b) La péréquation

(1) Quel jugement portez-vous sur le mécanisme régional de péréquation de la CVAE prévu pour entrer en vigueur en 2013 ? Etes-vous favorable à un prélèvement sur la croissance nette de la CVAE ou sur le différentiel de croissance entre la CVAE de la région Ile-de-France et la CVAE nationale ?

Le mécanisme défini à l'article 124 de la LFI 2011 est censé répondre au problème des inégalités entre régions en termes d'évolution du produit de CVAE. Seraient contributrices les régions dont l'évolution cumulée de leur CVAE est supérieure à celle constatée au niveau national et dont le potentiel financier par habitant (PF) est supérieur au PF moyen de l'ensemble des régions. Seraient éligibles aux ressources de ce fonds les régions dont le PF est inférieur à 0,85 fois le PF moyen.

Ainsi, que cela soit pour déterminer les régions contributrices comme les régions bénéficiaires, ce mécanisme est fondé sur le critère du potentiel financier, critère non défini actuellement par la loi. Il parait essentiel pour la Région d'IDF que soit déterminé courant 2012 un critère équitable et exhaustif, à l'instar de ce qui a été fait pour les collectivités du bloc communal comme pour les départements en LFI 2012, c'est-à-dire un critère qui prenne en compte l'ensemble des nouvelles ressources des régions y compris les dotations du FNGIR et de la DCRTP.

La région d'Ile de France n'est pas favorable à un prélèvement qui serait opéré sur la croissance nette de sa CVAE et qui donc priverait la collectivité du dynamisme de son territoire auquel son action participe. Un prélèvement basé sur le différentiel de croissance entre la CVAE régionale et la CVAE nationale parait plus équitable et permettrait de garantir une convergence des évolutions.

(2) Quelle part de la CVAE la région est-elle prête à « abandonner » au profit de la péréquation ?

La région d'Ile de France « abandonne » d'ores et déjà plus la moitié de sa CVAE (55 %) au bénéfice de la péréquation opérée par le FNGIR. La « territorialisation » de la CVAE, souhaitée par les Parlementaires lors de l'élaboration de la réforme, est ainsi largement affectée en Ile de France par le mécanisme du FNGIR.

L'introduction à compter de 2013 d'un nouveau mécanisme dont l'objet serait alors de prélever une part de la croissance annuelle de la CVAE régionale constitue une atteinte supplémentaire à la « territorialisation » de cet impôt et parait contre-incitatif. En effet les régions seraient privées d'une partie des fruits de leur action en matière de développement économique territorial et cela contribuerait de façon supplémentaire à rompre le lien, au demeurant largement déjà remis en cause, entre la collectivité et son territoire.

(3) Jugez-vous les critères de répartition de ces fonds satisfaisants, notamment les critères de charges ?

En l'état actuel des textes, la répartition des ressources du fonds est effectuée entre régions éligibles en fonction du critère de ressources du PF (pour 50 %) et de trois critères de charges (pour 50 %).

Les critères de charges sont les suivants :

pour 1/3, au prorata de leur population,

pour 1/3, au prorata de l'effectif des lycéens et des stagiaires de formation professionnelle,

pour 1/3, au prorata de leur superficie.

Les critères de charges qui ont été retenus ne sont pas satisfaisants. En effet, il parait anormal qu'aucun indicateur représentatif des charges en matière de transports n'ait été retenu compte tenu du poids des dépenses transport dans le total des budgets des régions (22 %) pour 19 % pour les dépenses de formation professionnelle et 24 % pour les dépenses d'enseignement. Par ailleurs, trop de poids est donné au critère de superficie. Or si ce critère peut être représentatif des charges des régions peu denses, il ne l'est pas pour les régions qui ont à supporter des charges de centralité comme la région d'Ile de France (un kilomètre de transport en commun coûte beaucoup plus cher en Ile de France qu'un kilomètre de voie ferrée dans une région peu dense).

Pour ce qui est du critère de ressources du PF se reporter à la réponse n°5.

(4) L'indicateur de ressources fiscales des régions, créé par la loi de finances pour 2012 et qui prend en compte leur PIB, fait-il l'objet d'un consensus entre les régions françaises ? Pourrait-il être utilisé pour la mise en oeuvre du fonds de péréquation de la CVAE ?

L'indicateur de ressources fiscales (IRF) des régions ne prend pas en compte de PIB.

La LFI 2012 propose la définition d'un « indicateur de ressources fiscales - IRF » (article 143) qui vient annuler et remplacer l'ancien potentiel fiscal défini à l'article L.4332-5 du CGCT. Ce nouvel indicateur est constitué :

du produit de la nouvelle fiscalité (CVAE et IFER),

(+) modulation TIPP,

(+) taxe sur les certificats d'immatriculation,

(-) prélèvement au titre du FNGIR, pour la seule Région IDF.

Comme il a été dit précédemment (question n°5), cet indicateur est problématique pour la région Ile de France. La spécificité du critère de ressources des régions tient à ce qu'il exclut le montant reçu au titre de la DCRTP et que l'impact du FNGIR n'est pris en compte que dans l'hypothèse d'un prélèvement (une seule région concernée : la région d'Ile de France) et non dans l'hypothèse d'un reversement (toutes les autres régions concernées). Ce choix spécifique régional induit une minoration des ressources des régions qui perçoivent la DCRTP et le FNGIR (soit environ 1,3 Mds€, 31 % des ressources totales qui ont compensé la suppression de la TP ne sont pas prises en compte pour ces régions), c'est-à-dire de toutes les régions sauf l'IDF.

C'est l'éligibilité à la péréquation de la DGF qui est fonction de deux critères : celui de l'IRF et celui du PIB par habitant.

Ainsi, selon l'article 143 de la LFI 2012, sont éligibles à la péréquation les régions de métropole dont l'IRF est inférieur à l'IRF moyen et dont le PIB par habitant est inférieur à 1,3 fois le PIB moyen par habitant. En 2009, le PIB/hab. moyen en France métropolitaine s'élève à 29 897 €, donc 38 866 € pour 1,3 fois le PIB moyen, seule l'Ile de France dépasse ce plafond en 2009 avec 46 984 €. La prise en compte du PIB/hab. n'avait pas été évoquée lors des travaux au sein du groupe de travail de l'ARF. Elle constitue un ajout de « dernière minute » de la DGCL afin de prévenir la situation où l'IRF de la région d'Ile de France passerait sous l'IRF moyen rendant ainsi notre région éligible à la péréquation.

Cet ajout « sur mesure » conçu pour exclure la région d'Ile de France est pour le moins suspect. D'une part car il disqualifie le critère de l'IRF. Par ailleurs, il ne nous parait pas pertinent par son essence même. En effet, il ne faut pas confondre richesse du territoire et richesse de la collectivité régionale :

La région d'Ile de France dispose de ressources par habitant plutôt inférieures à la moyenne.

En termes de ressources fiscales par habitant la région d'Ile de France se situe dans la moyenne en 2010 (193 €/hab. en IDF contre 186 €/hab. en métropole hors Ile de France). Toutefois, en 2010, les recettes réelles de fonctionnement par habitant de la région d'Ile de France (293 €) sont parmi les plus faibles (après la région Pays de la Loire) et, en tout état de cause, inférieures de 14 % à la moyenne de métropole hors Ile de France (341 €).

Cette situation se reflète également dans les ratios d'épargne.

L'épargne brute (recettes réelles de fonctionnement - dépenses réelles de fonctionnement) par habitant en Ile de France est inférieure de plus de 16,7 % à la moyenne métropolitaine hors Ile de France.

Alors que les dépenses de fonctionnement par habitant de la région d'Ile de France sont inférieures à la moyenne.

Ainsi, en 2010 les dépenses réelles de fonctionnement par habitant en Ile de France (223 €/hab.) sont inférieures de 14 % à la moyenne de métropole hors IDF (258 €/hab.). En particulier, les frais de personnel représentent en Ile de France 14 % des dépenses de fonctionnement (et seulement 3,7 % pour les frais de personnel hors TOS), contre 17,1 % en métropole hors Ile de France.

En outre, la région doit faire face à des inégalités territoriales beaucoup plus fortes que dans les autres régions.

Les inégalités territoriales sont très fortes en Ile de France. Les écarts de richesse sont particulièrement importants et vont de 1 à 10 pour les communes de plus de 10 000 habitants (quand ces écarts ne sont que de 1 à 3 en région Rhône Alpes et de 1 à 9 en région Nord Pas de Calais. La région Ile de France compte en effet de nombreux territoires parmi les plus défavorisés de France. Ainsi, 26 Zones Franches Urbaines (ZFU), sur 100 au total au niveau national, sont en Ile de France. Les projets de rénovation urbaine se concentrent singulièrement en région d'Ile-de-France (29,8 % des projets validés par le comité d'engagement), bien davantage qu'en régions Nord-Pas-de-Calais (10,4 %) et Rhône-Alpes (8,8 %). Au final, les projets franciliens représentent 37,1 % des financements du programme national de rénovation urbaine, soit 4,3 milliards d'euros de subvention 75 ( * ) .

La Région a donc dû s'engager significativement sur des politiques à la demande de l'Etat (logement social, apprentissage, formation professionnelle,...). La région d'Ile de France a signé une convention avec l'ANRU, à l'instar de douze autres régions. La seule contribution régionale de l'Ile de France (1 234 M€) dépasse la somme des apports des autres régions (1 146 M€) sur la période 2007-2013.

La brève analyse de l'ensemble de ces éléments montre que la collectivité régionale francilienne n'est pas dans une situation plus confortable que les autres régions et qu'il faut dissocier la richesse du territoire francilien (mesurée par le PIB) et celle de la collectivité régionale qui n'a pas le pouvoir de mobiliser cette richesse, alors qu'elle doit faire face à des besoins qui ne sont pas moindres mais au contraire, et notamment en matière de transports, sans commune mesure avec ceux des autres régions en tant que région capitale.


* 75 Source : ETAT DU PROGRAMME NATIONAL DE RENOVATION URBAINE - 1 er janvier 2012

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