Première séquence - Pourquoi les femmes s'engagent

Animatrice : Muguette Dini, ancienne sénatrice du Rhône

Intervenantes :

Claire Guichet, rapporteure pour la délégation aux droits des femmes
du Conseil économique social et environnemental (CESE)
de Les forces vives au féminin : les femmes dans la représentation citoyenne

Anne Barre, co-présidente
de Women in Europe for a common future (WECF) - France

Gisèle Bourquin, présidente de l'association Femmes au-delà des Mers

Guylaine Brohan, présidente départementale de la Fédération Familles rurales de Vendée , maire adjointe de Saint-Georges-de-Montaigu

Damarys Maa Marchand, présidente de la Fédération
Initiative des femmes africaines de France (IFAFE)

Florence Montreynaud, historienne, co-fondatrice des Chiennes de garde ,
de Encore féministes ! et de Zéromacho ; auteure de Chaque matin,
je me lève pour changer le monde. Du MLF aux Chiennes de garde. Mémoires féministes

INTRODUCTION

CLAIRE GUICHET, RAPPORTEURE POUR LA DÉLÉGATION AUX DROITS
DES FEMMES DU CONSEIL ÉCONOMIQUE SOCIAL ET ENVIRONNEMENTAL (CESE)
DE LES FORCES VIVES AU FÉMININ : LES FEMMES DANS LA REPRÉSENTATION CITOYENNE

Muguette Dini, ancienne sénatrice du Rhône

Je remercie Chantal Jouanno de m'avoir sollicitée pour animer cette première séquence sur le thème « Quelles sont les raisons de l'engagement des femmes dans les associations ? ». Comme nous l'a rappelé Michelle Perrot, cet engagement a préexisté à la reconnaissance des droits politiques. Il est donc à la fois très ancien et inséparable de la citoyenneté des femmes.

J'ai autour de moi cinq femmes aux engagements associatifs très divers.

Anne Barre est co-présidente de WECF - France (Women in Europe for a common future - France) , dont le but est de construire avec les femmes un monde juste, sain et durable.

Gisèle Bourquin préside Femmes au-delà des Mers , qui oeuvre notamment pour la reconnaissance de l'apport des femmes ultramarines à notre histoire.

Guylaine Brohan est présidente d'une fédération départementale de Familles rurales , celle de la Vendée, association présente sur tout le territoire et née il y a plus de soixante-dix ans pour, à l'origine, organiser la solidarité entre les familles.

Damarys Maa Marchand préside la Fédération IFAFE (Initiatives des femmes africaines de France) dont la mission est d'aider à l'intégration de femmes primo-arrivantes par un accompagnement individuel.

Florence Montreynaud est pleinement engagée dans le combat féministe, au MLF d'abord, puis plus récemment dans le réseau Zéromacho contre la prostitution.

Je donne sans plus tarder la parole pour introduire brièvement cette séquence à Claire Guichet, chargée de recherche et d'enseignement à l'Université Paris II - Panthéon Assas, ancienne membre du Conseil économique, social et environnemental et ancienne présidente de la Fédération des associations générales étudiantes (FAGE) .

Claire Guichet, chargée de recherche et d'enseignements à l'université Paris II - Panthéon Assas

Il y a plus de douze ans que je suis engagée, d'abord dans le militantisme étudiant. Je pensais m'être engagée comme les garçons. Mais, en y réfléchissant, mon premier engagement était un engagement de lien social au service de l'éducation populaire, alors que je vivais à l'étranger, auprès d'un organisme né des anciennes « charities » protestantes britanniques. J'ai réalisé que c'est ce premier engagement qui m'a en quelque sorte mis le pied à l'étrier.

Le rapport du Conseil économique, social et environnemental intitulé Les forces vives au féminin vise à définir comment la société civile, de façon générale, représente les femmes. On évoque fréquemment la place des femmes en politique ou dans les conseils d'administration des entreprises, à la suite de la loi dite Copé-Zimmerman de 2011. En revanche, la question de la place des femmes dans les associations et parmi les partenaires sociaux est beaucoup moins traitée et semble moins facile à appréhender.

Pourtant, la place des femmes dans la société civile est un engagement essentiel pour donner de la visibilité aux femmes dans la vie publique et, ainsi, créer des modèles auxquels les jeunes femmes pourront s'identifier. C'est aussi parce que cet engagement au sein de la société civile est bien souvent le moyen d'acquérir de nouvelles compétences et parce qu'il peut servir de marchepied pour prendre d'autres responsabilités, non seulement dans le champ de la société civile, mais également dans le champ économique, voire dans le champ politique. On sait que de nombreuses femmes parlementaires ont accédé aux responsabilités politiques après de multiples engagements dans la société civile - il y a peut-être des exemples de ce type de parcours parmi les sénatrices présentes ce matin.

Si l'on se pose la question de l'engagement des femmes, il faut aussi se demander ce qui lui est spécifique. Or, ce qui lui est spécifique, c'est l'engagement associatif. Ce n'est pas que les hommes soient absents des associations, mais les femmes, plus souvent que les hommes, commencent leurs engagements par des engagements associatifs et, le plus souvent, sont engagées uniquement dans une association, alors que les statistiques montrent que le « poly-engagement » est beaucoup plus fréquent chez les hommes. Généralement, l'association est l'un des engagements des hommes, parmi d'autres (syndical, politique, etc.).

D'après une enquête de l'Ifop de 2013, les femmes chercheraient majoritairement, dans leur engagement associatif, à « donner du sens », là où leurs collègues masculins chercheraient plutôt à apporter leurs compétences à une cause particulière. On peut certes se dire qu'entrer dans une association sans chercher à donner du sens à son engagement est un peu dommage ! Ainsi, le problème ne serait pas chez les femmes...

En revanche, la question est de savoir si cette approche par le sens a des conséquences sur les thèmes de l'engagement des femmes. Dans le secteur associatif, peut-être plus encore que dans d'autres secteurs de la société civile, la sectorisation des associations par champ d'action met en évidence malheureusement une division genrée des thématiques d'engagement, avec des femmes que l'on retrouve plus nombreuses dans des thématiques assez traditionnelles, qui reflètent la vision des rôles attribués aux femmes et aux hommes dans notre société.

Par ailleurs, la question du sens semble s'opposer à celle de la compétence.

Il y aurait alors celles qui « donnent du sens » et ceux qui apportent des compétences techniques, une capacité à parler en public, une capacité à gérer une structure.

Cependant, la division sexuée du travail, à l'intérieur de l'association, s'organise un peu différemment. En fait, les femmes mettent bel et bien en oeuvre leurs compétences au sein des associations, mais souvent elles en sont les chevilles ouvrières internes, elles sont la « maison » de l'association. Elles s'occupent de son bon fonctionnement, elles gèrent les relations, elles font en sorte que l'association se structure suffisamment. Mais quand il s'agit de la représenter à l'extérieur, de faire partie des réseaux, de porter le message en public, ce sont bien souvent les hommes qui reprennent le devant. Ainsi, l'accès aux postes de trésorier est généralement égalitaire mais, quel que soit le domaine, même dans les domaines typiquement féminins, les présidences des associations restent majoritairement dévolues aux hommes.

Cette influence sur les postes clé se retrouve même dans la différence entre le travail et la gouvernance. Beaucoup de femmes, dans leur quête de sens, vont devenir salariées du secteur associatif, ce qui leur permettra de donner du sens via leur vie professionnelle. Mais cela n'a pas de conséquence sur la gouvernance de l'association. La difficulté par ailleurs est que les compétences acquises dans des fonctions internes sont moins facilement transférables à d'autres secteurs. Et la vie sociale est faite de réseaux qui se constituent à partir des rencontres que l'on fait en fonction des positions que l'on a occupées. Or chacun sait que le trésorier d'une association n'a pas les mêmes contacts sociaux que son président.

En fait, la question « Pourquoi les femmes s'engagent ? » serait la première question à se poser quand on s'intéresse à l'égalité entre les hommes et les femmes. Il faudrait donc d'abord poser cette question à celles qui s'engagent, mais aussi leur demander quelles difficultés elles percevaient avant de s'engager. Lorsque dans le secteur associatif vous proposez un poste à une femme, lorsque vous lui proposez de progresser dans la hiérarchie, bien souvent la première question qu'elle se pose est celle de ses compétences. Chez les hommes, c'est celle du temps disponible pour s'en occuper. Cela prouve que nous, les femmes, avons intériorisé l'idée de notre manque de capacités supposé.

Je serai donc particulièrement attentive à vos témoignages. Par ailleurs, au-delà de la question que nous nous posons, « Pourquoi les femmes s'engagent ? », je souhaiterais savoir pourquoi, encore en 2016, les femmes qui s'engagent ne le font pas de la même manière et pourquoi elles n'obtiennent pas les mêmes droits et la même visibilité que les hommes. Je suis donc curieuse de vous entendre sur le passage à l'acte de votre engagement et ce qui l'a rendu possible.

Mais vous êtes la preuve que c'est possible et je suis très honorée d'être parmi vous aujourd'hui.

Muguette Dini

Je vous remercie pour cette introduction. Pendant votre discours, j'ai vu beaucoup de femmes hocher la tête et se demander pourquoi elles ne prenaient pas le pouvoir.

Mais passons donc, maintenant, aux témoignages.

Je me tourne vers nos cinq témoins auxquels je poserai deux questions.

Anne Barre, qu'est-ce qui est le plus important pour vous dans l'action de WECF : l'aspect femmes ou l'aspect environnement ?

Selon une étude réalisée en 2012 par France Bénévolat , les femmes s'engagent dans l'action associative pour donner du sens, et les hommes pour faire bénéficier l'association de leurs compétences et talent, comme le rappelait Claire Guichet à l'instant. Vous sentez-vous concernée par ce constat ?

Anne Barre, co-présidente de Women in Europe for a common future (WECF) - France

WECF est une ONG qui existe depuis vingt-deux ans. Elle a été créée aux Pays-Bas en 1994, puis en Allemagne en 2001 et enfin en France en 2008. Je suis la fondatrice de l'antenne française. Votre première question vise à me demander si notre priorité est d'abord l'environnement ou d'abord le féminisme et le droit des femmes, mais nous agissons en fait à la croisée de ces chemins.

Notre association a été créée après le premier Sommet pour la Terre , qui s'est tenu à Rio en 1992. Cet événement a permis de reconnaître que les femmes jouaient un rôle fondamental dans la protection de leur environnement et dans le développement de leur communauté. Les États ont alors reconnu qu'il fallait leur donner une place importante et leur permettre de participer pleinement à l'élaboration des politiques de développement durable (Principe 20 - Déclaration de Rio : les femmes ont un rôle vital dans la gestion de l'environnement et le développement. Leur pleine participation est donc essentielle à la réalisation d'un développement durable.) Cela fait aujourd'hui plus de vingt ans que cette reconnaissance est établie par tous les États qui étaient présents à Rio. Dans nos agendas 21, on a voulu mettre en oeuvre ce principe de participation des femmes aux politiques de développement durable, mais beaucoup de travail reste encore à réaliser. Telle est la mission de notre ONG, qui démontre comment les femmes sont impactées de manière disproportionnée (par la pollution, par le changement climatique, pour l'accès à l'eau et à l'assainissement, autour des questions de santé liées à l'environnement), mais aussi combien elles sont porteuses de solutions différentes, qui sont un encouragement au dialogue et à la réflexion.

Notre ONG est constituée de 150 organisations réparties dans plus de quarante pays, qui travaillent au quotidien de manière très concrète. Il est difficile pour elles d'obtenir les financements dont elles ont besoin pour agir. L'utilité de leur action est très visible à l'échelle du foyer, mais l'est moins dans la vie publique et dans la politique. Permettez-moi de vous donner un exemple très concret. Nous étions présentes au Bourget en 2015 pour la COP 21, pour renforcer la question de l'égalité entre hommes et femmes et évoquer la place des femmes dans l'élaboration des politiques Climat. WECF est membre fondateur de la coalition d'ONG de femmes qui a le statut officiel d'observateur au sein de la Convention des Nations Unies pour le changement climatique. Or nous constatons qu'il est encore difficile aujourd'hui, pour le grand public, de voir quel est le lien entre les inégalités entre hommes et femmes et les questions climatiques. Pourtant, ce sont les inégalités sociales qui renforcent les difficultés auxquelles les femmes sont confrontées, face aux changements climatiques. Cependant, elles peuvent apporter des solutions pertinentes, notamment en ce qui concerne la transformation de l'accès aux ressources vitales, solutions qui permettront d'améliorer immédiatement les conditions de vie des populations.

Comment expliquer dès lors que ces solutions pertinentes ne bénéficient pas des financements Climat classiques qui sont en train de se mettre en place ? Ces financements sont dirigés aujourd'hui plutôt vers des solutions développées par des entreprises ou des États, technologiquement sophistiquées et de grande ampleur, qui certes vont permettre d'économiser beaucoup de CO 2 , mais qui ne vont pas toujours apporter une amélioration des conditions de vie des populations et leur permettre cette résilience dont elles ont absolument besoin face au changement climatique.

Nous ne souhaitons pas établir de priorité entre droits des femmes et environnement dans nos actions, mais nous voulons faire la démonstration que les femmes ont un rôle à jouer et que c'est en renforçant leurs droits qu'on va contribuer à renforcer la protection de l'environnement.

Vous rappeliez le résultat d'une enquête indiquant que l'engagement des femmes est d'abord motivé par une quête de sens : je le crois aussi, mais j'espère également que les hommes s'engagent dans le monde associatif ou dans le monde politique pour donner du sens à leur place dans notre société.

Pour moi, le sens a été une des premières motivations de mon engagement, mais j'ai voulu aussi apporter les compétences que j'avais acquises au travers de ma formation, de mon éducation, de mon expérience, de mon métier - car je n'ai pas toujours été engagée dans le monde associatif et j'ai travaillé aussi en entreprise, et notamment dans la communication. J'ai alors été amenée à gérer des équipes. Ces compétences sont essentielles car, si le monde associatif a parfois du mal à se faire reconnaître des autorités pour sa valeur et son action, comme le démontre l'histoire, c'est aussi parce que les associations ont besoin de structuration, de professionnalisation et de cet apport de compétences de la part de personnes qui ont travaillé dans d'autres milieux professionnels. Aujourd'hui, alors que le soutien des pouvoirs publics se fait plus rare, il est d'autant plus important d'avoir en tête ce besoin de professionnalisme, notamment pour collecter des fonds et pour communiquer.

Selon moi, il serait dommage de faire une différenciation sexuée entre les femmes qui s'engageraient pour « donner du sens », sans penser qu'elles sont capables d'apporter des compétences, et les hommes convaincus qu'ils ont le devoir d'apporter leurs compétences au service d'une cause. Il serait dommage de faire perdurer cette vision caricaturale. Il me semble que les femmes sont aujourd'hui bien conscientes de ce qu'elles peuvent apporter au monde associatif, et j'espère qu'elles vont continuer à s'engager comme elles le font en prenant la parole avec courage.

Muguette Dini

Merci beaucoup.

Gisèle Bourquin, vous avez créé Femmes au-delà des Mers en 2007, mais toute votre vie, vous avez oeuvré aussi et surtout pour le rayonnement de l'histoire et du patrimoine ultramarins.

L'action associative est-elle pour vous un engagement ? Êtes-vous d'accord avec le titre de ce colloque ?

De quelle réalisation concrète de Femmes au-delà des Mers êtes-vous la plus fière ?

Gisèle Bourquin, présidente de Femmes au-delà des Mers

Avant de répondre à vos questions, je souhaite remercier les organisateurs et organisatrices de ce colloque qui m'offrent l'opportunité de parler des femmes et de l'outre-mer. Je profite aussi de cette tribune pour saluer l'outre-mer. Je sais que la déléguée régionale aux droits des femmes de Mayotte, Noera Mohamed, nous regarde et je pense que Chantal Galenon, présidente du Conseil des Femmes, nous regarde aussi depuis la Polynésie, si le décalage horaire le permet. Les outre-mer sont très intéressés par ce qui se passe dans le monde et y apportent leur concours.

Je suis pleinement d'accord avec le titre de notre colloque car les femmes s'engagent et maintiennent leur engagement, elles veulent que leur engagement ait du sens. Je pense même que ce colloque va permettre aux femmes de le renforcer !

Qu'est-ce que Femmes au-delà des Mers ? C'est une association qui regroupe des hommes et des femmes de tous horizons, pour créer des ponts entre les outre-mer, qui sont des mondes différents même s'ils partagent une langue et une histoire. Cette diversité des outre-mer, avec des cultures différentes, est une chance pour notre pays. L'important est d'identifier ces différences, échanger et apporter à l'autre. Femmes au-delà des Mers travaille à ce maillage, à ce réseau, car nous sommes convaincus que « les univers se complètent et s'enrichissent mutuellement », comme le dit si bien le poète haïtien René Depestre.

De quelle réalisation ai-je été le plus fière ? Je pense que c'est le fait d'avoir pu garder un cap cohérent dans Femmes au-delà des Mers . Plutôt que de nous concentrer sur les histoires et les revendications, notre action, dans un parti pris positif, cherche à valoriser les personnes qui apportent aux autres. Par exemple, nous avons réalisé une mosaïque de portraits de femmes, qui ne sont pas des femmes célèbres mais des femmes qui ont cru à ce qu'elles faisaient et qui ont montré le chemin à d'autres. Avec ces portraits, nous permettons une transmission de notre mémoire et nous montrons à tous, en particulier à la jeunesse, que l'on peut se donner les moyens d'avancer, d'où que l'on vienne. Nous avons donc choisi de mettre en valeur des personnes d'aujourd'hui, de sorte qu'elles puissent guider les autres.

Une autre de nos actions consiste à rassembler les éléments d'un foyer qui retracent le parcours d'une famille, d'une communauté. Ce programme est appelé le « Patrimoine unique et privé ». Notre idée est de répertorier, cataloguer et préserver des éléments de l'histoire à partir de la valorisation de trajectoires individuelles. Nous pensons qu'il est important de rassembler les témoignages physiques d'un parcours. La valorisation de ces fonds familiaux favorise ainsi l'appropriation de notre Histoire commune (notamment auprès d'un jeune public) à travers l'histoire familiale. Ainsi, un fonds documentaire issu d'un foyer et se rapportant à Aimé Césaire permet de retracer des éléments d'histoire de sa famille, mais aussi de la Martinique et de la littérature. Ces éléments d'un seul foyer, patrimoine des descendants de ce foyer privé, sont des éléments du patrimoine des membres d'une collectivité, de la société et appartiennent donc aussi au patrimoine commun.

Plus que jamais l'engagement des femmes est au coeur de notre action. Que ce soit dans notre galerie de portraits, dans notre fonds Patrimoine unique et privé ou bien encore lors de nos conférences, expositions, nous ressentons leur volonté de s'exprimer et surtout de transmettre pour donner un sens à leur vécu. Leur témoignage et leur expérience sont attendus et porteurs d'avenir de de fierté des outre-mer.

Le mot qui émerge actuellement, « matrimoine », nous décrit parfaitement car nous nous attelons à mettre en avant un « matrimoine » ultramarin. Une productrice nous a demandé de participer à une série de films sur les savoirs des femmes, dont l'intitulé serait justement Matrimoine . Cette initiative est très bien accueillie en dehors de l'hexagone, notamment en Polynésie, et permet de mettre en évidence les liens entre les régions. Le premier film de cette série portera sur le savoir des femmes des Marquises, le tapa 7 ( * ) .

Muguette Dini

Je vous remercie beaucoup.

Guylaine Brohan, vous représentez Familles rurales . L'action associative est-elle pour vous un engagement ?

En préparant ce colloque, vous avez dit quelque chose de très riche que je me permets de citer : « Ce qui me plaît dans la vie, c'est l'autre, c'est le lien social. Mes objectifs de vie et d'action sont toujours basés sur le contact : travailler avec l'autre et pour l'autre, sans calcul, sans projection intéressée. » Ces propos traduisent-ils selon vous l'intérêt de la vie associative par rapport à une certaine façon de concevoir la politique ?

Guylaine Brohan, présidente départementale de la Fédération Familles rurales - Vendée, maire adjointe de Saint-Georges-de-Montaigu

Je vous remercie tout d'abord de votre invitation que je conçois comme une marque importante de reconnaissance. C'est moi qui aujourd'hui suis à la tribune, mais je parlerai aussi au nom de tous les bénévoles de Familles rurales de France .

Pour ma part, j'ai rejoint l'association Familles rurales pour apprendre à connaître les habitants de ma commune, où je venais de m'installer et dans laquelle j'avais peu de relations. C'est ainsi que j'ai répondu favorablement à la proposition de la présidente de l'association, qui m'a proposé de rejoindre le groupe. Trois ans plus tard, j'étais présidente de l'association locale ; vingt ans après, je suis présidente de la fédération départementale.

Mon engagement s'est amplifié au bout de trois-quatre ans, lorsque nous avons identifié le besoin d'un accueil de loisirs dans notre commune, dont la municipalité ne voyait pas l'intérêt. Notre association est alors « montée au créneau » et nous sommes allés à la rencontre des élus pour leur dire combien la création de ce lieu d'accueil était importante pour les familles de notre commune rurale. Nous avons su convaincre et ce centre d'accueil de loisirs a été créé.

Quelques années plus tard, en 1995, le maire de notre commune m'a sollicitée, avant les élections municipales, pour intégrer le conseil municipal. Il s'est tourné vers moi car j'étais présidente d'association. C'est donc à ce titre que j'ai étendu mon engagement à un mandat municipal. Cette expérience m'a aussi amenée à m'affirmer, parfois en m'opposant au maire pour convaincre, par exemple, que la commune avait plus besoin d'une salle de danse que d'une salle de sport. Mon engagement a été quotidien, mêlant à la fois vie associative et vie politique au sein du conseil municipal.

Je définis la politique comme une mission qui vise à agir sur le développement et l'équilibre de la société. Je crois que les associations jouent aussi un rôle politique, mais pas au sens parfois péjoratif du terme, tel qu'on l'entend par exemple dans les médias. Souvent, la politique a mauvaise presse. Hier soir, j'ai rencontré des sénateurs, en amont de ce colloque, et maintenant j'ai l'impression d'un peu mieux comprendre la politique. Je les remercie d'ailleurs de m'avoir accueillie parmi eux.

Par exemple, de grands bouleversements sont attendus dans la ruralité avec des « mariages » de communes. Les élus des communautés de communes seront plus éloignés des habitants. Les associations Familles rurales ont donc créé des groupes de travail pour être présents auprès des grandes communautés de communes. Sur les territoires, les bénévoles seront toujours auprès des familles, même si la commune s'agrandit, car nos bénévoles seront toujours présents dans les quartiers. Demain, dans cette nouvelle configuration, les politiques auront encore plus besoin des associations. Comme le président Larcher le rappelait en introduction, nous savons pertinemment que les fonds publics vont se contracter. Nous avons compris que nous devions favoriser les mutualisations pour nous adapter à cette réalité. Ainsi, plutôt que de nommer une directrice d'accueil de loisirs dans chaque commune, nous nommerons peut-être une seule personne responsable pour plusieurs communes. Nous chercherons à optimiser nos moyens, mais nous prendrons les décisions ensemble. Pour réussir ce pari du changement et de la mobilisation des territoires, il est nécessaire qu'associations et pouvoirs publics travaillent main dans la main.

Enfin, pour terminer, je souhaite dire que la convivialité est essentielle. Les femmes qui se retrouvent dans une association locale ou dans une fédération apprécient le côté sympathique de nos rencontres et de nos travaux. C'est comme cela que nous arriverons à avancer, car le lien social est la base de tout.

Muguette Dini

Je crois qu'il n'y a pas une seule d'entre nous qui ne soit entrée en politique sans passer par les associations. Pour simplifier, voire schématiser, nous pourrions dire que les hommes ont plutôt tendance à se former dans les partis politiques, tandis que les femmes arrivent en politique après un engagement associatif.

Guylaine Brohan

Je souhaite ajouter que nous perdons beaucoup de bénévoles associatifs qui partent rejoindre les conseils municipaux. Mais en fait, nous ne les perdons pas complètement, car nous les avons formés et nous savons qu'ils seront de bons élus !

Muguette Dini

Damarys Maa Marchand, parlez-nous de votre projet « Ma cousine et moi ». Quel est le profil de vos bénévoles françaises ? Qu'est-ce qui, selon vous, les motive ? À votre avis, qui reçoit le plus : les femmes migrantes que vous accompagnez ou les françaises qui les aident ?

Vous avez participé à de nombreuses initiatives associatives. Cela semble naturel pour vous. Est-ce cela, pour vous, être citoyenne ? Avez-vous été tentée par la vie politique ?

Damarys Maa Marchand, présidente de la Fédération IFAFE (Initiatives des femmes africaines de France)

Avant de présenter le projet « Ma cousine et moi », je souhaite remercier la délégation aux droits des femmes et sa présidente, Chantal Jouanno. Je suis très honorée d'être à cette tribune pour représenter les femmes migrantes qui sont aujourd'hui des citoyennes françaises.

Le dispositif « Ma cousine et moi » est porté par la Fédération Initiatives des femmes africaines de France et d'Europe (IFAFE) , qui a été créée en 1993. En 1996, nous avons pris conscience que nous n'étions pas assez visibles. Le plafond de verre existe partout, même dans la vie associative ! Notre mouvement s'appelle Initiatives des femmes africaines de France et d'Europe , mais nous sommes ouverts aux femmes de toutes origines. Nous accueillons notamment le comité des femmes tamoules de France, de la Martinique, et même une association de femmes de l'île de la Réunion, qui ne sont pas migrantes puisque françaises, et bien d'autres communautés encore... L'objectif était de mutualiser nos efforts et nos connaissances.

Nous célébrons cette année notre vingtième anniversaire. Notre marraine est la comédienne Firmine Richard.

Comment aider les femmes ? Pour cela, il faut chercher des solutions, inventer chaque jour de nouvelles idées. Ce projet, qui était dans les tiroirs, a fini par voir le jour lorsque nous avons rencontré l'association Enda Europe (Environnement Développement Action) qui lutte particulièrement contre les discriminations et pour la mobilisation des populations migrantes en faveur du développement. Nous avons estimé qu'il serait utile pour nous de travailler en partenariat avec Enda Europe pour être plus fortes, ensemble. Cela fait plus de trente ans que l'on parle d'intégration sans voir le bout du tunnel ! Notre collaboration a permis d'unir nos forces.

Le projet « Ma cousine et moi » est un dispositif qui a pour objet de renforcer le vivre ensemble et la participation citoyenne des femmes. Il tend à favoriser l'épanouissement de chacune au niveau local, grâce à des actions de solidarité, mais aussi à encourager un enrichissement réciproque entre des citoyens aux parcours différents. Ce programme vise également à renforcer l'accès aux droits des femmes migrantes par la prise en compte globale de leur situation. Il permet enfin de lutter contre les préjugés mutuels.

Cette action citoyenne, soutenue par la région Ile-de-France, la ville de Paris et par la Fondation SNCF, consiste à créer des binômes constitués d'une femme migrante (cousine d'ailleurs) et d'une femme désireuse de participer à des échanges interculturels (cousine d'ici). Ces binômes choisissent librement les activités partagées, en fonction de leurs centres d'intérêts communs (cinéma, shopping, cuisine, histoire de chacun des pays, etc.). Les femmes qui participent aux binômes définissent librement le contenu de leurs échanges, mais nous leur demandons de signer une charte qui rappelle que ces échanges doivent intervenir dans un climat de respect mutuel. Il nous a paru en effet important d'instaurer un cadre de référence et de principes partagés entre les différents binômes. La femme non migrante désireuse de participer à cette action ne doit pas, par exemple, adopter un ton paternaliste et prétendre qu'elle peut tout apprendre à l'autre. Ces échanges doivent valoriser le partage. La charte rappelle également que les propos racistes ou xénophobes sont proscrits. Ce message peut sembler évident, mais il doit être rappelé pour éviter de heurter l'autre. Ces échanges doivent aussi se faire dans le respect de chaque partie, en convenant de rendez-vous en fonction des disponibilités des deux femmes, partant du principe que l'une ne doit pas se mettre à la disposition de l'autre. Le dispositif « Ma cousine et moi » ne vise pas à ce qu'une femme accompagne l'autre, mais repose sur les principes d'équité et d'enrichissement mutuel.

Quel est le profil des bénévoles ? Les associations de notre fédération qui accueillent au quotidien les femmes migrantes identifient des femmes migrantes qui viennent à nos permanences d'accueil, suivent nos cours de français ou de couture, par exemple, et qui souhaitent avancer, mais qui rencontrent souvent beaucoup de difficultés. Enda Europe , pour sa part, par l'association Groupement des éducateurs sans frontières (GREF) , identifie également des « cousines ». Dès 2013, la Fédération IFAFE a pu mobiliser trois de ses associations sur le terrain, à Bagneux, Pierrefitte et Arcueil, pour organiser des expériences similaires. Les échanges permettent véritablement un enrichissement réciproque entre citoyennes aux parcours différents.

Avec mes collègues d' Enda Europe , nous avons réfléchi à cette question : qui reçoit le plus dans ces échanges ? Il s'avère cependant qu'il est impossible d'y répondre car donner est aussi recevoir, la vie est un perpétuel apprentissage. Ce dispositif permet d'abord de signer un contrat avec soi-même et ses convictions. Nous pensons aussi que ce projet peut apporter quelque chose d'inattendu par le regard de l'autre.

Enfin, d'où vient mon énergie ? Que dire, sinon que j'ai trouvé en France un dispositif formidable, qui est la loi de 1901 sur les associations. Beaucoup d'entre nous viennent de pays où s'associer et se réunir n'est pas si simple. Cette loi est extraordinaire et j'aurais aimé pouvoir en remercier chaleureusement Monsieur Waldeck-Rousseau en personne ! Force est de reconnaître que les associations apportent beaucoup à la société. Mon énergie vient aussi du fait que j'ai commencé très jeune à militer. En arrivant sur le territoire français, j'ai commencé par le syndicalisme. Ma mère était également militante.

Pour terminer, ai-je été tentée par un engagement politique ? Non, pas en tant que tel, bien que des opportunités se soient présentées à maintes reprises. En 1988, j'ai été recrutée en tant que chargée de la revue de presse auprès de la mission du Bicentenaire de la Révolution française par le président Edgar Faure, puis Jean-Noël Jeanneney. À cette occasion, j'ai pu approcher le monde du pouvoir et côtoyer toutes les tendances politiques. Les déconvenues rencontrées et la persistance du plafond de verre m'ont montré l'envers du décor et ont fait s'envoler mes espérances... J'ai plus tard été approchée pour participer à un mouvement politique mais, quoique sympathisante, j'ai décliné toute offre pour garder ma liberté d'action. Cela m'a coûté quelques sacrifices. J'ai dû renoncer ainsi au prestige de cette mission qui aurait pu faciliter mon quotidien et me donner de l'importance auprès de mon entourage. Consciente que l'engagement dans le monde associatif est souvent le tremplin d'une carrière politique, je sentais néanmoins que cela n'était pas ma voie et que cette ambition entrait en conflit avec mon coeur.

Muguette Dini

Je vous remercie.

Florence Montreynaud, vous avez un parcours militant féministe, que vous retracez dans votre livre Chaque matin je me lève pour changer le monde. Du MLF aux Chiennes de garde , publié en 2014, et que vous présentez comme vos « Mémoires féministes ». Auriez-vous pu vous engager dans l'action associative pour d'autres causes que pour la défense des droits des femmes ?

Florence Montreynaud, historienne, cofondatrice des Chiennes de garde , de Encore féministes ! et de Zéromacho ; auteure de Chaque matin, je me lève pour changer le monde. Du MLF aux Chiennes de garde. Mémoires féministes

Je tiens tout d'abord à vous remercier pour votre invitation. J'ai toujours plaisir à rencontrer certaines sénatrices pour parler de sujets féministes. J'ai enfin lâché le mot « féminisme » que nous entendons pour la première fois au cours de cette matinée...

Le féminisme est capital dans ma vie. Je ne comprends même pas comment on peut ne pas être féministe, dans la mesure où je définis ce terme comme la recherche d'égalité et de dignité pour tous les êtres humains. Certains définissent peut-être ce terme autrement, et alors il y a malentendu. Mais le féminisme est pour moi la recherche de droits égaux, l'application de ces droits et le respect de la dignité.

J'ai en effet été tentée par toutes sortes d'engagements, mais j'ai préféré me consacrer à un seul engagement et m'y adonner complètement. Bien entendu, d'autres causes me concernent. L'environnement en fait partie. J'ai aussi été membre d'une union de consommateurs, car je crois que nous avons le pouvoir de notre argent face aux producteurs et que, si nous nous unissons, nous pouvons imposer des choses. Je me suis aussi mobilisée pour l'interdiction de fumer en public, ce danger pour la santé en général. Je trouve scandaleux que l'État, sans que cela dérange nos dirigeant-es, perçoive un impôt sur le tabac qui provoque tant de morts.

Tous les matins, j'aimerais m'engager dans une nouvelle cause mais la sagesse me recommande de me concentrer sur une seule, qui est le féminisme, et que je considère comme la mère de tous les engagements. Selon moi et comme le dit Virginie Despentes, le programme féministe est « révolutionnaire » puisqu'il s'agit « de tout foutre en l'air », c'est-à-dire de changer le fondement machiste de notre société pour construire un autre monde sur la base de l'égalité femmes-hommes. L'égalité fait partie de la devise de la République française depuis des siècles, pourtant ce que nous en faisons est dérisoire ! Les autres combats m'intéressent aussi : j'ai participé à d'innombrables manifestations et rassemblements, j'ai aussi signé beaucoup de pétitions mais, avec le temps, je me suis concentrée sur cette action-là car, pour être efficace, il faut être identifié à une seule cause. Maintenant, on me reconnaît comme féministe.

Je suis aussi historienne, grâce à Michelle Perrot qui m'a donné ce titre, ce qui a été pour moi comme un adoubement. Je suis donc en même temps témoin et actrice. C'est ce que j'aime dans mon engagement.

Muguette Dini

Vous avez été pionnière en politique, puisque vous avez été la première conseillère municipale en 1977 de votre commune de l'Oise. En 1978, vous avez été candidate aux élections législatives dans ce département. Depuis 1978, avez-vous participé à d'autres élections ?

Quel jugement portez-vous sur la vie politique par rapport à la vie associative ? Estimez-vous que l'engagement associatif vous a apporté plus de satisfactions, si du moins vous pensez que l'on peut comparer les deux en ces termes ?

Enfin, pensez-vous que l'engagement associatif permette plus d'efficacité que l'engagement politique ?

Florence Montreynaud

Je me suis engagée en politique en étant élue dans une petite commune rurale. J'ai été dans l'opposition pendant six ans, et j'ai trouvé stérile de voter contre le budget tous les ans... En 1978, j'ai été la première femme candidate aux élections législatives dans l'Oise. Pouvez-vous imaginer que jamais une femme ne s'était encore présentée dans ce département ? Cependant, la campagne électorale a été d'une telle violence que cela m'a dégoûtée de la politique. Sur les affiches de ma campagne, on voyait mon grand sourire, et il était mentionné que j'étais traductrice et mère de trois enfants. Certains ont jugé bon d'y écrire en grosses lettres : « PUTE ». Je n'ai pas résisté à ces violences, aux coups de téléphone anonymes, aux injures, aux attaques contre mon mari.

Au premier tour, j'étais extrêmement déçue de ne pas être élue, car je pensais que les femmes entendraient mon message et que les hommes seraient sensibles à mon appel à l'égalité femmes-hommes. Avec un tel discours, je pensais évidemment être élue au premier tour...

Comme je le disais, la violence des attaques que j'ai vécues à cette époque m'a dégoûtée à tout jamais de la politique. Que peut-on répondre à ceux qui vous insultent et vous traitent de « pute » ? « Fils de pute » ou « salopard », ça n'est pas pareil. Ces insultes ont été blessantes et humiliantes. Il n'y a pas d'équivalent pour les hommes. On les traite de « salaud » et éventuellement d'« enculé », mais c'est une insulte à la fois homophobe et sexiste (« enculeur » n'est pas une insulte). Quand j'ai vu par la suite toutes ces femmes politiques être régulièrement insultées, j'ai pris l'habitude de leur écrire des messages de solidarité.

Dans tous les partis, les insultes publiques visant les femmes sont fréquentes. Dans aucun autre pays au monde, on ne voit des femmes politiques être autant insultées qu'en France. Des députées m'ont raconté ce qu'elles entendent dans l'hémicycle lorsqu'elles montent à la tribune. Dans d'autres pays, comme en Espagne et en Italie, il existe une solidarité entre femmes qui limite ces attaques. De plus, les hommes qui se comporteraient de cette manière indigne ne pourraient conserver leur poste.

Les « insulteurs de femmes » ne devraient pas avoir leur place en politique.

La réponse que j'ai trouvée à ces agissements a été de fonder un mouvement préventif. Ayant élevé des enfants, je sais qu'il faut allier prévention et punition, en leur disant : « Si tu fais ça, tu auras telle punition. » J'ai donc lancé le mouvement Chiennes de garde en optant pour ce nom, traduit de l'anglais watchdogs , qui évoque un mouvement en alerte, vigilant. Cependant, les gens entendent tout autre chose dans le mot « chiennes », comme c'est bizarre !

Je sais que l'allusion au sexe fait rire, mais je ne ris pas quand on insulte Nicole Notat ou Roselyne Bachelot ou encore Dominique Voynet. La coupe a débordé le 6 mars 1999 lorsque j'ai vu à quel point cette dernière avait été malmenée au Salon de l'agriculture.

À ma stupéfaction, Chiennes de garde a démarré très rapidement. Les médias se sont emparés de notre lancement, pensant faire scandale. Pendant quelques années, les hommes politiques se sont mieux tenus. Et puis, tout cela a recommencé. C'est effrayant !

Le mouvement Chiennes de garde est aujourd'hui présidé par Marie-Noëlle Bas. Tous les ans, il attribue un prix au Macho de l'année. Malheureusement, le choix reste encore large... La plupart de ces machos appartiennent au monde politique. Certains responsables osent écrire des tweets insultants, comme celui qui a osé écrire à propos de Barbara Pompili « Une place de ministre pour une pipe ». Comment est-il possible que cet homme ne soit pas sanctionné, en application de la loi de 2004 sur les insultes sexistes ? À chaque fois que nous réagissons, il se trouve des hommes pour affirmer que nous, les féministes, manquons d'humour. Il faut réagir, car cette violence continuera si nous nous taisons.

Malgré tout, je me suis présentée aux élections européennes, il y a deux ans, sur une liste féministe. Je ne regrette pas cette expérience, même si, à ma grande déception, nous n'avons pas été élues.

Muguette Dini

Je crois que les élues qui sont parmi nous adhèrent totalement à vos propos, car elles ont vécu ce que vous avez décrit.

Nous en avons fini avec la première séquence. Je vous remercie de votre participation.

PAUSE

[Diffusion de quatre vidéos :

- « 4 minutes pour comprendre ATD Quart monde » ;

- OSE : « Pour des berges et milieux naturels propres » ;

- Delphine Roullet, présidente de l'Association Française pour la Sauvegarde du Grand Hapalémur(AFSGH) ou HELPSIMUS, gestionnaire du programme européen d'élevage du grand Hapalémur ;

- Fédération IFAFE : « Ma cousine et moi ».]


* 7 Il s'agit d'étoffes fabriquées à partir d'écorces battues (écorces de mûrier, de jeunes arbres à pain ou du banian), les couleurs des étoffes étant différentes en fonction des essences.

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