3. Conseil régional d'Ile-de-France

Mme Marie-Pierre DE LA GONTRIE (Réponses au questionnaire adressé par la mission commune d'information)

a) Les ressources de la région

(1) Quelle a été l'évolution, depuis 2009, des ressources fiscales de la région Ile-de-France ?

- 2010 a constitué une année de transition dans le cadre de la réforme de la TP.

Ainsi, la région a perçu les parts régionales des taxes foncières sur les propriétés bâties et non bâties, qui ont été maintenues en 2010 pour la dernière année, ainsi que le versement d'une « compensation relais » pour la suppression de la taxe professionnelle. Cette compensation devait être égale au plus élevé des deux montants suivants : soit le produit 2009 de la TP, soit le produit potentiel résultant de l'application aux bases de TP 2010 du taux de TP adopté par les régions en 2008 (égal au taux 2009 pour l'Ile de France soit 1,72 %) et c'est ce second calcul qui a été retenu pour la région d'Ile de France (IDF). De ce produit a été déduit le coût, en 2009, du plafonnement de la TP à 3,5 % de la valeur ajoutée.

Ainsi, la région a perçu en 2010 un produit de fiscalité directe (hors rôles supplémentaires) qui a progressé de + 2,9 % par rapport à 2009.

- En 2011 , la réforme fiscale a plafonné (modulo la progression sur les IFER) la nouvelle fiscalité directe régionale (CVAE + IFER) au niveau perçu en 2010 avec l'intervention du mécanisme du fonds national de garantie individuelle de ressources (FNGIR). Ainsi, le produit fiscal régional 2011 a fait l'objet d'un prélèvement de 668,9 M€ au titre du FNGIR et a enregistré au final une progression de + 0,4 % par rapport à 2010 du fait de la progression des IFER.

- En 2012 , selon les premières informations relatives à la progression de la CVAE en 2012, la CVAE en Ile de France devrait progresser de +1,67 % . Le produit régional des IFER devrait stagner (-0,08 %).

Ainsi, compte tenu du fait que la loi gelait en 2011 le nouveau produit fiscal au produit fiscal de référence basé sur celui perçu en 2010, 2011 a constitué une année « blanche » avec une absence d'évolution de la fiscalité directe locale (contre une évolution moyenne annuelle des bases de la TP et des taxes foncières en Ile de France de +3,79 % entre 1993 et 2009). En 2012, le produit de la fiscalité directe régionale après réfaction du FNGIR reste inférieur de 3,95 % à ce qu'aurait été notre produit fiscal 2012 sans la réforme de 2010. Au total, le manque à gagner pour la région sur les deux années 2011 et 2012 s'élèverait à environ 50 M€.

(2) Comment évaluez-vous la croissance attendue de la CVAE au profit de la région pour les années à venir ?

Selon les premières informations relatives à la progression de la CVAE en 2012 (informations qui recouvrent environ 91 % de la CVAE versée aux régions), la CVAE en Ile de France 73 ( * ) progresse (+1,67 %) à un rythme inférieur à la moyenne de métropole hors Ile de France (+2,14 %).

Il nous parait difficile d'établir des prévisions régionales au-delà ; toutefois on peut d'ores et déjà anticiper que les évolutions nationales de la CVAE pour 2013 (CVAE basée sur la valeur ajoutée 2011) et pour 2014 (CVAE basée sur la valeur ajoutée 2012) seront très faibles.

(3) Une modification du panier fiscal des régions vous semble-t-elle souhaitable ? Le cas échéant, laquelle ?

Oui, une modification du panier fiscal des régions nous parait souhaitable.

- Les régions disposent désormais quasi-exclusivement d'une fiscalité assise sur des flux (taxe sur les certificats d'immatriculation, CVAE, modulations TIPP, redevance pour création de bureaux en Ile de France).

C'est en particulier à ce titre que les régions ont été pénalisées par la réforme fiscale de 2010 par rapport aux autres niveaux de collectivités dont la nouvelle fiscalité directe est composée à hauteur de plus de 91,4 % d'une fiscalité sur stock pour le bloc communal et de 60,9 %pour les départements, quand les régions ne disposent que de 14,7 %de fiscalité directe sur stock (à savoir les deux IFER qui lui sont affectées et dont les bases sont particulièrement peu dynamiques).

Cette nouvelle structure des recettes fiscales régionales rend les budgets régionaux particulièrement dépendants de la conjoncture économique alors même que leur action s'inscrit souvent dans une perspective contra-cyclique.

- Le manque de dynamisme de la fiscalité sur stock est désormais reconnu. Dans le cadre de la réforme, les régions se sont vu accorder l' IFER Telecom dont l'assiette initiale sur les répartiteurs principaux de la boucle locale cuivre, a été étendue aux unités de raccordement (UTA) et aux cartes d'abonnés en LFI 2011.

Cette évolution a été assortie d'une clause de sauvegarde du produit par un plancher de recettes fixé à 400 M€ (garantie pour l'année suivante).

En l'état actuel du droit, cette taxe est doublement problématique. D'une part, l'assiette n'a aucun dynamisme, au contraire elle régresse. En effet, le développement du nombre de lignes fixes traditionnelles stagne au bénéfice des abonnements mobiles (non compris dans l'assiette de l'IFER). En outre, à plus long terme, la technologie de la fibre optique (non comprise dans l'assiette) se substituera à celle de la boucle locale cuivre. D'autre part, les modifications apportées en LFI 2011 sur les tarifs et les assiettes sont insuffisantes à maintenir le niveau de la recette. Le parlement l'a reconnu implicitement en adoptant un mécanisme de sauvegarde qui compense, l'année suivante, la perte par rapport à un plancher de recettes prévu à 400 M€. Or ce mécanisme est entré en application dès la première année puisque le produit perçu en 2011 au titre de l'IFER Telecom est d'ores et déjà inférieur au seuil de 400 M€.

Ainsi, les régions souhaitent que soit revue l'IFER Telecom qui leur a été octroyée. L'assiette actuelle de cette imposition est structurellement dégressive. Les régions demandent à ce que soient prises des mesures sur l'assiette (intégration du réseau de la téléphonie mobile et du réseau fibre optique) et sur les tarifs (en particulier par l'augmentation du tarif et la création des tarifs pour les stations de radiotéléphonie ainsi que pour les points de raccordement optiques à l'abonné).

- L' absence de diversité fiscale est préjudiciable aux régions qui ne conservent, après la réforme, qu'une fiscalité directe exclusivement assise sur les entreprises (quand 77 % de la nouvelle fiscalité directe du bloc communal est assise sur les ménages et 60 %pour celle des départements). La rétrocession d'un impôt ménage au profit des régions permettrait de rétablir le lien entre la région et ses administrés et d'avoir une matière fiscale plus équilibrée, donc réduisant les risques par rapport à la conjoncture économique.

(4) Vous paraitrait-il souhaitable de donner aux régions la possibilité de moduler le taux de CVAE applicable sur leur territoire ou de voter un taux complémentaire d'imposition à la CVAE ?

Oui il nous parait souhaitable de donner aux régions la possibilité de moduler le taux de CVAE applicable sur leur territoire.

Une telle mesure permettrait de redonner des marges de manoeuvre aux régions dont les budgets sont excessivement contraints par des dépenses de fonctionnement structurelles qui progressent (TOS, transports,...) et des ressources de fonctionnement qui stagnent (dotation, TIPP,...), voire régressent potentiellement (en fonction de la conjoncture pour ce qui est de la fiscalité sur flux : CVAE, taxe sur les certificats d'immatriculation, contribution au développement de l'apprentissage...).

Un nouveau pouvoir de taux permettrait :

- de résoudre en grande partie le problème de l'inégale répartition de la valeur ajoutée au niveau national,

- de supprimer les fonds de péréquation qui se juxtaposent les uns aux autres (FNGIR, fonds national de péréquation de la CVAE des régions) pour « corriger » imparfaitement (par le biais de quasi-dotations) une réforme dont les résultats ne sont satisfaisants pour personne.

(5) Quel jugement portez-vous sur le traitement de la région Ile-de-France au regard du mécanisme de compensation de la réforme de la taxe professionnelle (Fonds national de garantie individuelle des ressources FNGIR) ?

Le produit de CVAE régionale est en grande partie reversé dans le cadre de la péréquation horizontale du FNGIR. La région d'Ile de France reverse par l'intermédiaire du Fonds plus de la moitié (55 %, environ 669 M€) de la CVAE recouvrée sur le territoire régional et n'en bénéficie donc qu'à hauteur de 45 %. Le prélèvement ainsi opéré est reversé aux autres régions et constitue donc bien une recette pour ces dernières (qui représente plus de 15 % de leur nouveau panier fiscal).

Or, le législateur a proposé pour les régions la définition d'un « indicateur de ressources fiscales » (article 143 de la LFI 2012) non exhaustif, car il ne prend ni en compte ces reversements opérés par le FNGIR aux régions bénéficiaires ni les versements de DCRTP 74 ( * ) à ces mêmes régions, alors même que ces dotations sont prises en compte dans l'indicateur de ressources des communes (article 140 de la LFI 2012) et des départements (article 138 de la LFI 2012). Ce choix spécifique régional induit une minoration des ressources des régions qui perçoivent la DCRTP et le FNGIR (soit environ 1,3 Mds€, 31 % des ressources totales qui ont compensé la suppression de la TP ne sont pas prises en compte pour ces régions). Cette asymétrie de traitement pose question quant à la pertinence d'un tel indicateur et quant à l'usage qui doit en être fait notamment dans le cadre des mécanismes de péréquation à mettre en place.


* 73 Données DGFIP pour 2012

* 74 Dotation de compensation de la réforme de la TP (environ 678 M€ reversés à l'ensemble des régions exception faite de l'Ile de France)

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