c) Perspectives
(1) Quels sont les effets probables de la réforme de la taxe professionnelle sur la politique de développement économique de la Région ? Peut-elle conduire à une réorientation des priorités, par exemple au détriment des entreprises industrielles ?
Comme il a été dit précédemment, les mécanismes de péréquation qui se juxtaposent les uns aux autres (FNGIR, fonds national de péréquation de la CVAE des régions) remettent en cause la « territorialisation » de la CVAE qui avait été souhaitée initialement par les Parlementaires. Ces mécanismes peuvent sans conteste avoir un effet dés-incitatif sur les politiques locales en matière de développement économique.
A ce stade, une réponse à cette question apparaît prématurée car la Région ne dispose pas assez de recul (données détaillées communiquées par la DGFIP fin décembre 2011 qui n'ont pas encore fait l'objet d'une analyse détaillée sur les contributeurs à la CVAE). Cependant, c'est une vraie question qui devra être analysée de manière approfondie en évaluant effectivement les effets de cette réforme sur notre assiette fiscale.
(2) La réforme de la fiscalité locale peut-elle avoir un effet positif sur la réduction des écarts de richesse au sein de la Région ?
La réforme du fonds de solidarité des communes de la région d'Ile de France a été incluse en LFI 2012 76 ( * ) . Il nous parait prématuré de vouloir évaluer son impact en matière de réduction des écarts de richesse au sein de la Région. Toutefois il est très vraisemblable que compte tenu de l'augmentation des ressources du fonds, celui contribue davantage à une réduction des écarts de richesse.
(3) En prenant en compte à la fois la réforme de la fiscalité locale (allègement de l'impôt économique local) et les réformes fiscales liées au projet de transport du Grand Paris (augmentation de la fiscalité sur les bureaux et surfaces commerciales), comment appréciez-vous le bilan des réformes récentes sur l'activité économique en Région Ile-de-France ?
S'il est possible à ce stade d'évaluer le coût financier de la réforme de la TP pour le budget régional : manque à gagner de 50 M€ sur 2011 et 2012 (cf réponse n°1), coût qui s'accompagne pour l'avenir d'une perte quasi-totale du pouvoir de taux des régions et donc de toute flexibilité budgétaire ;
... comme d'établir un bilan pour de la réforme sur le budget de l'Etat. En effet, la suppression de la taxe professionnelle serait plus coûteuse que prévu. Dans son rapport sur le projet de loi de finances rectificative pour 2011, le rapporteur du Budget, Gilles Carrez, fournit une évaluation à la hausse du coût de la réforme. En régime de croisière, le manque à gagner pour l'Etat devrait s'élever à 6,7 milliards d'euros, contre 5,8 milliards d'euros anticipé par le gouvernement lors de la mise en oeuvre de la réforme, en 2009.
Il parait très difficile a contrario d'évaluer à ce stade l'impact de la réforme en termes de compétitivité des entreprises du territoire et d'établir un bilan sur l'usage que les entreprises ont fait des économies fiscales induites par la réforme...
Pour ce qui concerne la réforme de la fiscalité sur les bureaux dans le cadre du financement des projets de transports en Ile de France, le bilan est très mitigé à ce stade pour la région d'Ile de France.
Dans le domaine des transports, les besoins en investissement sont très importants en Ile de France et s'élèvent à plus de 32 Mds€ à horizon 2025. Comme acté dans le protocole d'accord avec l'Etat conclu en janvier 2011, 11,9 Mds€ sont directement à la charge de la région, auxquels s'ajoutent 5,5 Mds€ au titre du financement par le STIF du matériel roulant, soit un total de 17,4 Mds€.
Les nouvelles recettes (TIPP Grenelle, modernisation de la redevance pour création de bureaux - RCB - et de la taxe sur les bureaux) accordées à la région dans la cadre du protocole d'accord, soit un total d'environ 199 M€ par an sur 15 ans entre 2011 et 2025, ne sont toutefois pas du tout au rendez vous.
Le protocole d'accord table en effet sur 199 M€/an de recettes nouvelles pour la région, à savoir :
- 1,7 Mds€ de recette au titre de la modernisation de la RCB à horizon 2025 (soit 113 M€/an sur 15 ans : période 2011-2025) ;
- 0,3 Mds€ de recette au titre de la modernisation de la taxe à horizon 2025 (soit 20 M€/an sur 15 ans : période 2011-2025) ;
- 0,980 Mds€ de recette au titre de la « TIPP Grenelle » à horizon 2025 (soit 66 M€/an sur 15 ans : période 2011-2025).
En 2011 , la région n'a perçu que 14 M€ supplémentaires au titre de la modernisation de la taxe sur les bureaux. La modernisation de la RCB n'a rien rapporté à la région sur 2011 (problème de rédaction du texte initial de la LFR 2010 revu en LFR 2011 de juillet, attentisme des promoteurs,...) et la TIPP Grenelle n'était pas encore applicable 77 ( * ) .
Pour 2012 , la région a adopté la modulation « TIPP Grenelle » qui devrait lui rapporter environ 71 M€, auxquels devraient s'ajouter la recette attendue au titre de la modernisation de la RCB (prévu à ce stade à 30 M€) et les 14 M€ au titre de la modernisation de la taxe sur les bureaux, soit un total de 115 M€ (à peine 58% de ce qui est prévu au protocole).
Il convient de rappeler que ces investissements conduiront à une charge en fonctionnement supplémentaire d'environ 800 M€/an à terme (chiffrage du rapport Carrez). La révision du zonage du versement transport (alignement de la zone de tarification intermédiaire à l'unité urbaine), dont le décret d'application a été soumis au CFL du 7 février dernier doit rapporter environ 100 M€/an en régime de croisière (30 M€ la première année avec une montée en charge sur trois ans 78 ( * ) ) et sera donc largement insuffisante à couvrir les besoins à venir.
* 76 L'article 125 de la LFI 2011 prévoyait la création d'un fonds de péréquation des recettes communales et intercommunales franciliennes à destination des communes et EPCI à fiscalité propre d'Ile-de-France. L'objectif de ce fonds était fixé dès 2012 au niveau atteint par le FSRIF en 2009 (180 M€) pour atteindre une fois et demi ce niveau en 2015 (270 M€). L'article 145 de la loi de finances pour 2012 (2011-1977) refonde en conséquence le FSRIF. Le FSRIF ne concerne plus que les communes franciliennes. Les EPCI à fiscalité propre ne sont plus susceptibles de contribuer qu'au fonds national de péréquation (FPIC) institué par l'article 144 de la LFI 2012. Les ressources du fonds de solidarité des communes d'Ile-de-France sont fixées, respectivement, à 210, 230, 230, 250 et 270 M€ pour 2012, 2013, 2014 et 2015. En 2011 le FSRIF a redistribué 190 M€.
* 77 C'est l'article 34 de la LFR 2011 du 29 juillet 2011 qui a complété l'affectation de la TIPP Grenelle, prévue initialement en LFI 2010, à tout projet contribuant à « l'amélioration du réseau de transports urbains en Ile de France ».
* 78 L'article 32 de la LFR 2010 de décembre prévoit en effet que pour les communes qui changent de zone tarifaire, l'évolution du taux applicable est progressivement mise en oeuvre par tiers sur trois ans.