II. UNE ABSENCE DE VISIBILITÉ PRÉJUDICIABLE

Si la diminution progressive de la part de l'État dans le financement des maisons de l'emploi, entamée par la précédente majorité, a été annoncée dès 2013, l'ampleur de la baisse en année N n'est pas connue avant le dépôt du projet de loi de finances en année N-1 .

Cette incertitude, conjuguée à des modalités de financement reposant de plus en plus sur des appels à projet (cf. supra ), nuit à la visibilité dont ont besoin ces structures pour lancer des actions de moyen-long terme .

Dans sa réponse au questionnaire de vos rapporteurs spéciaux, le ministère du travail a indiqué que « les services de l'État sont attentifs à accompagner les structures qui se trouveraient mises en difficulté par la restriction des financements d'État. D'ores et déjà, la répartition des crédits pour l'année 2018 entre les régions a été réalisée en intégrant le besoin d'accompagner la transition liée au retrait des financements de l'État, à l'instar des années précédentes ».

De fait, la maison de l'emploi de Strasbourg a bénéficié de l'accompagnement de la Direccte afin de trouver des sources de financement alternatives.

Une telle situation n'apparaît cependant pas satisfaisante dans la mesure où, d'une part, elle fait peser une incertitude sur les maisons de l'emploi, qui ne sont pas incitées à lancer des projets ambitieux et, d'autre part, elle nécessite la mobilisation d'effectifs, tant des structures elles-mêmes que des services déconcentrés de l'État, pour des montants généralement faibles .

À cet égard, vos rapporteurs spéciaux estiment que la mise en place d'une convention pluriannuelle nationale dès 2013 aurait permis aux maisons de l'emploi d'anticiper le niveau de la baisse des financements étatiques et de chercher de nouveaux financements, voire, le cas échéant, d'abandonner certaines actions .

Recommandation n° 3 : dans le cadre d'une conférence nationale des financeurs, rassemblant État, collectivités territoriales et l'Alliance villes emploi, établir une convention triennale définissant une trajectoire d'évolution de la participation financière de l'État.

III. UNE SUPPRESSION DES CRÉDITS ÉTATIQUES PRÉVUE EN 2019 QU'IL CONVIENT DE RÉEXAMINER

Dans sa réponse au questionnaire de vos rapporteurs spéciaux, le ministère du travail a indiqué qu' « au vu des missions très variables et territorialisées des maisons de l'emploi et des besoins prioritaires par ailleurs portés par la mission « Travail et emploi », le choix a été fait, dans un contexte de contraction des finances publiques, de poursuivre le retrait du financement de ces structures par l'État, dans la continuité des exercices budgétaires précédents. L'objectif du gouvernement, en termes de financement de structures, est de prioriser les opérateurs du service public national de l'emploi en concentrant tous les efforts budgétaires sur les politiques qu'ils portent ».

En conséquence, il est prévu la disparition de la contribution de l'État au budget 2019 de fonctionnement des maisons de l'emploi .

Vos rapporteurs spéciaux estiment que ce désengagement total de l'État du financement des maisons de l'emploi (hors dispositifs spécifiques) n'est pas souhaitable pour deux raisons .

En premier lieu, cela aboutirait à une situation paradoxale où l'État continuerait de faire partie de la gouvernance des structures en tant que membre constitutif sans pour autant participer à leur financement . Or, ainsi que l'ont rappelé certaines personnes entendues par vos rapporteurs spéciaux, la suppression des crédits portés par le programme 102 discréditerait la voix de l'État au sein des conseils d'administration des maisons de l'emploi et donc sa capacité d'influence . Les responsables de l'EPEC ont par exemple indiqué que la suppression des financements de l'État aurait un impact sur son activité de promotion des clauses sociales . En particulier, ils ont estimé qu'ils ne seraient plus en mesure d'accompagner la direction des achats de l'État et les institutions faisant appel aux services de l'EPEC dans ce domaine .

En second lieu, ce retrait pose une question en termes d' égalité territoriale, seules les collectivités territoriales les plus « riches » étant en mesure de conserver une telle structure sur leur territoire .

Comme le notait l'Igas en 2013, « les territoires ne disposant pas de structures de ce type sont donc doublement handicapés. Ils ne bénéficient pas des actions correspondantes. Ils ne bénéficient pas davantage des financements apportés par l'État à ce titre ».

Vos rapporteurs spéciaux appellent par conséquent le Gouvernement à revenir sur sa décision et demandent le maintien d'un financement étatique .

Votre rapporteur spécial Emmanuel Capus estime que le choix du Gouvernement fait en 2018, tendant à orienter les financements de l'État vers les maisons de l'emploi enregistrant des résultats positifs, allait dans le bon sens . Il considère par conséquent qu'il serait illogique de mettre en difficulté des structures dont la valeur ajoutée est reconnue. Il revient cependant au Gouvernement de déterminer le montant pertinent, au regard de la diminution du nombre de maisons de l'emploi qui aurait pu être constatée en 2018 et des résultats enregistrés par ces structures , compte tenu de la nécessaire réduction de la dépense publique.

Votre rapporteure spéciale Sophie Taillé-Polian estime pour sa part que les crédits de l'État doivent être maintenus à leur niveau de 2018, soit 12 millions d'euros . En effet, bien que faible et donc « absorbable » par le budget de l'État, ce montant assure un socle de financement, leur permettant de poursuivre le développement d'actions et de candidater sur des appels à projet , dans un contexte où les mutations économiques doivent être mieux anticipées au niveau des territoires.

Recommandation n° 1 : maintenir un financement de l'État en faveur des maisons de l'emploi.

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