctions épuratrices, du point de vue qualitatif , les zones humides font l'objet d'une attention particulière, car elles sont réputées être des espaces privilégiés pour le développement de la biodiversité .

En France, l' inventaire national du patrimoine naturel (Art. L. 441.5 du code de l'environnement) est piloté par le MNHN (Muséum national d'histoire naturelle) chargé d'établir le répertoire des espèces animales et végétales et de dresser des cartes dans des conditions évoquées au III ci-dessous.

Pour l'organisation RAMSAR, les zones humides d'eau douce sont réputées contenir 40 % des espèces de la planète et 12 % de toutes les espèces animales et végétales. Il convient de relever que ces chiffres sont des estimations, car il n'existe pas présentement d'inventaire exhaustif.

En outre, il faudrait distinguer les espèces animales strictement inféodées aux zones humides de celles qui y résident régulièrement ou occasionnellement.

Par ailleurs, les zones humides sont également impliquées dans le régime des précipitations, la production d'oxygène, l'émission de méthane ainsi que le cycle du carbone, en particulier dans les tourbières. Cependant, pour ce qui concerne le carbone, il y a lieu de relever que la tourbière (= puits de carbone) est un système moins performant que la forêt cultivée qui constitue une pompe à carbone dont la capacité de stockage 3 ( * ) est renouvelable après récolte des grumes et installation d'une nouvelle génération d'arbres, le bois d'oeuvre récolté continuant à stocker le carbone qu'il contient.

II. APPROCHE JURIDIQUE

Force est de constater que les règles de droit interne, celles découlant du droit communautaire, et celles issues du droit international ne sont pas en parfaite adéquation.

A. UN DROIT INTERNE POINTILLISTE ET COMPLEXE

1. Les règles spécifiques

Le code de l'environnement (Art. L. 211-1) fixe le principe de la préservation des zones humides et détermine les règles de définition de celles-ci, précisées par voie réglementaire (Art. R.211-108 et arrêté ministériel du 24 juin 2008).

Les critères essentiels sont la nature des sols et la présence d' espèces végétales et d' habitats caractéristiques énumérés dans la classification CORINE biotopes, les plans d'eau étant exclus, car soumis à d'autres règles.

La délimitation des zones humides peut être effectuée lors de l'élaboration des schémas directeurs d'aménagement et de gestion des eaux (SDAGE) ou des schémas d'aménagement et de gestion des eaux (SAGE).

En outre, dans le cadre de la police de l'eau , le préfet peut procéder à la délimitation des zones humides en concertation avec les collectivités locales et leurs groupements (Art. L. 214-7-1 du code de l'environnement).

Il résulte de ces dispositions légales qu'une zone humide - au sens du code précité - n'est explicitement identifiée qu'après délimitation de son périmètre .

Un arrêté en date du 24 juin 2008 a précisé les critères de définition et de délimitation des zones humides, en retenant des critères pédologiques et botaniques .

Cet arrêté fondant les décisions de certains préfets en matière de police de l'eau a suscité une vive inquiétude chez les agriculteurs ; l'application des critères énoncés dans ledit arrêté conduisant à classer en « zone humide » une très grande partie des surfaces de certains départements. Le MEEDDAT a remis sur le métier ce texte réglementaire dont une nouvelle version devrait être présentée prochainement au groupe de travail dit « Grenelle » sur les zones humides.

Dans le cadre de la procédure de SAGE, des zones humides d'intérêt environnemental particulier peuvent en outre être délimitées ; des contraintes environnementales s'appliquent alors aux exploitants agricoles et un programme d'action visant à maintenir ou à restaurer la zone est défini par la commission locale de l'eau (CLE).

En outre, à l'intérieur des zones précédentes, le SAGE peut identifier des zones stratégiques pour la gestion de l'eau dans lesquelles des servitudes d'utilité publique peuvent être instaurées par le préfet, notamment pour contraindre les propriétaires à entretenir et à conserver les ouvrages permettant l'inondation temporaire de certains terrains, l'objectif essentiel visé ici étant la protection des captages d'eau potable.

Le droit spécifique des zones humides se distingue par son extrême complexité, parfois proche de la contradiction interne. Ainsi, les motifs (Art. L. 211-3, II, 3°, a) justifiant la délimitation de zones humides d'intérêt environnemental particulier mêlent sans les hiérarchiser les valeurs « touristique, écologique, paysagère ou cynégétique », alors que l'expérience a abondamment démontré que le développement du tourisme est totalement antinomique de la préservation des milieux fragiles, la « nature » n'étant pas un bien consommable , à l'inverse de tous les produits finis proposés dans les commerces de détail aux urbains qui constituent la majorité de la population française.

2. Les autres régimes juridiques

Par ailleurs, les zones humides peuvent être visées par d'autres régimes juridiques non spécifiques .

Ainsi, des arrêtés de biotope (Art. R. 411-15 du code de l'environnement) peuvent être pris par le préfet , après enquête publique, pour protéger certaines espèces animales ou végétales présentes dans des « mares, marécages ou marais peu exploités par l'homme ».

D'autre part, certaines zones humides ont été classées réserves naturelles nationales (Art. L. 332-1 et suivants du code de l'environnement). Le territoire visé est défini par l'acte de classement - pris après enquête publique - qui institue la réserve. Le classement en réserve naturelle peut impliquer des restrictions importantes à l'exercice d'activités économiques productives ou d'activités censées occasionner des perturbations (chasse).

Les régions peuvent également créer des réserves naturelles régionales (Art. L. 332-2 du code de l'environnement) soumises aux mêmes règles.

Quelques zones humides sont également situées à l'intérieur de parcs nationaux issus de la loi de 1960 modifiée en 2006.

Enfin d'autres zones humides dépendent d'un parc naturel régional (Art. L. 333-1 et suivants du code de l'environnement) créé à l'initiative des collectivités locales.

Ainsi quelques parcs naturels régionaux ont été créés prioritairement pour protéger des zones humides remarquables telles que la Brenne, la Brière, les marais du Cotentin et du Bessin, le Marais poitevin ou la Camargue ; cette dernière étant gérée par un syndicat mixte en application de la loi n° 2007-1773 du 17 décembre 2007.

L'aménagement et la gestion de tels parcs sont dévolus à un syndicat mixte, l'action des collectivités publiques étant définie par une charte élaborée en concertation avec les partenaires concernés, approuvée après enquête publique, mais qui ne constitue pas un « document d'urbanisme ».

Aux régimes juridiques décrits ci-dessus s'ajoutent des statuts particuliers propres aux terrains appartenant au Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres , ou inclus dans des réserves nationales de chasse et de faune sauvage (Art. R. 422-92 du code de l'environnement) ainsi qu'aux réserves biologiques forestières de l'ONF et des forêts soumises au régime forestier . Ces espaces comportent un certain nombre de zones humides.

Enfin des zones humides sont visées de façon non spécifique par le programme ZNIEFF initié en 1980 par le ministère chargé de l'environnement. Dans ce cadre, un inventaire du patrimoine naturel remarquable a été engagé qui vise, bien évidemment, pour partie des zones humides.

Pour mémoire, on rappellera qu'on distingue :

- des ZNIEFF de type 1 concernant des surfaces relativement petites, mais comportant des milieux rares ou particulièrement remarquables ;

- des ZNIEFF de type 2 visant des ensembles homogènes dotés d'une grande richesse écologique.

La loi n° 2002-276 du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité a confirmé l'objectif de réaliser un inventaire naturaliste sur la totalité du territoire national, sous la responsabilité scientifique du M. N. H. N..

Il convient de souligner la primauté de l'objectif scientifique des ZNIEFF qui, pour l'heure, ne sont pas des documents opposables, mais sont cependant intégrées dans le « porter à connaissance » des collectivités locales, lors de l'élaboration des documents d'urbanisme.

B. LES RÈGLES COMMUNAUTAIRES

Indépendamment de la « directive-cadre sur l'eau » (n° 2000/60/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2000) et de la « directive-oiseaux » (n° 79/409/CEE du Conseil du 4 avril 1979) qui visent indirectement les zones humides, le principal instrument juridique communautaire est le programme Natura 2000 (directive n° 92/43/CEE du Conseil du 21 mai 1992) dont l'ambition prioritaire est de protéger la biodiversité sur le territoire de l'UE ; ce texte vise explicitement divers milieux humides au titre :

- des habitats à préserver , parmi lesquels on relève notamment : lagunes côtières, marais et prés-salés atlantiques et continentaux, marais et prés-salés méditerranéens et thermo-atlantiques, eaux dormantes, prairies humides semi-naturelles à hautes herbes, tourbières acides à sphaignes, tourbières boréales ;

- des espèces d'intérêt communautaire justifiant la désignation comme « zone spéciale de conservation ».

Quelques sites présentés à l'UE sont exclusivement une zone humide telle qu'une tourbière. D'autres sites où l'on recense une grande diversité de milieux, ont, dans leur périmètre, quelques zones humides caractérisées pour lesquelles le DOCOB (document d'objectifs) propose des contrats adaptés, puisque l'Etat français a officiellement choisi la voie contractuelle pour mettre en oeuvre ce programme communautaire.

C. LE DROIT INTERNATIONAL

Le coeur du droit international des zones humides réside dans la convention RAMSAR signée le 2 février 1971, ratifiée par la France en 1986. Au titre de cette convention, vingt-neuf sites français, dont trois situés outremer ont été reconnus comme zones humides d'importance internationale. Onze nouveaux sites ont été présentés en 2008.

Ainsi la France a rejoint un groupe qui rassemble 1.650 sites représentant plus de 149 millions d'hectares, répartis dans 154 pays.

On relève que, dans son article premier, la convention définit les zones humides comme des « étendues ... où l'eau est stagnante ou courante », en sorte que des cours d'eau sont compris dans des sites RAMSAR ; sur ce point, la convention RAMSAR se distingue nettement du droit français.

Les zones humides sont également concernées de façon non exclusive par la procédure des « réserves biogénétiques » instituée en 1976 par le Conseil de l'Europe . Trente-cinq sites français comportant notamment des zones humides ont été intégrées dans ce réseau ; ils sont tous des réserves naturelles ; certains de ces sites sont en outre - pour tout ou partie - des ZICO (zone d'intérêt communautaire pour la protection des oiseaux).

Par ailleurs, l' UNESCO a pris l'initiative de susciter la création de « réserves de la biosphère » pour préserver les écosystèmes terrestres ou côtiers dans le cadre du programme MAB (i.e. l'homme et la biosphère).

Le plus souvent ces réserves sont constituées d'une zone centrale faisant l'objet d'une forte protection légale et d'une zone annexe, d'une zone-tampon ainsi que d'une zone dite « de coopération » où l'on s'efforce d'inciter les habitants à améliorer le milieu et à faire progresser la pratique du développement durable. Dix sites français, dont deux outremer, sont intégrés dans ce réseau de l'UNESCO ; parmi ceux-ci, l'un d'eux relève explicitement des zones humides : la Camargue (delta du Rhône), et plusieurs comportent des milieux variés dont des zones humides, en particulier la forêt de Fontainebleau et le parc naturel du Gâtinais, les Vosges du Nord et le Pfalzerwald.

Le schéma ci-après propose une présentation sommaire des règles essentielles issues du code de l'environnement, des règles communautaires et des règles de droit international applicables aux zones humides.

Schéma relatif aux règles de droit interne, aux règles communautaires et au droit international
applicables aux zones humides

III. DES INCERTITUDES SUR LA QUALITÉ DES CONNAISSANCES ACQUISES

Au-delà de la vulgate véhiculée par les media, votre rapporteur a vainement cherché des données historiques fiables sur l'évolution des superficies de zones humides en métropole. Tout au plus peut-on, semble-t-il, se référer à la thèse d'un historien qui a analysé les variations des surfaces de zones humides, selon l'état de prospérité ou de guerre dans telle ou telle province française.

Il convient de rappeler que, lorsque la géographie s'y prête, des étangs piscicoles ont été aménagés pour produire du poisson. Le cas de la Dombes est exemplaire. Ailleurs des zones humides ont parfois été créées pour tenter de se protéger des envahisseurs.

Avec la création en 1995 de l'Observatoire national des zones humides et de l'IFEN, le Gouvernement a mis en place un outil permettant de suivre l'évolution d'un échantillon de 152 zones humides remarquables.

Simultanément des travaux de recensement et d'analyse des zones humides ont été engagés au niveau local par des structures privées ou des institutions publiques selon leurs propres critères.

En conséquence les données acquises sont très hétérogènes.

En outre, le responsable politique doit s'interroger sur l'utilité d'une connaissance systématique de la totalité du territoire, d'autant plus que pour l'heure, ce sont surtout quelques zones humides remarquables qui ont retenu l'attention et qu'il paraît peu probable que l'on puisse recenser toutes les zones humides y compris les micro-zones humides qui, à défaut de recéler éventuellement des trésors, contribuent à l'ensemble des bénéfices attendus de la politique de préservation des zones humides.

A. LES IMPRÉCISIONS CONCEPTUELLES

L'ambition de cartographier la totalité du territoire national, pour satisfaisante qu'elle soit du point de vue intellectuel, paraît quelque peu illusoire, sauf à y consacrer des moyens financiers et humains considérables qui, à ce jour, n'ont pu être dégagés dans le cadre national et dont la mise en oeuvre éventuelle devrait nécessairement être soumise à une analyse coût-avantage comparée avec d'autres usages des ressources financières publiques.

1. Le choix de l'échelle

Ainsi, l'échelle de 1/100.000 e choisie par l'Union européenne pour la mise en oeuvre du programme communautaire Natura 2000 s'avère en pratique tout à fait inadaptée lors de l'élaboration des documents d'objectifs. On relève d'ailleurs que bon nombre d'arrêtés ministériels désignant des zones spéciales de conservation sont assortis d'une cartographie au 1/25.000 e .

Il convient de relever que le périmètre initial de certains sites Natura 2000 transmis à l'UE comporte, du fait de l'échelle retenue, des erreurs et des incohérences, ce qui est très dommageable pour la mise en oeuvre harmonieuse du programme précité et implique une tâche très lourde pour les opérateurs chargés d'établir le DOCOB des sites concernés, appelés à rectifier les erreurs initiales.

En outre, plus généralement, en choisissant l'échelle de 1/100.000 e , on néglige nécessairement les micro-zones humides qui contribuent efficacement à la qualité de certains milieux.

2. Les limites de la photo-interprétation

Cette méthode, mise en oeuvre à grande échelle, par le MNHN, traduit la réalité de façon souvent approximative voire erronée.

Pour illustrer ce propos, on citera des exemples concrets :

- ici, une tourbière qui prospère sur un cours d'eau qui s'élargit dans une dépression n'a pas été vue, ce qui paraît conforme aux possibilités de l'outil. Une des personnes entendues par votre rapporteur a relevé qu'une tourbière située en forêt est indécelable par photo-interprétation, une autre a insisté sur la difficulté d'interpréter correctement les images satellitaires ;

- là, une lagune dont l'émissaire rejoint un cours d'eau dépendant d'un réseau hydrographique Natura 2000 n'a pas été intégrée dans le site.

Or la procédure de présentation des sites d'intérêt communautaire a des effets non négligeables, elle peut être créatrice de contraintes pour les titulaires de droits réels sur les terrains concernés.

Ces approximations constituent en outre un obstacle majeur à l'acceptation de programmes environnementaux par un monde rural fin connaisseur de ses territoires.

De même, dans le cadre d'un inventaire des micro-zones humides effectué dans le département du Jura 4 ( * ) en collaboration notamment avec les chasseurs, l'expérience a montré que la préidentification des zones à étudier issues de la télédétection fournissait des informations de qualité inférieure à celles délivrées par les acteurs locaux.

B. L'EXPLOITATION HASARDEUSE DES COUCHES GÉOGRAPHIQUES DISPONIBLES

Dans un document émanant du MNHN, sur les milieux à composante humide, on a tenté de pallier les lacunes de la cartographie à l'échelle nationale, en exploitant les couches géographiques disponibles, à savoir :

- les ZNIEFF de première génération ;

- les propositions de sites d'intérêt communautaire ;

- la base de données « Corine Land cover » issue de l'exploitation d'images satellitaires prises en 2000. Cette base de données, élaborée dans le cadre du programme européen CORINE, a l'ambition de rassembler des données géographiques de 29 Etats européens, ainsi que des zones littorales du Maroc et de la Tunisie et de présenter, pour la France, des informations plus cohérentes avec la « BD carto» de l'I.G.N. 5 ( * ) .

Selon le document précité, on s'est livré à une synthèse de données hétérogènes : en effet, il est indiqué qu'« on a tenté de quantifier l'importance des milieux humides » dans chacune des couches d'information recueillies, en se référant aux « codes des nomenclatures qui doivent être considérés comme humides ».

Une méthode qui passe sans précaution particulière du constat de la réalité à la normalisation suscite quelques interrogations. Ces dernières ne sont pas apaisées, loin s'en faut, par le discours explicitant les modalités de réalisation de la synthèse finale, obtenue en agrégeant certains éléments des diverses couches d'information géographique qui, pour certaines d'entre elles, comportent, selon les dires des auteurs, une quantification biaisée.

L'hétérogénéité des dates, des échelles et des critères de délimitation et de cotation des zones humides n'a pas constitué un obstacle à la production d'une carte de synthèse dont le caractère scientifique laisse perplexe.

Au regard du corpus juridique précédemment décrit, cette démarche suscite des réserves, dans la mesure où elle pourrait éventuellement conduire à se dispenser des études préalables sérieuses et contradictoires effectuées notamment dans les procédures de SAGE ou lors de l'élaboration des DOCOB des sites Natura 2000, voire de la délimitation d'une éventuelle « trame verte-trame bleue », alors que la démarche pragmatique peut seule emporter la conviction des populations et des parties prenantes des programmes environnementaux.

C. L'ABANDON DES CONSENSUS ANCIENS

En retenant des définitions issues de concepts scientifiques innovants pour délimiter les zones humides, on s'est délibérément privé des consensus anciens et des traditions concrétisées par des structures de gestion qui, à défaut d'être modernes, ont fait leur preuve depuis 200 ans, il s'agit des « syndicats de marais », même si de nombreuses structures de ce type continuent à fonctionner.

En effet, depuis des siècles, les campagnes françaises ont été aménagées dans le but d'améliorer la productivité de l'agriculture, cet objectif impliquant une gestion collective de l'eau.

Après la disparition des droits seigneuriaux et des corvées, afin de mettre en valeur des marais généralement détenus par plusieurs propriétaires fonciers, des associations syndicales ont été créées dès le début du XIX e siècle dans les sites concernés. La détermination des territoires visés faisait l'objet d'une acceptation sociale quasi unanime.

Le régime juridique des associations syndicales a été clarifié par la loi du 21 juin 1865 qui a régi ces organisations jusqu'à la réforme issue de l'ordonnance n° 2004-632 du 1 er juillet 2004, bel exemple de longévité législative.

Certes présentement, l'objectif a changé, puisque c'est la préservation des zones humides qui est prioritaire et non l'intensification culturale, concrétisée le plus souvent par le développement de cultures céréalières mais l'outil a le mérite d'exister.

IV. LA NÉCESSITÉ D'UNE GESTION APPROPRIÉE

Pour rendre les services précédemment décrits, les zones humides doivent être convenablement gérées et dans la majorité des cas, cette gestion a un coût .

Pour illustrer ce propos, on se référera à des exemples concrets de zones humides gérées dans un but tant de régulation du régime des eaux que de valorisation écologique des espaces concernés.

Ainsi dans les barthes de l'Adour sur la commune de Tercis-les-Bains (40), les zones humides protégées par une digue contre les petites crues du printemps constituent une zone d'expansion de la crue hivernale.

La barthe basse est équipée d'écluses afin de maintenir de l'eau sur des prairies basses fréquentées par les oiseaux dont le nombre a considérablement augmenté en effectifs et en variété d'espèces depuis une dizaine d'années.

Source : DOCOB du site Natura 2000 des Barthes de l'Adour

Une partie des barthes hautes a été convertie à la maïsiculture. Cependant une partie importante de ces zones est exploitée en pâturage extensif et collectif pour les bovins et les chevaux sans apport d'engrais.

La maîtrise de l'hydraulique et l'exploitation extensive des pâturages sont subordonnées à l'entretien attentif de divers dispositifs créés pour la plupart il y a plus de 200 ans à savoir : des digues, des portes à flot, des canaux, des clôtures, dont le bon état détermine la fonctionnalité de l'ensemble du système. Cet entretien autrefois réalisé par les agriculteurs tenus d'exécuter des corvées est actuellement à la charge de la commune qui, pour ce faire, perçoit une subvention de 25.000 € par an du Conseil général. Dans plusieurs secteurs, la gestion est dévolue à une association syndicale autorisée.

Présentement le problème de la pérennité du système est posé en raison du coût d'entretien élevé et de l'inadéquation des outils juridiques et financiers proposés par l'Etat (cf. V ci-après).

Simultanément, le maintien et le développement de la biodiversité dans ces espaces sont subordonnés à la présence active de bétail à raison de 0,6/UGB ha afin d'éviter l'embroussaillement et la fermeture des prairies, les barthes hautes étant exploitées en prairies de fauche.

En outre, l'effet optimal sur la biodiversité résulte de la présence d'un bétail diversifié : équins et bovins, car le piétinement et l'herbe consommée varient selon les espèces animales actives sur les parcelles.

Les expériences d'entretien et de valorisation des zones humides rapportées lors d'un séminaire technique tenu à l'APCA en janvier 2009 et lors d'un colloque organisé en février 2009 par l'Agence de l'eau Adour-Garonne mettent en relief le rôle éminent des agriculteurs dans la gestion et la qualité environnementale de ces espaces .

On citera ici un autre exemple de mise en valeur des zones humides : les marais charentais 6 ( * ) . Ces espaces représentent le quart de la SAU du département avec 120.000 ha de zones humides situées à proximité du littoral ou dans les vallées alluviales.

Alors que dans les décennies 1970-1980, 20.000 ha ont été drainés et mis en culture dans ce département, on a assisté à un revirement des pratiques, concrétisé par un protocole d'accord « agriculture-environnement » signé en 1991 fixant deux règles essentielles : l'arrêt des drainages, le soutien de l'élevage, dont la mise en oeuvre a été facilitée par l'application de mesures agri-environnementales dès 1992, puis dans le cadre du programme européen « Natura 2000 ». L'activité d'élevage, indispensable pour préserver la biodiversité, souffre d'un handicap économique qui doit être compensé par des dispositifs financiers spécifiques.

Cette exigence a été soulignée par un représentant du Conservatoire national de l'espace littoral et des rivages lacustres lors du colloque précité ( Les bons comptes des zones humides ). Certains domaines acquis par cet établissement public dans le cadre de la politique foncière visant des espaces naturels menacés par l'urbanisation sont ensuite loués à des agriculteurs qui s'engagent dans une gestion extensive favorable à la biodiversité. A cette occasion, la question de l'avenir de telles opérations a été posée dans le cadre de la réforme annoncée de la politique agricole commune.

Pour illustrer la nécessité d'une gestion des zones humides, on citera le cas de la vallée de la Saône 7 ( * ) entre Verdun-sur-le-Doubs et Mâcon visée par un projet de développement pour la période 1995-2010 concernant tant la protection des eaux souterraines et le développement de la biodiversité que la reconstitution ou la préservation des espaces d'expansion des crues.

Dans une phase préalable (1989-1995) les agriculteurs ont été sensibilisés sur le thème de la réduction de l'emploi des fertilisants ; certains agriculteurs se sont ensuite engagés individuellement dans le cadre d'une charte « Ferti-mieux » pour la période 1996-2000, du fait de la « directive nitrates » et grâce au soutien financier des mesures agro-environnementales (MAE), la phase suivante de cette démarche étant des expertises de labellisation des exploitations agricoles engagées dans ce programme.

Par ailleurs un référentiel relatif à la biodiversité des prairies inondables a été établi.

Enfin, au regard de l'enjeu « inondation », les pertes économiques affectant les prairies et les cultures inondables ont été calculées ; elles sont récapitulées dans les tableaux ci-après.

Application du plan de gestion du Val de Saône inondable

1) ANALYSE DES PERTES DE RENDEMENT AU NIVEAU DES PRAIRIES

Type de prairie

Produit

brut €/ha

perte (en % du rendement optimum)

15 j au stade sensible

30 j au stade sensible

45 j au stade sensible

prairies sur fluviosol calcaire non fertilisées

588

25 %

35 %

60 %

prairies sur fluviosol calcaire fertilisées

230

27 %

37 %

61 %

prairies sur redoxisol calcaire non fertilisées

618

16 %

40 %

65 %

prairies sur redoxisol calcaire fertilisées

272

15 %

42 %

67 %

prairies sur redoxisol non fertilisées

642

16 %

41 %

66 %

prairies sur redoxisol fertilisées

302

16 %

42 %

67 %

prairies sur reductisol non fertilisées

576

2 %

35 %

59 %

prairies sur reductisol fertilisées

236

2 %

35 %

60 %

Source : Séminaire technique « Zones humides » APCA, 23 janvier 2009

2) ANALYSE DES PERTES DE RENDEMENT AU NIVEAU DES CULTURES

Rotations

(€/ha)

Marge/

engrais,

semence,

traitement

perte (en % du rendement optimum)

Crue d'hiver

< 15 j

Crue d'hiver

> 15 j

Crue de printemps

8 à 15 j

Crue de printemps

> 15 j

Maïs

765

0 %

0 %

60 %

100 %

Maïs/soja

645

0 %

0 %

55 %

100 %

Source : Séminaire technique « Zones humides » APCA, 23 janvier 2009

Bien évidemment ces exemples ne rendent pas compte des engagements financiers nécessaires afférents aux programmes de restauration des zones humides d'intérêt majeur telles que le marais poitevin pour lequel la France a l'obligation légale de se conformer aux demandes de la Commission de l'UE.

V. LES MOYENS PUBLICS MIS EN oeUVRE AU BÉNÉFICE DES ZONES HUMIDES

Indépendamment des actions conduites par les agences de bassin, modernisation des structures administratives, exonérations fiscales et mesures financières sont censées contribuer à la protection spécifique des zones humides. Qu'en est-il dans la réalité ?

A. LA CRÉATION D'UN OUTIL AD HOC

A la suite de la loi n° 2006-1772 du 30 décembre 2006 sur l'eau et les milieux aquatiques, une structure administrative spécialisée d'expertise a été mise en place, regroupant les compétences dispersées dans les services dépendant respectivement du ministère de l'Agriculture et du ministère chargé de l'Environnement ainsi que les missions du Conseil supérieur de la pêche dissous par le décret instituant l'ONEMA (Office national de l'eau et des milieux aquatiques) en 2007.

Cet office cumule des fonctions techniques et d'expertise, centralise et organise les connaissances relatives à l'eau 8 ( * ) pour les mettre à la disposition des services de l'Etat, des collectivités locales et du public ; il participe également à la surveillance des milieux aquatiques et la police de l'eau. Il a été fortement impliqué dans l'élaboration de la « trame verte et bleue » proposée par le projet de loi « Engagement national pour l'environnement ».

B. LA PORTÉE LIMITÉE DES EXONÉRATIONS FISCALES

La mesure la plus significative est l'exonération partielle de la TFNB (taxe foncière sur les propriétés non bâties) issue de la loi n° 2005-157 du 23 février 2005 sur le développement des territoires ruraux. Ce dispositif donne compétence au maire pour définir avec la commission communale des impôts directs la liste des parcelles situées en zone humide ouvrant droit à l' exonération de 50 % de la part communale et intercommunale de la TFNB , lorsqu'un engagement de gestion favorable est pris pour cinq ans renouvelables impliquant, notamment le non-retournement des parcelles et la préservation de l'avi-faune.

Les parcelles visées doivent être préalablement classées dans la 2° ou la 6° catégorie définies par l'instruction ministérielle du 31 décembre 1908 qui détermine les règles fondamentales d'établissement de la TFNB. Les terrains visés sont :

- les prés et prairies naturels, herbages et pâturages ;

- les landes, pâtis, bruyères, marais, terres vaines et vagues.

Simultanément, la loi précitée a instauré une exonération de la TFNB (part communale et intercommunale) au bénéfice des terrains inclus dans un site Natura 2000 , les parcelles cadastrales éligibles devant figurer sur une liste établie par les services de la DDEA et transmise aux services fiscaux avant le 1 er septembre de l'année de référence. La mise en oeuvre de ce dispositif est complexe car, pour l'heure, aucun système automatique ne permet de passer aisément de la carte d'un site Natura 2000 au plan cadastral . Les services de la direction des finances publiques considèrent que la réalisation de cette transcription serait très difficile et très coûteuse.

Dans les sites Natura 2000, l'exonération peut s'appliquer à des parcelles pour lesquelles un engagement de gestion conforme à la charte du DOCOB a été pris pour une durée de 5 ans renouvelable.

On relèvera la discordance entre les catégories (au sens de l'instruction précitée du 31 décembre 1908) éligibles au titre des zones humides stricto sensu et pour les terrains classés Natura 2000 et présentant des caractéristiques de zones humides.

En effet, outre les 2° et 6° catégories précitées, les parcelles relevant de la 8° catégorie peuvent, de facto, comporter des faciès de zones humides, il s'agit des « lacs, étangs, mares, abreuvoirs, fontaines, canaux non navigables et dépendances, salins, salines et marais salants ».

En 2005 , l'estimation des surfaces visées était de 2 à 3 millions d'hectares 9 ( * ) et le coût de la mesure était évalué entre 23 et 53 millions d'euros . Les résultats acquis sont modestes, si l'on considère la compensation versée aux communes et établissements intercommunaux au titre des deux mesures précitées (spécifique zones humides + Natura 2000).

A ce titre, l'Etat a reversé globalement aux collectivités :

- en 2006 : 347.033 € ;

- en 2007 : 417.158 € ;

- en 2008 : 838.781 €.

Aucun résultat précis n'est avancé quant aux surfaces effectivement engagées. Les services du MEEDDAT n'ont, semble-t-il, pas encore mis en place un outil d'évaluation permettant d'apprécier l'impact réel de la mesure d'exonération fiscale adoptée en 2005. Il faut souligner que le débat actuel sur l'assiette dépasse largement le sujet des zones humides et s'inscrit dans une réflexion globale sur la valeur cadastrale des terres.

Les règles issues de l'instruction ministérielle précitée peuvent parfois être défavorables aux zones humides. C'est le cas en particulier pour certains terrains aménagés pour un usage cynégétique.

Classées alors dans la 11° catégorie de l'instruction ministérielle (terrains d'agrément), les parcelles ne peuvent faire l'objet d'aucune exonération de la TFNB.

Ainsi des plans d'eau à vocation cynégétique sont assujettis à une taxe foncière beaucoup plus élevée que des terrains humides en friche et ne peuvent bénéficier des exonérations précitées, dès lors que des installations ou dispositifs de chasse (tonnes, gabions ou huttes) sont implantés, alors que les abords de ces plans d'eau permanents ou temporaires répondent le plus souvent aux critères pédologiques et botaniques caractérisant les zones humides.

Cette discrimination est de nature à limiter les initiatives des organisations de chasseurs qui dans de nombreux départements ont été des précurseurs dans l'entretien et la restauration des zones humides, bien avant l'adoption du programme national de restauration des zones humides. On rappellera ici, à titre d'exemple, les platières du Nord de la France, les marais de Charente ou du Médoc, les marais ou les lagunes des Landes.

En conséquence, l'instruction ministérielle précitée ne paraît pas cohérente avec la volonté affichée de préserver et de restaurer les zones humides.

C. DES MOYENS FINANCIERS PUBLICS INDÉTERMINÉS

Il est malaisé de dresser un bilan financier précis des crédits publics affectés aux zones humides.

De fait, en dépit des interventions de caractère global des agences de bassin, à quelques exceptions près, les zones humides sont « noyées » dans la PAC qui n'a pas été conçue pour mettre en oeuvre une politique volontariste de protection de l'environnement, mais pour assurer la sécurité alimentaire de l'Union européenne.

En effet, l'essentiel du budget des zones humides a été géré par le ministère de l'agriculture dans le cadre de la programmation du développement rural 2000-2006.

Dans cet ensemble, on relève une seule action agri-environnementale spécifique sous la rubrique « 18.06 » : gestion des milieux remarquables, notamment milieux humides (tourbières, prairies humides, marais, etc.).

Nombre de contrats

Surface engagée

Montant de l'annuité agroenvironnementale

CTE (total)

49.368

2.357.654 ha

environ 300 M€

CTE en zone Natura 2000 ( estimation )

7.848

266.084 ha (11,2 %)

-

CTE avec action 18.06*

1.512

32.764 ha (1,4 %)

4,6 M€ (1,5 %)

CAD (total)

22.380

903.983 ha

110 M€

CAD en zone Natura 2000

3.550 (16 %)

95.272 ha (10,5 %)

-

CAD avec action 18.06*

5.524 (24,6 %)

82.715 ha (9 %)

17,3 M€ (15,7 %)

*action agroenvironnementale 18.06 : gestion des milieux remarquables, notamment milieux humides (tourbières, prairies humides, marais, etc.)

Source : Ministère chargé de l'Agriculture

Dans la programmation du développement rural adoptée par l'Union européenne pour la période 2007-2013, les mesures agro-environnementales territorialisées (MAET) paraissent mieux adaptées aux problèmes spécifiques des zones humides.

Cependant, intégré dans le système de la PAC, le dispositif n'a pas pour objectif prioritaire de dynamiser la politique des zones humides.

D'ailleurs, on observe que le MEEDDAT ne semble pas porter un intérêt soutenu à ces dispositifs, notamment quant à leur efficacité du point de vue écologique.

En outre, dans un audit effectué au ministère de l'Agriculture sur la mise en oeuvre des MAE à mi-parcours (2005) du PDRN précédent, on relève peu d'informations précises sur le suivi écologique des parcelles et des exploitations engagées, et aucun renseignement explicite sur les zones humides. En revanche l'accent est mis sur les effets négatifs des ruptures engendrées par le changement des outils, générateur d'instabilité et de complexité.

En effet depuis 1991, les dispositifs suivants se sont succédé :

- opérations locales agri-environnementales (OLAE) de 1991 à 1998 ;

-  contrats territoriaux d'exploitation (CTE) de 2000 à 2003 ;

- contrats d'agriculture durable (CAD) de 2004 à 2006 ;

- engagements agri-environnementaux depuis 2007.

Dans la nouvelle évaluation des mesures agri-environnementales actuellement en cours, les actions visant les zones humides pourraient ne pas être plus lisibles.

Une exception notable doit être évoquée ici : il s'agit de l'application - à titre expérimental - de l' indemnité compensatoire de handicaps naturels (ICHN) dans le marais poitevin .

L'ICHN (appelée en son temps prime à l'herbe) a initialement été instituée pour pallier la déprise dans les zones de montagne, consécutive à l'exode rural. Le système a été ultérieurement étendu à d'autres types de territoires, parmi lesquels les zones à handicaps spécifiques et les zones défavorisées simples (règlement [CE] n° 1257/1999 du Conseil du 17 mai 1999).

Pour la période 2000-2002, 58 communes du marais poitevin étaient classées en zone défavorisée simple. De ce fait les exploitations agricoles répondant aux critères réglementaires (siège et 80 % de la SAU situés dans les communes classées) ont pu recevoir l'ICHN, au tarif de 49€/ha, pour les surfaces fourragères et les céréales autoconsommées.

Simultanément, les mêmes agriculteurs ont pu souscrire des contrats territoriaux d'exploitation (CTE) pour le maintien et la gestion extensive des prairies permanentes, selon les 3 niveaux d'engagement proposés, à savoir :

- niveau 1 : 152,45 €/ha/an ;

- niveau 2 pour les prairies anciennes à forte valeur biologique : 228,67 €/ha/an ;

- niveau 3 pour des milieux spécifiques : 304,90 €/ha/an et une mesure de reconversion de terres arables : 374,87€/ha/an.

Le périmètre d'application de l'ICHN a été étendu à tout le marais poitevin et à partir de 2003, le PDRN a autorisé une majoration de cette indemnité pour les prairies permanentes, landes et parcours du marais poitevin, fixée à 60 €/ha/an pour les marais desséchés et à 121 €/ha/an pour les marais mouillés.

Simultanément, dans l'ensemble du marais poitevin les CAD (contrats d'agriculture durable) ont intégré les enjeux de « biodiversité remarquable » et de « qualité de l'eau ».

Pendant l'ensemble de la période 2000-2006, l'ICHN a été cumulable avec les mesures agro-environnementales. La majeure partie des contrats signés par des agriculteurs concernent le maintien et la gestion extensive de prairies permanentes.


Procédant en 2005 à une évaluation de l'efficacité de ces dispositifs, les services d'inspection des ministères concernés, en collaboration avec le Conseil général du Génie rural, ont observé que le taux de pénétration global de l'ICHN s'établissait à 40 % au plus et que le taux de pénétration des aides spécifiques marais était de 33 % au plus, 22.000 ha de prairies étant exclus du bénéfice de l'ICHN.

Depuis 2007, le régime de l'ICHN est applicable dans les mêmes conditions que pendant la période précédente, dans le cadre d'un projet territorial défini par l'Etat, en concertation avec les professionnels (chambres d'agriculture) et le syndicat mixte du parc interrégional du marais poitevin. Ce projet comporte en outre une mesure prairie humide (MPH) de 150€/ha/an qui vise de façon élective les zones humides, ainsi que deux mesures assorties de niveaux de contrainte plus élevés pour des montants respectifs de 226 €/ha/an et 279 €/ha/an.

Ce système est complété par une mesure de création/entretien de couverts herbacés dans un but de reconversion ultérieure des terres arables.

Le cumul de la majoration de l'ICHN spécifique avec les MAE (hors mesure prairie humide) autorisé en 2007, a été supprimé depuis 2008.

En dépit des moyens mobilisés jusqu'en 2006, l'exemple du marais poitevin met en évidence les difficultés d'une reconversion des exploitations agricoles vers un modèle de production extensif économiquement et écologiquement viable .

Il apparaît urgent de dresser un bilan précis du nouveau système appliqué depuis 2007, notamment pour pallier les risques du contentieux communautaire ; la Commission de l'Union européenne a suspendu la procédure engagée contre la France, dans l'attente des résultats du nouveau dispositif mis en oeuvre.

Conclusion partielle

Globalement, la faible lisibilité des moyens publics destinés aux zones humides dans le cadre national et communautaire conduit à s'interroger sur les moyens et les méthodes mis en oeuvre.

Des procédures complexes, instables , voire inadaptées nuisent à l'efficacité des crédits affectés à cette politique qui ne saurait se limiter à la préservation des « grandes zones humides » emblématiques, mais doit viser les zones humides « ordinaires ».

En créant un « groupe national en faveur des zones humides » en avril dernier, le Gouvernement a lui-même reconnu la nécessité de reconsidérer les actions visant ces espaces .

CONCLUSION

Pour relancer la politique publique visant les zones humides , quelques axes opérationnels peuvent être proposés.

Du point de vue réglementaire , la priorité doit être donnée à une réécriture réaliste des règles de délimitation des zones humides .

En effet, dans ce domaine, la méthode inductive semble la plus appropriée ; l'empirisme doit prévaloir, même s'il n'est pas conforme au schéma idéal conçu par des scientifiques.

Pour appréhender correctement la réalité, l'arrêté précité du 24 juin 2008 doit être repensé, d'autant plus que la perspective de son application à des superficies importantes du territoire paraît peu réaliste, du fait de sa complexité et de la nécessité de mobiliser des compétences très pointues.

Le cumul des critères pédologiques et botaniques pour délimiter les zones humides n'apporte pas de réponse propre à faciliter l'exercice de la police de l'eau par les préfets ; il conduit notamment à paralyser l'exécution de travaux d'entretien d'émissaires aménagés de longue date et accroît l'opacité des procédures, du fait de l'absence d'une définition claire du drainage et de l'assèchement.

On relève d'ailleurs que le critère « morphologie des sols » ne figure pas explicitement dans les dispositions législatives (art. L.211-1 du Code de l'environnement), mais qu'il résulte des textes réglementaires (Art. R. 211-108 du code de l'environnement et arrêté précité de 2008). On est donc ainsi passé d'une approche expérimentale (terrains habituellement inondés ou gorgés d'eau) à un système de nature dogmatique dans lequel les gestionnaires de territoires ne peuvent se retrouver.

Pour mettre un terme à ces errements, votre Délégation suggère une réécriture de l'arrêté précité fondée sur le pragmatisme.

La mise en application de la loi sur l'eau de 2006 doit être accélérée. Peut-être faudrait-il mettre à la disposition des collectivités locales des moyens supplémentaires pour hâter la réalisation des SAGE qui permettent d'établir des règles concertées d'utilisation de l'eau d'un réseau hydrographique et conditionnent donc l'évolution des zones humides qui en dépendent. En effet, présentement, à l'intérieur du périmètre du SDAGE, la création d'une CLE (commission locale de l'eau) et la réalisation d'un SAGE sont laissés à l'initiative des collectivités locales. Les ressources des agences de l'eau pourraient être mobilisées à cet effet.

Quant au dispositif d' aide dédiée aux zones humides, qui n'existe pas pour l'heure, on pourrait utilement s'inspirer de l'ICHN, en créant une « indemnité spéciale zone humide », ainsi que l'avait suggéré dès 2006 notre excellent collègue Philippe Leroy. Une telle indemnité permettrait d'instaurer un régime pérenne de soutien aux gestionnaires de ces zones et faciliterait la lisibilité de la volonté politique en ce domaine. Une attention particulière devrait être portée à ce sujet dans le cadre de la future réforme de la PAC.

Pour des motifs financiers énoncés précédemment, les acquisitions foncières doivent rester limitées, ciblées principalement en périphérie des métropoles urbaines où la pression foncière est particulièrement forte. De plus, l'acquisition ne garantit pas nécessairement la bonne gestion et la protection à long terme : les exemples de domaines préemptés par des collectivités pour un motif de protection de l'environnement et transformés ultérieurement en boulevard ou en esplanade ne manquent pas.

En outre, par cohérence avec les principes qui ont inspiré la décentralisation, la préférence pour un outil géré par les collectivités locales devrait prévaloir ; bon nombre d'entre elles disposant déjà d'un établissement public foncier (EPF) local pour mener à bien leur politique d'aménagement. En temps que de besoin, les compétences de ces EPF pourraient être élargies.

Enfin, pour les motifs d'efficacité de la dépense publique précédemment indiqués, il serait opportun de mieux prendre en considération les actions de préservation des structures privées . La Commission européenne ne s'y est pas trompé en apportant son soutien à une initiative originale lancée par ELO 10 ( * ) dans l'espace communautaire ; il s'agit de « Wildlife Estate Initiative » (cf. Annexe 9).

ANNEXES

ANNEXE 1 - GLOSSAIRE DES SIGLES

APCA

Assemblée permanente des chambres d'agriculture

CLE

Commission locale de l'eau

DDEA

Direction départementale de l'équipement et de l'agriculture

DOCOB

Document d'objectifs (d'un site Natura 2000)

EPFL

Etablissement public foncier local

EUNIS

European Nature Information System

ICHN

Indemnité compensatoire de handicaps naturels

IFEN

Institut français de l'environnement

MAE

Mesures agri-environnementales

MNHN

Muséum national d'histoire naturelle

ONEMA

Office national de l'eau et des milieux aquatiques

ONZH

Observatoire national des zones humides

PDRN

Programme de développement rural national

SAGE

Schéma d'aménagement et de gestion des eaux

SAU

Surface agricole utile

SDAGE

Schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux

Taux de chargement

Nombre d'UGB/hectare

TFNB

Taxe foncière sur les propriétés non bâties

UGB

Unité de gros bétail

ZICO

Zone d'intérêt communautaire pour la protection des oiseaux

ZNIEFF

Zone naturelle d'intérêt écologique faunistique et floristique

ZPS

Zone de protection spéciale (directive oiseaux)

ZSC

Zone spéciale de conservation (directive Habitats)

ANNEXE 2 - AUDITIONS PAR LE RAPPORTEUR

- APCA (Assemblée permanente des chambres d'agriculture), Vice-présidence ;

- FNSEA (Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles), Vice-présidence, Service Environnement ;

- Fédération nationale des syndicats de propriétaires forestiers sylviculteurs, Direction ;

- FNE (France nature environnement) ;

- LPO (Ligue pour la protection des oiseaux) ;

- MEEDDAT (Ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire), Direction de l'eau et de la biodiversité, Sous-direction des espaces naturels ;

- MEEDDAT (Ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire), Sous-direction de l'information environnementale ;

- Ministère de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche, Sous-direction de la biomasse et de l'environnement ;

- Ministère de l'économie, de l'industrie et de l'emploi, Direction de la législation fiscale, Sous-direction C ;

- MNHN (Muséum national d'histoire naturelle) ;

- ONEMA (Office national de l'eau et des milieux aquatiques), Direction du contrôle des usages et de l'action territoriale.

ANNEXE 3 - LES ÉTANGS DE BOSTENS (40) : ESPACE NATUREL OU AMÉNAGÉ ?

A. Descriptif actuel

1) en amont : un petit plan d'eau alimenté par une source ;

2) en aval : un grand plan d'eau équipé d'une digue et d'un dispositif permettant de vider l'étang ;

3) un émissaire se déversant dans un cours d'eau.

B. Histoire récente

1) avant 1950, le grand étang ne se remplissait plus et se transformait en marécage ;

2) vers 1950 le grand étang a été curé et la digue remise en état.

C. Intérêt écologique

Aujourd'hui, on y observe de nombreux carex, susceptibles d'héberger des visons d'Europe ; la présence de la tortue cistude y est avérée, les sites de ponte étant situés sur les digues des étangs.

D. Modalités actuelles d'exploitation

Les deux étangs ont été acquis par la commune qui les entretient et les exploite comme étangs piscicoles et y organise des journées récréatives pour les habitants.

ANNEXE 4 : HYDROMORPHIE DES SOLS EN RHÔNE-ALPES

A) Estimation des surfaces concernées

Département

Ain

Ardèche

Drôme

Isère

Loire

Rhône

Savoie

Haute-
Savoie

Surface totale (ha)

652.858

583.299

692.834

871.985

573.223

330.863

1.039.241

484.087

0 : Zones à terrains non hydromorphes (ha)

370.137

540.442

642.394

454.862

394.263

280.351

919.138

407.789

%

57%

93%

93%

52%

69%

85%

88%

84%

1 : Zones à terrains minoritairement (10 à 50 %) hydromorphes (en ha)

59.058

4.541

22.851

417.124

42.961

5.492

108.806

191.135

Surface concernée par l'hydromorphie (ha)

23.623

1.362

6.855

125.137

12.888

1.648

32.642

5.741

Surface concernée par l'hydromorphie (%)

4%

0%

1%

14%

2%

0%

3%

1%

2 : Zones à terrains majoritairement (10 à 50 %) hydromorphes (en ha)

223.663

38.316

27.589

0

135.998

45.019

11.297

57.162

Surface concernée par l'hydromorphie (ha)

178.930

30.653

22.071

0

108.799

36.016

9.038

45.730

Surface concernée par l'hydromorphie (%)

34%

7%

4%

0%

24%

14%

1%

12%

Total des surfaces concernées par l'hydromorphie (%)

38%

7%

5%

14%

26%

14%

1%

13%

Source : MEEDDAT

B)

B) Hydromorphie des sols en Rhône-Alpes

ANNEXE 5 : DONNÉES RELATIVES AU MARAIS POITEVIN

A) Évolution des financements dans le marais poitevin (€)

ICHN et MAE

(Indemnités compensatoires

Handicap naturel +

Mesures agroenvironnementales)

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

6.320.000

5.988.000

6.733.000

7.817.000

8.125.000

7.183.000

6.931.000

7.235.000

Source : Ministère de l'Agriculture

B) Évolution des surfaces agricoles dans le marais poitevin (ha)

2004

2005

2006

2007

2008

SCOP hors maïs

27.636,2

28.506,9

29.134,4

28.050,7

27.932,30

Maïs

20.091,2

18.482,1

17.735,8

18.648,7

20.019,10

Prairie permanente

28.439,7

28.927,1

29.156,9

29.246

28.979,8

Prairie temporaire

3.921,7

3.767,2

3.997,3

3.948,4

5.397,2

Gel

4.881,2

6.345,6

6.159,8

6.104,3

3.004,1

Autres espaces agricoles

1.956,4

1.812,1

2.008,3

2.253,9

2.654,60

TOTAL

86.926,5

87.841

88.192,5

88.251,9

87.987,1

Source : Ministère chargé de l'Agriculture

C) ICHN dans le Marais poitevin - Bilan de la campagne 2004

Département : Charente-Maritime

Types de dossiers

Nombre de dossiers

Surface fourragère totale (ha)

Surface en prairie (ha)

Surface bénéficiant
du complément marais (ha)

Total

Prairie de marais

Prairie de marais bénéficiant de l'ICHN

Marais desséché

Marais mouillé

Total

Bénéficiaires de l'ICHN normale

dont la totalité des prairies en Marais bénéficie de l'ICHN normale

Avec complément marais

51

2.409,42

1.921,00

1.596,35

1.596,35

666,43

929,92

1.596,35

Ecartés du complément marais

(Taux de chargement compris entre 1,6 et 2)

3

280,49

252,65

247,62

150,00

dont la surface de prairies en Marais bénéficiant de l'ICHN normale est plafonnée (plafond de 50 ha ou plafond appliqué aux producteurs mixtes)

Avec complément marais

18

942,52

1.714,4

1.615,06

900

240,00

659,4

900

Ecartés du complément marais (Taux de chargement compris entre 1,6 et 2)

6

235,68

199,07

196,17

196,17

Total

78

4.868,11

4.087,12

3.655,20

2.842,52

907,03

1.589,32

2.496,35

Demandeurs de l'ICHN, non éligibles

6

276,07

159,23

146,59

Total

84

5.144,18

4.246,35

3.801,79

2.842,52

907,03

1.589,32

2.496,35

Source : Ministère chargé de l'Agriculture

ANNEXE 6 - INFORMATIONS RELATIVES À L'ESPAGNE

ÉTAT

AUTONOMIES

Estimation des surfaces

63 zones humides classées RAMSAR totalisant 281.768 ha dont notamment :

Inventaire de 1996 recensant 2500 zones humides


Doñana : 111.646 ha

delta de l'Ebre : 7.736 ha

Autorités compétentes

Etat espagnol : ministère de l'environnement et du milieu rural et marin.

Compétences de protection de la nature transférées aux communautés autonomes en application de l'article 148-1 de la Constitution.

Le Comité des zones humides, dépendant de la commission étatique pour le patrimoine naturel et la biodiversité (composé de représentants de l'Etat et des autonomies) - institué en 1994 - a préparé le « plan stratégique espagnol pour la conservation et l'usage rationnel des zones humides » et participé à la mise en oeuvre des décrets royaux 581/2001 et 435/2004 régissant l'inventaire national des zones humides.

Textes normatifs essentiels

Décret législatif royal 1/2001 du 20 juillet 2001 modifiant la loi sur l'eau ;

Loi 42/2007 du 13 décembre 2007 du patrimoine naturel et de la biodiversité instaurant l'inventaire espagnol du patrimoine naturel et de la biodiversité.

Nombreuses lois et décrets propres aux autonomies visant les zones humides de façon spécifique et indirectement ;

Participation à la collecte des données rassemblées par la Direction générale de l'environnement et de la politique forestière dans le cadre de l'inventaire national.

Méthodologie des inventaires

Pas d'informations centralisées.

Méthodologie propre à chaque autonomie.

Sources de financement

Budgétaires

- Pas de données agrégées ;

- Crédits issus de plusieurs ministères (ministère de l'environnement et du milieu rural et marin, ministère de la défense).

Crédits provenant des budgets propres aux autonomies.

Fondations

Parmi les 9000 fondations recensées en Espagne, il est présentement impossible de disposer de données globales relatives à celles dédiées spécifiquement aux zones humides.

On évoquera ci-après deux exemples, l'un public, l'autre privé, de fondations dédiées à l'environnement.

a) La « Fondation Biodiversité », régie par un statut de droit privé, financée à 100 % sur crédits publics, appartient à l'Etat ; elle a pour objet la protection, l'acquisition de connaissances et l'utilisation rationnelle de la biodiversité.

Le conseil d'administration est composé de représentants de l'Etat (ministère chargé de l'environnement précité), de l'Agence espagnole de coopération internationale et de l'Organisme autonome des parcs nationaux.

Parmi les neuf lignes stratégiques retenues par cette fondation figure un programme « contribution à la conservation des zones humides, des fleuves et des étendues d'eau ».

Deux fois par an, la fondation propose des appels d'offres pour des projets s'inscrivant dans une de ses lignes stratégiques et donc notamment la protection des zones humides.

Le projet retenu est financé à 70 % dans les limites d'un plafond de 200.000 €, le solde étant issu de partenariats, notamment d'entreprises privées.

Depuis 2005, le bilan des activités « zones humides » de la fondation s'établit comme suit : 1,2 million € engagés pour 21 projets sélectionnés dont le coût global est de 3,7 millions €.

b) La « Fondation Territoires et paysages » dépendant de la Fondation Caixa Catalunya, issue d'un établissement bancaire a pour objet de contribuer à la conservation du patrimoine naturel et à la sensibilisation du public à la protection de l'environnement. Cette fondation apporte des concours financiers à des opérations engagées par d'autres entités publiques ou privées (Etat, ONG) prenant la forme d'acquisitions foncières ou de gestion des espaces naturels. La protection des zones humides figure parmi les programmes d'action retenus.

Pour la période 2001-2008 le budget affecté par cette fondation à des acquisitions foncières a été de 650.000 €, incluant notamment des zones humides.

ANNEXE 7 - ELÉMENTS RELATIFS À LA BELGIQUE

WALLONIE

FLANDRE

Estimation des superficies concernées

environ 6.500 ha

environ 5.572 ha

Autorités compétentes

Le ministre en charge de la conservation de la nature.

Le ministre responsable de l'environnement et de la nature.

Textes normatifs essentiels

Directive Habitats, transcrite en 2001 ;

Loi sur la conservation de la nature ;

Arrêté de l'exécutif régional wallon du 8 juin 1989, modifié par le gouvernement wallon en 1997.

Directive Habitats, transcrite en 2002 ;

Décret nature de 1997, modifié ;

Arrêté exécutif du 28 juin 1998 explicitant la protection des zones humides.

Méthodologie des inventaires

Enquête régionale en 1991 réalisée, en appliquant la classification EUNIS, par la Direction de la nature et de la forêt. A la suite de cette enquête, 314 sites ont été retenus, le plus grand nombre étant déjà visé par un régime de protection légal de droit interne ou communautaire.

Il est envisagé d'instaurer un statut de « site de grand intérêt biologique » s'appliquant à des unités géographiques homogènes d'une surface de 1 are à 10 ha, afin d'éviter l'accumulation des régimes juridiques.

Mise en oeuvre de la « méthodologie RAMSAR » et du système de l'Union européenne pour la désignation des « habitats » (cahiers d'habitats) et utilisation de cartes « valeur biologique de la végétation ».

Sources de financement

Ressources budgétaires affectées à :

- frais extraordinaires pour les réserves naturelles ;

- frais de gestion ;

- des expropriations ;

- l'aide à l'acquisition par des structures privées.

Ressources budgétaires affectées à :

- l'acquisition et l'aménagement de réserves naturelles ;

- des frais de gestion ;

- des projets de restauration ;

- des expropriations ;

- l'aide des acquisitions par des structures privées ou des collectivités locales.

ANNEXE 8 - LE PROGRAMME « WILDLIFE ESTATES INITIATIVE »

L'organisation européenne des propriétaires fonciers (ELO) a pris l'initiative de lancer un programme mobilisant des partenaires privés soucieux de valoriser la biodiversité dans leurs domaines ruraux, en conciliant les activités économiques productives avec les impératifs de protection des milieux et de conservation de la biodiversité.

L'objectif est de faciliter la création d'un réseau de territoires gérés de façon exemplaire, dans le cadre d'une charte à laquelle adhère le pétitionnaire.

Les principes essentiels sont la compatibilité avec les règles de Natura 2000 d'une part, le partenariat avec les acteurs ruraux d'autre part.

Les lignes directrices de la charte sont adaptées à chaque région biogéographique, afin de définir des règles à la fois flexibles et reproductibles.

Pour le cas particulier des territoires dédiés à la chasse, un guide de bonnes pratiques de gestion spécifique a été établi.

L'un des sites pilotes les plus remarquables est le domaine de Listel (Camargue) qui cumule les caractéristiques suivantes : zone de production viticole, bonne qualité de l'eau douce, zone de protection des oiseaux, lieu de chasse et de pêche, site d'écotourisme.

Parmi les autres sites affiliés à ELO hors de France, on citera les exemples britanniques de la « Holme dunes national nature reserve » et de « Scott Head island reserve » qui gèrent de vastes zones humides côtières en privilégiant la biodiversité.

La Commission européenne, via sa Direction générale (DG) Environnement soutient ce programme pour lequel des subventions sont attribuées, sous réserve d'être redistribuées.

La mise en oeuvre du programme est fondée sur le volontariat, les propriétés candidates faisant l'objet d'une évaluation préalable à leur intégration dans le réseau.

Au cours de l'exercice 2009, ELO doit achever l'analyse de 69 propriétés qui se sont portées candidates pour adhérer à « Wildlife Estates Initiative ».

La révision prochaine de la PAC, les perspectives de la diminution probable du budget communautaire incitent à rechercher des solutions alternatives pour éviter les écueils du « tout réglementaire » stérile et coûteux en frais de gestion, en privilégiant le soutien des innovations.

* 1 Colloque « Les bons comptes des zones humides » (3 février 2009), Agence du bassin Adour-Garonne.

* 2 Colloque « Les bons comptes des zones humides » (3 février 2009), Agence du bassin Adour-Garonne.

* 3 Cf « Les relations forêt-atmosphère » par Y. BRUNET, unité de climatologie - INRA ( in colloque Arbora 1997).

* 4 Cf. colloque « Zones humides, chasse et conservation de la nature », maison de la Baie de Somme, 17-19 juin 2009.

* 5 Base de données cartographiques de l'Institut géographique national.

* 6 Séminaire technique « zones humides » - APCA 23 janvier 2009.

* 7 Séminaire technique « zones humides » - APCA, 23 janvier 2009.

* 8 SIE : service d'information sur l'eau.

* 9 L'estimation en 2009 serait, selon le MEEDDAT, de 1,5 million ha.

* 10 ELO : European Landowners Organisation.

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