C. COMPTE RENDU DE LA RÉUNION DU 28 JUIN 2017, SUITE AU DÉPLACEMENT DANS LE FINISTÈRE ET LES COTES-D'ARMOR LES 26 ET 27 AVRIL 2017

Mme Élisabeth Lamure , présidente de la Délégation aux entreprises . - Nous allons aujourd'hui entendre le compte-rendu que vont nous faire nos collègues MM. Michel Canevet et Michel Vaspart du déplacement que nous avons effectué les 26 et 27 avril dernier en Bretagne.

M. Michel Canevet . - Merci, Madame la Présidente, d'avoir permis ce déplacement dans le Finistère et les Côtes-d'Armor... avec un petit passage en Ille-et-Vilaine. Outre mon collègue Michel Vaspart et moi-même, y ont également participé nos collègues Gilbert Bouchet, Guy-Dominique Kennel, Patricia Morhet-Richaud et Claude Nougein.

Notre journée dans le Finistère a débuté par la visite de Savéol, coopérative agricole créée en 1981, qui regroupe 125 producteurs. Elle emploie directement une centaine de salariés permanents et plus de 400 salariés saisonniers. Son chiffre d'affaires est d'environ 200 millions d'euros, en augmentation de 10 % par rapport à 2014.

La coopérative est leader national dans la production de tomates mais ses producteurs cultivent une gamme de 30 variétés de fruits et légumes de haute qualité. La production s'élève notamment à environ 80 000 tonnes de tomates et 2 000 tonnes de fraises en 2015 (et s'étend marginalement aux concombres). Elle est vendue essentiellement mais en France mais l'export représente 14 % de la production totale (vers l'Allemagne, l'Italie, l'Espagne, la Grande-Bretagne et même Dubaï...). Le Maroc est son premier concurrent sur les tomates.

Savéol dispose de deux stations de conditionnement à proximité des producteurs, l'une à Guipavas et l'autre à Plougastel-Daoulas où se situe son siège social. À Guipavas, où nous avons été accueillis, elle dispose aussi d'un élevage d'insectes, sur un site unique en Europe construit en 2013.

Savéol est en effet impliquée dans la préservation de l'environnement : elle a été pionnière dans la protection biologique intégrée en créant, dès 1983, un élevage d'insectes pour protéger naturellement ses cultures, une initiative encore inédite en France dans un groupement de producteurs. Ainsi, pour protéger les plants de tomates des aleurodes (mouches blanches), elle élève des punaises Macrophulus, qui se nourrissent d'aleurodes, ainsi que des micro-guêpes - sur des plants de tabac, qui appartiennent à la même famille que les plants de tomates - qui s'attaquent aux larves d'aleurode : ces micro-guêpes sont libérées dans la serre de tomates une fois par semaine en prévention. Saveol en produit 100 millions par an. Saveol évite ainsi l'utilisation de produits chimiques et produit des tomates de qualité, dans le respect de l'environnement et de la santé.

En 1989, elle s'est lancée dans la pollinisation naturelle des cultures en serres : elle élève des bourdons qui, en butinant, transportent le pollen des étamines vers le pistil. 15 000 ruches de bourdons sont ainsi produites chaque année pour assurer la fécondation de 260 hectares de serres.

Elle a obtenu en 2005 la certification GlobalGAP, programme mondial de certification basé sur le respect des bonnes pratiques agricoles. En outre, elle s'est engagée en 2007 sur la voie du développement durable en ayant notamment recours aux éco-emballages et aux énergies renouvelables pour réduire l'empreinte carbone de ses productions.

Même si une quinzaine de jeunes agriculteurs se sont installés en quatre ou cinq ans, le dirigeant de Savéol reste vigilant tant le métier est décrié et l'agriculture présentée comme pollueuse : il appelle à en finir avec le discours ambiant qui critique le mode de production des agriculteurs. Il dénonce aussi la pression de la distribution sur la production. Il invite à travailler tous ensemble, y compris avec les petits producteurs, pour produire le volume requis, avec la bonne qualité et au juste prix. Il s'inquiète enfin pour la transmission des exploitations, devenue très compliquée tant les outils sont devenus capitalistiques.

Nous avons ensuite été accueillis à la station biologique de Roscoff, fondée en 1872. Ce centre de recherche et d'enseignement en biologie et écologie marines dépend de l'Université Pierre et Marie Curie (UPMC) et du CNRS. Les recherches menées par la station visent à relever les grands défis de la biologie et de l'écologie modernes.

Ces recherches couvrent quatre grandes thématiques :

- l'étude des organismes marins et des écosystèmes ;

- la compréhension des processus d'adaptation et d'évolution en milieu marin ;

- le développement de nouveaux modèles biologiques marins ;

- la recherche de molécules actives.

300 personnes y travaillent, dont plus de 200 chercheurs. Les recherches font appel à la biologie moléculaire et cellulaire, en particulier les dernières avancées techniques en génomique, mais aussi à la chimie, aux mathématiques et aux sciences de l'environnement. Elles s'appuient sur des observations de la biodiversité et de l'environnement côtier dans un contexte de changement global et d'impacts croissants des activités humaines sur le littoral.

En ce qui concerne l'enseignement, la station biologique de Roscoff est l'un des trois sites de formation délocalisés de l'UPMC et accueille à ce titre de nombreux étudiants chaque année, y compris étrangers. La station biologique de Roscoff est d'ailleurs engagée dans de nombreux partenariats scientifiques nationaux et internationaux et assure aussi de la formation continue.

À l'échelle interrégionale, elle est membre du groupement Biogenouest qui coordonne plus de 20 plateformes de génomique dans les domaines de la mer en Bretagne et Pays-de-la-Loire. Elle est membre fondateur du pôle de compétitivité Pôle mer Bretagne Atlantique qui oeuvre au développement de partenariats entre laboratoires de recherche publics et entreprises dans le domaine maritime.

Au niveau européen et international, la station est leader européen de la communauté scientifique en biologie marine : avec l'unité de Sète, elle co-anime le consortium européen des sciences marines, Euromarine, qui coordonne la recherche fondamentale européenne en sciences marines ; avec les deux autres stations de Banyuls et Villefranche-sur-mer, elle participe à la composante française du Centre européen de ressources biologiques marines - EMBRC - , infrastructure intergouvernementale qui propose aux scientifiques comme aux entreprises divers services comme l'accès aux ressources, aux données et à l'expertise marines, et renforce la coopération transmanche et ses partenariats privilégiés avec l'Amérique latine (Chili et Brésil notamment en matière d'algues).

Depuis les années 2000, le transfert de connaissances vers les entreprises est aussi l'un des axes de travail entre la Station biologique de Roscoff et le Pôle de compétitivité Mer Bretagne Atlantique. Le déploiement d'un parc scientifique « Blue Valley », situé au Laber à Roscoff (sur 2,3 hectares), a ainsi été lancé en mai 2015. Ce projet à effet cluster associe recherche, formation, innovation et vie étudiante autour des biotechnologies marines. Son ambition est de faire de la Bretagne la place mondiale de l'étude des océans et de leur valorisation, pour conquérir des marchés à fort potentiel. Les secteurs d'application sont très vastes, depuis la mise au point de composés bioactifs en nutrition et santé jusqu'à l'amélioration génétique des espèces cultivées, en passant par la bio remédiation, la chimie bleue et les études d'impacts environnementaux. L'objectif est de marier le rayonnement international de la station avec le développement territorial, afin que le dynamisme du site du Laber diffuse sur tout le territoire breton: Blue Valley va concentrer la R&D mais la production devrait déborder sur la Bretagne, pour en faire la première région française en biotechnologie marines.

Nous avons pu rencontrer plusieurs entreprises qui participent à ce projet en cours de déploiement :

- Agrival, spécialiste de la fabrication d'ingrédients naturels d'origine végétale ; cette société est dirigée par le président de la SICA de Saint-Pol-de-Léon, qui est le premier groupement de producteurs de légumes français ;

- la société ostréicole René Brest & Fils, qui est dirigée par l'ancien président du comité national de la conchyliculture et travaille à la réintroduction de l'huître plate ;

- Olmix, spécialiste des solutions naturelles à base d'algues pour l'agriculture et l'élevage : le groupe a son équipe R&D à Blue valley mais développe ses sites de production dans le Morbihan et en Vendée.

Ce projet offre une illustration édifiante de la façon dont la recherche fondamentale peut nouer des relations avec les entreprises et produire un effet d'entraînement territorial.

À Roscoff toujours, nous nous sommes ensuite rendus chez Brittany Ferries (BF). Les présidents du Conseil de surveillance et du Directoire nous ont présenté cette compagnie maritime française - qui transporte passagers et véhicules entre la Bretagne, la Normandie, le sud de l'Angleterre, l'Irlande et l'Espagne -, créée en 1973 pour participer au désenclavement de la Bretagne. Ils en ont rappelé la genèse : dans les années 1960, le développement du territoire Breton est au coeur de la réflexion du comité d'Études et de Liaison des Intérêts Bretons (CELIB). Diverses actions sont menées en ce sens : développement des activités agricoles et maritimes, pôle universitaire en Bretagne occidentale, extension des réseaux (routiers et TIC), développement des activités industrielles dans le port de Brest et construction d'un port en eau profonde à Roscoff.

Le projet aboutit à la création de la BAI (Bretagne-Angleterre-Irlande) destinée au transport transmanche des productions agricoles bretonnes, sous l'impulsion de coopératives agricoles, actionnaires majoritaires de BF : la SICA de St Paul a acheté le premier bateau.

La compagnie a appareillé pour la première fois le 2 janvier 1973, le lendemain de l'entrée du RU dans l'UE, pour la traversée Roscoff/Plymouth. Brittany Ferries a, au fil des ans, développé son offre de liaisons maritimes : dès 1978, des lignes relient la Bretagne, l'Angleterre (Plymouth, Portsmouth) et l'Irlande. Elle opère aujourd'hui 12 lignes et 11 navires.

La compagnie est à présent un transporteur maritime de premier plan mais aussi un tour-opérateur européen proposant à ses clients des destinations en Grande-Bretagne, Irlande, Espagne, Portugal et France. L'Autoroute de la mer Espagne - Royaume-Uni rencontre un franc succès : entre 2008 et 2014, le service de navettes de BF a capté près de 15 % de la totalité des poids lourds et des remorques routières qui transitent entre le Royaume-Uni et la péninsule ibérique.

Brittany Ferries emploie 2 770 emplois en moyenne, son chiffre d'affaires 2016 était de 455 millions d'euros, avec 63 % provenant des 2,5 millions de passagers annuels, 15 % des ventes à bord et 21 % du fret. Les retombées économiques sont nombreuses, que ce soit en matière d'activités touristiques de la clientèle et de nuitées sur le continent, d'achats de l'entreprise, de retombées fiscales et d'emplois. Les activités de BF génèrent ainsi 4 500 emplois indirects - achats, approvisionnements et opérations de maintenance -, profitant à 81 % aux régions Bretagne, Normandie, Pays de Loire et Ile-de-France. Brittany ferries détient 13 % de part de marché sur le marché des touristes ramenés en France, mais représente beaucoup plus en termes de montant rapporté par chaque passager car les trajets sont plus longs.

Les dirigeants de Brittany ferries ont présenté les défis que doit affronter l'entreprise : le renouvellement de la flotte transmanche (ce qui requiert une rentabilité structurelle stabilisée), l'adaptation numérique, l'intégration de la problématique sûreté et le développement sur l'arc atlantique, ceci dans un contexte de dépendance à l'égard de l'attractivité des destinations touristiques (pour l'activité passagers) et du dynamisme des hinterlands des ports de la façade atlantique (pour l'activité fret). C'est pourquoi Brittany ferries aurait besoin :

- pour les projets innovants, de petits cliquets de financement attestant le soutien de l'État, ce qui est très important pour les investisseurs ;

- de moyens pour les projets d'infrastructure maritime. Selon les dirigeants de BF, la Caisse des dépôts, qui aurait le volume nécessaire, se positionne plutôt en actionnaire qu'en investisseur, ce qui est moins intéressant pour BF qui a un petit capital de 22 millions d'euros.

BF a dégagé des résultats positifs de 2000 à 2008 (avec un record en 2007), mais, en raison de la chute de la livre sterling qui fait 80 % du chiffre d'affaires, ses résultats sont devenus négatifs. En 2012, les résultats ont nécessité un plan de retour à la compétitivité avec une hausse du temps de travail supérieure à la hausse des salaires, mais sans aucun licenciement. La sortie de la tourmente s'est faite après dix jours d'arrêt total de l'activité de l'entreprise.

Malgré son redressement, BF souffre d'une visibilité floutée par le Brexit car, avec 85 % de passagers britanniques, un siège social et des marins français, BF a une double dépendance, économique et financière : son avenir dépend de la dynamique de l'économie et de la bonne tenue de la devise britannique. Enfin, les dirigeants de BF ont souligné le risque d'augmentation du décalage de compétitivité entre le pavillon britannique et le pavillon français.

M. Michel Vaspart . - Madame la Présidente, à mon tour, je souhaiterais vous remercier d'avoir organisé ce déplacement en Bretagne sur deux jours. Avec Michel Canevet - qui s'est davantage orienté vers l'agriculture - nous nous sommes efforcés de prévoir des visites complémentaires.

Ainsi, dès le premier soir, nous nous sommes rendus dans une station touristique de la baie de Saint Brieuc, à Pléneuf-Val-André. Nous avons débuté par un débat avec des professionnels du tourisme, respectivement directeurs d'un spa, d'un golf et d'un centre nautique, ainsi qu'avec le maire de Pléneuf-Val-André et le conseiller départemental en charge du secteur. Une fois de plus les excès de réglementation ont été critiqués ; ils pèsent lourdement sur le golf, qui doit affronter une compétition internationale très forte. Les remarques ont également porté sur la mise en place de la réforme des rythmes scolaires - le temps d'activité périscolaire (TAP) ayant manifestement pesé sur la fréquentation, par les jeunes, du Centre nautique de Pléneuf-Val-André. C'est la première fois qu'une telle remarque était exprimée, ce qui est intéressant à avoir à l'esprit. Le directeur du Spa Marin a quant à lui vivement critiqué Pôle Emploi, précisant que le moyen le plus sûr pour recruter est aujourd'hui le site Internet du « Bon Coin » ! Je vous livre là les observations des professionnels rencontrés.

La journée du jeudi 27 avril a débuté très tôt sous le signe de la mer. Nous avons effectivement visité la criée d'Erquy qui, avec celle de Saint-Quay Portrieux, se situe au quatrième rang français des ports de pêche et vend 20 000 tonnes de produits de la mer par an pour un chiffre d'affaires de 60 millions d'euros. Cet ensemble est géré par la chambre de commerce et d'industrie (CCI). J'ajoute que la spécificité d'Erquy est la gestion de la ressource des coquilles Saint Jacques, mise en place depuis longtemps avec les services de l'État, le conseil général des Côtes d'Armor et les pêcheurs. Ce système, qui repose sur des contrôles draconiens, rend possible un maintien des prix permettant aux pêcheurs de vivre convenablement.

Sur ces deux ports, qui réunissent 22 bateaux hauturiers, on constate une très grande inquiétude liée au Brexit. Actuellement, ces bateaux hauturiers vont pêcher près des côtes anglaises, plus précisément à l'ouest des Cornouailles et jusqu'au sud de l'Irlande. Le Brexit constitue donc un vrai défi car, si les négociations ne permettent plus à la flottille bretonne de pêcher dans les eaux britanniques, alors les hauturiers risquent de se rabattre sur les eaux françaises et gêner ainsi les pêcheurs côtiers qui seront confrontés à une raréfaction du poisson et à un déclin de l'activité. Nous devrons suivre avec vigilance la mission confiée à Michel Barnier, négociateur en chef pour la préparation et la conduite des négociations avec le Royaume-Uni.

Après avoir visité une unité de découpe de poissons, nous avons enchaîné avec la visite du Pôle Cristal, un centre d'essais et d'innovation en réfrigération et génie climatique. Créé il y a une vingtaine d'années à l'initiative de la Communauté de communes de Dinan et du Lycée La Fontaine des Eaux, le Pôle Cristal est labellisé par le Ministère de la recherche. Dès le départ, l'idée était de mettre un centre de ressources à destination des entreprises, adossé à des formations en BTS (brevets de techniciens supérieurs). Fort de huit salariés, le Pôle est subventionné par trois collectivités : l'intercommunalité, le département et la région. Il développe également des ressources propres en réalisant des missions de recherche et développement pour des entreprises privées.

Nous avons, sur place, pu également organiser une table ronde, comme notre présidente le souhaite à chaque déplacement. Nous avons ainsi pu écouter les entrepreneurs du club des entreprises du pays de la Rance (CEPR) qui réunit 150 entreprises de toutes tailles, représentant tous les secteurs. Leurs témoignages ont convergé avec ceux que nous avions déjà recueillis, au sujet de la complexité administrative. La simplification est ainsi une demande récurrente, ainsi que la baisse des charges qui affectent la compétitivité des entreprises. Ce sont des sujets que nous connaissons bien et pour lesquels il nous faudra essayer d'apporter des solutions.

Enfin pour clore notre déplacement, nous avons visité l'entreprise qui produit les gavottes, c'est-à-dire les célèbres petites crêpes dentelles. Nous avons été reçus par Christian Tacquard, le président du groupe Loc Maria. Arrivé il y a environ 25 ans à Dinan, il a fait le pari de racheter l'usine des gavottes, qui n'était alors pas à vendre. Il a accompli avec succès une série d'opérations de croissance externe permettant l'union de 7 biscuiteries en 20 ans. Aujourd'hui son groupe produit en France 8 500 tonnes de biscuits par an, dont 5 000 tonnes de gavottes, soit un chiffre d'affaires de 64,3 millions d'euros avec 370 salariés. Un quart de cette production est destiné à l'exportation et la moitié des gavottes est destinée aux États-Unis. Enfin le groupe consacre 15 % de son chiffre d'affaires à l'innovation. Nous avons été remarquablement bien reçus et avons ainsi pu découvrir un outil de production neuf et extrêmement performant. Nous avons pu admirer la gestion de cette entreprise dont les effectifs augmentent à mesure que les robots sont modernisés et qui fait l'objet d'une transmission de direction progressive du président à son fils.

Mme Élisabeth Lamure , présidente . - Je vous remercie pour ce compte rendu. Je dois dire que la dernière entreprise visitée, qui nous a frappés, n'est pas sans nous rappeler l'entreprise Valrhona, découverte grâce à notre collègue Gilbert Bouchet. Elles partagent le même état d'esprit, accordant une place importante aux relations humaines.

M. Gilbert Bouchet . - Je souhaiterais remercier nos deux collègues qui nous ont permis d'effectuer un déplacement particulièrement intéressant. J'ai découvert les problèmes auxquels sont confrontés les pêcheurs, y compris en termes d'emplois, ainsi que le défi posé par le Brexit . Je suis d'accord avec notre présidente sur la comparaison entre Loc Maria et Valrhona, les brisures de gavottes s'associant d'ailleurs au chocolat.

Mme Annick Billon . - Bien que connaissant la Bretagne, je regrette de n'avoir pu participer à cette visite de terrain. Il me semble que le déplacement organisé sur deux jours permet de gagner en efficacité grâce à une meilleure immersion. J'ai quelques questions complémentaires. Les premières concernent l'entreprise Savéol : le modèle choisi pour éviter l'usage de produits nocifs est-il reproduit ailleurs ? L'entreprise communique-t-elle sur cette technique? Je m'interroge ensuite sur le Pôle Cristal : son financement repose-t-il toujours sur des fonds publics ? N'est-ce pas un risque pour sa pérennité dans le temps ? Enfin, s'agissant de la criée d'Erquy, a-t-elle une spécialité, à l'instar du poisson bleu pour la Vendée ?

M. Guy-Dominique Kennel . - Je souhaiterais me joindre aux remerciements. J'estime également que les déplacements sont encore plus intéressants sur deux jours. Pour ma part, j'ai découvert la criée, la qualité de son accueil et son fonctionnement : j'ai été étonné de trouver une salle quasiment vide, le numérique ayant transformé l'activité. J'ajoute que les représentants de Savéol -autre belle découverte- ont fait part de la difficulté qu'ils rencontraient à communiquer sur leur démarche et à la diffuser ; ils espèrent que les parlementaires pourront contribuer à cette communication.

M. Michel Canevet . - Savéol utilise cette technique depuis des décennies, mais apparemment elle est restée inédite en France. Cependant l'entreprise a ouvert, l'année dernière, un centre d'information du grand public qui bénéficie à l'ensemble des 125 producteurs.

Mme Annick Billon . - Certains maraîchers suivent ces techniques, de façon plus artisanale. Il serait intéressant de les divulguer pour que d'autres cultures s'en emparent, par exemple celle des fleurs sous serre.

M. Michel Canevet . - Concernant le Brexit , les pêcheurs craignent non seulement de ne plus avoir accès aux eaux britanniques, mais aussi que les Britanniques ne soient plus soumis aux quotas annuels de capture. S'ils s'en affranchissent, ils risquent d'inonder le marché, de faire baisser les cours et de porter atteinte à la préservation des ressources naturelles.

M. Michel Vaspart . - Pour répondre à la question de notre collègue sur les criées d'Erquy et de Saint-Quay, je précise qu'il n'y a pas de différence entre elles, aucune n'ayant de spécialisation. Concernant le Pôle Cristal, les fonds publics représentaient 100 % du financement lors de sa création, puis progressivement 70 %. La mission confiée aux directeurs du Pôle est d'inverser la tendance : les ressources propres s'élèvent aujourd'hui à 50 % et devront représenter 70 % d'ici 2024. J'ajoute que le passage de 3 à 8 salariés a été financé exclusivement sur fonds propres.

M. Henri Cabanel . - Je regrette de n'avoir pu être présent mais je souhaite rebondir sur les sujets évoqués. Il semble que Savéol, bien que membre de l'organisation professionnelle Coop de France, ait développé un lien insuffisant avec le consommateur pour lui permettre de mesurer son action pour une agriculture durable. Par ailleurs vous avez évoqué les craintes liées au Brexit , mais une étude d'impact a-t-elle été menée afin de chiffrer les conséquences économiques pour la pêche du scénario redouté ? Cela me paraît essentiel.

Mme Élisabeth Lamure , présidente . - Notre collègue Michel Vaspart a fait allusion à Michel Barnier mais je vous rappelle qu'au Sénat, notre collègue Jean Bizet, président de la commission des affaires européennes, assure un suivi des négociations du Brexit . Il a d'ailleurs déjà évoqué la question de la pêche. Il serait utile de se rapprocher de lui et de susciter une rencontre avec Michel Barnier.

M. Michel Vaspart . - Nous pourrions proposer à Michel Barnier de venir en Bretagne.

M. Michel Canevet . - Le Brexit est un sujet extrêmement préoccupant pour nous. Les eaux britanniques sont moins profondes, rendant le poisson plus accessible. La carte des zones de pêche qui nous a été montrée à Erquy le mettait parfaitement en évidence et les professionnels préparent des argumentaires. La France est le deuxième espace maritime or, en produits de la mer, notre balance commerciale est déjà déficitaire. J'insiste sur le fait que le Brexit est un enjeu pour l'avenir des zones littorales mais aussi pour l'avenir des ressources naturelles !

S'agissant de Savéol, il est vrai que Coop de France a effectivement intérêt à faire connaître les bonnes pratiques environnementales de ses membres.

Je voudrais également revenir sur la difficulté de recrutement décrite par tous les entrepreneurs du pays de Rance présents à la table ronde. Malgré des carnets de commandes bien remplis, ils ne parviennent pas à trouver la main d'oeuvre recherchée. Cela montre une réelle inadéquation entre les besoins des entreprises et la qualification des personnes inscrites à Pôle Emploi. Un effort doit être fait en matière de formation professionnelle.

M. Henri Cabanel . - Ce phénomène touche aussi les métiers saisonniers.

Mme Elisabeth Lamure, présidente . - ...Pas seulement ! Je me souviens notamment du témoignage saisissant d'un électricien présent à cette rencontre : les personnes compétentes n'acceptent de travailler que sous forme d'intérim et pas plus de six mois dans l'année, afin de bénéficier des avantages sociaux. Il existe une véritable organisation souterraine qui est choquante.

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