AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Voici près de dix ans que les pouvoirs adjudicateurs disposent d'un nouveau montage contractuel : le contrat de partenariat.

Introduit dans notre droit, dans le cadre d'une ordonnance 1 ( * ) et donc d'un débat parlementaire notoirement écourté, le contrat de partenariat s'est ajouté à plusieurs instruments juridiques existants qui ont pour particularité de lier contractuellement un « prescripteur » public et un « prestataire » privé, entraînant un transfert important de charges et de risques de la personne publique vers son partenaire privé et, en retour, des incertitudes et des risques financiers non négligeables pour le « prescripteur ». Depuis sa création, le contrat de partenariat, communément appelé « partenariat public-privé » ou « PPP », a suscité de vifs débats opposant ses adeptes et ses pourfendeurs.

Vos rapporteurs ont souhaité, au terme de cette décennie, mesurer les effets de ces nouveaux contrats afin d'en appréhender le plus objectivement possible les avantages mais aussi les inconvénients et risques qu'il induit. Plusieurs rapports ont déjà exploré ces questions, qu'ils émanent de la Cour des comptes, du conseil général de l'environnement et du développement durable ou de l'inspection générale des finances, dernier rapport d'ensemble sur le sujet que M. Pierre Moscovici, alors ministre de l'économie et des finances, a transmis à vos rapporteurs.

Sans revenir sur un travail largement effectué par ces rapports, vos rapporteurs ont choisi de se concentrer sur les grands enjeux que présentent les contrats de partenariat. Ils ont voulu répondre à cette question fondamentale : compte tenu des risques qu'ils peuvent présenter, les contrats de partenariat sont-ils pour les personnes publiques qui en ont conclus une bombe à retardement ?

Même si les contrats de partenariat ne représenteraient, selon les rares études disponibles, que 5 % du PIB en France, leur impact sur les finances publiques est inquiétant, surtout dans un contexte de raréfaction de la ressource budgétaire.

Vos rapporteurs se sont parallèlement attachés à examiner ces contrats sous l'angle de leurs utilisateurs directs - les pouvoirs adjudicateurs et les partenaires privés - mais aussi des petites et moyennes entreprises qui, sans être partie à ce contrat, en subissent les effets indirects, soit par leur éviction, soit par leur participation à leur exécution comme sous-traitant.

Ce bilan serein est d'autant plus nécessaire que le recours aux contrats de partenariat s'est accéléré. Selon les estimations de l'institut pour la gestion déléguée (IGD), 156 contrats de partenariat ont été attribués entre 2004 et mi-2012, pour un montant de 34 milliards d'euros hors taxe. Précisons que sur ces 156 contrats, 124 d'entre eux ont été conclus par les collectivités territoriales.

Ajoutons qu'en prévision de la transposition des deux directives européennes du 26 février 2014 visant à réformer les procédures de passation des marchés publics, le Gouvernement a fait part de son intention de rationaliser les règles relatives aux différents partenariats public-privé, ouvrant la voie à des modifications des règles relatives aux contrats de partenariat. Il a sollicité une habilitation à procéder par ordonnance pour « unifier et rationaliser l'ensemble des règles relatives aux contrats de la commande publique qui sont des marchés publics au sens du droit de l'Union européenne 2 ( * ) , y compris les contrats de partenariat public-privé, notamment en ce qui concerne les conditions de recours à ces contrats et de leur mise en oeuvre » 3 ( * ) .

Ce rapport a l'ambition de contribuer à une discussion parlementaire sur un dossier sur lequel le Parlement n'a pas eu jusqu'à présent l'occasion de se prononcer. À la suite d'une habilitation, les contrats de partenariat ont été créés par une ordonnance dont la ratification implicite n'a pas permis aux assemblées parlementaires de débattre. Le projet de loi de 2008 partait du postulat selon lequel les contrats de partenariat devaient parfois être facilement généralisés - postulat partiellement battu en brèche par la décision du Conseil constitutionnel 4 ( * ) relative à ce projet de loi.

Vos rapporteurs estiment qu'il est plus que temps que le législateur se saisisse à nouveau du dossier. Le but de ce rapport est de contribuer à la nécessaire nouvelle législation sur ces sujets.


* 1 Ordonnance n° 2004-559 du 17 juin 2004 sur les contrats de partenariat.

* 2 Au regard de la législation de l'Union européenne, le contrat de partenariat est un marché public, même si, en droit français, il s'en distingue formellement.

* 3 Article 27 du projet de loi relatif à la simplification de la vie des entreprises, déposé sur le Bureau de l'Assemblée nationale le 25 juin 2014.

* 4 Conseil constitutionnel, 24 juillet 2008, n° 2008-567 DC.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page