B. UNE VOIE INCONTOURNABLE DANS LAQUELLE SE SONT LANCÉS DE NOMBREUX ETATS

Face au développement de l'obésité depuis quatre décennies, de nombreux pays et institutions ont lancé des politiques de prévention contre l'obésité.

1. Les actions menées en France

La France a longtemps paru protégée de l'obésité. Néanmoins, devant le phénomène de rattrapage qui semblait s'être engagé à partir des années 90, particulièrement chez les enfants, plusieurs initiatives ont été prises afin de promouvoir la prévention de l'obésité.

Actuellement, une multitude d'actions sont menées aussi bien au niveau national que local, sans d'ailleurs faire l'objet ni d'un recensement ni d'une réelle évaluation de leur efficacité.

Sans préjuger de la valeur des stratégies de prévention menées dans de nombreuses collectivités territoriales, deux exemples seront mis en valeur : d'une part le programme national nutrition santé (PNNS) parce qu'il incarne la pierre angulaire de la prévention basée sur la nutrition au niveau national ; d'autre part le programme Fleurbaix-Laventie parce qu'il représente la première tentative suivie et évaluée scientifiquement d'une stratégie de prévention reposant sur toute une communauté.

a) Le Programme national nutrition santé (PNNS)

A la suite de la publication, en 2000, du rapport du Haut comité de la santé publique intitulé « Pour une politique nutritionnelle de santé publique en France », le Premier ministre a annoncé le lancement en janvier 2001 du Programme National Nutrition Santé (PNNS).

L'objectif général du PNNS est d'améliorer l'état de santé de l'ensemble de la population en agissant sur l'un de ses déterminants majeurs qu'est la nutrition.

b) Le premier PNNS (2001-2006)

Il établit un socle de repères nutritionnels validés scientifiquement et fondés sur une approche globale et positive de la nutrition.

Les 9 repères de consommation

Fruits et légumes : au moins 5 par jour ; consommation à chaque repas et en cas de petits creux ; crus, cuits, nature ou préparés ; frais, surgelés ou en conserve.

Pains, céréales, pommes de terre et légumes secs : à chaque repas et selon l'appétit. Favoriser les aliments céréaliers complets ou le pain bis. Privilégier la variété.

Lait et produits laitiers (yaourts, fromages) : 3 par jour. Privilégier la variété. Privilégier les fromages les plus riches en calcium, les moins gras et les moins salés.

Viandes et volailles, produits de la pêche et oeufs : 1 à 2 fois par jour. En quantité inférieure à celle de l'accompagnement. Viandes : privilégier la variété des espèces et les morceaux les moins gras. Poisson : au moins 2 fois par semaine.

Matières grasses ajoutées : limiter la consommation. Privilégier les matières grasses végétales (huiles d'olive, de colza...). Favoriser la variété. Limiter les graisses d'origine animale (beurre, crème...).

Produits sucrés : limiter la consommation. Attention aux boissons sucrées. Attention aux aliments gras et sucrés à la fois (pâtisseries, crèmes dessert, chocolat, glaces...).

Boissons : de l'eau à volonté. Au cours et en dehors des repas. Limiter les boissons sucrées (privilégier les boissons allégées). Boissons alcoolisées : ne pas dépasser, par jour, 2 verres de vin (de 10 cl) pour les femmes (à l'exclusion des femmes enceintes auxquelles il est recommandé de s'abstenir de toute consommation d'alcool pendant la durée de la grossesse) et 3 pour les hommes. 2 verres de vin sont équivalents à 2 demis de bière ou 6 cl d'alcool fort.

Sel : limiter la consommation. Préférer le sel iodé. Ne pas resaler avant de goûter. Réduire l'ajout de sel dans les eaux de cuisson. Limiter les fromages et les charcuteries les plus salés et les produits apéritifs salés.

Activité physique : au moins l'équivalent d'une demi-heure de marche rapide chaque jour. À intégrer dans la vie quotidienne (marcher, monter les escaliers, faire du vélo...)

Les messages du PNNS tiennent compte du caractère culturel de l'alimentation et de son association, notamment en France, à des notions de plaisir, de convivialité et de goût. Toute stigmatisation de personnes, de comportements ou de produits alimentaires est bannie et aucun interdit vis-à-vis d'aliments n'est émis. Sont mis en avant les aliments et non pas les nutriments, ainsi que la pratique régulière d'une activité physique.

Par ailleurs, le PNNS fixe 9 objectifs nutritionnels prioritaires en termes de santé publique.

5 objectifs concernent la modification des habitudes alimentaires :

- augmenter la consommation de fruits et légumes afin de réduire le nombre de petits consommateurs de fruits et légumes d'au moins 25 % ;

- augmenter la consommation de calcium afin de réduire de 25 % la population des sujets ayant des apports calciques en dessous des apports nutritionnels conseillés, tout en réduisant de 25 % la prévalence des déficiences en vitamine D ;

- réduire la contribution moyenne des apports lipidiques totaux à moins de 35 % des apports énergétiques journaliers, avec une réduction d'un quart de la consommation des acides gras saturés au niveau de la moyenne de la population (moins de 35 % des apports totaux de graisses) ;

- augmenter la consommation de glucides afin qu'ils contribuent à plus de 50 % des apports énergétiques journaliers, en favorisant la consommation des aliments sources d'amidon, en réduisant de 25 % la consommation actuelle de sucres simples, et en augmentant de 50 % la consommation de fibres ;

- réduire l'apport d'alcool chez ceux qui consomment des boissons alcoolisées. Cet apport ne devrait pas dépasser l'équivalent de 20 g d'alcool pur par jour (soit deux verres de vin de 10 cl ou deux bières de 25 cl ou 6 cl d'alcool fort).

3 objectifs visent la modification de marqueurs de l'état de santé de la population française :

- la réduction de 5 % de la cholestérolémie moyenne dans la population des adultes ;

- la réduction de 10 mm de mercure de la pression artérielle systolique chez les adultes ;

- la réduction de 20 % de la prévalence du surpoids et de l'obésité (IMC > 25 kg/m²) chez les adultes et l'interruption de l'augmentation de la prévalence de l'obésité chez les enfants.

La sédentarité est officiellement reconnue comme un facteur de risque des maladies chroniques. Le dernier objectif chiffré vise donc à augmenter l'activité physique quotidienne par une amélioration de 25 % du pourcentage des sujets faisant l'équivalent d'au moins 1/2h de marche rapide par jour.

Pour atteindre ces objectifs, le PNNS propose 6 axes stratégiques visant à :

- i nformer et orienter les consommateurs vers des choix alimentaires et un état nutritionnel satisfaisant, éduquer les jeunes et créer un environnement favorable à une consommation alimentaire et un état nutritionnel satisfaisant ;

- prévenir, dépister et prendre en charge les troubles nutritionnels dans le système de soins ;

- impliquer les industriels de l'agro-alimentaire et la restauration collective ainsi que les consommateurs au travers des associations de consommateurs et de leurs structures techniques ;

- mettre en place des systèmes de surveillance alimentaire et nutritionnelle de la population ;

- développer la recherche en nutrition humaine : recherches épidémiologiques, comportementales et cliniques ;

- engager des mesures et actions de santé publique complémentaires destinées à des groupes spécifiques de population.

c) Le deuxième PNNS (2006-2010)

Le deuxième PNNS vise à poursuivre les actions lancées dans le premier plan à travers la promotion des 9 repères de consommation et le développement de campagnes de communication sur ces repères.

Par ailleurs, trois nouvelles priorités sont reconnues :

- l'amélioration de la qualité de l'offre alimentaire : le PNNS prône la signature, sur un mode individuel ou collectif, d'engagements portant sur la composition nutritionnelle des aliments, leur présentation et leur promotion. De la même façon, les entreprises de restauration collective sont invitées à signer des engagements similaires. En outre, un observatoire de la qualité alimentaire des produits (OQALI) est créé afin d'assurer le suivi de la qualité des produits alimentaires.

- la mise en place d'un plan de dépistage précoce et de prise en charge de l'obésité . Le PNNS pose le principe d'un dépistage systématique qui doit reposer sur les bureaux de protection maternelle et infantile, la médecine scolaire et la médecine de ville ainsi que sur la mise en place de réseaux multidisciplinaires de prise en charge médicale de l'obésité. Le PNNS prône également la mise en place de pôles interrégionaux de référence de l'obésité autour des centres hospitalo-universitaires. Par ailleurs, l'enseignement de la nutrition doit être renforcé dans la formation initiale des personnels de santé et diffusé auprès des travailleurs sociaux, des enseignants et des éducateurs physiques par le biais de la formation continue.

- l'instauration de mesures spécifiques pour les populations défavorisées : les personnes défavorisée ou précaires sont les plus touchées par l'obésité. Le PNNS prévoit donc des mesures permettant d'assurer une meilleure prévention et prise en charge de l'obésité auprès de cette catégorie de population à travers les réseaux sociaux (caisses d'allocation familiale, centres d'examen de santé, services sociaux) et la multiplication d'interventions de terrain pour promouvoir la prévention de l'obésité.

Le deuxième PNNS s'achevant en décembre 2010, un nouveau plan est en cours d'élaboration pour la période 2011-2015.

d) L'adoption d'une législation cadrant certains aspects de l'offre alimentaire

La loi de santé publique du 9 août 2004 a repris les axes de prévention du PNNS. En outre, elle a posé un cadre limitatif à certains aspects de l'offre alimentaire.

D'une part elle a introduit l'obligation d'une information sanitaire pour les messages publicitaires visant à promouvoir les boissons sucrées et les produits alimentaires manufacturés. D'autre part, elle a interdit dans les écoles les distributeurs automatiques de boissons et de produits alimentaires payants accessibles aux élèves.

e) Fleurbaix-Laventie, ville santé

Ces deux communes du Pas-de-Calais ont fait l'objet de trois études successives.

La première étude (1992/1997) avait pour objectif d'évaluer si un programme d'éducation nutritionnelle enseigné à des enfants de l'école primaire pouvait modifier les habitudes alimentaires de la famille. Ce programme consistait à améliorer les connaissances des enfants sur les caractéristiques de la nourriture et des nutriments, sur les habitudes alimentaires saines, sur la transformation de la nourriture et l'étiquetage à travers des enseignements réalisés par les enseignants. Ces derniers élaboraient eux-mêmes leurs cours. Ils avaient au préalable suivi une formation en nutrition par des nutritionnistes et des diététiciens. Aucun accent particulier n'était mis sur l'importance de l'activité physique.

Le caractère concret de ces enseignements était encouragé par toute une série d'initiatives permettant aux enfants de goûter à une alimentation variée, agréable et abordable financièrement : cours de cuisine, repas « découverte » à la cantine, visites de fermes et de magasins, organisation de petits-déjeuners à l'école en présence des parents et de diététiciennes.

La deuxième étude (1997/2002) visait à étudier les liens existants entre la prise de poids et des facteurs génétiques et/ou environnementaux. Cette étude épidémiologique longitudinale suivait 294 familles qui faisaient l'objet tous les deux ans d'un examen clinique et devaient répondre à un questionnaire. Cette étude ne devait s'accompagner d'aucune intervention. Néanmoins, non seulement les programmes d'éducation nutritionnelle lancés dans le cadre de la première étude ont été maintenus, mais les conseils municipaux de ces deux villes ont progressivement engagé des mesures de prévention de l'obésité en direction des enfants et des adultes. Ainsi, deux diététiciennes ont été embauchées par les deux communes pour intervenir dans les écoles et dans les associations, de nouveaux équipements sportifs ont été construits, des éducateurs sportifs ont été employés dans les écoles primaires pour promouvoir l'activité physique, des « pédibus » ont été instaurés, des journées de promotion de l'activité physique et d'une vie saine ont été organisées, touchant toute la population.

Dans la troisième étude (2002/2007), un bilan de santé associé à un questionnaire censé déceler les modes de vie peu sains (consommation d'alcool, sédentarité, tabagisme etc.) a été offert à 3 000 volontaires. Les sujets identifiés comme présentant une inadéquation par rapport aux recommandations du PNNS se sont vu offrir une intervention personnalisée et ciblée pour atteindre ces recommandations.

S'est donc mise progressivement en place une véritable politique de prévention reposant sur toute une communauté visant à modifier les comportements alimentaires et à augmenter la pratique de l'activité physique.

Or, cette politique a porté ses fruits puisque plusieurs études ont montré qu'à partir de 2004, la prévalence du surpoids à Fleurbaix-Laventie a diminué alors qu'elle continuait à augmenter dans les villes voisines comparables.

Le programme EPODE (Ensemble prévenons l'obésité des enfants) a ensuite été créé. Il vise à aider les familles à modifier en profondeur et durablement leur mode de vie en développant, grâce à la mobilisation des acteurs locaux, une offre de proximité conforme aux recommandations du Programme National Nutrition Santé et axée principalement sur :


• Une alimentation équilibrée, diversifiée, abordable et plaisante au niveau familial.


• La pratique d'activités physiques pour tous, intégrées dans le quotidien.


• L'encouragement à développer un environnement local favorable à ces bonnes habitudes.

Le programme EPODE est assuré, au niveau national, par un acteur privé, l'agence Protéines, qui coordonne et anime le programme. Elle s'appuie sur un comité scientifique qui intervient dans la phase d'analyse des recommandations scientifiques et des comportements individuels et collectifs. Ce comité valide également les actions proposées et labellise l'ensemble des outils développés ou des actions locales initiées dans les villes.

En 2004, le programme EPODE a été lancé dans 10 villes pilotes. Il compte aujourd'hui 226 villes en France.

Le réseau des villes actives du PNNS

Le PNNS s'est accompagné dès 2003/2004 de la création d'une charte « villes actives du PNNS » visant à impliquer officiellement les villes et communautés de communes dans la mise en oeuvre d'actions ou de programmes en cohérence avec le PNNS.

Depuis 2007 a été créé le réseau des villes actives du PNNS dont l'objectif est de valoriser les actions des villes et des communautés de communes, mais également d'échanger sur leurs pratiques à travers la création d'une banque de « projets nutrition » nationale et d'un site Internet dédié.

En 2010, le réseau des villes actives du PNNS regroupe 224 communes, soit 11,46 millions d'habitants.

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