N° 345

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2017-2018

Enregistré à la Présidence du Sénat le 8 mars 2018

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la commission des affaires européennes (1) sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, ratifiant l'ordonnance n° 2017-1252 du 9 août 2017 portant transposition de la directive 2015/2366 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 concernant les services de paiement dans le marché intérieur (n° 292, 2017-2018),

Par M. Jean-François RAPIN,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Jean Bizet, président ; MM. Philippe Bonnecarrère, André Gattolin, Mmes Véronique Guillotin, Fabienne Keller, M. Didier Marie, Mme Colette Mélot, MM. Pierre Ouzoulias, Cyril Pellevat, André Reichardt, Simon Sutour, vice-présidents ; M. Benoît Huré, Mme Gisèle Jourda, MM. Pierre Médevielle, Jean-François Rapin, secrétaires ; MM. Pascal Allizard, Jacques Bigot, Yannick Botrel, Pierre Cuypers, René Danesi, Mme Nicole Duranton, MM. Thierry Foucaud, Christophe-André Frassa, Mme Joëlle Garriaud-Maylam, M. Daniel Gremillet, Mme Pascale Gruny, Laurence Harribey, M. Claude Haut, Mmes Christine Herzog, Sophie Joissains, MM. Guy-Dominique Kennel, Claude Kern, Jean-Yves Leconte, Jean-Pierre Leleux, Mme Anne-Catherine Loisier, MM. Franck Menonville, Jean-Marie Mizzon, Georges Patient, Michel Raison, Claude Raynal, Mme Sylvie Robert.

AVANT-PROPOS

La deuxième directive sur les services de paiement 1 ( * ) dite « DSP2 » entend favoriser l'innovation, la concurrence, l'efficience et la sécurité des services de paiement fournis au sein de l'Union européenne afin d'élargir et d'améliorer les choix des consommateurs.

La commission des affaires européennes a examiné les conditions dans lesquelles l'ordonnance du 9 août 2017 2 ( * ) , actuellement soumise au Sénat aux fins de ratification 3 ( * ) , a procédé à la transposition de cette directive, et plus particulièrement dans quelle mesure les modifications et compléments qu'elle a apportés à cet effet au code monétaire et financier sont susceptibles de comprendre des éléments de sur-transposition.

La sur-transposition des textes européens par les États membres peut en effet nuire au bon fonctionnement du marché intérieur et pénaliser ce faisant les consommateurs. De nature à générer une surcharge administrative et des coûts supplémentaires pour les entreprises, elle est en outre susceptible de nuire à leur efficacité concurrentielle.

Cette problématique préoccupe à juste titre la Commission européenne 4 ( * ) tout comme le Gouvernement français 5 ( * ) . Celui-ci s'est ainsi engagé à limiter le nombre de normes, notamment lors de la transposition du droit européen en droit interne 6 ( * ) et entend examiner le droit en vigueur pour identifier et évaluer les sur-transpositions existantes.

De son côté, la commission des affaires européennes a engagé en janvier 2018, conjointement avec la délégation aux entreprises, une démarche de recensement auprès des entreprises des sur-transpositions qu'elles estiment pénalisantes pour l'exercice de leurs activités 7 ( * ) .

La Conférence des Présidents a en outre confié à la commission des affaires européennes, le 21 février dernier, à titre expérimental, une mission de veille sur l'intégration des normes européennes en droit interne afin notamment d'informer le Sénat sur d'éventuelles sur-transpositions. C'est dans cette optique que la commission des affaires européennes a examiné ce projet de loi sur les services de paiement et a formulé quelques observations.

I. LA DIRECTIVE : SÉCURISER LES PAIEMENTS ET LES DONNÉES À CARACTÈRE PERSONNEL TOUT EN AMÉLIORANT L'INFORMATION DES CONSOMMATEURS SUR LEUR SITUATION FINANCIÈRE

La directive, qui se substitue à la directive dite « DSP1 » qu'elle abroge, révise les conditions d'agrément et d'exercice des services de paiement fournis par les banques et les autres établissements de paiement (versements ou retrait d'espèces, prélèvements, opérations de paiement effectuées avec une carte, virements ou transmissions de fonds ), renforce les exigences de sécurité et de protection des données ainsi que les droits des utilisateurs des services de paiement.

Elle encadre en outre les services de paiement dits tiers, services de paiement connexes innovants dont les fournisseurs sont des sociétés de technologie financière (les « FinTech ») qu'elle désigne sous l'appellation de prestataires de services de paiement tiers (« PSP tiers » ).

Sans entrer dans le détail de la directive, il convient de rappeler qu'elle fixe le cadre d'agrément, d'exercice et de contrôle des services de paiement tiers, révise les conditions d'agrément des établissements de paiement, renforce leur supervision prudentielle et les exigences de sécurité des données ainsi que la protection des données à caractère personnel des clients et leurs droits en cas de fraude au paiement.

A. UN CADRE D'EXERCICE POUR LES SERVICES DE PAIEMENT TIERS

Les services de paiement tiers qu'ajoute la directive sont de deux ordres :

- le service d'initiation de paiement (SIP), qui initie les paiements à la demande et pour le compte de clients à partir des comptes de paiement que ceux-ci détiennent auprès de prestataires de services de paiement : il donne au commerçant l'assurance que le paiement a été initié, ce qui lui permet de livrer les biens ou de fournir les services sans délai ;

- le service d'information sur les comptes (SIC), qui donne au client une vue agrégée d'ensemble sur ses comptes et soldes disponibles.

La directive encadre ces services de paiement tiers et prévoit des conditions d'agrément et d'enregistrement tenant compte de leurs différences de nature (articles 11.1 et 33.1). Elle prévoit des règles dérogatoires en matière de fonds propres, dans la mesure où ces prestataires ne détiennent pas les fonds des clients, mais leur impose de souscrire une assurance de responsabilité civile professionnelle couvrant les territoires où ils proposent des services, ou une garantie comparable.

Afin que ces prestataires puissent avoir matériellement accès aux informations utiles auprès des établissements de crédit, la directive impose aux gestionnaires des comptes des obligations de communication d'informations qui devraient entrer en vigueur dix-huit mois après la publication du règlement dérivé de la Commission concernant les normes techniques d'interfaçage.


* 1 Directive (UE) 2015/2366 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 concernant les services de paiement dans le marché intérieur.

* 2 Prise par le Gouvernement dans le cadre de l'habilitation qui lui a été donnée par l'article 70 de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique (dite loi «Sapin II »).

* 3 Par le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale le 30 janvier 2018, ratifiant l'ordonnance n° 2017-1252 du °août 2017 portant transposition de la directive 2015/2366 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 concernant les services de paiement dans le marché intérieur.

* 4 Voir notamment la communication au Conseil COM 2010/543 du 8 octobre 2010 « Une réglementation intelligente au sein de l'Union européenne ».

* 5 Voir notamment l'étude du Conseil d'État, « Directives européennes : anticiper pour mieux transposer » (2015).

* 6 Circulaire du Premier ministre du 26 juillet 2017 qui pose notamment que « toute mesure allant au-delà des exigences de la directive est en principe proscrite ».

* 7 Une plateforme de consultation a été mise en place, dans un premier temps à l'occasion de l'examen du projet de loi pour un État au service d'une société de confiance adopté par l'Assemblée nationale le 30 janvier 2018. La présidente de la délégation aux entreprises et le président de la commission des affaires européennes ont présenté une communication sur les réponses reçues lors d'une réunion commune le 8 mars 2018.

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