B. LES MOYENS D'INFORMATION DE LA DÉLÉGATION PARLEMENTAIRE AU RENSEIGNEMENT COMPLÉTÉS

Les moyens d'information de la délégation parlementaire au renseignement avaient été élargis une première fois par rapport au texte initial de 2007 81 ( * ) par la LPM 2014-2019 pour lui permettre d'exercer au mieux sa mission nouvelle de contrôle et d'évaluation.

1. Les documents communiqués à la DPR

Le I de l'article 6 nonies de l'ordonnance du 17 novembre 1958 disposait ainsi que devaient être communiqués à la DPR les documents suivants :

« 1° la stratégie nationale du renseignement » : il s'agit d'un document public qui fixe, pour un horizon de cinq ans, les grands axes de la politique du Gouvernement en matière de renseignement. Ce document a été transmis à la DPR en octobre 2014 et a fait l'objet d'une publication sur le site Internet de l'Académie du renseignement ;

« 2° des éléments d'informations issus du plan national d'orientation du renseignement » (PNOR). Le PNOR est la déclinaison annuelle de la stratégie nationale, à destination des services. Il s'agit donc d'un document à vocation opérationnelle, couvert par le secret de la défense nationale. La première version de ce PNOR avait été présentée à la délégation le 27 novembre 2014 par le Coordonnateur national du renseignement ;

« 3° un rapport annuel de synthèse exhaustif des crédits consacrés au renseignement et le rapport annuel d'activité des services spécialisés de renseignement ». Deux rapports de synthèse des crédits ont été transmis à la DPR à ce jour, en septembre 2014 pour l'exercice 2013 et en septembre 2015 pour l'exercice 2014. Le rapport annuel d'activité n'a pas été jusqu'à présent transmis à la délégation mais devrait l'être pour la première fois en 2016 sur l'exercice 2015.

« 4° des éléments d'appréciation relatifs à l'activité générale et à l'organisation des services spécialisés de renseignement » . Tout au long de l'année, la DPR a demandé et reçu un certain nombre de documents de la part des services pour préparer son rapport d'activité.

La loi du 24 juillet 2015 a complété cette liste des documents à transmettre à la DPR, à la suite de plusieurs amendements de M. Jean-Pierre Raffarin, président de la commission des affaires étrangères et de la défense du Sénat.

Les services de renseignement du « second cercle », c'est-à-dire n'appartenant pas à la communauté du renseignement, ont ainsi été intégrés dans le champ de contrôle de la DPR. Les 3° et 4° de l'article 6 nonies disposent désormais que le rapport annuel de synthèse des crédits et les éléments sur l'activité générale des services porteront également sur les « services autorisés par le décret en Conseil d'État mentionnée à l'article L. 811-4 » du code de la sécurité intérieure à recourir aux techniques de renseignement prévues par la loi. Ils précisent également que ces informations ne concerneront que les activités de renseignement de ces services.

Cela élargit considérablement le champ d'action de la DPR puisque le décret en Conseil d'État publié le 11 décembre 2015 82 ( * ) établit une liste très complète des services autorisés à recourir à ces techniques. Y sont ainsi notamment mentionnées, au sein de la police nationale, la direction centrale de la police judiciaire, la direction centrale de la police aux frontières, la direction centrale de la sécurité publique ; au sein de la gendarmerie nationale, la sous-direction de l'anticipation opérationnelle et les sections de recherche ; la sous-direction du renseignement territorial ; les sections de recherche de la gendarmerie maritime, de la gendarmerie de l'air et de la gendarmerie de l'armement ( voir supra Chapitre II et Annexe 6)

Par ailleurs, toujours à l'initiative du président Jean-Pierre Raffarin, la loi du 24 juillet 2015 a ajouté un 5° à l'article 6 nonies de l'ordonnance pour prévoir une transmission à la DPR des « observations que la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement adresse au Premier ministre [...] ainsi qu'une présentation, par technique et par finalité, des éléments statistiques » figurant dans son rapport d'activité. Si de nombreuses informations sont déjà comprises dans le rapport public de cette commission, le Gouvernement n'avait pas souhaité que la présentation par technique et par finalité soit rendue publique. Il était en revanche légitime que la DPR soit destinataire de ce type d'informations.

L'article 21 de la loi relative au renseignement a également pris en compte, d'une part, la possibilité pour la délégation de saisir la CNCTR (article L. 833-11 du code de la sécurité intérieure) et, d'autre part, la transmission des observations que la CNCTR adresse au Premier ministre (article L. 833-10).

2. Une extension de la liste des personnes susceptibles d'être entendues par la DPR

Enfin, la liste des personnes pouvant être entendues par la délégation, déjà enrichie par la LPM 2014-2019 83 ( * ) , a été complétée par la loi du 24 juillet 2015 à l'initiative de M. Jean-Jacques Urvoas, président de la commission des lois de l'Assemblée nationale, contre l'avis du ministre de l'Intérieur 84 ( * ) . Peuvent désormais être auditionnés, outre les directeurs des services spécialisés de renseignement, éventuellement accompagnés des collaborateurs de leurs choix « toute personne placée auprès de ces directeurs et occupant un emploi pourvu en conseil des ministres » . Il s'agit d'ailleurs de la mise en oeuvre d'une proposition formulée par la délégation parlementaire au renseignement dans son rapport d'activité 2014.

Cette disposition permettra de recevoir les cadres de ces services, sans que le ministre ou le directeur du service ne puissent s'y opposer. Un nombre assez large de personnes est en réalité concerné : les officiers généraux occupant des fonctions de sous-directeurs au sein de certains services de renseignement et les emplois « à la décision du Gouvernement » traditionnellement prévus en conseil des ministres.

Ceci intègre naturellement les directeurs des services du « second cercle ». La DPR a ainsi procédé à l'audition, le 3 septembre dernier, des responsables de la sous-direction à l'anticipation opérationnelle (SDAO) de la Gendarmerie nationale, de la DRPP et du SCRT

La loi du 24 juillet 2015 a également prévu la possibilité pour la délégation parlementaire au renseignement d'entendre chaque semestre le Premier ministre sur son application ainsi que les personnes spécialement déléguées par lui pour délivrer les autorisations de mise en oeuvre des techniques de renseignement mentionnées par la loi.

Celle-ci peut également inviter le président de la CNCTR à lui présenter le rapport d'activité de la commission, tout comme le président de la Commission consultative du secret de la défense nationale.


* 81 Loi n° 2007-1443 du 9 octobre 2007 portant création d'une délégation parlementaire au renseignement.

* 82 Décret n° 2015-1639 du 11 décembre 2015 relatif à la désignation des services autres que les services spécialisés de renseignement, autorisés à recourir aux techniques mentionnées au titre V du livre VIII du code de la sécurité intérieure, pris en application de l'article L. 811-4 du code de la sécurité intérieure.

* 83 La délégation peut aujourd'hui entendre le Premier ministre, les ministres compétents, le secrétaire général de la défense et de la sécurité nationale, le directeur de l'Académie du renseignement, les directeurs des services spécialisés, les directeurs d'administration centrale ayant à connaître l'action des services, le président de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement et le président de la Commission consultative du secret de la défense nationale.

* 84 Lors de l'examen au Sénat du projet de loi relative à la programmation militaire (LPM) pour les années 2014 à 2019 et portant diverses dispositions concernant la défense et la sécurité nationale (Loi n° 2013-1168 du 18 décembre 2013), la question de la délimitation du champ des personnes pouvant être auditionnées par la délégation avait déjà fait l'objet de débats. Notre collègue Jean-Pierre Sueur avait proposé que la délégation puisse entendre, avec l'accord des directeurs de service et en leur présence, tous les agents des services. Toutefois, le Gouvernement avait sous-amendé cette disposition en ne prévoyant que la possibilité pour les directeurs des services de se faire accompagner des collaborateurs de leur choix.

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