DÉPLACEMENT AU CENTRE NATIONAL DU RUGBY
(Marcoussis)

____

MERCREDI 5 FÉVRIER 2014

LISTE DES PERSONNES RENCONTRÉES À MARCOUSSIS

M. Pierre Camou , président de la fédération française de rugby

M. Paul De Keerle , directeur financier et administratif de la fédération française de rugby

M. Olivier Keraudren , directeur des activités sportives et juridiques

M. Francis Chouat , maire d'Évry

M. Stéphane Raffalli , maire de Ris-Orangis

COMPTE RENDU DES ENTRETIENS EFFECTUÉS
À MARCOUSSIS

Réunion avec MM. Pierre Camou, président de la fédération française de rugby et Paul De Keerle, directeur financier et administratif de la fédération française de rugby

M. Pierre Camou, président de la fédération française de rugby, FFR . - Le Centre national de rugby (CNR) a été inauguré en 2001 et regroupe les joueurs, les entraîneurs et les équipes techniques sur un même site.

La fédération française de rugby, fondée en 1919, est une association reconnue d'utilité publique en 1922 ayant reçu quatre délégations (conformément à l'article L. 131-14 du code du sport) pour gérer le rugby à XV, le rugby à 7, le rugby à V ainsi que le rugby de plage. Le siège de la fédération française de rugby se situe à Marcoussis, un site intégrant également un centre national. Il faut ajouter à ces structures les 34 comités territoriaux qui gèrent les 440 000 licenciés en 2013 (contre 280 000 en 2007) se répartissant dans les 1 843 clubs affiliés. La FFR dispose d'une organisation interne classique composée d'une assemblée générale, d'un comité directeur et d'un bureau fédéral. L'organisation opérationnelle repose sur 114 collaborateurs permanents et 54 cadres techniques mis à la disposition de l'État dans le cadre de la délégation de service public.

La fédération française de rugby gère plusieurs activités. Au plan sportif au cours de la saison 2012-2013 elle a ainsi délivré 62 titres fédéraux et challenges, arbitré 30 399 rencontres officielles, et géré les équipes nationales. Elle a notamment oeuvré pour le développement du rugby à 7, une discipline à part entière devenue discipline olympique, mais surtout une perspective importante de développement notamment pour le rugby féminin. La fédération française de rugby est également présente au niveau international puisque la France est un acteur majeur de toutes les instances internationales de ce sport.

La fédération française de rugby et la ligue nationale de rugby ont, par convention, mis en place un nouveau dispositif relatif à la préparation et la mise à disposition du « XV de France » avec l'idée de créer un groupe « XV de France » mais surtout de limiter le nombre de matchs afin d'économiser les joueurs. En contrepartie la FFR s'engage à payer 23 millions d'euros sur la durée totale de la Convention dont 1 300 euros par joueur et par jour de mise à disposition.

La FRR est dotée d'un budget de 100 millions d'euros en 2013-2014, budget qui a doublé en 10 ans puisqu'il s'établissait en 2000-2001 à 50 millions d'euros. 54 % du budget est consacré au soutien au développement du rugby professionnel et amateur ; 39 % est consacré au fonctionnement administratif et sportif ; 4 % à l'amortissement et aux provisions ; et 3 % aux impôts et taxes (impôt sur les sociétés ou encore taxe spectacle...). Les ressources de la FFR proviennent à 57 % des partenariats et des droits TV ; à 22 % des recettes des matchs ; à 12 % des cotisations ; à 2 % des séminaires organisés sur le site du CNR ; et à 7 % des subventions. Au total le bilan de la FFR fait apparaître un actif et un passif de 112 millions d'euros, 49 millions d'euros de capitaux permanents et 33 millions d'euros d'actifs immobilisés. La billetterie représente 500 000 billets, et le CNR totalise de son côté 60 000 repas, 20 000 nuitées, et un coût de construction et du terrain de 46 millions d'euros.

M. Paul De Keerle, directeur administratif et financier de la fédération française de rugby . - Le projet de grand stade de la FFR est une « construction territoriale qui va lier une association sportive et quatre collectivités territoriales ». Le projet a été initié par la fédération française de rugby pour développer son sport. Elle a ainsi lancé un appel d'offres territoriales et les villes ont été mises en concurrence. C'est un projet qui repose donc sur un partenariat original entre plusieurs maîtres d'ouvrage : la ville de Ris-Orangis ; la ville de Bondoufle, l'agglomération d'Évry centre Essonne, le conseil général de l'Essonne, et bien sûr la FFR. L'originalité de ce projet est qu'il émane des territoires dans une logique décentralisée et ne repose pas sur un modèle de partenariat public privé, ce qui le distingue fortement du modèle du Stade de France.

Le rugby est aujourd'hui un sport en pleine croissance puisqu'on ne compte pas moins de 1 843 clubs qui assurent un maillage territorial pour les 440 000 licenciés. C'est dans cette perspective qu'est envisagé le projet de stade par la FFR. L'enjeu pour cette dernière est de promouvoir les valeurs du rugby (« le rugby, des valeurs pour la vie »), et de développer le rugby amateur et professionnel notamment à travers le XV de France.

La FFR souhaite être propriétaire de son infrastructure afin de pouvoir jouer ses propres matchs. La FFR ne veut plus être tributaire du calendrier d'autres disciplines sportives, comme le football par exemple, ni des contraintes de calendrier des autres stades, ni des conditions météo. Ce nouveau stade doit permettre à la FFR de gérer suffisamment en amont ces propres compétitions et de vendre sa billetterie. À titre d'exemple, à cause de l'Euro 2016 la FFR n'a pour l'instant pas trouvé de stade pour accueillir la finale du Top 14 de la saison 2015-2016. Maîtriser la programmation permettra de mieux maîtriser les revenus, sachant que les ressources issues des matchs du XV de France représentent en moyenne plus des trois quarts des recettes annuelles totales de la FFR.

Le projet est avant tout un projet architectural, imitant le modèle d'une « citadelle imprenable ». Le choix a été fait, à l'issue des différentes études, d'une aréna multifonctionnelle et polyvalente. L'idée de la FFR de pouvoir disposer d'un stade qui permettra d'accueillir tous types de manifestations sportives, culturelles et économiques de pleine jauge et de moyenne jauge tout au long de l'année. Le stade disposerait d'une capacité de 82 000 places pour permettre au nombre habituel des spectateurs du XV de France d'assister au match. Ce chiffre a été déterminé pour nous permettre de rivaliser avec des stades comme celui de Twickenham par exemple. Le choix d'un toit rétractable a également été fait et il n'existe pas en France d'autres stades de cette envergure qui dispose d'une telle caractéristique. Avec ce toit, le gestionnaire sera en capacité de proposer une offre inédite de grands concerts tout au long de l'année. En outre, une couverture permet de garantir la qualité du jeu et le confort des spectateurs en cas de pluie. La pelouse mobile a également été retenue afin de coulisser depuis l'extérieur vers l'intérieur en moins de deux heures. Ce type de pelouse rétractable présente l'avantage d'utiliser l'enceinte le reste du temps en l'équipant d'une dalle de béton et d'arrivée électrique permettant d'organiser des événements comme des concerts, des séminaires, des salons, des conventions, ou encore des événements sportifs tels que des matchs de handball, de basketball, de volleyball et même de l'athlétisme grâce à une piste indoor . En clair, la FFR présente un projet de stade tout usage. Il est par ailleurs prévu d'installer quatre écrans géants diffusant des informations comme à la télévision afin d'enrichir la qualité du spectacle pour ceux qui se trouvent au coeur du stade. Une tribune proche du terrain est également prévue et les aménagements intérieurs reposants sur des « grands plateaux » doivent permettre la lisibilité du jeu quelle que soit sa place dans les tribunes. Enfin, des grandes places d'accueil sont prévues pour accueillir les spectateurs au début du match et éventuellement leur proposer des options de restauration dans une ambiance festive.

Le modèle financier du projet de grand stade a été construit à partir d'hypothèses prudentes réalisées par le cabinet de conseil McKinsey. Ce modèle économique prévoit 17 grands événements dans l'année : cinq matchs du XV de France, la finale du Top 14, 4 autres matchs de rugby et 6 autres événements sportifs ou culturels. Si les marges les plus importantes seront réalisées sur les matchs de rugby, le business plan repose à la fois sur la location des loges à l'année (65 millions d'euros), sur la vente de places VIP ainsi que sur les recettes de billetterie (17 millions d'euros). De façon complémentaire elle escompte des recettes en provenance de la panneautique et des partenaires (13 millions d'euros), ainsi que de la location du stade pour d'autres événements.

Selon les projections, le grand stade permettra le remboursement complet des emprunts grâce à une marge annuelle de 10 millions d'euros générés par les matchs du XV de France. Au cours des 20 premières années d'exploitation les charges se répartiront entre le remboursement de la dette (57 millions d'euros) et les charges d'exportation (42 millions d'euros). Après 20 ans d'exploitation, quand les emprunts auront été remboursés, le stade dégagera des marges beaucoup plus importantes.

Le business plan s'appuie aussi sur une hypothèse de financement du stade assuré exclusivement par la FFR : 200 millions d'euros sur fonds propres et 400 millions d'euros sur emprunts bancaires, pour un coût total de 600 millions d'euros. Ce business plan a été soumis à des stress tests afin de tester la solidité des hypothèses financières : il apparaît solide même en hypothèse basse.

Le modèle du stade est celui de Twickenham à Londres (82 000 places), du millénium à Cardiff (74 500 places), ou de Murrayfield à Édimbourg (67 130 places), mais également le stade Roland-Garros qui a eu un impact considérable sur le développement du tennis en France. La FFR considère que cet exemple permet de comprendre l'importance de la maîtrise de son stade dans le développement d'un sport : maîtriser son stade c'est maîtriser sa programmation est donc maîtriser ses revenus.

Ce stade est aussi un projet, porteur d'une ambition territoriale. Pour les territoires concernés il s'agit d'un projet symbole et fédérateur autour d'une identité forte pour un territoire qui souffre encore d'une image dégradée. Pour les habitants de l'Essonne, un territoire jeune, c'est un projet dynamique et ambitieux pour un territoire de la deuxième couronne parisienne, qui doit donner une vraie impulsion à l'économie locale avec des perspectives importantes de création d'emplois, lors de la phase de travaux, mais aussi dans l'exploitation du stade après la finalisation des aménagements. Ce stade va devenir un marqueur du sud parisien comme Disneyland l'a été pour Marne-la-Vallée. En ce sens, ce projet doit répondre à l'objectif de rééquilibrage des pôles de développement en Île-de-France et s'inscrit parfaitement, selon ses promoteurs, dans le Grand Paris.

La FFR privilégie de grands axes pour développer l'activité autour du stade : le premier est un projet de village de loisirs qui proposera des activités tournées vers le sport, les loisirs, la nature et le bien-être et qui aura vocation à devenir une véritable adresse touristique sud francilienne ; le second concerne un projet de création d'un pôle d'excellence dédiée à la filière sport en France, qui pourrait permettre de développer une filière économique intégrée en regroupant les infrastructures, les acteurs et les compétences.

Les collectivités territoriales concernées disposent de terrains disponibles sans aucune servitude (le site de l'ancien hippodrome de Ris-Orangis a en effet été acquis par la communauté d'agglomération et est aujourd'hui en friche ce qui permet d'éviter toutes les contraintes habituelles et blocages éventuels dans le cadre de ce type de projet d'aménagement) mais surtout reliés à des infrastructures routières et autoroutières ainsi qu'à des transports en commun (RER et trains). Cette dernière dimension apparaît fondamentale dans un territoire qui se situe au carrefour des principaux actes de transports franciliens (les axes routiers de l'A6, de la Nationale 7 et de la francilienne, des aéroports d'Orly et de Roissy, les gares TGV de Massy et de Juvisy ainsi que les trois lignes de RER B, C et D). Il est notamment prévu de moderniser et d'optimiser la branche Sud des RER C et D, mesures inscrites dans le schéma directeur du STIF pour un coût estimé à 500 millions d'euros.

Le projet s'inscrit également dans un modèle durable sur le plan environnemental (démarche durable, promotion d'éco-quartiers au coeur de l'Essonne, développement de la filière des éco-activités) mais également sur le plan social. Il doit permettre de développer l'emploi local et la réinsertion des personnes en difficulté.

La FFR et les collectivités territoriales ont pris des engagements respectifs.

S'agissant des collectivités territoriales, c'est la garantie d'emprunt qui est stratégique et qui sera assurée par le département à concurrence d'un montant maximum estimé à ce jour à 450 millions d'euros. Cette garantie d'emprunt se justifie selon le maire de Ris-Orangis par le caractère d'intérêt général du projet. Par cette garantie le projet pourra bénéficier de la signature du conseil général et gagner en crédibilité auprès des investisseurs.

De son côté, la FFR s'engage à prendre en compte des publics prioritaires pour le projet (les jeunes, les travailleurs handicapés, les allocataires des minima sociaux, grâce à l'introduction de clause d'insertion dans les marchés de construction et d'entretien et d'exploitation du grand stade et des équipements associés), mais aussi à développer des activités au bénéfice du territoire (pépinière d'entreprises, centres de formation sur les métiers du sport, mise à disposition du stade pour l'organisation de manifestations d'intérêt départemental) et à intégrer les politiques publiques portées par le département (développement durable, action éducative et citoyenne autour des valeurs du sport et du rugby).

Une partie du financement repose enfin sur un emprunt obligataire de 5 millions d'euros sur une durée de 50 ans dans le cadre d'une souscription publique. La méthode est pratiquée dans les pays anglo-saxons ainsi qu'en Espagne. Il ne s'agit pas d'un produit de placement mais plutôt d'un accompagnement financier autour de valeurs partagées de la part de personnes privées fières de participer symboliquement à ce projet collectif.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page