b) Les conséquences de l'ouverture du marché de l'électricité pour la compétitivité des industries
Avec le processus d'ouverture à la concurrence du marché de l'électricité engagé en 1996 par l'Union européenne 207 ( * ) et la transposition progressive des dispositions correspondantes en droit interne 208 ( * ) , les industries électro-intensives ont été contraintes de s'organiser pour sécuriser leurs approvisionnements et leurs tarifs.
• En effet, contrairement à ce que l'on aurait pu en attendre, la libéralisation du marché de l'électricité s'est traduite en France par une augmentation des tarifs. C'est pourquoi, après la hausse des prix consécutive à l'ouverture du marché aux clients professionnels au 1 er juillet 2004, il a été prévu que ces derniers puissent bénéficier jusqu'au 31 décembre 2010 d'un tarif réglementé transitoire d'ajustement au marché (TaRTAM) 209 ( * ) .
Pour une consommation constante « en ruban », le TaRTAM s'élevait, en 2010, à 42 euros par Mwh, soit un niveau nettement inférieur au prix moyen du marché (56 euros), mais supérieur d'environ 20 % à celui de l'électricité française d'origine nucléaire (31 euros par Mwh).
En réalité, du fait de l'importance de la part d'électricité d'origine hydraulique et nucléaire, les coûts de production en France se trouvent être particulièrement compétitifs par rapport à ceux des autres États membres, encore fortement dépendants de centrales au charbon ou au gaz, beaucoup moins efficientes : ainsi, le prix de l'électricité en France est inférieur de 27 % à la moyenne européenne pour les ménages et de 33 % pour les autres consommateurs.
En 2006 et 2007, le TaRTAM a fait l'objet de deux procédures contentieuses de la part de la Commission européenne, au motif qu'il aurait pu constituer une forme de subvention déguisée aux entreprises éligibles et un obstacle à l'ouverture du marché électrique.
• Afin d'échapper à toute condamnation mais aussi de permettre aux consommateurs français de continuer à bénéficier de la modicité du coût de l'électricité nucléaire, le Gouvernement s'est engagé à régulariser la situation de la France au regard des directives européennes en faisant adopter par le Parlement la loi portant nouvelle organisation du marché de l'électricité, dite loi NOME 210 ( * ) .
Ce texte prévoit la mise en place jusqu'en 2025 d'un système temporaire d'accès régulé à l'électricité de base rebaptisé « accès régulé à l'électricité nucléaire historique » (ARENH), qui consiste à permettre à tout fournisseur alimentant des consommateur sur le territoire national d'obtenir, dans la limite d'un plafond global de 130 TWh (soit un quart de la production d'électricité d'origine nucléaire d'EDF), une certaine quantité d'électricité à un prix régulé reflétant la totalité des coûts de production du parc nucléaire (exploitation, maintenance, prolongement de la durée de vie, démantèlement des centrales, gestion des déchets radioactifs, etc.).
Quel que soit le prix fixé pour l'ARENH, les prix de l'électricité seront inéluctablement amenés à augmenter dès 2016. Dans cette perspective, les industries électro-intensives ne pourront pas trouver de solutions adaptées à leurs contraintes en termes de compétitivité et de visibilité tarifaire dans le cadre de la tarification ARENH, les quantités allouées aux fournisseurs et les tarifs correspondants étant fixés annuellement.
Les solutions alternatives résident donc dans la conclusion de contrats de fourniture de moyen ou long terme avec les producteurs d'électricité permettant aux industriels d'obtenir des droits de tirage sur la production d'électricité en contrepartie d'investissements en faveur du développement du parc nucléaire ou hydraulique, ce que permet la nouvelle loi NOME.
* 207 Directive 1996/92/CE concernant les règles communes pour le marché intérieur de l'électricité ; directive 2003/54/CE du 26 juin 2003 ; directives 2009/72/CE et 2009/73/CE.
* 208 Loi du 10 février 2000 relative au service public de l'électricité ; loi du 9 août 2004 relative au service public de l'électricité et aux industries électriques et gazières ; loi du 7 décembre 2006 relative au secteur de l'énergie.
* 209 Loi du 7 décembre 2006 précitée.
* 210 Loi n° 2010-1488 du 7 décembre 2010 portant nouvelle organisation du marché de l'électricité.