B. UNE « RÈGLE DU TIERS » DE LA CONSOLIDATION BUDGÉTAIRE

L'enjeu consiste donc à concilier tout à la fois la réduction de la dette publique, la hausse des dépenses d'investissement des administrations et la diminution des prélèvements obligatoires. Avant de présenter les moyens d'y parvenir, il convient de noter que ces différents objectifs ne sont pas aussi contradictoires qu'il n'y paraît. En particulier, comme cela a déjà été souligné, le poids de la dette dans le PIB reculera d'autant plus vite que la croissance de l'activité sera dynamique ; de même, la baisse de la charge fiscale ne produira de réels effets sur le comportement des entreprises et des ménages que si elle est jugée crédible et durable par ces derniers , ce qui suppose qu'elle soit concomitante à une amélioration de la situation des finances publiques, visible à travers le fléchissement de la dette.

Aussi notre stratégie budgétaire pourrait-elle s'appuyer sur une « règle du tiers » qui consisterait à consacrer un tiers de l'effort de maîtrise de la dette à la hausse des investissements publics et à la baisse des prélèvements obligatoires . De cette manière, les efforts consentis en faveur de la diminution du niveau de l'endettement public, et ce en application des engagements européens de la France, s'accompagneraient nécessairement de mesures de nature à accroître la croissance potentielle.

Par ailleurs, la « règle du tiers » de la consolidation budgétaire imposerait un contrôle accru des dépenses , afin, d'une part, de financer la baisse de la dette publique et des prélèvements obligatoires et, d'autre part, de dégager les marges de manoeuvre nécessaires à la réallocation de moyens budgétaires en direction de l'investissement. Ainsi, la « règle du tiers » vient tout à la fois « accompagner » la trajectoire de désendettement et renforcer les exigences de maîtrise des dépenses et de qualité de ces dernières .

Afin d'appréhender les effets potentiels de la « règle du tiers » , il convient d'examiner quelle serait l'évolution des dépenses publiques, de l'investissement des administrations et des prélèvements obligatoires si elle venait à être appliquée dans les prochaines années - dans l'hypothèse où le poids de la dette publique dans le PIB reculerait conformément aux prescriptions du Pacte de stabilité et de croissance (PSC). À titre de rappel, ce dernier implique une réduction minimale de l'écart entre le ratio d'endettement et le seuil de 60 % du PIB d'un vingtième chaque année en moyenne sur trois ans ; toutefois, après avoir corrigé son déficit excessif - ce qui devrait être le cas de la France, en principe, en 2017 -, un État dispose de trois années pour respecter la règle de dette et est donc tenu, au cours de cette période transitoire, d'accomplir des progrès suffisants en vue de s'y conformer.

Graphique n° 67 : Évolution de la dette publique, des dépenses et des prélèvements obligatoires en application de la « règle du tiers »

(en % du PIB)

Source : commission des finances du Sénat

Par conséquent, dans le cadre de la présente projection, deux périodes sont distinguées : celle allant de 2017 à 2019 , au cours de laquelle un ajustement structurel de 0,5 point de PIB est réalisé chaque année, puis celle comprise entre 2020 et 2022 durant laquelle l'écart entre le ratio de dette et le seuil de 60 % est réduit de 1/20 e chaque année. Il est supposé que les objectifs budgétaires arrêtés dans le cadre du dernier programme de stabilité pour l'année 2017 sont respectés et que la croissance du PIB de même que l'inflation accélèrent progressivement au cours de la période considérée pour atteindre chacune + 1,75 % en 2022. En application de cette trajectoire, qui résulte des obligations découlant du Pacte de stabilité et de croissance - mais qui n'empêche en rien qu'un effort de désendettement plus important puisse être entrepris -, la part de la dette publique dans le PIB reculerait de 96,3 % en 2017 à 89,9 % en 2022 .

À titre d'illustration, entre 2019 et 2020, le ratio d'endettement baisserait, dans le cadre de la projection, de 1,8 point de PIB. Par suite, en application de la « règle du tiers » de la consolidation budgétaire, un tiers de cette évolution, soit 0,6 point de PIB, serait consacré à l'augmentation des investissements publics et à la diminution des prélèvements obligatoires
- chacun de 0,3 point de PIB.

Ainsi, parallèlement à la réduction du poids de la dette publique dans la richesse nationale, de 6,4 points de PIB entre 2017 et 2022, la « règle du tiers » impliquerait, tout d'abord, une augmentation de la part des investissements dans le PIB de 3,4 % du PIB à 3,9 % (+ 0,5 point) , ce qui correspond, au cours de la période considérée, à un effort en investissement supérieur, en 2022, de près de 26 milliards d'euros au niveau de 2017 - en partant du principe que la part des dépenses réorientée vers les investissements publics le demeure par la suite. Ensuite, le taux de prélèvements obligatoires reculerait d'un point de PIB , passant de 44,3 % du PIB en 2017 à 43,3 % du PIB en 2022 ; les baisses d'impôts sous-tendant cette évolution approcheraient également 26 milliards d'euros .

Graphique n° 68 : Évolution des investissements et des prélèvements obligatoires en application de la « règle du tiers »

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances du Sénat

Afin de mener à bien la baisse du ratio d'endettement, la hausse des dépenses d'investissement et la réduction des prélèvements obligatoires, il serait nécessaire de réaliser des économies au sein des dépenses publiques hors investissement d'un montant d'un peu moins de 80 milliards d'euros . Si l'on considère l'ensemble des dépenses publiques - intégrant donc l'augmentation des dépenses d'investissement -, l'économie réalisée serait de l'ordre de 45 milliards d'euros 215 ( * ) ; cela permettrait un recul du ratio des dépenses publiques de 2,3 points de PIB entre 2017 et 2022 , celui-ci étant ramené de 55,7 % du PIB à 53,4 % au cours de la période.


* 215 Le montant des économies à réaliser est évalué à partir du taux de progression tendancielle des dépenses publiques, estimé à 1,8 % en volume par le Gouvernement (v. rapport économique, social et financier (RESF) annexé au projet de loi de finances pour 2016, p. 143).

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