C. UNE MAXIMISATION DES RESSOURCES PROPRES PROBLÉMATIQUE

Les produits courants de l'exploitation du domaine confié à VNF se répartissent en péages et en redevances domaniales. Ils représentent une part très faible des financements nécessaires aux missions confiées à VNF. Ainsi, l'actif géré par l'établissement est source de coûts qui sont loin d'être couverts par les produits de son exploitation.

La loi sous revue a entendu élargir l'objet social de VNF dans la perspective de faire évoluer cette situation en ouvrant à l'établissement de nouvelles opportunités.

À l'examen, ces nouvelles facultés, qui s'inscrivent dans un contexte limitant, ont été mobilisées par VNF dans des conditions dont l'optimalité est discutable pour des raisons qui échappent assez largement à l'établissement et appellent une réflexion en profondeur sur les moyens de mieux valoriser son actif.

En toute hypothèse, les perspectives des recettes propres de VNF semblent faibles.

La trajectoire financière des recettes domaniales et de péages prévue par VNF les fait passer de 42,4 millions d'euros en 2014 à 44,34 millions d'euros en 2017 soit une progression de 4,5 % quasi-mécanique ne témoignant pas qu'à court terme les mesures d'extension et d'intensification de la gestion domaniale prévues par la loi exercent des effets notables.

1. Des péages structurellement contraints

Les péages perçus par VNF ne représentent qu'une portion congrue de ses ressources (2,4 % du total), autour de 14 millions d'euros.

Encore faut-il observer que les péages correspondant au fret ne s'élèvent qu'à environ 8 millions d'euros, le reste étant apporté par le trafic de passagers de sorte que les « péages  industriels de VNF » peuvent être considérés comme d'une insigne modestie.

Il est douteux que cette situation qui ne présente pas que des avantages puisse significativement évoluer tant que le système général de tarification des transports restera à l'identique.

Les inconvénients de la situation actuelle sont connus : VNF n'éprouve pas d'incitation spontanée à développer des investissements qui n'ont que peu de retours financiers ; l'absence d'un véritable rôle joué par les prix empêche ceux-ci d'exercer leur fonction d'orientation ; la structure de financement de VNF implique des transferts implicites entre agents économiques qui peuvent être inéquitables ou juridiquement contestables au nom de la concurrence non faussée ; VNF est tributaire d'arbitrages budgétaires dont le contexte ne lui est pas favorable dans la mesure où la rentabilité financière des investissements dans le fluvial n'est pas évidente.

Peut-on pour autant sortir de cette configuration et tabler sur une élévation des péages ? L'analyse de la tarification des infrastructures a une longue histoire en France. On connaît le dilemme né de la recommandation de déterminer le prix de l'usage de l'infrastructure au coût marginal afin de satisfaire l'optimum social. Pourtant cette configuration a ses limites La tarification au coût marginal suppose un déficit budgétaire de l'infrastructure dans tous les cas où le coût marginal est inférieur au coût moyen, ce qui est bien entendu le cas pour le transport fluvial, comme ce l'est pour le ferroviaire. Dans un tel cas, des subventions publiques doivent être appliquées. Elles se heurtent à tous les inconvénients mentionnés ci-dessus.

C'est donc de longue date que la tarification au coût marginal a cédé sa place à la recommandation d'en passer par un autre modèle de tarification, dit de Ramsay-Boiteux. Il s'agit d'optimiser l'incitation à consommer l'infrastructure tout en permettant à son titulaire de se rapprocher de l'équilibre budgétaire. On applique au coût marginal un sur-tarif d'autant plus important que l'usager de l'infrastructure est captif, ce qui revient à optimiser le jeu des élasticités de la demande auquel est confronté le propriétaire de l'infrastructure. Il n'est pas toujours illégitime de surtaxer la clientèle captive dans la mesure où cette « captivité » est choisie, mais ce n'est pas toujours le cas et, par conséquent, la formule proposée peut receler des iniquités. Mais, surtout, elle paraît de peu de portée s'agissant du fluvial.

Sa validité est en effet suspendue au degré de captivité de la clientèle.

Or, force est de reconnaître que, s'agissant de l'infrastructure fluviale, celui-ci est globalement faible d'autant que le système de prix des transports n'en assure pas la vérité des coûts (voir le Chapitre I du présent rapport).

Une tarification des transports restaurant la vérité des coûts environnementaux modifierait les prix relatifs des différents modes et offrirait des perspectives de rentabilisation marchande de l'actif fluvial.

Tant que cette reconfiguration demeurera à l'état de perspective, les ajustements sur les péages de pourront qu'être marginaux. Les marges de manoeuvre envisageables vont de l'instauration de péages négatifs sur des segments limités à une modulation des péages à raison de la capacité contributive des usagers ou (et) de la valeur des marchandises transportées.

2. Des ressources domaniales étiques

Le montant des redevances domaniales perçues par VNF se situent globalement autour de 25 millions d'euros.

Source : rapports financiers de 2010 à 2012.

Elles rapportent à VNF près du double des produits des péages mais ne représentent pas beaucoup plus que 4 % des ressources de VNF pour un actif comprenant plus de 40 000 hectares.

On relève incidemment le niveau relativement élevé des produits résultant du déploiement de la fibre optique (qui ont pu avoisiner certaines années les recettes de péages) dont le déclin - qui semble résulter de l'encadrement des tarifs applicables - pourrait être inversé à raison des investissements impliqués par la généralisation souhaitable du très haut débit par la fibre.

De la même manière les redevances acquittées au titre des bateaux logements qui peuvent poser des problèmes particuliers de gestion atteignent un niveau significatif puisqu'il est proche de celui des redevances d'occupations temporaires dont le potentiel apparaît a priori bien supérieur.

Pourtant, celles-ci n'apportent qu'un peu plus d'une dizaine de millions d'euros par an.

Ces produits sont perçus en contrepartie des occupations privatives du domaine confié à VNF.

Ils répondent à la mission assignée à VNF par la loi (nouvel article L. 4311-1 du code des transports) de gérer et exploiter le domaine de l'État qui lui est confié.

Lorsque le domaine n'est pas directement utile aux besoins du service, il peut faire l'objet d'occupation privative par le biais d'autorisations d'occupation, soit unilatérales (autorisations d'occupation temporaire, « AOT »), soit contractuelles (conventions d'occupation temporaire « COT »).

13 000 autorisations sont ainsi actives sur une année ce qui astreint VNF à des lourdeurs de gestion.

Le produit unitaire moyen apparent des redevances est modeste ; il s'élève à 1 846 euros par an. Il est sensiblement plus faible encore pour un grand nombre d'occupations privatives du domaine de VNF. Cette situation conduit à s'interroger sur la capacité de VNF à tirer des produits normaux de son domaine.

Plusieurs questions offrent de ce point de vue une certaine actualité.

Une partie des redevances domaniales résulte de la location d'une fraction du contingent de maisons éclusières (2 570 environ) affectées à VNF.

Celles-ci sont prioritairement occupées par les agents de VNF, selon un cadre qui, sous conditions, réserve aux locataires un avantage de loyer. Le projet de renforcer la conditionnalité de cet « avantage » a donné lieu à un conflit social de sorte qu'un moratoire a été décidé qui doit trouver son terme en 2015.

Cette question sensible appelle des solutions raisonnables.

Autant il est souhaitable que VNF, qui est largement financé par le contribuable, ne procure à personne des avantages indus, autant il est à recommander que les logements procurés aux agents soient traités comme une forme d'outil de travail lorsqu'ils correspondent bien à cette définition.

Si sur ce point, une vérification systématique s'impose, d'autant que les maisons éclusières constituent un actif qui pourrait être mieux valorisé, quitte à recourir à des cessions, il conviendrait que ce dossier soit traité avec tous les accompagnements nécessaires et en l'inscrivant dans la logique des choix de périmètres du réseau fluvial.

Un autre problème d'actualité réserve a priori de plus forts enjeux. VNF est l'héritier de concessions accordées dans un passé parfois lointain selon des modalités très préférentielles, à une époque où l'État semblait plus soucieux de se débarrasser de la gestion de certaines portions de son domaine que d'une optimisation de celui-ci.

Des situations quelque peu incongrues en résultent avec des tarifs de location de l'ordre parfois de 4 centimes au mètre carré ou encore des produits de concessions très éloignées de la valeur économique totale des biens concédés par VNF, une fois tenu compte des externalités qu'elles produisent. Cette situation prévaut en particulier dans le cas des concessions d'outillages publics, dont la partie portuaire est déficitaire quand les domaines adjacents produisent des bénéfices sans profit pour l'autorité concédante. Cette question fait l'objet d'une étude conjointe de l'IGF et du CGEDD dont il faut attendre qu'elle aboutisse à des solutions réalistes mais plus équilibrées.

Enfin, se pose le problème récurrent des effets des choix relatifs au statut de la propriété du domaine fluvial confié à VNF, dont celui-ci n'a pas la propriété.

La question est connexe à un problème pratique concernant le devenir des produits de cession du domaine qu'il faut aborder ici. En l'état le choix a été fait de ne pas transférer la propriété du domaine fluvial confié à VNF au nom d'un principe d'unité du domaine de l'État auquel par ailleurs les organisations syndicales ont montré leur attachement lors de la mise au point du projet devant aboutir à la loi sous revue. Cette solution soulève une série de problèmes de gestion parmi lesquels le sort des produits de cession. En théorie, ils devraient revenir à VNF à raison de l'article L. 4316-2 du code des transports publié en 2012. 23 dossiers de déclassements ont été traités depuis 2010 et, entre 2006 et 2013, près de 3,3 millions d'euros de produits de cessions ont été réalisés. Or, ces produits n'ont pas été versés à l'établissement et il semble que la traduction concrète du décret du 21 septembre 2012 doive attendre la conclusion d'une convention de gestion du domaine public fluvial en cours de formalisation entre les parties concernées précisant les droits concédés à VNF sur ces produits. Les évolutions souhaitables de ce dossier sont compliquées par des considérations pratiques. Considérant que la valeur économique du domaine confié à VNF peut sembler incertaine, réduisant les perspectives de recettes qu'il pourrait procurer, il faut envisager le volet fiscal d'un transfert de propriété. Les impôts fonciers auxquels VNF pourrait se trouver assujetti dépasseraient sans doute de beaucoup nombre des recettes engendrées par le domaine dans l'état actuel de l'économie de son exploitation.

En toute hypothèse, vos rapporteurs en appellent au respect des dispositions légales et réglementaires qui doivent inspire le versement effectif à VNF des produits de cession du domaine confié.

3. Un élargissement de l'objet social de VNF supposé diversifier ses ressources qui doit faire la preuve de son utilité
a) VNF et l'hydroélectricité, un destin contrarié

La loi sous revue a consacré la pratique exceptionnelle qui voyait VNF contribuer à la production d'hydroélectricité en la portant au rang d'une mission échéant dorénavant à l'établissement.

Le potentiel hydroélectrique du domaine confié à VNF a été estimé à 165 MW pour une production annuelle de 950 Gwh, correspondant aux besoins, hors chauffage, d'une ville de 900 000 habitants.

Cette extension des missions de VNF qui paraît logique compte tenu de la nature de l'actif confié à l'établissement représente toutefois, paradoxalement, un défi pour lui si bien qu'en l'état on ne peut vraiment envisager que le potentiel hydroélectrique puisse réserver des ressources futures significatives à VNF.

L'élargissement des missions de VNF à l'exploitation de la force hydraulique paraît logique.

Elle s'inscrit dans un objectif de maximisation de l'exploitation du potentiel de la voie d'eau offrant la perspective de recettes qui pourraient augmenter les capacités financières propres, aujourd'hui trop faibles, de l'établissement.

Par ailleurs, compte tenu des conflits d'usage des voies navigables, il est raisonnable de confier cette mission à VNF en considération de sa fonction de coordonnateur des utilisations de la voie d'eau.

Pourtant, en l'état, VNF est un acteur mineur de la production d'hydroélectricité.

Si quelques 145 installations de production hydroélectrique sont installées sur le domaine public fluvial confié à VNF, profitant des ouvrages de navigation gérés par l'établissement, celui-ci n'exploite directement quasiment aucune de ces centrales.

Elles sont exploitées par des entreprises ou des particuliers sous statuts de conventions d'occupation temporaires (COT) ou d'arrêtés d'exploitation valant autorisations d'occupation temporaire.

La seule contrepartie revenant à VNF pour ces installations réside dans les produits de taxe hydraulique pour un montant de 400.000 euros à mettre en rapport avec une valeur de production, estimée à 21 millions d'euros par l'établissement, pour un taux apparent de prélèvement indirect de 1,9 %, qui apparaît comme très préférentiel.

Dans ces conditions, la mission confiée à VNF implique à tout le moins d'investir une spécialité fonctionnelle nouvelle qui, compte tenu des spécificités économiques de la production hydroélectrique, peut réserver des difficultés dont l'établissement n'a pas la « culture ».

On aurait pu s'attendre à ce que ce motif entre en ligne de compte dans le choix de VNF, de poursuivre la logique d'externalisation qui s'est imposée en pratique à l'occasion de la reconstruction des barrages de la Meuse et de l'Aisne projet-phare de VNF en ce domaine (31 ouvrages concernés en deux tranches) avec le renouvellement de quatre équipements hydroélectriques devant augmenter de 50 % la puissance hydroélectrique installée sur le bassin de la Meuse.

Pourtant, selon l'avis rendu par la mission d'appui à la réalisation des contrats de partenariat (avis n° 2009-2010), VNF ne s'est pas appuyé sur le critère de l'efficience économique dans son choix préférant faire valoir la complexité du projet d'un point de vue à la fois technique, financier et juridique.

On a évoqué les réserves qu'appelle le recours à une formule d'externalisation qui dépasse le strict champ de la construction des centrales. Dans l'avis de la mission d'appui du ministère de l'économie et des finances, un surplus net de recettes de l'ordre de 40 millions d'euros sur la durée du contrat avait été évoqué.

Mais la mission s'interrogeait sur la part de ce surplus devant revenir à VNF au vu de l'équilibre du contrat envisagé. Celle-ci devait être égale à la moitié du surplus après rémunération des actionnaires (et bien entendu, après couverture des coûts) ce qui revenait à transférer l'essentiel de la rente hydroélectrique à la société chargée du contrat.

Un aménagement du contrat est intervenu sur ce point avec l'instauration d'une garantie de recettes au profit de VNF pour la partie hydroélectrique du projet mais, apparemment, sur la base d'une capacité productive réduite par rapport aux engagements initiaux. Cette garantie de recettes correspondant à une partie des coûts de construction et d'exploitation des microcentrales sera déduite des loyers bruts versés par VNF au partenaire (un peu plus de 30 millions d'euros nets par an hors taxes) pour la totalité des ouvrages.

Ces péripéties du contrat renforcent les interrogations d'espèce sur la justification du recours à un contrat de partenariat s'agissant d'un projet qui ne devrait pas excéder les capacités techniques de VNF.

L'étendue de son objet suscite également des interrogations dans la mesure où il recouvre la maintenance et l'exploitation des ouvrages.

In fine , la production hydroélectrique acquise dans ce projet ne dégagera des recettes nettes qu'au terme de la durée du contrat (30 ans après le début de la construction) sous l'hypothèse de la capacité des ouvrages à cette échéance.

En toute hypothèse, l'extension des compétences de VNF à la production d'hydroélectricité consacrée par la loi peut être considérée comme partiellement en trompe-l'oeil.

Cette compétence est doublement limitée :

- elle ne s'exerce que sur le domaine public confié à VNF ;

- elle doit rester accessoire.

La traduction juridique de cette dernière condition, peu évidente a priori , est toutefois importante. Elle conduit à éviter la présomption que VNF n'entre dans la catégorie des producteurs d'électricité.

La première condition, de son côté, renforce très concrètement cette limitation. Elle a des effets très concrets sur des perspectives offertes à VNF par l'élargissement des missions consacré par la loi sous revue. En effet, elle conduit à entériner les équilibres historiques de la production d'hydroélectricité. Celle-ci est en réalité l'affaire de l'État qui est l'autorité concédante depuis la loi du 16 octobre 1919. Si VNF a été substitué à l'État dans toutes les concessions accordées sur le domaine confié à lui, cette solution n'a pas été appliquée s'agissant de la Compagnie Nationale du Rhône et des concessions d'hydroélectricité, qui ne produisent aucune redevance pour l'établissement.

Par ailleurs, comme on peut s'en douter, les concessions actuelles sont installées sur les parties du domaine fluvial aux plus forts potentiels hydroélectriques, ce qui limite mécaniquement la « vocation » d'électricien de VNF sans compter que les chutes d'eau les plus productives se déversent dans les parties non navigables du domaine fluvial qui n'entrent pas dans le périmètre du domaine confié à VNF.

A défaut de transférer à VNF le domaine hydroélectrique, il pourrait être justifié, dans le cadre du renouvellement des concessions, d'attribuer à VNF une part des produits des concessions d'hydroélectricité dans la mesure où les exploitants bénéficient de la gestion hydraulique assumée par VNF.

b) Les nouvelles formes de valorisation foncière, une stratégie à auditer

L'élargissement de l'objet social de VNF auquel a procédé la loi a également consacré la pratique, jusque-là exceptionnelle, de valorisation du domaine de VNF par des opérations d'aménagement ou de développement réalisées via des entités filiales plutôt que sous les formes plus traditionnelles de concessions ou d'autorisation d'occupation du domaine.

VNF n'avait pas attendu l'adoption de la loi pour procéder à de telles opérations d'aménagement. En particulier, l'établissement a contribué à une opération d'envergure sur le site de la « Confluence » à Lyon, appelée « Port Rambaud »

Ce projet avait suscité en son temps une intervention du législateur, dont la justification était moins juridique que politique. Un article de la loi de finances rectificative pour 2003 avait déclassé des parcelles du domaine public fluvial et préfiguré le modèle de valorisation domaniale dessiné par la loi de 2012.

La poursuite de l'activité d'aménageur de VNF aurait été envisageable mais dans des conditions reposant sur des bases légales succinctes qu'il était justifié de compléter dans la perspective de son développement.

C'est ainsi que tout en consacrant cette compétence, le législateur a souhaité l'encadrer en en précisant certaines modalités.

En particulier, des règles de délégation et constitution des entités porteuses ont été posées de sorte que VNF, quand il recourt à des véhicules extérieurs pour ces opérations d'aménagement, soit conduit à opter soit pour des structures « codifiées », soit pour des filiales à capitaux majoritairement publics.

Par ailleurs, la loi a entendu concilier l'activité d'aménagement de VNF avec celle des collectivités territoriales tout en favorisant la prise en compte des objectifs locaux de logement et d'habitat.

Ces dispositions paraissent appelées à des fortunes diverses.

S'agissant de la conciliation entre les projets de VNF et les priorités des collectivités territoriales dans le domaine de l'aménagement, si les dispositions nouvelles introduites par la loi paraissent heureuses, force est d'anticiper que la procédure de consultation prévue pour intégrer les préoccupations locales relatives à l'habitat ne déploiera ses effets qu'en fonction de la pratique qui sera suivie.

Sur ce point, il est sans doute hasardeux d'attendre de VNF une contribution majeure non seulement en raison du périmètre domanial effectivement mobilisable mais aussi parce que VNF manque à l'évidence des ressources financières et d'expertise nécessaires pour apporter une pierre décisive à ce type de politique publique.

Selon le rapport de l'inspection générale des finances de 2009, les terrains inutiles au transport fluvial susceptibles d'être cédés représentaient alors 6 millions d'euros, estimation sans doute dépassée mais qui illustre la modicité du potentiel foncier de VNF.

Ce n'est pas à dire que la contribution de VNF soit appelée à être nulle sur ce point.

Même, si, alors que la loi prévoit que les opérations conduites par VNF en ce domaine soient confiées à des intervenants sociaux ce n'est pas prioritairement vers eux que l'établissement s'est tourné, les projets en cours comportent un volet habitat qui peut être précieux.

Mais il convient encore d'envisager les nouvelles voies empruntées pour valoriser le domaine sous l'angle de leur équilibre financier.

Pour ces opérations, une société de droit privé, Rives & Développement (RSD), a été créée le 25 avril 2003 par VNF et par la CDC sous la forme d'une société par actions simplifiée (capital de 2,2 M€, 60 % VNF et 40 % CDC). Son objet social portait uniquement à l'origine sur la valorisation du Port Rambaud à Lyon. En 2008, les statuts de RSD ont été modifiés pour lui donner une compétence en matière d'étude sur l'ensemble du domaine géré par VNF. En 2012, les statuts de RSD ont été de nouveau modifiés pour lui permettre de réaliser des opérations d'aménagement et d'exercer ses missions de montages immobiliers sur l'ensemble du domaine géré par VNF.

Une fois les projets élaborés par cette structure légère, le montage des opérations immobilières repose sur les principes suivants ainsi décrits par VNF :

« - constitution d'une SCI avec pour associés VNF (apport de terrain valorisé après aménagement, soit bâtiment préexistant à reconvertir), la Caisse des Dépôts et Consignations, et un tiers investisseur et preneur intéressé au projet ;

- le tiers investisseur s'engage à prendre à bail une surface locative dont la proportion au sein de l'immeuble est supérieure ou égale au taux de sa participation au capital de la SCI ;

- les opérations sont financées par emprunt auprès des établissements bancaire traditionnels ; la société est capitalisée au minimum, l'objectif étant d'obtenir une valorisation optimale à terme (maximisation du TRI de l'opération). »

Moins d'une dizaine d'opérations sont en cours. On peut rappeler ici que l'IGF avait dénombré 36 sites qui pourraient faire l'objet d'opérations de valorisation foncière sur le modèle de « Port Rambaud » à Lyon ce qui paraît laisser quelques marges à VNF.

Quelques remarques s'imposent.

Le recours à des sociétés sous-capitalisées peut être considéré comme quelque peu regrettable au vu de la composante fiscale de cette formule d'optimisation. Il a un autre effet qui est associé à la nature respective des apports des partenaires.

Dans ces montages, la question de la rémunération des apports de VNF se pose dans la mesure où, durant une période qui peut être longue, les loyers perçus sont affectés aux charges financières et ne rémunèrent pas les apports en nature qui sont ceux de VNF.

Dans ces conditions, la question de l'égalité de traitement des porteurs de parts des SCI peut se poser.

En toute hypothèse, la perspective de recettes, à supposer qu'elle soit tangible, est nécessairement retardée. Elle dépend des conditions de sortie de la SCI qui, même non perturbées par les « interventions hors-marché » toujours envisageables, sont conjecturales.

Vos rapporteurs prennent bonne note des perspectives plutôt favorables alléguées par VNF.

Cependant, au vu de la complexité de montages qui échappent assez largement aux métiers traditionnels de VNF et aux contrôles des tutelles (voir supra ), il serait souhaitable qu'un audit soit réalisé sur ce point. Il devrait permettre d'estimer le bilan des coûts de portage assumés de fait par l'établissement et des valorisations d'actifs, mais aussi d'envisager les conditions de la gouvernance effective des SCI.

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