c) Le problème des garanties de sécurité

On peut s'attendre, à la simple lecture du rapport Evans-Kawaguchi, à une très forte pression lors de la Conférence d'examen du TNP :

- en faveur d'une déclaration de non emploi en premier de l'arme nucléaire par les Etats dotés (« no first use ») donc non seulement de renonciation à tout emploi préventif ou préemptif - ce qui est légitime - mais même de simple riposte à une attaque conventionnelle massive ou par voie d'armes de destruction massive autres que nucléaires, ce qui serait la négation de la dissuasion ;

- ou à défaut, d'une déclaration des Etats dotés spécifiant que le seul but de l'arme nucléaire serait de dissuader un autre Etat d'utiliser celle-ci contre l'Etat concerné ou un de ses alliés (« sole purpose »), position qui serait plus proche de celle à laquelle se rallierait l'Administration américaine dans le cadre de la NPR 2010.

L'argument du cynisme avec lequel l'engagement du « no first use » a été pris par l'URSS pendant la guerre froide, ou pourrait l'être aujourd'hui par d'autres puissances « émergentes », conduit la Commission Evans-Kawaguchi, bien que préférant en théorie le « no first use » au « sole purpose », à se contenter de ce dernier engagement comme position de repli.

En effet le problème de la dissuasion élargie aux alliés des Etats-Unis ne peut être résolu que par cette voie. Si soucieuse qu'elle soit de « délégitimer » l'arme nucléaire, la Commission Evans-Kawaguchi prend en compte les nécessités de la « Puissance globale » que constituent les Etats-Unis, pour assouplir l'engagement vers un concept de « dissuasion », censé assurer la protection des « alliés ». Cet engagement ne répond pas mieux que le précédent (le « no first use ») à notre doctrine qui est d'abord une doctrine de dissuasion nationale, même si elle est aussi une contribution à la dissuasion globale de l'Alliance atlantique. En fait l'argument de la dissuasion élargie se renverse : que se passe-t-il si une puissance non dotée mais alliée à un pays doté se livre à une agression ? La Commission Evans- Kawaguchi préconise une résolution du Conseil de sécurité des Nations unies prohibant l'usage des armes nucléaires « en tout temps et partout contre les Etats non dotés parties au TNP ou au moins ceux qui ne maintiennent pas d'armes nucléaires sur leur territoire en vertu d'arrangements pris dans le cadre d'une alliance ». Cette formulation aboutirait à favoriser la dénucléarisation de certains pays. Déjà le nouveau gouvernement japonais a manifesté son opposition à la présence d'armes nucléaires américaines sur le sol du Japon. De même la revendication d'une Europe « sans armes nucléaires » se fait-elle entendre en Allemagne, en Belgique et aux Pays-Bas. Cette dénucléarisation unilatérale ne prendrait pas en compte les conditions de la sécurité globale, si elle devait se faire sans contrepartie.

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