AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Le Grenelle de l'environnement a marqué en 2007 une rupture dans la manière d'aborder la décision politique en matière environnementale. La méthode de gouvernance retenue a permis d'associer les parties prenantes à la concertation, à savoir l'État, les élus locaux, les associations environnementales, et les syndicats de salariés et d'employeurs, dans ce qui a par la suite été appelé la « gouvernance à cinq ».

Ce nouveau mode de gouvernance a été le grand succès du Grenelle. Cette nouvelle méthode a permis de donner l'élan nécessaire à la mise en oeuvre des nombreux engagements pris, tant en ce qui concerne l'énergie, que le bâtiment ou les questions liées à la biodiversité, bien que cet élan se soit rapidement essoufflé faute de volonté politique suffisante.

Vos rapporteurs ont pu constater le bon niveau général d'application des lois Grenelle I et II dans leurs dispositions concernant la gouvernance, deux décrets seulement sur les trente-deux concernés par ce sujet étant en attente de publication.

Les procédures d'enquête publique, de participation du public à l'élaboration des décisions environnementales ou encore de débat public sont ainsi largement devenues les méthodes de gouvernance de droit commun.

La nouvelle démarche a toutefois trouvé ses limites dans la mise en oeuvre de deux des mesures phares : la représentativité des associations environnementales et la responsabilité sociétale des entreprises (RSE). Les mesures d'application prises s'inscrivent en recul par rapport à l'ambition du législateur. En particulier, sur la RSE, ce recul traduit un retour à des pratiques de négociations bilatérales, radicalement opposées aux concertations larges et ouvertes préconisées par le Grenelle.

Vos rapporteurs déplorent cette situation qui illustre, une nouvelle fois, l'intérêt d'un contrôle vigilant et déterminé du Parlement sur les mesures réglementaires d'application de la loi.

Cinq ans après le Grenelle, la Conférence environnementale, organisée pour la première fois les 14 et 15 septembre 2012, témoigne de la volonté de redonner un élan, avec certaines adaptations, aux règles de gouvernance instaurées par les lois Grenelle I et Grenelle II. Il s'agit désormais d'une « gouvernance à 5 + 1 », les parlementaires étant associés aux autres parties prenantes, ce dont vos rapporteurs se félicitent. Ils saluent aussi la démarche des conférences environnementales annuelles qui doit permettre d'évaluer et de suivre, d'une conférence à l'autre, les mesures engagées.

I. LA MISE EN oeUVRE DES DISPOSITIONS RELATIVES À LA GOUVERNANCE DANS LE CADRE DES LOIS GRENELLE I ET II : UN BILAN PLUTÔT POSITIF

A. RETOUR SUR LE PROCESSUS DU GRENELLE : UNE MÉTHODE DE GOUVERNANCE INÉDITE

1. La méthode, vrai succès du Grenelle

Les lois n°2009-967 du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement et 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement sont l'aboutissement et la retranscription législative du « Grenelle de l'environnement » lancé à l'été 2007.

Le Président de la République avait, comme de nombreux autres candidats, souscrit au Pacte écologique porté par Nicolas Hulot pendant la campagne présidentielle de 2007. En application de ce Pacte, un grand ministère chargé de toutes les questions de transports, énergie, biodiversité, infrastructures, et urbanisme a été créé, et une grande concertation sur la politique de l'environnement a été organisée.

La méthode du Grenelle est inédite par son mode de gouvernance. Elle réunit en effet les membres de cinq collèges représentant l'ensemble des parties prenantes à la politique environnementale, dans ce qui a été appelé la « gouvernance à 5 » : élus locaux, représentants de l'administration, syndicats de salariés, d'employeurs, et associations de protection de l'environnement. L'objectif de cette concertation au cadre élargi a été de rechercher des positions consensuelles et informées. Le Parlement n'a été que tardivement associé à la démarche, bien que le Sénat ait créé dès l'été 2007 un groupe sénatorial de suivi du Grenelle, présidé par le sénateur Bruno Sido et réalisant des auditions parallèlement aux travaux des groupes de travail.

Six groupes de travail ont été mis en place, chaque groupe étant composé de quarante membres, à part égale des cinq collèges. Les thèmes ont été les suivants : lutter contre les changements climatiques et maîtriser la demande d'énergie, préserver la biodiversité et les ressources naturelles, instaurer un environnement respectueux de la santé, adopter des modes de production et de consommation durables, construire une démocratie écologique, enfin, promouvoir des modes de développement écologiques favorables à la compétitivité et à l'emploi. Ces groupes ont réalisé un important travail de diagnostic, et remis leurs propositions fin septembre 2007.

Une phase de consultations a suivi, avec des débats sans vote au Parlement, le 3 octobre 2007 à l'Assemblée, le 4 octobre au Sénat, dix-neuf réunions en région rassemblant 15 000 participants, huit forums internet récoltant 300 000 visites et 11 000 contributions, et une consultation des partis et fondations politiques.

Les cinq collèges se sont réunis autour de tables rondes les 24, 25 et 26 octobre 2007. Les négociations ont abouti à un total de 265 engagements . Le Président de la République a prononcé un discours de restitution des travaux du Grenelle le 25 octobre, mettant l'accent sur le nouveau mode de gouvernance né de ce processus, à savoir l'association de tous les acteurs concernés par une politique publique, et la prise en compte à l'avenir des enjeux environnementaux dans chaque prise de décision publique.

Les engagements du Grenelle ont ensuite été déclinés en mesures concrètes lors de la réunion de trente-quatre comités opérationnels au premier semestre 2008, dont un tiers étaient pilotés par un parlementaire.

L'objectif du Grenelle, dès le départ, a été de transformer en profondeur la société française. Cela traduit, d'une part, la prise de conscience de l'urgence de la problématique environnementale, d'autre part, la réalisation du potentiel de croissance de l'écologie. L'étude d'impact associée au projet de loi Grenelle I en novembre 2008 a estimé que le Grenelle représenterait trente-cinq milliards d'investissements par an en moyenne et 500 000 créations d'emploi, estimations confirmées dans un rapport indépendant du Boston Consulting Group en juin 2009.

Les 265 engagements du Grenelle peuvent se décliner en quatre axes principaux :

- la lutte contre le changement climatique ;

- la préservation et la gestion de la biodiversité et des milieux naturels ;

- la préservation de la santé et de l'environnement, tout en stimulant l'économie ;

- l'instauration d'une démocratie écologique, en renouvelant les modes de gouvernance et en prônant un État exemplaire.

Deux secteurs économiques ont plus particulièrement été au centre des engagements du Grenelle :

- le bâtiment : l'objectif visé est la réduction des consommations énergétiques du bâtiment de 38% d'ici 2020. Le Grenelle prévoit un programme ambitieux de rénovation du parc existant et de réduction des consommations énergétiques des constructions neuves ;

- les transports : l'objectif est de réduire de 20% d'ici 2020 les émissions de gaz à effet de serre (GES) dues aux transports, en incitant au report modal vers les moyens de déplacement peu émetteurs de CO2. Les transports sont en effet le 1 er émetteur de GES, le bâtiment arrivant juste derrière avec 25% des émissions (source ADEME).

Ces objectifs s'inscrivent par ailleurs dans un cadre européen. L'écologie a constitué une des priorités de la Présidence française de l'Union Européenne du 1 er juillet au 31 décembre 2008. Le paquet énergie-climat adopté en décembre 2008 prévoit, à l'horizon 2020, de diminuer de 20% les émissions de GES, réduire de 20% la consommation d'énergie, et porter à 20% la part des énergies renouvelables dans la consommation totale d'énergie.

Certains engagements du Grenelle ont été mis en oeuvre au niveau législatif, avant même les lois Grenelle I et II de 2009 et 2010, dans le cadre des lois suivantes :

- la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 : le Conseil Économique et Social est transformé en Conseil Économique, Social et Environnemental (titre XI) ;

- la loi du 1er août 2008 relative à la responsabilité environnementale ;

- la loi de finances pour 2009, avec notamment l'éco-prêt à taux zéro pour les travaux de rénovation thermique très performants, le crédit d'impôt développement durable, le crédit d'impôt agriculture biologique, l'éco-redevance sur les poids lourds, ou la hausse de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) ;

- la loi de finances rectificative pour 2008 : malus pour les véhicules émettant plus de 250 grammes de CO2 par km, application d'un taux de TIPP réduit à l'aquagazole, relèvement de la taxe additionnelle à la taxe sur les installations nucléaires de base pour financer recherche sur la gestion des déchets radioactifs.

Enfin, la mise en oeuvre du Grenelle a bénéficié d'une accélération dans le cadre du plan de relance présenté le 4 décembre 2008. Ce plan prévoyait une hausse des investissements des grandes entreprises publiques pour moderniser leurs réseaux, notamment en matière de transports et d'énergies renouvelables (SNCF, EDF). L'État a également annoncé à cette occasion des investissements directs dans des secteurs stratégiques : 500 millions d'euros en 2009 vers des infrastructures et équipements durables dans le cadre du Grenelle.

C'est dans ce contexte très spécifique que sont intervenues les lois Grenelle I et II, afin de traduire de manière législative les nombreux engagements issus de cette méthode de gouvernance à cinq. La loi de programmation de 2009 affiche les objectifs de l'État dans la politique environnementale et les moyens pour y parvenir, sans comporter de dispositions normatives d'application directe. Pour rendre sa mise en oeuvre effective, le Parlement a été saisi d'un autre texte, le projet de loi d'engagement national pour l'environnement, qui décline en mesures techniques et concrètes les engagements du Grenelle.

2. Les lois Grenelle I et II
a) La loi Grenelle I

La loi Grenelle I, adoptée à la quasi unanimité à l'Assemblée et au Sénat et promulguée le 3 août 2009, reprend à travers cinquante-sept articles les engagements du Grenelle et complète certaines de ses orientations, dans les secteurs de l'énergie et du bâtiment, des transports, de la biodiversité et des milieux naturels, de la gouvernance et des risques pour l'environnement et la santé.

Les modifications apportées au texte par les parlementaires se sont faites essentiellement à la marge. La liberté d'action du Parlement était en effet virtuellement limitée : il était difficile de ne pas partager les objectifs ambitieux du Grenelle, proposés qui plus est par l'ensemble du corps social dans le cadre de la gouvernance à cinq. Le choix de passer par une loi de programmation avant de décliner des dispositifs opérationnels dans un second texte traduit la volonté du gouvernement de faire ratifier par le Parlement les compromis passés avec la société civile lors des négociations du Grenelle.

Les principaux objectifs de la loi Grenelle I

La loi vise à faire du bâtiment le chantier prioritaire de la lutte contre le changement climatique. Les objectifs fixés sont ambitieux, et visent notamment à appliquer la norme BBC (bâtiment basse consommation) à toutes les nouvelles constructions avant la fin de l'année 2012, réduire la consommation d'énergie dans les bâtiments anciens de 38% d'ici à 2020, définir un programme de rénovation thermique des bâtiments, avec 400 000 rénovations complètes par an à partir de 2013, lancer un plan particulier pour 800 000 logements sociaux, ou encore favoriser la conclusion d'accords avec les banques et assurances pour financer les investissements en économies d'énergie.

En matière d'énergie, la loi prévoit la division par quatre des émissions de gaz à effet de serre à l'horizon 2050 (facteur 4), et le passage à une part de 23 % d'énergies renouvelables dans la consommation d'énergie. Le texte prévoit également d'inciter les collectivités territoriales à établir des plans climat énergie territoriaux, ou encore de généraliser l'étiquetage énergétique des produits. Les parlementaires ont par ailleurs ajouté au projet de loi une disposition concernant le retrait de la vente, à compter de 2010, des ampoules à incandescence.

Dans les transports, le Grenelle I a confirmé l'objectif de transfert modal pour tout le fret routier de transit, ainsi que les programmes accélérés de transport collectif urbain et de lignes à grande vitesse. Le législateur a par ailleurs acté la nécessité de mettre en place une écotaxe sur les poids lourds pour financer les infrastructures de transport alternatives à la route. Enfin, est posé le principe du développement des autoroutes de la mer, des autoroutes ferroviaires et l'extension du réseau fluvial, notamment à travers la construction du canal Seine Nord Europe.

En matière de biodiversité, agriculture, forêt et mer, la confirmation de toutes les dispositions, échéances et chiffrages issus de la première lecture a été votée, notamment la trame verte et bleue reliant les grands ensembles du territoire, les agricultures économes et productives, la dynamisation forestière et la gestion intégrée de la mer et du littoral. La volonté de stopper la perte de biodiversité a été réaffirmée dans tous ces secteurs.

Des dispositions concernant la prévention des risques pour la santé et l'environnement ont été votées, comme par exemple la mise en place d'un « carnet de santé du salarié » qui retracerait les expositions aux substances dangereuses subies par le travailleur durant sa vie professionnelle.

Enfin, en matière de gouvernance, la loi comporte des dispositions visant notamment à créer un portail environnemental d'information accessible à tous, ou encore à définir des critères de représentativité pour les associations appelées à participer à la concertation.

La loi a prévu les conditions du suivi de son application, en créant à son article premier le Comité national du développement durable et du Grenelle de l'Environnement (CNDDGE). Ce comité, institué par le décret du 13 avril 2010, se réunit tous les deux mois. Composé de 41 membres et placé auprès du ministre chargé du développement durable, il assure le suivi de la mise en oeuvre des engagements du Grenelle. Il apporte également son concours au Gouvernement pour les politiques de développement durable.

Par ailleurs, l'article 1 er du Grenelle I prévoit que « L'État rend compte de la mise en oeuvre des engagements du Grenelle de l'environnement au Parlement dans un rapport annuel transmis au plus tard le 10 octobre, ainsi que de son incidence sur les finances, la fiscalité locale et les prélèvements obligatoires au regard du principe de stabilité de la pression fiscale pesant sur les particuliers et les entreprises » . Trois rapports ont à ce jour été remis, en octobre 2009, novembre 2010 et octobre 2011.

Au 8 janvier 2013, le taux d'application de la loi Grenelle I atteignait 50%. Le texte ne prévoyait que 4 mesures d'application. Deux ont été prises, deux restent à prendre :

- un décret sur les conditions techniques pouvant justifier des adaptations marginales à la norme de réduction des consommations d'énergie du parc des bâtiments existants ;

- un arrêté sur la liste des projets d'infrastructures qui feront l'objet d'un suivi par le groupe national de suivi des projets d'infrastructures majeurs et d'évaluation des actions engagées.

Par ailleurs, la loi prévoyait onze rapports. Dix ont été déposés, tandis qu'un rapport reste encore non déposé, sur « l'opportunité de créer une instance propre à assurer la protection de l'alerte et de l'expertise afin de garantir la transparence, la méthodologie et la déontologie des expertises ».

b) La loi Grenelle II

Le projet de loi Grenelle II, déposé au Sénat le 12 janvier 2009, s'inscrit dans le prolongement de la loi de programmation relative à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement. Il s'agit d'un texte d'application et de territorialisation du Grenelle I, qui décline pour chaque chantier les mesures concrètes qui permettront d'atteindre les objectifs fixés dans la première loi. Promulguée le 12 juillet 2010 et largement enrichie par le Parlement, la loi portant engagement national pour l'environnement comprend 257 articles répartis en six titres. L'adoption de ce texte a été marquée par la disparition du consensus qui avait présidé à l'élaboration du Grenelle I.

La loi Grenelle II

Les 257 articles de la loi Grenelle II se répartissent en 6 titres, et modifient entre autres le code de l'environnement, le code général des impôts, le code de l'urbanisme, le code de la construction et de l'habitation, ou encore le code général des collectivités territoriales. Les principales mesures adoptées sont les suivantes :


Le bâtiment : l'objectif des dispositions dans ce domaine est de favoriser la conception de bâtiments plus sobres énergétiquement, et de mieux articuler les politiques d'urbanisme, de développement commercial et de transports.

- renforcement du code de l'urbanisme comme outil de l'aménagement durable et de lutte contre l'étalement urbain, notamment par la simplification et le verdissement des outils de planification (DTA, SCOT et PLU) ;

- généralisation des Schémas de Cohérence Territoriale (SCOT) à l'ensemble du territoire d'ici 2017 ;

- réforme de la réglementation de l'affichage publicitaire, pour limiter son impact sur les paysages, notamment à l'entrée des villes ;

- développement des contrats de performance énergétique et amélioration du diagnostic de performance énergétique (DPE).


Les transports : la loi Grenelle II vise ici à assurer la cohérence de la politique de transports, que ce soit pour les voyageurs ou pour le fret, et à faire évoluer les infrastructures et les comportements pour mieux respecter les engagements écologiques.

- clarification des compétences des collectivités locales sur la gestion des modes de transports : auto-partage, vélos en libre service, stationnement, etc. ;

- transposition d'une directive européenne pour moduler les tarifs de péages en fonction des performances environnementales des véhicules ;

- expérimentation des systèmes de péage urbain pour une durée de 3 ans dans les villes de plus de 300 000 habitants qui le souhaitent.


L'énergie : dans l'objectif constant de réduire de façon significative les émissions de GES en France, le Grenelle II encourage le développement des énergies renouvelables et les économies d'énergie.

- instauration de schémas régionaux du climat, de l'air et de l'énergie pour encourager les énergies renouvelables et l'efficacité énergétique ;

- obligation d'adopter un plan énergie-climat dans les collectivités locales de plus de 50 000 habitants d'ici fin 2012 ;

- création de schémas régionaux éoliens et développement de l'éolien en mer ;

- encouragement à l'installation de panneaux photovoltaïques sur les bâtiments, et possibilité de revendre l'électricité produite au « tarif d'achat bonifié ».


L'agriculture et la biodiversité : dans la continuité du Grenelle I, l'objectif défendu est de protéger le bon fonctionnement des écosystèmes, et d'encourager une agriculture durable.

- interdiction de l'épandage aérien de produits phytopharmaceutiques ;

- protection des aires d'alimentation de captages d'eau potable ;

- création d'un dispositif de déclaration obligatoire des flux d'azote réels pour lutter contre les algues vertes ;

- définition de la trame verte et bleue et des schémas régionaux de cohérence écologique ;

- définition d'une stratégie nationale de gestion intégrée de la mer et du littoral ;

- création d'un écolabel pour les produits de la pêche ;

- création de parcs naturels marins.


Risques, santé et déchets : l'objectif est de préserver l'environnement et la santé de la population par la prévention des principaux risques et nuisances. Le chapitre sur les déchets vise plus spécifiquement à améliorer le caractère durable de leur gestion.

- établissement d'un cadre législatif relatif à la pollution lumineuse ;

- imposition des plans d'exposition au bruit aux nouveaux aéroports ;

- introduction du principe de surveillance de la qualité de l'air intérieur pour les lieux recevant du public ou des populations sensibles dans le code de l'environnement ;

- interdiction de l'utilisation du téléphone portable dans les écoles maternelles, élémentaires et les collèges ;

- diminution de 15 % des déchets destinés à l'enfouissement ou l'incinération ;

- réduction de la production d'ordures ménagères de 7 % sur 5 ans ;

- possibilité d'expérimentation dans les collectivités locales de la mise en place sur une durée de trois ans d'une part variable incitative dans la taxe d'enlèvement des ordures ménagères, calculée en fonction du poids et du volume des déchets.


La gouvernance écologique : la loi prévoit dans ce titre les conditions nécessaires à l'instauration d'une « démocratie écologique », en créant des outils de concertation et d'information au sein des entreprises, des collectivités territoriales et de l'État.

Contrairement à la loi Grenelle I, la loi Grenelle II nécessite un grand nombre de mesures réglementaires : pas moins de 180 mesures d'application sont prévues par le texte. Au 3 janvier 2013, 23 mesures restaient à prendre, pour un taux d'application d'environ 87% 1 ( * ) .

Un effort significatif a été réalisé par les administrations à partir de juin 2011, même si un certain nombre de mesures restent à prendre, plus de deux ans après la promulgation de la loi.

3. Les dispositions relatives à la gouvernance

Vos rapporteurs ont fait le choix de se pencher en détail sur la mise en application des dispositions relatives à la gouvernance. Il ressort en effet des travaux et auditions réalisés qu'au-delà des objectifs quantitatifs fixés dans des domaines aussi variés que le bâtiment, l'énergie ou les transports, la méthode en elle-même du Grenelle restera probablement comme l'un des apports principaux de ces deux lois .

Le sujet de la gouvernance est traité dans la loi Grenelle I et pour l'essentiel dans la loi Grenelle II.

La loi Grenelle I comporte un certain nombre de dispositions concernant la gouvernance, l'information et l'objectif d'arriver à un État exemplaire. La loi prévoit la création d'un portail environnemental permettant de diffuser les informations environnementales détenues par les autorités publiques, et le cas échéant de participer à l'élaboration de décisions publiques. Autre apport important, les associations de protection de l'environnement respectant des critères de représentativité, gouvernance, transparence et compétence fixés par décret se voient reconnues dans leur statut de partenaires. Des mesures fortes sont enfin prises pour rendre l'État exemplaire, avec la mise en place d'un plan d'amélioration de l'efficacité énergétique, l'organisation dans toutes les administrations, au plus tard en 2009, d'un bilan des consommations d'énergie et des émissions de GES, et la réduction de la consommation de papier.

Dans la loi Grenelle II, le titre VI est entièrement consacré à la gouvernance écologique, avec plusieurs mesures majeures :

- l'obligation pour les entreprises de plus de 500 salariés, entreprises et établissements publics compris, de présenter un bilan social et environnemental dans leur rapport annuel ;

- l'affichage à compter de 2011 des émissions de gaz à effet de serre des moyens de transport de voyageurs et de marchandises ;

- la réforme des études d'impact, intégrant les bénéfices et coûts liés aux projets étudiés ;

- la réduction radicale du nombre d'enquêtes publiques existant, nombre passant de cent-quatre-vingts à deux ;

- l'association du public au processus décisionnel pour toutes les réglementations nationales majeures sur l'environnement et l'amélioration de l'accès à l'information ;

- l'élargissement de la concertation aux syndicats et aux acteurs économiques, avec possibilité pour les préfets de créer des instances locales de concertation sur le modèle des cinq collèges du Grenelle ;

- la création des conseils économiques, sociaux et environnementaux régionaux ;

- la définition d'un référentiel facilitant et harmonisant la constitution d'Agendas 21.

4. L'avis du CESE sur le Grenelle : « une dynamique en faveur de l'environnement dans le cadre d'une gouvernance inédite »

Le Conseil économique, social et environnemental (CESE) a rendu public en février 2012 un avis faisant le bilan des réformes engagées avec le Grenelle de l'environnement. Le constat principal du CESE est celui d'un élan inédit pour le développement durable, élan qui souffre aujourd'hui d'un relatif essoufflement.

Le CESE impute cette dynamique nouvelle au processus d'élaboration retenu, la gouvernance à cinq, ainsi qu'aux premiers résultats encourageants obtenus dans certains chantiers. Les médias ont aussi largement contribué à populariser les enjeux environnementaux.

Le système de gouvernance à cinq a favorisé le dialogue entre les parties prenantes, l'appropriation des enjeux, l'expression de nombreuses propositions et la recherche de compromis. Le Grenelle a contribué à faire évoluer les mentalités sur la place occupée par l'environnement dans la société.

Le CESE relève toutefois certaines critiques parfois adressées à la méthode Grenelle. Un manque d'informations sur les critères de désignation des parties prenantes a pu être déploré, de même que l'absence de certaines catégories d'acteurs, notamment associatifs, lors de la discussion, une réflexion fondamentale devant être menée sur leur représentativité. Le choix d'approches thématiques au détriment d'une approche transversale a également été regretté, ainsi que l'association tardive des parlementaires.

Malgré le succès global de la gouvernance à cinq, le Conseil constate dans son bilan que la dynamique engagée s'est progressivement essoufflée.

Certaines difficultés relevées par le CESE sont d'ordre administratif, la publication des près de 200 décrets nécessaires à la mise en oeuvre de la loi Grenelle II étant toujours en cours à l'heure actuelle. Des écueils sont apparus dans la gouvernance à cinq, notamment dans l'effectivité des consultations sur les textes d'application (réunions, consultations sur internet, etc.), le tout devant se faire dans des délais courts laissant parfois peu de temps à une réelle concertation sur le fond.

Le CESE a regretté que les indicateurs prévus par la loi aient rarement vu le jour, et qu'ils se résument généralement à des indicateurs de moyens ne permettant pas de suivre l'application concrète de la loi.

L'application du Grenelle a également rencontré des difficultés dans les territoires, du fait de l'articulation difficile entre l'action de l'État, de ses services déconcentrés et agences, l'action des régions et celle des autres collectivités. Le CESE relève que la concertation à l'échelon local n'a pas été conduite de manière optimale.

Enfin, de mai 2009 à fin 2011, le CESE a noté une recrudescence des pratiques de lobbying et un retour à des logiques de discussion bilatérale. En matière de gouvernance à cinq, il regrette ainsi que ce mode de décision ne soit plus vraiment l'instrument de pilotage des politiques du Grenelle.

A l'échelon territorial, les comités de pilotage du Grenelle ont une composition très hétérogène et reflètent rarement une gouvernance à cinq équilibrée, du fait de l'absence de définition de critères de représentativité clairs. Peu de Conseils économiques, sociaux et environnementaux régionaux ont par ailleurs été consultés dans le cadre du processus de territorialisation ou pour dresser un bilan du Grenelle dans leur région.

Certaines mesures emblématiques ont été retardées. C'est le cas des dispositions sur la responsabilité sociale et environnementale des entreprises (RSE). La loi rend obligatoire la publication, par les sociétés, d'informations sur les conséquences sociales et environnementales de leur activité. Le projet de décret soumis à consultation a fait l'objet de vives critiques, notamment sur les seuils retenus, sur les obligations des filiales, et sur le rôle des vérificateurs indépendants. L'entrée en vigueur de cette disposition a de ce fait été repoussée à janvier 2013. En outre, sur initiative parlementaire, la loi de régulation bancaire d'octobre 2010 a supprimé la possibilité pour les institutions représentatives du personnel et les parties prenantes concernées de présenter leur avis sur les démarches de RSE des entreprises.

Du fait de la crise, les coupes budgétaires ont retardé le lancement de certaines mesures. Ces retours en arrière ont déçu un grand nombre d'acteurs. Face à la crise, le CESE estime pourtant qu'il conviendrait de relancer le processus du Grenelle afin de fonder un modèle de développement durable et d'économie verte , telle que définie par le Programme des Nations Unies pour l'Environnement : une « économie qui entraine une amélioration du bien-être humain et de l'équité sociale tout en réduisant de manière significative les risques environnementaux et la pénurie de ressources ».


* 1 Source : échéancier de mise en application de la loi Grenelle II, www.legifrance.gouv.fr

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