E. QUELS VERROUS FAIRE SAUTER EN PRIORITÉ ? (LES SYSTÈMES D'INFORMATION)
Les systèmes d'information sont le « nerf de la guerre » pour moderniser une administration. Ils apparaissent aujourd'hui comme le premier verrou à faire sauter pour permettre à la réforme des bases de défense de générer toutes les synergies attendues.
Vos rapporteurs ont pu constater que la simplification et la dématérialisation, qui permettent de mutualiser les tâches et de dégager des économies, n'ont paradoxalement pas précédé ni même totalement accompagné la réforme : ils apparaissent au contraire aujourd'hui comme le « talon d'Achille » de la modernisation du ministère.
Héritant d'une situation de dispersion des opérateurs , de cloisonnement des réseaux et de prolifération des applications , le ministère a dû lancer un vaste chantier pour rationaliser et optimiser le service rendu par ses systèmes d'information, qu'il s'agisse des serveurs (dont le nombre va être divisé par 4), des équipements, des applications...
Un rapport de la Cour des Comptes d'octobre 2011 sur les systèmes d'information et de communication du ministère de la défense a dressé un constat sans appel sur les redondances applicatives du ministère de la Défense et l'éclatement préjudiciable des systèmes d'information :
- en 2009 on relevait un ratio de 9,37 applications par grande fonction, ce ratio étant même de 19,4 applications pour les ressources humaines ;
- en 2010 ce ratio serait déjà tombé à 6,81 applications par fonction ;
- en 2014 l'objectif est d'atteindre un ratio de 2,72 applications par fonction.
Au total, d'ici à 2014, c'est plus de la moitié (57%) des applications d'administration et de gestion du ministère qui devraient être supprimées, avec des taux record de 76% pour le soutien de l'homme, de 74% pour les applications financières et de 65% pour les ressources humaines 37 ( * ) .
Lors de son audition, le Directeur général des systèmes d'information et de communication du ministère a précisé à vos rapporteurs que sur les 821 applications d'administration et de gestion existant au 1 er janvier 2010, seules 366 devraient subsister en 2015.
Les gains attendus de cette rationalisation dépassent le seul domaine purement informatique. Ils sont également largement organisationnels.
En effet, le remplacement de plusieurs applications hétéroclites par une seule application force les organismes concernés à repenser leurs processus pour les harmoniser et les moderniser, en un processus partagé plus efficient, contribuant ainsi puissamment à la rationalisation des chaînes métier.
Lors de leurs visites de terrain dans les bases de défense, vos rapporteurs ont pu mesurer la demande, très forte, de disposer d'outils informatiques permettant de tirer profit de la nouvelle organisation . Au lieu de cela bien souvent les agents sont contraints d'empiler les systèmes précédents. Alors que le nombre de structures interarmées a très fortement augmenté, il existe toujours des systèmes d'information en matière de ressources humaines, mais aussi plusieurs systèmes d'information pour la logistique, ou encore la restauration (bien que le logiciel SIGMESS soit en cours de déploiement dans la plupart des cercles mess).
Deux exceptions ont fréquemment été citées celle du portail de demande de prestation de soutien Sillage et celle logiciel de gestion des frais de déplacement fd@ligne .
1. Le catalogue virtuel « Sillage » : un déploiement réussi, des fonctionnalités à optimiser
a) Un déploiement réussi, au prix d'une forte mobilisation pour la conduite du changement
L'application « Sillage », qui à l'origine était utilisée par la direction générale de l'armement, a été déployée progressivement tout au long de l'année 2011 dans l'ensemble des bases de défense métropolitaines (et, outre-mer, à La Réunion, en Nouvelle-Calédonie et dans les Émirats arabes unies).
Ce portail de prestations de soutien général se présente comme un « catalogue » qui centralise toutes les demandes de soutien des unités et sert de canal à l'expression des besoins auprès du groupement de soutien de la base de défense.
Les prestations qu'on peut commander par Sillage vont du carburant au nettoyage, de l'entretien des infrastructures à celui des espaces verts, de la maîtrise des risques au transport et à l'habillement.
C'est un catalogue virtuel de 80 prestations qui est mis à la disposition des unités soutenues. Cette application permet une validation quasi instantanée du besoin par la hiérarchie, et un suivi de l'état de traitement de la demande.
Sillage collecte déjà 19 000 demandes par semaine, soit une moyenne de 70 000 demandes par mois, pour 35 000 utilisateurs.
Exemple de soutien d'une activité via l'application « sillage »
L'exemple du déploiement de « sillage » sur la base de Tours La base de Tours est base pilote pour le déploiement du logiciel « Sillage » qui est un portail de commande de prestations de soutien pour toutes les unités soutenues. Là où autrefois les unités disposaient de leurs propres moyens, elles en font aujourd'hui la demande au groupement de soutien de base de défense, par le biais d'un catalogue en ligne. L'ensemble des activités de soutien ressortissant de la compétence du groupement de soutien de bases de défense est concerné : 42 prestations sont proposées dans un catalogue dans les domaines : - de la restauration et de l'hébergement, - du transport, - de l'entretien des infrastructures, - des demandes d'achats, - du soutien santé, - du soutien pétrolier, - du soutien des matériels, - de la téléphonie, de l'audiovisuel et du multimédia. Pour déployer ce logiciel, la base de Tours a mis en oeuvre une véritable stratégie participative, en élaborant des fiches d'aide à l'utilisation du logiciel, en organisant des retours d'expérience systématiques, en faisant un contrôle qualité très suivi des délais de réponses, via des comités de pilotages réguliers. En particulier, chaque prestation à commander était accompagnée de fiches pratiques indiquant : - le service responsable de la délivrance des prestations - le périmètre - le ou les textes de référence - le délai de préavis - le délai de réponse, de traitement, de prise en compte ou de service - les mentions obligatoires - les informations complémentaires - les dispositions liées à l'urgence opérationnelle - le circuit retour. Cette stratégie a permis une bonne appropriation de l'outil par ses utilisateurs. Elle s'est accompagnée de la mise en place d'outils de remontée d'informations comportant un système d'alertes : - Formalisation et planification des travaux à conduire, - Organisation de comités de pilotage réguliers, - Suivi d'exécution précis, adapté et régulier (respect des directives et des délais prescrits). |
b) Des fonctionnalités à optimiser
L'intérêt de Sillage est d'ores et déjà d'offrir un « guichet unique » de demande de prestations de soutien aux unités, et de leur permettre de suivre, jusqu'à leur réalisation, l'état d'avancement du traitement de leurs demandes.
Toutefois, ses fonctionnalités peuvent et doivent encore être optimisées. Ainsi, par exemple, les demandes concernent pour un tiers l'infrastructure et pour un tiers les transports. Dans ces deux domaines, un interfaçage automatique avec les applications concernées (application « DUT », demande unique de transport, et « GTP », gestion technique du patrimoine) éviterait de très nombreuses ressaisies informatiques aux personnels du soutien.
* 37 Source : Cour des Comptes