CONCLUSION

La crise économique et financière que traverse l'Espagne vient mettre en lumière les failles d'un modèle économique financé en partie par l'Union européenne mais bâti imprudemment sur une vision spéculative de l'immobilier et un surdimensionnement des établissements financiers, notamment régionaux. Si, à la différence des cas grec, irlandais et portugais, cette crise devrait pouvoir être surmontée dans un proche avenir sans que le recours au Fonds européen de stabilité financière et au Fonds monétaire international, des questions restent posées quant à l'avenir économique du pays.

Il apparaît en effet délicat aujourd'hui de déterminer quelles seront les pistes pour permettre à l'Espagne de renouer avec une phase d'expansion économique. A l'image de son voisin ibérique, l'Espagne semble, à court-moyen terme, devoir composer avec une croissance faible, peu créatrice d'emplois, tirée par l'exportation de produits industriels traditionnels. Le confort d'une croissance à crédit, assise sur la brique, a tempéré toute ambition en matière de réforme de l'enseignement supérieur ou de modernisation du marché du travail. Le financement des projets immobiliers s'est opéré dans le même temps au détriment d'autres secteurs tels que la recherche et développement.

Il y a fort à craindre que les politiques de rigueur espagnole et communautaire ne gèlent le financement public au cours des prochaines années. La situation difficile que rencontrent les établissements financiers, dont les bilans sont grevés par les scories de l'effondrement du secteur immobilier, devrait limiter leur implication dans l'économie locale. Il apparaît pourtant vital que l'Espagne, qui ne bénéficiera plus, en 2013, de la manne européenne de façon aussi conséquente qu'à l'heure actuelle, puisse mettre en oeuvre un modèle économique alternatif sous peine d'être confrontée à un défi tant social que politique de grande ampleur. La question de son organisation territoriale est par ailleurs implicitement posée par les problèmes occasionnés par le surdéveloppement des caisses d'épargne régionales et par le laxisme financier des collectivités locales qui ne peuvent que nuire à la crédibilité du pays tout entier.

EXAMEN PAR LA COMMISSION

La commission des affaires européennes s'est réunie le mardi 29 mars 2011 pour l'examen du présent rapport.

M. Jacques Blanc :

Je souhaite souligner que la bulle immobilière a été générée à la fois par une demande accrue de logement mais aussi par la volonté des promoteurs et des communautés autonomes de multiplier les résidences de tourisme.

Il convient également de noter que toutes les communautés autonomes sont touchées par la crise, même celles qui, à l'instar de la Catalogne, sont considérées comme les plus dynamiques.

M. Gérard César :

Mon interrogation porte sur les logements qui ont été récupérés par les établissements financiers. Le rapporteur indique que leur nombre varie entre 1 million et 1,5 million. Que vont en faire les banques et les caisses d'épargne ?

M. Jean-François Humbert :

Je n'ai pas eu de la part de mes interlocuteurs de réponse précise sur ce sujet. Les banques et les caisses d'épargne ne peuvent pas vendre massivement ces biens tant il y aurait un risque de chute vertigineuse des prix. On est en présence d'un problème de demande. D'un autre côté, ces biens grèvent les bilans des établissements financiers et limitent leur capacité d'investissement.

Mme Catherine Tasca :

Peut-on parler de crise du logement en Espagne au regard de ce que vous nous avez indiqué dans votre exposé ? Par ailleurs, quelles sont les conséquences pour l'Espagne de la crise au Portugal, au regard de la forte exposition de son économie au risque portugais ?

M. Jean-François Humbert :

S'il y a crise du logement, il s'agit plutôt d'une crise de la demande tant l'offre est conséquente et dépasse les besoins de la population.

En ce qui concerne le Portugal, je ne pense pas qu'il puisse y avoir un risque de contagion. Je rappelle que les banques espagnoles ne sont pas plus exposées que les banques françaises au risque portugais. Je pense que l'« effet domino » annoncé par les analystes devrait s'arrêter après la Grèce et l'Irlande, au Portugal.

M. Pierre Bernard-Reymond :

Le rapport de notre collègue vient souligner un peu plus la nécessité de renforcer la surveillance économique de l'Union européenne de façon à prévenir ce type de crise. Un dispositif d'alerte doit être mis en place afin de repérer la formation de ce type de bulle. La gouvernance économique ne saurait, en effet, se limiter à la seule surveillance de la situation budgétaire des États membres.

L'autre enseignement tient, comme vient de le rappeler le rapporteur, à l'absence, à l'heure actuelle, de conséquence majeure pour l'Espagne des difficultés financières portugaises.

M. Denis Badré :

Les investissements espagnols en Amérique latine, dont la situation économique s'améliore, ont-ils permis au pays d'atténuer les effets de la crise ?

M. Jean-François Humbert :

L'économie espagnole est, en effet, très présente en Amérique latine via les grandes multinationales qui s'y sont installées mais aussi par l'intermédiaire de ses deux plus grandes banques, BBVA et Santander, dont l'essentiel de l'activité a trait à ces pays. Cette ouverture a de fait permis de compenser, de façon relative, les effets de la crise.

A l'issue du débat la commission a autorisé la publication du rapport.

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