2. La distinction entre les biens et services reproductibles et les biens patrimoniaux

Dans la lignée des conceptions du revenu de John Hicks, le champ de la production est séparé de celui de la création patrimoniale qui est défini par la non-reproductibilité.

Mais, la frontière entre ces deux territoires est susceptible d'évoluer en fonction des conditions techniques ou économiques. Par exemple, le développement industriel du secteur informatique a modifié du tout au tout l'approche des biens liés à son objet : des logiciels en particulier.

Des questions analogues peuvent se poser pour l'ensemble des oeuvres de l'esprit, dont la recherche-développement, ou pour les actifs non produits.

Le secteur informatique et celui de la recherche-développement sont d'une importance particulière du fait des grandeurs concernées et des évolutions comptables intervenues ou à venir.

Pour ce qui est des logiciels , seules les contreparties de l'exploitation des séries commercialisées étaient inscrites en production. Les salaires des ingénieurs travaillant à la création des originaux étaient réputés couverts par cette exploitation, la production d'originaux n'étant pas valorisée en tant que telle.

L'essor de l'industrie informatique reposant sur un courant continu d'innovations et la part du travail consacrée à de nouveaux produits étant importante dans un volume grandissant d'activités informatiques, une proportion de plus en plus grande des activités salariales se trouvaient dépourvues de productions correspondantes.

C'est pour remédier à cette situation qu'il a été décidé d'intégrer à la production la part de l'activité des informations correspondant au développement de nouveautés dans les logiciels.

Désormais la production des originaux est incluse dans la production à hauteur d'une portion des salaires d'une partie des effectifs de la branche concernée.

Cette solution conduit à estimer une production, réelle par les forces productives qu'elle mobilise, mais virtuelle parce qu'elle n'est pas mise sur le marché.

Elle se traduit par une correction du rapport salaires/valeur ajoutée qui, augmentant le dénominateur du ratio, diminue la part des salaires par rapport à la situation antérieure où celle-ci ressortait comme un peu artificiellement supérieure.

Il n'en reste pas moins qu'avec la nouvelle règle, la production du secteur marchand est partiellement déliée des ventes effectives réalisées sur le marché et des recettes qu'elles apportent.

Au demeurant, si les efforts de recherche n'aboutissent pas, la production n'en est pas pour autant corrigée, les comptes de patrimoine étant seuls mouvementés à travers la dévalorisation d'un actif constitué en continu mais dont la valeur chute du fait de l'échec du travail de création de l'original.

Mutatis mutandis , ce sont les mêmes principes qui devraient s'appliquer à l'avenir s'agissant des efforts de recherche-développement des entreprises. Il devrait là-aussi en résulter des modifications quant à la perception de la part des salaires dans la valeur ajoutée.

En l'état, les salaires versés aux chercheurs n'ont pas de production correspondante et la part des salaires dans la valeur ajoutée croît dès lors que la composante salariale de l'effort de recherche augmente et décroît quand elle diminue.

Dans la nouvelle règle, la valorisation en production de la recherche-développement devrait se traduire par une baisse structurelle de la part des salaires dans la valeur ajoutée par rapport à ce qu'elle est dans les conventions actuelles. En outre, comme une symétrie partielle sera établie entre les coûts salariaux de la R-D et la production, la variation de la part des salaires dans la valeur ajoutée sera moins sensible aux évolutions des dépenses salariales de R-D.

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