2. La baisse de prix constatée

Le débat sur la réalité des baisses de prix s'est engagé, lors du passage au taux réduit de TVA, sur des tentatives pour vérifier que les restaurateurs respectaient bien les engagements qu'ils avaient pris dans le contrat d'avenir. Cela a créé une grande confusion car les dispositions du volet « prix » de ce contrat étaient rédigées de manière telle qu'elles rendaient très difficile toute tentative sérieuse d'évaluation. En effet, dès lors qu'on cherche à apprécier les engagements de baisse des prix au niveau de la carte d'un établissement, il s'en suit que tout changement de carte (événement pourtant fréquent et souhaitable dans la vie d'un restaurant) se traduit de facto par la disparition des points de comparaison. Par ailleurs, baisser le prix d'un produit de la carte n'a pas le même sens selon que celui-ci est faiblement ou fortement demandé par les consommateurs : il suffit donc de baisser le prix de produits peu consommés pour pouvoir afficher un respect formel des engagements sans que cela se traduise véritablement par une baisse de prix pour les consommateurs.

La difficulté à vérifier, en pratique, le respect des engagements pris par les professionnels a alimenté la suspicion du public et des médias sur la réalité de la baisse et ce doute a nui à l'ensemble des professionnels, aussi bien ceux qui ont joué sincèrement le jeu que les autres. Votre rapporteur déplore, s'agissant d'une mesure réclamée depuis dix ans par la profession et promise depuis 2002 par les pouvoirs publics, qu'une attention plus grande n'ait pas été portée, en amont, à la définition d'indicateurs de performance opérationnels aisément lisibles, ainsi qu'à la mise au point d'une politique de communication plus pertinente sur la question si sensible de la baisse des prix.

Pour rompre avec les approximations initiales, il faut s'en tenir au seul indicateur robuste d'un point de vue méthodologique, à savoir l'indice des prix à la consommation dans la restauration, indice synthétique qui intègre les prix de l'ensemble des produits et qui pondère ces prix en fonction du poids de chaque produit dans la consommation . L'INSEE propose ce type d'indice et l'analyse de son évolution, avant et après la réduction du taux de TVA sur les ventes à consommer sur place, apporte des enseignements intéressants 19 ( * ) .

On constate tout d'abord que les prix à la consommation dans la restauration ont connu une baisse quasi immédiate de 1,5 % au cours de l'été 2009 , ce qui correspond à 60 % de la baisse qu'on aurait pu espérer si l'ensemble des restaurateurs avaient répercuté sans tarder, dans la proportion d'un tiers, la baisse de la TVA.

Les prix du secteur ont ensuite entamé une lente remontée à partir de l'automne, remontée qui ne les a toutefois pas ramenés à leur niveau initial. Plus d'un an après la réduction du taux de TVA, les prix à la consommation du secteur se situent en effet encore 0,7 % au dessous de leur niveau de juin 2009.

Pour aller plus loin dans l'analyse, on doit cependant s'intéresser à la manière dont les prix dans la restauration ont évolué par rapport à l'inflation. C'est en effet l'écart par rapport au niveau général des prix à la consommation qui permet de mesurer l'évolution « réelle » des prix.

Source : établi à partir des données de l'INSEE.

L'analyse du graphique ci-dessus conduit à établir un bilan plutôt positif de l'effet « prix » de la réduction du taux de TVA.

Les prix « réels » à la consommation ont en effet bel et bien baissé dans des proportions significatives. L'inflation a augmenté de 1,43 % en France de juin 2009 à août 2010, tandis que, dans le même temps, le recul des prix dans la restauration s'établissait à 0,7 %. La baisse réelle des prix ( c'est-à-dire l'écart entre les prix du secteur et le niveau général des prix à la consommation) atteint donc 2,15 points en août 2010, après avoir culminé à 2,5 points en mai 2010 .

Certes, le rythme de la baisse a été plus lent qu'on aurait pu le souhaiter puisque, sur les six premiers mois d'application de la réforme, le secteur de la restauration a restitué aux consommateurs environ 1/6 du montant total des gains liés à la réduction du taux de TVA, au lieu du 1/3 prévu. Cependant, la mesure est ensuite montée en puissance et a permis d'atteindre, entre mars et juillet 2010, la cible de baisse des prix visée initialement. Cela a été possible grâce à une progression très modérée des prix du secteur par rapport à l'inflation. Un bilan honnête de l'effet « prix » de la réduction de TVA ne doit donc pas se focaliser uniquement sur l'ampleur un peu décevante de la baisse des prix immédiatement constatée, mais doit également intégrer cet effet de modération des prix dans la durée, modération d'autant plus remarquable que la restauration est un secteur traditionnellement très inflationniste.

Source : établi à partir des données de l'INSEE et du ministère de l'économie.


* 19 Tous les indices de prix sont accessibles en ligne à l'adresse : http://www.insee.fr/fr/bases-de-donnees/default.asp?page=indices.htm.

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