2. Un vote anticipé et à distance par voie électronique

Le vote par correspondance électronique existe depuis 2003 pour les élections des Français établis hors de France. Le « vote par internet » est un vote anticipé et à distance, ce qui est sans équivalent en droit électoral français 31 ( * ) . Il est prévu, s'agissant des élections législatives, par l'article L. 330-14 du code électoral et, pour les élections consulaires, à l'article 22 de la loi n° 2013-659 du 22 juillet 2013.

Sous réserve de s'authentifier avec un identifiant et un mot de passe personnel, adressés par l'administration consulaire entre le sixième et le troisième mercredi précédant le date du scrutin, l'électeur peut à partir d'un ordinateur, voter pour un candidat ou voter blanc 32 ( * ) . Ce dispositif de vote exclut a priori un vote nul.

La période de vote par correspondance électronique s'ouvre le deuxième mercredi précédant la date du scrutin, à partir de 12 heures (heure de Paris) et se clôt le mardi précédant la date du scrutin à la même heure. Durant ces sept jours, les votes sont collectés sur un serveur qui fait office d'urne électronique.

Ce caractère anticipé évite le double vote en permettant à l'administration consulaire d'indiquer sur les listes électorales utilisées lors du scrutin au sein du bureau de vote qu'un électeur a déjà voté par voie électronique, et donc en l'empêchant de déposer une enveloppe dans l'urne.

3. Une faculté non systématique ouverte à l'électeur hors de France
a) Une modalité de vote au choix de l'électeur

Le vote par correspondance électronique, comme son homologue sous forme papier, ne se substitue pas au vote à l'urne mais constitue une modalité supplémentaire de vote. En droit, le « vote par internet » relève donc d'un choix de l'électeur parmi les multiples modalités de vote qui lui sont offertes.

Les modalités de vote ouvertes aux électeurs français à l'étranger

Scrutin concerné

Vote à l'urne

Vote par correspondance électronique

Vote par correspondance papier

Vote par remise de pli à l'administration

Élection du président de la République

Oui

Non

Non

Non

Référendum national

Élection des députés

Oui

Oui

Élection des sénateurs

Non

Non

Oui

Élection des représentants au Parlement européen

Non

Élection des conseillers à l'Assemblée des Français de l'étranger

Non

Oui

Élection des conseillers consulaires

Oui

Non

Au regard de ce foisonnement des modalités de vote, la Cour des comptes, dans son rapport de septembre 2013, s'interrogeait sur l'opportunité de maintenir concomitamment trois autres modalités de vote (vote à l'urne, vote par procuration, vote par correspondance papier) parallèlement au vote par correspondance électronique. Cette question présente une particulière acuité s'agissant des élections législatives à l'étranger, pour lesquelles coexiste le vote par correspondance sur support électronique et sous forme papier.

b) Une modalité de vote réservée à une partie des élections à l'étranger

À ce jour, le « vote par internet » n'est autorisée que pour des élections se déroulant dans des circonscriptions comptant comme électeurs des Français établis hors de France 33 ( * ) , ce qui est le cas des élections législatives et consulaires. Le législateur n'a ainsi jamais franchi le pas conduisant à introduire cette modalité de vote pour des élections ayant lieu, même partiellement, sur le territoire national.

A l'inverse, le « vote par internet » n'est pas ouvert à l'ensemble des élections organisées auprès des électeurs établis hors de France. Il est ainsi exclu pour l'élection du président de la République, des représentants au Parlement européen et pour les référendums nationaux. Pour ces élections, les Français établis hors de France votent dans la même circonscription que des électeurs votant en France ; la possibilité offerte aux Français de l'étranger de voter « par internet » aurait nécessairement posé la question de sa généralisation sur le territoire national.

Le vote par correspondance électronique n'est pas admis pour l'élection des sénateurs représentant les Français établis hors de France et des conseillers à l'Assemblée des Français de l'étranger alors même que ces scrutins ne concernent que des électeurs établis hors de France. Cependant, ces deux élections au scrutin indirect 34 ( * ) comportent un collège électoral restreint dont les membres peuvent recourir au vote par remise de pli à l'administration, modalité de vote préférée par le législateur en 2013 à l'extension du vote par internet.

Le vote par remise de pli à en main propre à l'administration

Cette nouvelle modalité de vote a été instaurée par la loi n° 2013-659 du 22 juillet 2013 qui l'a réservée à l'élection des conseillers à l'Assemblée des Français de l'étranger et des sénateurs représentant les Français établis hors de France. L'électeur vote ainsi par anticipation en remettant à un fonctionnaire son enveloppe contenue au sein d'un pli, l'acheminement du pli jusqu'au bureau de vote à Paris incombant à l'administration consulaire, l'enveloppe étant alors sortie du pli et introduite dans l'urne à Paris.

L'adoption de cette modalité de vote a conduit le Parlement à rejeter parallèlement l'introduction, pour ces élections, d'un vote par correspondance électronique, essentiellement pour des questions de coût au regard du collège électoral restreint.

Fixé par le Gouvernement dès le dépôt du projet de loi, le cadre du vote par remise de pli a été profondément remanié au cours des débats parlementaires. Soucieux d'apporter les garanties nécessaires à cette modalité de vote relativement inédite, le Sénat a accordé des garanties supplémentaires à l'électeur que le Conseil constitutionnel a explicitement validées, rappelant à cette occasion que leur détermination relève du seul législateur.

En effet, alors que le projet de loi se bornait à prévoir que l'électeur votait « sous enveloppe fermée, remise en mains propres » à un fonctionnaire, la commission des lois du Sénat a, tout d'abord, instauré la délivrance d'un récépissé et renvoyé le soin au pouvoir règlementaire de préciser les règles de conservation de l'enveloppe dans des conditions « de nature à respecter le secret du vote et la sincérité du scrutin ». Le Sénat a prolongé cette démarche en introduisant, en séance publique, lors de la remise du pli par l'électeur une procédure analogue à un bureau de vote (passage dans l'isoloir, émargement, etc.) et en permettant la présence de délégués des candidats au bureau de vote comme lors des remises de plis.

En conclusion, les caractéristiques générales du « vote par internet » le distinguent donc fortement du vote électronique pratiqué sur le territoire national par le biais des machines à voter.

Vote à distance, anticipé par rapport à la date du scrutin, le « vote par internet » ne constitue qu'une des alternatives de vote offerte à l'électeur établi hors de France quand, au sein de son bureau de vote, l'électeur est contraint d'utiliser, forcément le jour du scrutin, une machine à voter lorsque son recours est décidé par la municipalité.


* 31 Lors de l'examen en première lecture au Sénat de la loi n° 2013-659 du 22 juillet 2013, pour tenir compte du fait que le dimanche n'est pas un jour chômé dans l'ensemble des pays, votre commission des lois avait adopté, à l'initiative de son rapporteur M. Jean-Yves Leconte, une disposition permettant aux électeurs, lors de l'élection des conseillers consulaires, de déposer par anticipation, la semaine précédant le scrutin, leur bulletin de vote auprès du poste consulaire au sein duquel se tiendrait le scrutin ; en séance publique, le Sénat a supprimé cette nouvelle modalité de vote anticipé.

* 32 Comme pour les machines à voter, la possibilité de voter « blanc » est explicitement offerte aux électeurs alors que lors d'un vote à l'urne, aucun bulletin blanc n'est à la disposition des électeurs.

* 33 En décembre 2013, le maintien de cette particularité a justifié, aux yeux de votre commission, de solliciter le renvoi en commission de la proposition de loi de notre collègue Robert del Picchia souhaitant étendre le vote par correspondance électronique pour les élections européennes alors que les Français établis hors de France sont rattachés à la circonscription d'Ile-de-France.

* 34 La loi n° 2013-659 du 22 juillet 2013 a maintenu l'élection au suffrage universel de l'Assemblée des Français de l'étranger mais a mis fin au scrutin direct au profit d'une élection par les conseillers consulaires, directement élus quant à eux par les électeurs.

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