B. UN MOUVEMENT DE MÉTROPOLISATION PARALLÈLE À LA CONSTITUTION DE GRANDES RÉGIONS

Actuellement, le territoire national se couvre de nouvelles et grandes agglomérations, créées ou en projet.

En dehors des métropoles, de nouvelles communautés urbaines se mettent en place.

1. L'avenir des anciens chefs-lieux de région

L'article 70 de la loi NOTRe a ouvert le statut de communauté urbaine aux anciens chefs-lieux de région dans la nouvelle carte régionale.

Le seuil démographique de 250 000 habitants exigé de l'ensemble n'est pas applicable aux EPCI à fiscalité propre comprenant une commune qui a perdu sa qualité de capitale régionale. Cependant, ils doivent respecter deux conditions : exercer l'intégralité des compétences obligatoires des communautés urbaines et l'accord des communes membres, recueilli à la majorité du droit commun 8 ( * ) , doit intervenir avant le 1 er janvier 2020 9 ( * ) .

L'ancienne capitale de la Bourgogne a précédé le mouvement : le 1 er avril 2015, est né le Grand Dijon par transformation de l'ancienne communauté d'agglomération.

À ce jour, sont donc concernées Amiens, Caen, Châlons-en-Champagne, Besançon, Limoges, Metz et Poitiers. La communauté d'agglomération de Clermont-Ferrand - Clermont communauté - qui comprend une population de 282 675 habitants, peut accéder à ce statut selon le droit commun de l'article L. 5215-1 du code général des collectivités territoriales.

Au terme des SDCI arrêtés le 31 mars 2016, ce statut participe de l'attractivité de leur territoire d'implantation et d'une organisation équilibrée du nouveau périmètre régional alors que les régions concernées, à l'exception de Bourgogne-Franche-Comté, comprennent une métropole (Normandie, Grand Est, Nouvelle Aquitaine et Hauts-de-France de même qu'Auvergne-Rhône-Alpes). Il est le moyen, pour ces agglomérations, de peser avec leur département face à la nouvelle région.

La CA de Caen-La-Mer qui accueillera le siège du conseil régional, se transformera au 1 er janvier 2017 en communauté urbaine.

L'objectif, pour cette collectivité, est d'équilibrer le territoire de la Normandie à l'ouest, face à la capitale régionale, Rouen, et à l'agglomération du Havre situées sur l'axe constitué par la Seine et ouvertes à l'est sur l'Ile-de-France.

Comme le soulignait le maire de Caen, M. Joël Bruneau, le 24 mars dernier lors d'une rencontre avec vos rapporteurs, la réussite du territoire doit réunir capacité d'innovation et entrepreneuriale, qualité de la vie et culture.

Cette question de la « reconversion » intéresse aussi la « Nouvelle Aquitaine » pour l'avenir de ses deux anciens chefs-lieux de région, Poitiers et Limoges, dans lesquels vos rapporteurs se sont rendu les 16 et 24 juin 2016.

Il s'agit, pour ces deux agglomérations, de peser demain dans la nouvelle région et d'accéder aux crédits des fonds structurels européens désormais gérés par les conseils régionaux. C'est un point important pour vos rapporteurs : les intercommunalités doivent structurer leurs projets de territoire pour contractualiser avec la région sur ces enveloppes ; les grandes agglomérations, particulièrement, doivent devenir des acteurs reconnus d'elle.

Poitiers et Limoges présentent chacune des atouts importants. La première, une université reconnue, un CHU (centre hospitalo-universitaire) de grande qualité et des infrastructures de transport performantes (des liaisons ferroviaire rapides : 1 heure 30 pour relier Paris et, dès 2017, 1 heure pour la capitale régionale, Bordeaux). Au 1 er janvier 2017, la CA Grand Poitiers devrait fusionner avec les trois CC du Val Vert du Clain, de Vienne et Moulière, du Pays Mélusin en intégrant aussi les communes de Chauvigny, Jardres, La Puye et Sainte Radegonde (membres de la CC du Pays Chauvinois). Sa population croitra alors d'un tiers pour s'établir à 188 509 habitants. L'objectif de ce projet est bien, dans le nouveau contexte régional, de renforcer l'agglomération existante pour qu'elle puisse remplir des fonctions métropolitaine.

Quant à Limoges, au nord-est de la nouvelle région, seule commune de la Haute-Vienne de plus de 11 000 habitants, son aire d'influence dépasse les limites départementales. Sa transformation en communauté urbaine est en débat.

Pour sa part, l'ancien chef-lieu de la région Champagne-Ardenne, Chalons-en-Champagne, avait déjà beaucoup souffert des restructurations de la carte militaire. Située à l'extrémité ouest d'une vaste région dirigée depuis sa frontière est, elle se trouve dans une configuration moins favorable que l'ancien chef-lieu de la Lorraine, Metz, au centre de la nouvelle collectivité. Les conséquences de la perte de son statut de capitale régionale n'ont pas toutes été évaluées, notamment le sort, dans cette nouvelle configuration, des directions para-publiques et privées qui y sont aujourd'hui implantées, notait son maire, M. Benoist Apparu. Celui-ci craint aussi, dans la préfecture de la Marne, l'évaporation des personnels de l'État au fil du temps. Par ailleurs, regrettant l'inéligibilité des communautés urbaines au grand emprunt qui est ouvert aux métropoles, il concluait à la convergence des efforts en faveur de la métropolisation.

Pourtant, les métropoles, quelles que soient leur puissance et leur dynamisme, n'ont ni la vocation ni la capacité d'assurer la prospérité de l'ensemble de leur région.

Le développement des territoires passe aussi par l'action de puissantes agglomérations réparties dans l'ensemble de la circonscription.

2. Pour une organisation multipolaire des nouvelles régions

Le même souci de peser dans la région fonde le renforcement des intercommunalités autour des autres grandes villes-centres de ces territoires. C'est le cas emblématique du Grand Reims qui, de communauté d'agglomération, se transformera en communauté urbaine au 1 er janvier 2017. Ses promoteurs, Mme Catherine Vautrin, présidente de Reims Métropole, et M. Arnaud Robinet, maire de Reims, ont exposé leur projet à vos rapporteurs le 29 avril dernier à Châlons-en-Champagne.

Tout d'abord, constituer l'entrée ouest de la nouvelle région du Grand Est alors que sa capitale est située, de par la loi 10 ( * ) , à son extrémité est, à Strasbourg.

Un projet en chantier

Ce nouvel ensemble doit résulter de la fusion-extension de Reims Métropole, de sept communautés de communes (Beine-Bourgogne ; Champagne Vesle ; Fismes Ardres et Vesle ; Nord Champenois ; Vallée de la Suippe ; Rives de la Suippe ; Vesle et Coteaux de la montagne de Reims) et de dix-huit communes de la communauté de communes Ardre et Châtillonais. Il doit rassembler 144 communes dont 111 de moins de 1 000 habitants alors que la ville-centre compte 185 000 habitants.

Le futur EPCI présente des disparités économiques et un élément commun, le rural.

La gouvernance de la toute prochaine CU, question complexe pour un groupement de 144 communes, est à l'étude.

A été créé un comité de préfiguration composé de deux élus de chacun des EPCI à fiscalité propre appelés à fusionner.

Ont aussi été mis en place des ateliers par intercommunalités existantes, l'un sur la fiscalité et les finances, l'autre sur les compétences pour les inventorier, sur les modalités de leur mise en oeuvre afin de déterminer pour la nouvelle CU un modèle partagé.

L'ensemble des maires est réuni tous les deux mois ; en juillet dernier, la réunion a été aussi ouverte aux adjoints et conseillers municipaux sur les travaux restant à mener d'ici le 1 er janvier 2017.

Le bureau de l'EPCI devrait détenir le rôle majeur dans sa conduite.

Les bâtiments des anciennes CC seront transformés en relais, sur le territoire, de la CU, avec le maintien sur place des personnels.

Pour ses promoteurs, le Grand Reims devra devenir la locomotive de la Marne pour constituer celle-ci en pôle d'équilibre au sein de la nouvelle région du Grand Est.

Ce projet est important car -répétons-le- la réussite de la nouvelle carte des collectivités ne doit pas s'analyser seulement en gains pour la réduction des dépenses publiques, mais aussi et surtout en termes d'atout pour l'attractivité des territoires, de tous les territoires, dans un mouvement général de développement.

Le seul élargissement du périmètre régional, même flanqué d'une métropole, ne saurait suffire à entraîner à sa suite, l'enrichissement de toute la région. Le défi est bien de permettre, dans l'ensemble et dans toutes ses composantes, un dynamisme territorial.

Il importe de favoriser la constitution d'un réseau de fortes intercommunalités, aptes à irriguer leur aire d'influence. Dans le cas contraire, resterait un face à face région/métropole, certainement impuissant à lui seul à remplir l'objectif assigné à la dernière réforme territoriale.


* 8 Les deux tiers des communes représentant la moitié de la population ou l'inverse.

* 9 Cf. article L. 5215-1 du code général des collectivités territoriales.

* 10 Cf. article 2 de la loi n° 2015-29 du 16 janvier 2015 relative à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral.

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