Rapport d'information n° 3 (2018-2019) de M. Philippe DALLIER , fait au nom de la commission des finances, déposé le 3 octobre 2018

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N° 3

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2018-2019

Enregistré à la Présidence du Sénat le 3 octobre 2018

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur la répartition et l' utilisation des aides à la pierre ,

Par M. Philippe DALLIER,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Vincent Éblé , président ; M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général ; MM. Éric Bocquet, Emmanuel Capus, Yvon Collin, Bernard Delcros, Mme Fabienne Keller, MM. Philippe Dominati, Charles Guené, Jean-François Husson, Georges Patient, Claude Raynal , vice-présidents ; M. Thierry Carcenac, Mme Nathalie Goulet, MM. Alain Joyandet, Marc Laménie , secrétaires ; MM. Philippe Adnot, Julien Bargeton, Jérôme Bascher, Arnaud Bazin, Yannick Botrel, Michel Canevet, Vincent Capo-Canellas, Philippe Dallier, Vincent Delahaye, Mme Frédérique Espagnac, MM. Rémi Féraud, Jean-Marc Gabouty, Jacques Genest, Alain Houpert, Éric Jeansannetas, Patrice Joly, Roger Karoutchi, Bernard Lalande, Nuihau Laurey, Mme Christine Lavarde, MM. Antoine Lefèvre, Dominique de Legge, Gérard Longuet, Victorin Lurel, Sébastien Meurant, Claude Nougein, Didier Rambaud, Jean-François Rapin, Jean-Claude Requier, Pascal Savoldelli, Mmes Sophie Taillé-Polian, Sylvie Vermeillet, M. Jean Pierre Vogel .

LES PRINCIPALES OBSERVATIONS ET RECOMMANDATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL

Les principales recommandations

Recommandation n° 1 : revenir à un fonctionnement « normal » du FNAP, avec un président en mesure de redonner au conseil d'administration une meilleure capacité de contrôle et d'impulsion.

Recommandation n° 2 : améliorer la prise en compte des besoins locaux par un meilleur partage des différentes sources d'information et leur enrichissement par des études.

Recommandation n° 3 : inclure la réhabilitation de logements locatifs sociaux dégradés parmi les opérations soutenues par le FNAP, en fonction des besoins et des coûts observés localement.

Recommandation n° 4 : généraliser la délégation des aides à la pierre aux collectivités locales, avec instruction par le délégataire.

Recommandation n° 5 : prendre en compte le niveau de consommation des crédits du FNAP par chaque région dans la définition des enveloppes budgétaires.

Recommandation n° 6 : sécuriser les fonds sur le plan pluriannuel, simplifier et stabiliser les règles de répartition et d'utilisation.

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

La création en 2016 du fonds national des aides à la pierre (FNAP) a représenté un progrès dans la transparence de la gestion de ces aides, grâce au regroupement des crédits budgétaires de l'État et des contributions des bailleurs sociaux sur une même ligne, et à la mise en place d'une gouvernance ouverte aux bailleurs ainsi qu'aux collectivités territoriales.

Pour autant, le principe de parité entre l'État et les bailleurs sociaux, selon lequel l'égalité au sein du conseil d'administration aurait dû refléter une égalité dans le niveau des financements, a très vite été abandonné. L'annulation en cours de gestion, le 21 février 2017, de 55 % des crédits budgétaires destinés au FNAP en a été l'éclatante illustration.

La commission des finances a donc décidé de confier à son rapporteur spécial des crédits du logement une mission de contrôle budgétaire relative à la répartition et à l'utilisation des aides à la pierre. Il s'agissait de faire un premier bilan, deux ans environ après sa création, des progrès atteints dans la concertation au niveau national pour la définition des enveloppes régionales, ainsi que sur la manière dont l'utilisation des aides au niveau local met en oeuvre les principes fixés par le conseil d'administration.

Ce travail doit être placé dans une double perspective.

D'une part il porte sur un fonds encore jeune, qui n'a connu qu'un seul exercice entier, de plus privé d'une gouvernance normale depuis la démission de son président le 6 octobre 2017.

D'autre part les aides à la pierre ne représentent aujourd'hui qu'une partie très minoritaire des sommes consacrées au logement. Le total des sommes versées par le FNAP en 2017, soit 366 millions d'euros, doit être mis en regard des subventions d'investissement à la filière du secteur locatif social, soit 1,5 milliard d'euros, qui proviennent principalement des prêts locatifs aidés et de l'Anru 1 ( * ) . Les aides personnelles au logement 2 ( * ) , qui conditionnent souvent l'accès des locataires aux logements construits, atteignent un montant de 18 milliards d'euros sans commune mesure avec les aides à la pierre, surtout si on considère que ces dernières proviennent pour l'essentiel de la péréquation des ressources des bailleurs sociaux et non de crédits budgétaires.

Il est pourtant important de souligner le caractère vertueux des aides à la pierre, qui encouragent la construction et évitent les dérives de dépenses de guichet. Elles n'ont pas l'effet inflationniste souvent dénoncé pour les aides personnelles ou les dispositifs fiscaux de soutien à l'investissement locatif. De surcroît, la création du FNAP a permis de présenter de manière plus transparente les crédits consacrés à cette politique, favorisant le contrôle du Parlement.

Le défi pour les aides à la pierre est double, ce qui sera reflété dans le plan du présent rapport. Soumis aux injonctions d'un État qui fixe des objectifs chiffrés de production dans des « plans » de production de logement, le fonds doit, au niveau de son conseil d'administration, prendre des décisions en partenariat avec ses véritables financeurs que sont aujourd'hui les bailleurs sociaux. L'État doit alors prendre en compte la dimension essentiellement locale des besoins en logement social et des contraintes de production, en laissant la marge de gestion nécessaire aux responsables locaux, qu'il s'agisse de l'administration préfectorale ou des collectivités délégataires des aides à la pierre.

Au total, il apparaît que, si le FNAP constitue un indéniable progrès, il reste encore à l'État à accepter de déléguer une partie plus importante de la politique du logement aux acteurs locaux.

I. LE FNAP DOIT RETROUVER TRÈS VITE UN FONCTIONNEMENT NORMAL AFIN DE CONSOLIDER LES AVANCÉES PROMISES LORS DE SA CRÉATION

Le FNAP a permis de répondre à l'augmentation de la contribution financière des bailleurs sociaux à la politique des aides à la pierre par leur participation, à égalité avec l'État, aux décisions de répartition et d'utilisation de ces fonds au niveau national. La démission de son président a toutefois montré que l'État conservait en pratique un poids prépondérant au sein du fonds.

A. L'ORGANISATION DU FONDS DOIT GARANTIR UN ÉQUILIBRE ENTRE L'ENSEMBLE DES PARTIES PRENANTES

1. Les aides à la pierre reposent sur un principe vertueux d'utilisation des deniers publics

La création du FNAP s'inscrit dans la dualité des aides au logement, entre aides « contingentées » , dont le montant est fixé chaque année, maîtrisé par les pouvoirs publics, et aides « de guichet » , dont le coût pour les finances publiques dépend du comportement des acteurs. Or la tendance dominante au cours des années 1990 et 2000 a été au développement des aides de guichet, avec la multiplication de dispositifs tels que le prêt à taux zéro en 1995 et les dispositifs fiscaux, souvent créés pour une durée limitée mais tout aussi souvent prolongés d'une année à l'autre.

Les aides de guichet présentent des difficultés bien connues : derrière leur effet moins directement visible pour les finances publiques - il s'agit d'une diminution des recettes fiscales et non d'une dépense directe pour le budget de l'État -, elles représentent en réalité un manque à gagner tout à fait considérable : environ 1,7 milliard d'euros en 2016 pour les différents dispositifs fiscaux en faveur de l'investissement locatif, représentant un coût étalé sur plusieurs années et donc peu flexible 3 ( * ) .

Un aspect plus spécifique aux politiques du logement est la tension entre la définition d'un dispositif fiscal qui se fait nécessairement au niveau national puisque les collectivités territoriales ne disposent pas du pouvoir de créer des taxes ou des exonérations, et le caractère local par nature de la question du logement. On a vu ainsi certains dispositifs, tels que les crédits d'impôt successifs de soutien à la construction de logements locatifs intermédiaires, prendre peu à peu en compte l'existence de différences entre les marchés locaux de l'immobilier, jusqu'à la limitation du dispositif « Pinel » aux seules zones tendues.

Il n'en reste pas moins qu'un dispositif fiscal défini au niveau national, malgré les améliorations apportées d'une loi de finances à la suivante, produit des effets parfois non anticipés sur les marchés locaux de l'habitat : par exemple, la priorité donnée au logement neuf peut favoriser l'étalement urbain là où les prix du foncier rendent la construction difficile en centre-ville 4 ( * ) . La multiplication des crédits d'impôt, venant à l'appui d'objectifs de politique de l'habitat fixés au niveau national, a pu contribuer à limiter les marges de pilotage de cette politique au niveau local, alors même que les vingt dernières années ont vu une montée en compétence des collectivités locales et de leurs groupements avec le développement rapide de l'intercommunalité depuis 1999 et les mouvements successifs de décentralisation.

Face à ces difficultés, les aides à la pierre présentent l'avantage de demeurer un dispositif contingenté , dont le montant total est fixé chaque année et réparti ensuite au niveau local. La création du FNAP en 2016, en rassemblant les subventions budgétaires de l'État et les différentes contributions du secteur du logement social dans une ligne unique, a renforcé la visibilité de ces aides dans les documents budgétaires et permis un contrôle amélioré du Parlement.

Le principe de l'attribution de subvention après instruction d'un projet permet de garantir la qualité des dossiers ainsi soutenus et d'assurer une meilleure utilisation de l'argent public. Des considérations du même ordre ont d'ailleurs poussé la Cour des comptes à porter un regard favorable sur le programme « Habiter mieux » de l'Agence nationale de l'habitat (Anah), dans un rapport commandé par votre commission et présenté le 4 avril dernier 5 ( * ) .

Le FNAP se place donc dans une logique vertueuse d'utilisation des fonds publics qui ne peut être qu'approuvée dans son principe.

2. Avant 2016, une gestion des aides à la pierre inadaptée à l'évolution des financements

Jusqu'en 2016, les aides à la pierre suivaient deux circuits distincts.

D'une part, l'État apportait des crédits budgétaires dans le cadre du programme 135 « Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat ». Or, comme votre rapporteur spécial le faisait observer 6 ( * ) , cette source de financement ne cessait de se réduire au cours des années. Dans la loi de finances pour 2015, il était de 400 millions d'euros en autorisations d'engagement mais seulement de 160 millions d'euros en crédits de paiement.

D'autre part, s'est développé le recours aux fonds de concours issus d'un fonds de péréquation alimenté par les bailleurs sociaux , le fonds national pour le développement d'une offre de logements locatifs très sociaux (FNDOLLTS) institué en 2009 à l'article L. 452-1-1 du code de la construction et de l'habitation 7 ( * ) . Ce fonds avait pour mission de contribuer au développement et à l'amélioration du parc de logements locatifs sociaux appartenant aux organismes d'habitations à loyer modéré (HLM) et aux sociétés d'économie mixte, ainsi qu'à la rénovation urbaine.

Contrairement à l'approche partenariale du FNAP, l'emploi des crédits du FNDOLLTS était arrêté par une commission de six membres dont cinq représentants de l'État, le sixième étant le directeur général de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (Anru).

Géré par la caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS), ce fonds recevait des ressources dont l'origine variait presque chaque année en loi de finances. Dans sa dernière année pleine de fonctionnement, en 2015, il a ainsi bénéficié :

- d'une fraction des cotisations principale et additionnelle versées par les bailleurs sociaux à la CGLLS 8 ( * ) ;

- du produit de la surtaxe sur les plus-values de cessions immobilières 9 ( * ) de plus de 50 000 euros, plafonné à hauteur de 45 millions d'euros.

Les fonds étaient consacrés pour une fraction à l'Anru et pour une autre fraction au développement et à l'amélioration du parc de logements locatifs sociaux.

Au fil des années, la participation du FNDOLLTS, c'est-à-dire des bailleurs sociaux, est devenue essentielle au financement des aides à la pierre. Elle était établie à un montant de 216 millions d'euros dans le projet de loi de finances pour 2015.

Consommation du programme 135 entre 2011 et 2015 selon la nature des crédits

(en millions d'euros)

Source : commission des finances, d'après les données du ministère du logement

Cette situation n'était plus acceptable pour les bailleurs sociaux, qui demandaient légitimement à être associés aux décisions d'affectation des crédits d'aide à la pierre.

3. La création du fonds national des aides à la pierre, fondée sur la promesse d'un meilleur équilibre

La création du fonds national des aides à la pierre (FNAP) a été décidée par la loi de finances pour 2016 10 ( * ) , qui supprimait parallèlement le FNDOLLTS.

La création du FNAP a répondu à des critiques formulées chaque année par la Cour des comptes, dans ses notes d'exécution budgétaire, à l'encontre du fonds de concours recevant les crédits du FNDOLLTS. Ces critiques étaient de trois ordres 11 ( * ) :

- intentionnalité de la partie versante : le produit de la surtaxe sur les plus-values de cessions immobilières, qui abondait le fonds de péréquation, constituait un prélèvement obligatoire pesant sur des acteurs privés sans lien avec le logement social et ne pouvait donc pas venir en recettes d'un fonds de concours 12 ( * ) ;

- externalité à l'État de la partie versante : la commission gérant le fonds de péréquation ne comprenait que des représentants de l'État ;

- universalité budgétaire et non-affectation des recettes : des ressources issues de prélèvements obligatoires étaient directement réaffectées au programme 135 sans être reversées au budget général, privant le Parlement de son rôle d'autorisation et de contrôle des dépenses relevant de ce programme.

La création du fonds répond pour l'essentiel à ces trois critiques 13 ( * ) :

- intentionnalité de la partie versante : les bailleurs sociaux, qui abondent le fonds par l'intermédiaire de la CGLLS, sont présents au conseil d'administration à parité avec l'État ;

- externalité vis-à-vis de l'État : le FNAP est un établissement public administratif doté de la personnalité juridique. De plus, l'État ne détient qu'un tiers des sièges au conseil d'administration ;

- universalité budgétaire et non-affectation des recettes : le dispositif bénéficie toujours d'une exception au principe d'universalité budgétaire, mais elle est mieux encadrée et plus transparente, favorisant le contrôle du Parlement.

4. Le respect des équilibres au sein du conseil d'administration

La représentation paritaire des représentants de l'État et des bailleurs sociaux au sein du conseil d'administration est désormais inscrite dans le code de la construction et de l'habitation 14 ( * ) , qui prévoit également que les collectivités territoriales, leurs groupements et le Parlement y sont également représentés. Trois collèges composent donc le conseil d'administration 15 ( * ) :

- cinq représentants de l'État , dont deux sont désignés par le ministre chargé du logement, un par le ministre chargé de l'économie, un par le ministre chargé du budget et un par le ministre chargé des collectivités territoriales ;

- cinq représentants du domaine du logement social , dont trois sont désignés par l'Union sociale pour l'habitat, un par la fédération des entreprises publiques locales et un par les fédérations des organismes agréés pour la maîtrise d'ouvrage d'insertion ;

- cinq représentants du Parlement et des collectivités territoriales et de leurs groupements , dont un député et un sénateur désignés par les assemblées auxquelles ils appartiennent et trois représentants respectivement de l'Assemblée des communautés de France (AdCF), l'Assemblée des départements de France (ADF) et France urbaine.

L'Union sociale pour l'habitat représente le secteur HLM à travers cinq fédérations : la fédération nationale des offices publics de l'habitat (OPH), les entreprises sociales pour l'habitat (ESH), la fédération nationale des sociétés coopératives de HLM (Coop'HLM), Procivis qui représente les Sociétés anonymes coopératives d'intérêt collectif pour l'accession à la propriété (Sacicap) et la fédération nationale des associations régionales d'organismes d'habitat social (FNAR).

Les entreprises publiques locales, sous le contrôle des collectivités territoriales, interviennent dans la construction et la gestion de logements sociaux.

Enfin, les organismes agréés pour la maîtrise d'ouvrage d'insertion (MOI) bénéficient de financements pour la réalisation d'opérations à destination des personnes et familles défavorisées, par exemple les logements-foyers ou les logements d'insertion.

5. Des ressources variées mais en pratique concentrées sur les bailleurs sociaux

En application de l'article L. 435-1 du code de la construction et de l'habitation, le FNAP reçoit, comme l'ancien FNDOLLTS, une fraction des cotisations principale et additionnelle versées par les bailleurs sociaux à la CGLLS 16 ( * ) , mais ne bénéficie plus d'une fraction du produit de la surtaxe sur les plus-values de cessions immobilières.

La loi de finances pour 2018 lui a également attribué une fraction du produit de la taxe sur les plus-values réalisées à l'occasion des cessions de logements situés en France métropolitaine par les organismes d'habitations à loyer modéré et par les sociétés d'économie mixte agréées 17 ( * ) . Le produit de cette taxe est versé à la CGLLS. Il convient de rappeler que cette taxe, qui dans le texte original du projet de loi de finances devait porter sur le produit des cessions, a été recentrée sur les plus-values des cessions sur la proposition conjointe de votre rapporteur spécial et de Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteure pour avis au nom de la commission des affaires économiques. Votre rapporteur constate toutefois que les mesures réglementaires permettant de mettre en oeuvre cette mesure sont toujours en attente de publication .

Le FNAP reçoit également les crédits budgétaires de l'État , autrefois versés directement au programme 135.

Il est enfin alimenté par d'autres ressources :

- une contribution d'Action logement , dans le cadre de la convention quinquennale 2018-2022 signée par cet organisme avec l'État ;

- des crédits issus des fonds d'aménagement urbain (FAU), dont les crédits disponibles ont été transférés au FNAP 18 ( * ) ;

- une fraction du produit des prélèvements SRU versés par les communes déficitaires en logements sociaux et soumises à obligation de rattrapage, situées hors EPCI délégataire et non couvertes par un établissement public foncier ;

- la majoration, prévue à l'article L. 302-9-1 du code de la construction et de l'habitation, du prélèvement « SRU » opérée sur les communes ne remplissant pas leurs obligations triennales. Cette ressource est fléchée vers le financement de la réalisation de logements très sociaux (PLAI adaptés) et de la mise en oeuvre de dispositifs d'intermédiation locative 19 ( * ) dans les conditions prévues au dernier alinéa de l'article L. 302-9-1 du code de la construction et de l'habitation.

En pratique, ces ressources représentent des montants très différents les uns des autres. La contribution des bailleurs sociaux , par l'intermédiaire de la CGLLS, compte donc pour plus des trois quarts des ressources du fonds en application du projet de budget pour 2018 adopté en conseil d'administration du 15 décembre 2017 20 ( * ) :

Répartition des ressources du FNAP 2018

Source : commission des finances, à partir des données présentées au conseil d'administration du FNAP du 15 décembre 2017

B. LE CALENDRIER ANNUEL DE GESTION DES AIDES S'EST FORMALISÉ ET CLARIFIÉ

1. Des règles de procédure favorisant une gestion plus rigoureuse des dépenses
a) Une notification des enveloppes plus rapide

La direction de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages (DHUP) a indiqué à votre rapporteur spécial que la mise en place du FNAP a permis de mieux cadrer le processus de décision et d'envoyer les lettres de notification plus tôt qu'auparavant .

Un examen des lettres de notification ou, avant 2010, des circulaires de programmation envoyées aux préfets permet de constater en effet que, depuis la création du FNAP par décret du 1 er juillet 2016, les lettres de notification des exercices 2017 et 2018 ont été envoyées avant le 1 er janvier de l'année de programmation, soit respectivement le 16 décembre 2016 et le 21 décembre 2017.

Cela n'avait été le cas que deux fois entre 1998 et 2016, les lettres de notification étant généralement envoyées entre la mi-janvier et la mi-mars de l'année de programmation.

Votre rapporteur ne peut qu'approuver cette rigueur plus grande qui permet d'éviter les retards au niveau national.

b) Un principe vertueux de limitation des autorisations d'engagement

Les crédits versés par le FNAP sur le programme 135 permettent d'ouvrir des crédits de paiement qui financent les dépenses précédemment engagées dans les territoires.

Une règle de fonctionnement importante du FNAP prévoit que les autorisations d'engagement qu'il accorde, afin de permettre l'agrément de nouvelles opérations, doivent être inférieures ou égales aux crédits de paiement dont le versement est prévu au cours de l'année 21 ( * ) .

Cette règle a pour but de stabiliser le montant des restes à payer sur le programme 135.

c) Le nécessaire respect de l'intention de la partie versante

L'article 17 de la LOLF prévoit que l'emploi des fonds de concours doit être conforme à l'intention de la partie versante. Un suivi rigoureux des crédits est donc indispensable au niveau local afin de vérifier la conformité de l'usage des fonds aux orientations décidées par le FNAP.

Ce suivi définit les rôles, attributions et responsabilités de chacun des acteurs et organise des contrôles tout au long de la procédure.

2. Le dialogue de gestion avec l'ensemble des partenaires et le suivi du financement

Le « dialogue de gestion » est un processus de concertation qui réunit, au niveau régional, les services de l'État et l'ensemble des acteurs concernés par le logement social. Ce dialogue de gestion comprend deux phases : la remontée des besoins afin de contribuer à la détermination du budget du FNAP en fin d'année, la gestion des crédits dans la région au cours de l'année suivante.

La gestion des aides s'inscrit ainsi dans un calendrier bien déterminé dans lequel la remontée des besoins des territoires permet de fonder la répartition territoriale des aides.

a) La remontée des besoins

Au cours de l'été, les directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL) effectuent un bilan de l'exécution de l'année passée et évaluent les besoins en se fondant sur un recensement mené auprès des territoires de gestion. Les territoires de gestion sont les délégataires des aides à la pierre (établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) ou départements) ou, dans les territoires non couverts par une délégation, les directions départementales des territoires et, le cas échéant, de la mer (DDT ou DDTM).

Une « feuille de route » destinée aux services de l'État insiste sur la nécessité d'une approche « qualitative » , qui au-delà des objectifs quantitatifs permet d'apprécier l'ensemble des enjeux locaux en matière de développement de l'offre locative sociale, ainsi que de démolition et de réhabilitation.

Les premières perspectives sont affinées entre juillet et fin septembre, ce qui permet à chaque DREAL de soumettre les besoins au FNAP.

b) La répartition entre les régions

Au mois de décembre le conseil d'administration du FNAP, en votant son budget, décide de la répartition des enveloppes et des objectifs régionaux, qui sont notifiés aux régions dans les jours qui suivent.

La répartition se fonde sur une méthode définie entre l'État, les élus et les bailleurs . La délibération du conseil d'administration fixe des objectifs de production de logements locatifs sociaux pour chaque région pour chacune des typologies de financement (PLAI, PLUS, PLS), ainsi que la dotation financière associée. Le rapport entre les autorisations d'engagement ouvertes et le nombre de PLAI prévus détermine, par zone, un montant moyen de subvention pouvant être attribué par logement.

Ce montant moyen de subvention sera utilisé par exemple pour ajuster les objectifs de production en cas d'abondement ultérieur de l'enveloppe, comme cela a été le cas au mois de mars 2018 lors de la répartition entre régions de reliquats disponibles.

c) La répartition des fonds au niveau infra-régional

La répartition des fonds fait l'objet d'un processus de concertation entre la DREAL, sous l'autorité du préfet de région, et les acteurs locaux.

Au mois de janvier, chaque entité gestionnaire définit un vivier d'opérations à lancer dans l'année. Dans les collectivités ou groupements ayant reçu délégation de gestion des aides à la pierre, la sélection des opérations fait l'objet d'un vote en assemblée.

Au mois de février, le préfet de région, sur la proposition du DREAL, définit un projet de répartition infra-régionale des aides. Ce projet devient effectif après avoir reçu l'avis de comité régional de l'habitat et de l'hébergement (CRHH). La DREAL s'appuie sur les documents de programmation locaux, notamment le plan local de l'habitat (PLH), le bilan de la programmation effectuée lors de l'année précédente ainsi que les capacités de production connues.

Le budget opérationnel du programme (BOP) 135, préparé par la DREAL, est signé par le préfet de région au mois de mars après avoir reçu le visa du contrôleur budgétaire régional. Le DREAL, en tant que responsable de BOP délégué, subdélègue alors les avances d'autorisations d'engagement auprès des territoires de gestion : un quart du montant des autorisations d'engagement de l'année précédente peuvent être subdélégués en attendant la signature des nouveaux avenants.

Fin avril ou début mai, la majorité des autorisations d'engagement peuvent être subdéléguées aux territoires de gestion, via l'application GALION. Lorsque le territoire de gestion est une collectivité ou groupement délégataire des aides à la pierre, un avenant à la convention de délégation doit être préparé et visé par le contrôleur budgétaire régional, nécessaire pour subdéléguer la majorité des autorisations d'engagement.

La DHUP commence en même temps à mener des enquêtes afin de rendre compte de l'état d'avancement de la programmation dans les territoires et des perspectives de l'année.

En cours d'année, la DREAL réalise des points d'étape avec les territoires de gestion et, au mois de septembre, transmet à la DHUP des éléments sur les perspectives de consommation et de réalisation en fin d'année.

C'est pendant les deux derniers mois de l'année que la programmation est la plus active. Les besoins étant connus ainsi que les capacités de production, les autorisations d'engagement sont redéployées entre les régions afin de permettre le financement du plus grand nombre possible d'opérations.

L'ordonnateur réalise un compte rendu de gestion annuel qui fait état de l'emploi des fonds 22 ( * ) , qui permet de justifier les montants en autorisations d'engagement et en crédits de paiement ouverts par fonds de concours.

Source : commission des finances, à partir des documents transmis par la DHUP

3. L'adoption du budget et la définition de la répartition des crédits au conseil d'administration de fin d'année

Le conseil d'administration du FNAP de fin d'année, soit le 15 décembre en 2017, vote la répartition entre les régions des enveloppes suivantes :

- financement des aides à la pierre « classiques » (470 014 784 euros pour l'année de gestion 2018), hors financement des actions ci-après, dont en 2018 une enveloppe spécifique de 10 millions d'euros au titre du financement des opérations de démolition ;

- financement de la réalisation de PLAI adaptés et de la mise en oeuvre de dispositifs d'intermédiation locative dans les communes faisant l'objet d'un arrêté préfectoral de carence (12 millions d'euros en 2018) ;

- financement d'actions annexes (4,7 millions d'euros en 2018).

a) Des aides à la pierre « classiques » concentrées sur les PLAI

S'agissant de l'enveloppe consacrée aux aides à la pierre « classiques », le conseil d'administration approuve les principes de programmation et de répartition. Est ainsi défini un montant moyen de subvention (MMS) par PLAI dans chaque région. Le conseil d'administration autorise son président à modifier cette enveloppe dans la limite de 10 % de son montant, en vue d'optimiser la production de logement social selon les besoins identifiés sur les territoires.

Le président du conseil d'administration a ainsi réparti les fonds entre les régions pour l'année 2018 par une décision du 18 décembre 2017.

Ce montant ne comprenait toutefois pas les autorisations d'engagement non consommées en fin d'année chez les délégataires des aides à la pierre. Le conseil d'administration du 14 mars 2018 a constaté que le montant de ces reliquats mobilisables en 2018 était de 10 915 851 euros 23 ( * ) et a décidé leur notification aux régions en prenant pour base les montants moyens de subvention déjà validés fin 2017.

(1) La concentration des financements sur les PLAI

Depuis 2015, les aides à la pierre issues du FNAP sont mobilisées très majoritairement sur les PLAI , c'est-à-dire les logements sociaux destinés aux familles les plus modestes. L'utilisation de ressources budgétaires pour d'autres catégories de logements demeure possible, en respectant la limite constituée par le montant moyen de subvention.

(2) L'enveloppe relative aux démolitions

Le conseil d'administration du 15 décembre 2017 a réservé, sur l'enveloppe générale consacrée aux aides à la pierre d'un montant de 470 millions d'euros, une sous-enveloppe de 10 millions d'euros consacrée au financement d'opérations de démolition , dont les principes de programmation et d'utilisation ont été définis par le conseil d'administration suivant du 14 mars 2018.

Cette sous-enveloppe est mise à disposition des bailleurs qui sollicitent le préfet de région pour contribuer à l'équilibre des opérations de démolition de logements sociaux localisées en zones B2 et C du zonage d'investissement locatif et en dehors de tout périmètre d'intervention de l'ANRU (PNRU et NPNRU).

Les opérations de démolition reçoivent une subvention égale au tiers du prix de revient de l'opération, dans un plafond de 5 000 euros par logement démoli. L'attribution de l'aide est réservée à des logements appartenant au parc conventionné aux aides personnalisées au logement des bailleurs sociaux.

Cette sous-enveloppe a donc un objet et des modalités d'utilisation très spécifiques puisqu'elle vise des territoires où le marché du logement est détendu , alors que l'enveloppe principale est plutôt destinée à la construction de logements dans les zones tendues.

De plus les fonds destinés à financer les démolitions ne font pas l'objet d'une territorialisation par le conseil d'administration . Ils sont attribués en fonction des dossiers transmis par les administrations déconcentrées, qui elles-mêmes en informent les acteurs du territoire, par exemple dans le cadre du comité régional et de l'hébergement (CRHH). Les dossiers remontent à l'administration centrale, qui vérifie que les opérations respectent bien les orientations émises par le conseil d'administration du FNAP puis délègue les fonds en région.

Enfin une fongibilité unidirectionnelle est mise en place : la sous-enveloppe « démolition » ne saurait être abondée en cours d'année à partir des fonds destinés aux aides à la pierre classiques, mais elle peut en sens inverse être réorientée vers la production neuve à compter du mois de septembre en cas de sous-consommation.

b) PLAI adaptés et intermédiation locative

Les PLAI adaptés concernent des logements destinés à des ménages qui cumulent des difficultés financières et sociales : outre un habitat à loyer et charges maîtrisés, ils bénéficient d'une gestion locative adaptée et le cas échéant d'un accompagnement ou d'une configuration de logement spécifique.

Ces programmes bénéficient, en application de l'article R. 331-25-1 du code de la construction et de l'habitation 24 ( * ) , d'une subvention spécifique qui vient en complément de la subvention attribuée normalement aux PLAI.

Jusqu'en 2017, ces crédits ne faisaient pas l'objet d'une répartition entre les régions, mais étaient attribués au moyen d'un appel d'offres annuel, ouvert aux bailleurs sociaux et aux associations agréées en matière de maîtrise d'ouvrage d'insertion.

(1) Des règles d'attribution spécifiques pour les PLAI adaptés, allant dans le sens d'une déconcentration

Les appels à projet ont été, jusqu'en 2016, financés sur les crédits du FNDOLLTS (voir supra ).

Quatre appels à projets menés de 2013 à 2016 ont permis de sélectionner 538 opérations représentant 1 732 logements programmés, pour un montant d'engagement de 12,5 millions d'euros. Ces chiffres sont jugés insuffisants par le Gouvernement, et les appels à projets connaissaient de plus un succès de moins en moins grand : alors que le premier appel à projets en 2013 avait permis de sélectionner 175 opérations pour 637 logements, celui de 2016 se limitait à 51 opérations et 181 logements 25 ( * ) .

La création du FNAP, qui a intégré le FNDOLLTS, a eu pour effet de pérenniser le PLAI adapté tout en déconcentrant son attribution. L'appel à projets 2017 a, selon la présentation du Gouvernement, assoupli les procédures de montage, d'instruction et de sélection des projets, tout en augmentant les niveaux de subvention par logement.

Ainsi, la sélection des projets a-t-elle été déconcentrée en régions dans une certaine mesure : dans le respect d'un cadrage élaboré par les préfets de région, les décisions de subvention sont prises par les préfets de département ou les délégataires des aides à la pierre, en association avec les partenaires concernés : services de l'État, bailleurs, associations de maîtrise d'ouvrage d'insertion, collectivités.

En outre, le périmètre de l'appel d'offres a été élargi aux résidences sociales de petite taille 26 ( * ) .

(2) L'intermédiation locative : un financement spécifique du FNAP dans les communes carencées

L'intermédiation locative est un dispositif par lequel le propriétaire confie la location d'un logement privé à une agence immobilière à vocation sociale ou à un organisme agréé, qui le loue à un ménage en grande précarité. Le propriétaire bénéficie d'une déduction fiscale de 85 % sur ses revenus fonciers dans le cadre du dispositif Louer abordable ou « Cosse » 27 ( * ) .

En particulier, lorsqu'une commune fait l'objet d'un arrêté de carence en raison du non-respect de ses obligations de production de logements sociaux, le préfet peut 28 ( * ) décider la mise en oeuvre, par convention avec un organisme agréé sur le territoire de la commune, d'un dispositif d'intermédiation locative qui contribuera à l'atteinte des objectifs SRU.

Afin d'inciter à la mise en place des conventions d'intermédiation locative dans ces communes, le FNAP, sur une décision du conseil d'administration du 7 septembre 2016 reconduite à l'identique le 10 mai 2017, apporte un financement lors de la première année de mise en place du dispositif, dans une limite de 10 000 euros par logement et par an dans les régions Île-de-France et Provence-Alpes-Côte d'Azur et de 5 000 euros par logement et par an dans les autres régions.

À compter de la deuxième année, ce financement est mis à la charge de la commune en application du code de la construction et de l'habitation 29 ( * ) .

(3) Une ressource spécifique

La subvention destinée aux PLAI adaptés et à l'intermédiation locative est issue d'une enveloppe spécifique , dont les ressources proviennent de la majoration du prélèvement SRU qui s'applique aux communes qui, aux termes d'un arrêté de carence prononcé par le préfet, ne respectent pas leurs obligations de construction de logements sociaux 30 ( * ) . Cette ressource est gérée par le FNAP dans un fonds distinct de celui destiné aux autres opérations.

c) Actions annexes

Les actions annexes, d'un montant de 4 750 000 euros en 2018, concernent :

- à hauteur de 4 400 000 euros, des actions d'accompagnement et d'ingénierie sociale dans le cadre de maîtrise d'oeuvre urbaine et sociale (MOUS) ;

La maîtrise d'oeuvre urbaine et sociale (MOUS)

La maîtrise d'oeuvre urbaine et sociale promeut l'accès au logement des personnes et familles défavorisées. C'est une prestation d'ingénierie qui couvre des situations très diverses, par exemple l'accès au logement de gens du voyage sédentarisés, la démolition et la reconstruction de foyers de travailleurs migrants ou la transformation en résidence sociale. Elle peut être directement opérationnelle ou relever de l'assistance à maîtrise d'ouvrage.

La MOUS concourt, sauf exception, à la réalisation des actions prévues par le plan départemental pour le logement des personnes défavorisées (PDALPD). Elle est conduite préférentiellement sous maîtrise d'ouvrage des collectivités territoriales ou de leurs groupements, ou dans certains cas de l'État.

Le taux de la subvention de l'État est plafonné à 50 % de la dépense.

- à hauteur de 350 000 euros, des dépenses d'accompagnement des évolutions concernant le domaine du logement locatif social.

Le conseil d'administration prévoit une souplesse d'utilisation de l'enveloppe consacrée aux actions annexes. Son président peut moduler de manière limitée le montant consacré aux dépenses d'accompagnement d'évolutions importantes dans le domaine du logement locatif social. Les responsables de budget opérationnels de programme régionaux peuvent, pour leur part, moduler l'enveloppe qui leur est attribuée pour le financement d'actions MOUS. Ces modulations d'enveloppe, limitées à la hausse et illimitées à la baisse, sont assurées à partir ou à destination de l'enveloppe des aides à la pierre « classiques » : aucune fongibilité n'est possible avec celle consacrée au financement des PLAI adaptés et aux opérations d'intermédiation locative.

4. Les principes de répartition entre les régions

Le conseil d'administration du FNAP a retenu pour 2018 des principes de répartition élaborés dans un groupe de travail, reposant sur un montant moyen de subvention et sur des objectifs chiffrés de production de logements PLAI.

a) Le calcul du montant moyen de subvention et des objectifs PLAI

Le conseil d'administration du 15 décembre 2017 a déterminé, pour chaque région, un montant moyen de subvention « cible » qui devra être atteint sur une durée de dix ans. Le montant moyen de subvention notifié à chaque région fin 2017 a donc une valeur intermédiaire entre celui qui avait été notifié l'année précédente et cette valeur cible.

Le montant moyen de subvention « cible » d'une région est calculé en fonction :

- pour 80 %, des coûts des opérations de logements sociaux observés depuis trois ans dans la région avec l'outil SISAL géré par la DHUP ;

- pour 10 %, de la part régionale des locataires du parc privé dont le taux d'effort 31 ( * ) dépasse 30 % ;

- pour 10 %, de la demande potentielle de logement PLAI, mesurée par la somme du nombre de ménages demandeurs sous plafond PLAI inscrits dans le système national d'enregistrement (SNE), et de 50 % des ménages du parc privé dont les ressources sont inférieures à celles des plafonds PLAI.

Ces critères permettent de cibler particulièrement les zones où le marché du logement est tendu.

Si le premier critère tend à mobiliser les crédits en priorité dans les territoires où les opérations coûtent le plus cher, le second et le troisième permettent de prendre en compte les territoires où le parc privé ne répond pas aux besoins des locataires en fonction de leurs ressources.

Le montant moyen de subvention notifié s'applique dans chaque région à un objectif de production de PLAI résultant des besoins exprimés , en assurant la compatibilité avec l'atteinte des objectifs quantitatifs et qualitatifs de rattrapage à atteindre par les communes déficitaires en logements sociaux en application des articles L. 302-5 et suivants du code de la construction et de l'habitation (ou « article 55 de la loi SRU »).

Ces objectifs de PLAI ont également été évalués en plafonnant à + 10 % l'évolution par rapport à 2017, afin de limiter les variations trop importantes d'enveloppe d'une année à l'autre, et en prenant en compte l'objectif de programmation de 40 000 PLAI défini dans la stratégie du Gouvernement.

Enfin, la répartition entre les régions favorise des territoires que le président de la République a désignés comme prioritaires lors de la conférence des territoires du 17 juillet 2017, c'est-à-dire les métropoles de Lyon et d'Aix-Marseille, la région Île-de-France et le pays de Gex 32 ( * ) .

Des objectifs en logement PLUS et PLS sont également notifiés mais ne sont pas pris en compte dans la détermination des moyens de subvention.

Votre rapporteur s'interroge sur l'utilité de définir des objectifs au niveau national pour les logements PLUS et PLS alors que les enveloppes régionales de financement sont dimensionnées en fonction des seuls objectifs relatifs aux logements PLAI.

b) Les objectifs de production de logements sociaux pour 2018

Le conseil d'administration du 15 décembre 2017, sur la base des principes de répartition régionale décrits précédemment, a défini des objectifs de production par région. Ces objectifs notifiés aux régions ont été légèrement augmentés par le conseil d'administration du 14 mars 2018 afin de prendre en compte les reliquats d'autorisations d'engagement non consommées l'année précédente.

Objectifs de production 2018 par région

Source : commission des finances, à partir des documents du conseil d'administration du 14 mars 2018

5. La complexité du mécanisme des fonds de concours

Le FNAP repose sur la centralisation au sein d'un programme budgétaire commun des fonds provenant aussi bien de l'État que des autres contributeurs. Ces fonds sont versés par le FNAP sur le programme 135 « Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat » par voie de fonds de concours. Depuis le programme 135, les fonds sont alors répartis par les services déconcentrés du ministère chargé du logement.

Le programme 135 est ainsi marqué par l'importance de ses crédits d'origine extra-budgétaire : en 2017, 62 % des crédits disponibles en AE et 51 % des crédits disponibles en CP provenaient de fonds de concours, versés tout au long de l'année.

En 2017, le programme 135 a ainsi reçu des fonds de concours d'un montant de 366 millions d'euros en crédits de paiement « frais » et au total de 489 millions d'euros en tenant compte des crédits reportés de 2016 33 ( * ) .

La procédure des fonds de concours pour dépenses d'intérêt public

La procédure des fonds de concours est régie par l'article 17 de la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances, précisé par le décret n° 2007-44 du 11 janvier 2007. Les fonds de concours comprennent les fonds à caractère non fiscal versés par des personnes morales ou physiques pour concourir à des dépenses d'intérêt public 34 ( * ) . Les recettes des fonds de concours sont évaluées au moment du vote de la loi de finances initiale et font l'objet de versements ultérieurs. Enfin l'emploi des fonds doit être conforme à l'intention de la partie versante.

Dans le cas du FNAP, le montant des fonds de concours est estimé dans la loi de finances initiale. En parallèle, le fonds vote son budget au mois de décembre et un arrêté porte attribution de fonds de concours, en autorisation d'engagements, au début de l'année d'exécution. Des arrêtés ultérieurs portent ouverture de fonds de concours en crédits de paiement pour les paiements effectifs.

Le FNAP s'engage à couvrir les besoins de paiement par l'attribution de crédits de paiement correspondants. Il doit donc trouver les financements pour couvrir les besoins des opérations nouvelles, ce qui impose de compenser le désengagement de l'État par l'augmentation de la contribution des financeurs existants (bailleurs sociaux) ou la participation de nouveaux acteurs (Action Logement).

Quatre fonds de concours ont été mis en place pour les versements du FNAP sur le programme 135 :

- fonds 1 : fonds de concours n° 1-2-00478 « Contribution du FNAP à la mise en oeuvre de la politique du logement - Restes à payer », ci-après « fonds 1 » : correspondant aux engagements juridiques antérieurs à la création du FNAP, ce fonds est abondé uniquement en crédits de paiement ;

- fonds 2 : fonds de concours n° 1-2-00479 « Contribution du FNAP à la mise en oeuvre de la politique du logement - Opérations nouvelles », ci-après « fonds 2 » ;

- fonds 3 : fonds de concours n° 1-2-00480 « Contribution du FNAP à la mise en oeuvre de la politique du logement - PLAI adaptés et IML 35 ( * ) communes carencées », ci-après « fonds 3 » ;

- fonds 4 : fonds de concours n°1-2-00494 « Contribution du FNAP à la mise en oeuvre de la politique du logement - Actions d'accompagnement et d'ingénierie sociale dans le cadre de MOUS », ci-après « fonds 4 ».

Les décisions de versement au programme 135 sont signées par le président du conseil d'administration du FNAP au fur et à mesure de la réception des crédits.

En pratique, selon les éléments transmis par l'administration centrale :

- une première délégation de crédits de paiement au fonds de concours « restes à payer » intervient au début du mois de mars, après la publication des arrêtés portant report de crédits sur le programme 135 ;

- après la conclusion de l'avenant annuel à la convention entre l'État et le FNAP, est publié l'arrêté portant ouverture des autorisations d'engagement préalables sur le programme 135 pour le fonds 2 (opérations nouvelles). 80 % des autorisations d'engagement sont alors déléguées, non compris en 2018 l'enveloppe de 10 millions d'euros consacrée aux démolitions ;

- les autorisations d'engagement et crédits de paiement relatifs aux actions d'accompagnement et d'ingénierie sociale dans le cadre « MOUS » (fonds 4) sont ouverts au cours du second trimestre ;

- les autorisations d'engagement et crédits de paiement relatifs aux PLAI adaptés et à l'intermédiation locative dans les communes carencées (fonds 3) sont ouverts après la validation du cahier des charges de l'appel à projets PLAI adaptés par le conseil d'administration du FNAP à la fin du premier semestre. Cette procédure a toutefois été transformée en 2018 (voir infra ) ;

- en 2018, l'enveloppe de 10 millions d'euros consacrée aux démolitions est déléguée au cours du deuxième trimestre, une fois les projets retenus par le président du conseil d'administration ;

- les autres délégations de crédits de paiement aux fonds 1 (restes à payer) et 2 (opérations nouvelles) interviennent tout au long de l'année ;

- une nouvelle délégation de crédits a lieu au mois d'octobre à destination des responsables de budgets opérationnels de programme.

Les contributions des bailleurs sociaux arrivent en cours d'année au FNAP. La CGLLS organise en effet deux campagnes annuelles de collecte des cotisations des bailleurs : la première, au printemps, représente deux tiers des recettes annuelles attendues, tandis que la deuxième, vers le mois de novembre, apporte le tiers restant. Cette deuxième campagne arrivant peu de temps avant la fin de gestion, les crédits correspondants, versés par la CGLLS au FNAP, sont utilisés en tout ou en partie pour entamer l'année de gestion suivante.

Les fonds de concours ont ainsi été alimentés au cours de l'année 2017 par les arrêtés suivants.

Arrêtés portant ouverture de fonds de concours

En millions d'euros

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Observations

Reports

12,92

123,71

Arrêté du 21 février 2017

445,477

0

Fonds 2 (opérations nouvelles).

Arrêté du 3 juillet 2017

165,29

165,29

Fonds 1.

Arrêté du 1 er octobre 2017

4,7

4,7

Fonds 4 (actions annexes de type MOUS et accompagnement)

Arrêté du 10 novembre 2017

72,488

84,131

Fonds 1 : 72,488 millions d'euros en AE et CP sur le fonds 1 (restes à payer).

Fonds 2 : 11,642 millions d'euros en CP.

Arrêté du 19 décembre 2017

112

112

Fonds 1 : 100 millions d'euros en AE.

Fonds 3 (PLAI adaptés et IML) : 12 millions d'euros en AE et CP.

Les CP sont presque tous reportés car rattachés tardivement.

Source : commission des finances à partir du rapport de l'ordonnateur pour 2017, annexé au conseil d'administration du FNAP du 14 mars 2018, et de la note de la Cour des comptes sur l'exécution budgétaire de la mission « Égalité des territoires et logement » en 2017

Il convient de noter que les autorisations d'engagement versées sur le fonds 1 sont bloquées en gestion , car ce fonds de concours a vocation à couvrir les restes à payer d'opérations de construction de logements sociaux déjà lancées.

De plus, le décret du 20 juillet 2017 ayant annulé 96 056 462 euros de crédits de l'État, un montant égal d'autorisations d'engagements , parmi celles qu'avait ouvertes l'arrêté du 21 février, a été bloqué afin de respecter la règle selon laquelle les autorisations d'engagement ouvertes ne dépassent pas les crédits de paiement de l'année.

Au total, les versements sur les quatre fonds de concours sont les suivants :

En euros

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Fonds 1 « Restes à payer »

337 778 355,18 € (bloquées)

337 778 355,18

Fonds 2 « Opérations nouvelles »

0

642 266,82

Fonds 3 « PLAI adaptés et IML »

4 700 000

4 700 000

Fonds 4 « Actions d'accompagnement et d'ingénierie sociale »

12 000 000

12 000 000

C. DEPUIS UN AN, L'ABSENCE DE PRÉSIDENT A REMIS L'ADMINISTRATION EN PREMIÈRE LIGNE

1. L'exécution 2017 a été perturbée par l'annulation d'une grande partie des versements de l'État

Le décret n° 2017-1182 du 20 juillet 2017 portant ouverture et annulation de crédits a conduit à diminuer de 96 056 462 euros la contribution de l'État au budget 2017 du FNAP, initialement prévue à 180 187 084 euros, la ramenant à un montant actualisé de 84 130 622 euros 36 ( * ) .

Le montant de la contribution de l'État au FNAP était fixé à 196,19 millions d'euros en loi de finances initiale pour 2018. Une réserve de précaution a été appliquée sur ce montant, à hauteur de 16 millions d'euros en autorisations d'engagement comme en crédits de paiement. La contribution effective de l'État était prévue à hauteur de 180,19 millions d'euros dans le budget de l'opérateur. Au final, sa contribution effective s'établit à 84,13 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement, soit une baisse de 96,06 millions d'euros.

Source : Cour des comptes, note d'exécution budgétaire 2017

La participation de l'État a donc finalement baissé par rapport à 2016 , où elle était de 100 millions d'euros, alors qu'elle devait presque doubler.

La baisse des crédits a conduit à une réduction des versements au programme 135, aussi bien au titre des restes à payer (en crédits de paiement) que des engagements pour les opérations nouvelles (en autorisations d'engagement). Les crédits d'aides à la pierre « classiques » (fonds 1 et 2 du FNAP) se sont ainsi établis à 349,42 millions d'euros, alors que le budget initial de l'opérateur prévoyait un montant de 445,48 millions d'euros.

La baisse des crédits a ainsi un effet non seulement sur l'année en cours, mais également sur les années suivantes , en application de la règle de « bonne gestion » qui prévoit que le montant annuel des engagements ne peut dépasser le montant total des versements effectués par le Fonds national des aides à la pierre au cours de l'exercice.

Le conseil d'administration du FNAP , réuni le 20 septembre 2017 , a refusé de voter le budget rectificatif qui lui était soumis . Les autorisations d'engagement correspondantes, d'un montant de 96 millions d'euros, ont alors été gelées.

2. Le président a démissionné en octobre 2017 pour protester contre le désengagement de l'État

M. Emmanuel Couet, président du FNAP, a remis sa démission au ministre de la Cohésion des territoires le 6 octobre 2017, après avoir reçu confirmation de la diminution de la contribution de l'État à 50 millions d'euros pour 2018, alors que cette contribution avait été prévue à hauteur de 200 millions d'euros pour 2017.

La contribution des bailleurs augmentant dans le même temps de 200 à 375 millions d'euros, il a entendu protester contre la « rupture du pacte fondateur » constitué par le principe du financement paritaire du FNAP par l'État et les bailleurs sociaux 37 ( * ) .

3. L'administration centrale est à nouveau en première ligne

Comme le prévoit le code de la construction et de l'habitation 38 ( * ) en cas d'empêchement du président ou de vacance, un des administrateurs nommés par le ministre chargé du logement supplée le président depuis cette date.

M. Laurent Girometti, alors directeur de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages (DHUP) et déjà membre du conseil d'administration du FNAP, a été désigné par courrier du 5 décembre 2017, signé des trois ministres de tutelle, président du conseil d'administration du FNAP par intérim.

Le président actuel par intérim est M. François Adam depuis le 1 er juin 2018, également successeur de M. Girometti en tant que DHUP par décret du 9 mai 2018.

4. Le président devrait assurer une fonction d'impulsion

Les représentants des divers organismes représentés au conseil d'administration, reçus en audition par votre rapporteur spécial, ont souligné l'importance du rôle du président dans un organisme tel que le FNAP.

Le président du conseil d'administration est nommé par les ministres chargés du logement, de l'économie et du budget, qui doivent le désigner parmi les représentants des collectivités territoriales au conseil d'administration. Il ne peut exercer plus de deux mandats consécutifs 39 ( * ) .

Si la composition du conseil d'administration reflète la diversité des acteurs et des décideurs de la construction de logements sociaux, le Fonds ne dispose pas de moyens de fonctionnement propres. Il s'appuie donc sur les moyens matériels et humains mis à disposition par le ministre chargé du logement 40 ( * ) , c'est-à-dire sur la DHUP.

La DHUP fournit donc au conseil d'administration des documents et des analyses dont votre rapporteur spécial a pu constater la grande qualité. Ces documents relèvent toutefois, par construction, d'une approche administrative et chiffrée qui nécessite d'être enrichie par l'approche plus diversifiée et les remontées du terrain qu'apportent les bailleurs sociaux comme les collectivités, notamment délégataires.

Le rôle du président est donc d'infléchir les travaux du conseil et en particulier d'organiser le travail de l'administration pour s'assurer que les décisions de répartition et d'utilisation des aides à la pierre reflètent les besoins et les orientations souhaitées par l'ensemble du conseil d'administration.

Plusieurs personnes ont ainsi exprimé à votre rapporteur spécial le sentiment que le conseil d'administration du fonds, dépourvu de président, fonctionnait au ralenti et qu'ils manquaient de visibilité sur son action.

Une réunion de ce conseil d'administration programmée pour le 27 juin dernier a ainsi été annulée au dernier moment. Or le président pourrait assurer une meilleure coordination afin que chaque membre du conseil d'administration dispose du même niveau d'information, que les convocations soient transmises à temps et que les documents soient diffusés assez tôt pour qu'ils aient le temps d'en prendre connaissance.

D'après les éléments recueillis par votre rapporteur spécial, le remplaçant de France urbaine n'a toujours pas été nommé, ce qui rend difficile la nomination d'un président puisque celui-ci doit faire partie des représentants des collectivités territoriales.

Votre rapporteur s'étonne donc que, près d'un an après la démission de M. Couet, le FNAP n'ait toujours pas de président et appelle à un déblocage rapide de cette situation.

Recommandation n° 1 : revenir à un fonctionnement « normal » du FNAP, avec un président en mesure de redonner au conseil d'administration une meilleure capacité de contrôle et d'impulsion.

II. LA GESTION DES AIDES À LA PIERRE DOIT ENCORE SE RAPPROCHER DES TERRITOIRES

Bien que le FNAP s'appuie sur un appareil statistique et un travail d'enquêtes auprès des acteurs locaux, il reste des divergences de point de vue entre le niveau national et le niveau local. D'une manière générale, les collectivités locales ne jouent pas encore le rôle qui devrait leur revenir et le processus de délégation des aides à la pierre demeure inachevé, laissant à l'État un rôle sans doute démesuré par rapport au faible niveau des ressources qu'il apporte.

A. LA PRISE EN COMPTE DES BESOINS LOCAUX PEUT PROGRESSER

La prise en compte des besoins locaux est essentielle, car le marché du logement est d'abord local . Les objectifs nationaux, en particulier sur une typologie donnée, ne peuvent s'appliquer de manière indifférenciée à tous les territoires.

C'est pourquoi la répartition infra-régionale des crédits et des objectifs entre les territoires de gestion laisse une importante marge d'appréciation au préfet . Il doit pour cela s'appuyer sur un diagnostic partagé de l'état du marché et des besoins locaux, qui se fonde sur les bases de données disponibles et le retour des différents acteurs.

Les sources pour la connaissance des besoins sont multiples : par exemple les bases de données et les études menées par les collectivités territoriales ou d'autres organismes locaux.

Les chiffres offrent une base objective, mais nécessairement partielle de la réalité des besoins . Ainsi certaines personnes auditionnées par votre rapporteur spécial dans les Hauts-de-France ont-elles souligné l'importance du parc privé dégradé. De plus le point de vue des services de l'État, de ceux des collectivités et des bailleurs sociaux n'est pas toujours identique sur les types de logement (PLAI, PLUS, PLS...) et leur typologie (T1, T2, T3, logements familiaux) dont la production est nécessaire dans un territoire donné.

Il apparaît donc nécessaire , malgré le développement des outils informatiques, d'améliorer encore le partage de l'information sur le niveau des besoins et l'état du marché, afin de faciliter la convergence des diagnostics.

La mise en place du système national d'enregistrement (SNE) a toutefois été un vrai progrès qui a permis d'enrichir la compréhension des besoins en logement locatif social.

1. Le SNE, un outil indispensable mais non suffisant

La mise en place en 2011 du système national d'enregistrement (SNE) des demandes de logement locatif social, en application de la loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion du 25 mars 2009 et de son décret d'application 41 ( * ) , a amélioré la connaissance des besoins afin d'orienter le pilotage des aides à la pierre.

Il permet de connaître les caractéristiques des ménages du parc social et ainsi de fonder des décisions favorisant la mixité sociale. Les données du SNE sont particulièrement utiles pour déterminer la demande en logements PLAI, critère de détermination des enveloppes régionalisées du FNAP. Elles permettent aussi, en centralisant l'ensemble des demandes, d'éviter l'apparition de doublons.

Le SNE est également un outil de mesure de la pression sur la demande de logement social, particulièrement nécessaire depuis que la loi « Égalité et citoyenneté » du 27 janvier 2017 42 ( * ) a différencié les obligations de production de logements sociaux à imposer aux communes soumises à la loi SRU. Le taux « normal » de 25 % est réduit à 20 % dans les agglomérations où le nombre de demandes de logements sociaux par rapport au nombre d'emménagements annuels, hors mutations internes, dans le parc locatif social ne justifie pas de réaliser un effort de production supplémentaire 43 ( * ) . Le taux de 20 % s'applique également à des communes en croissance démographique auxquelles le taux normal ne s'applique pas et dont le parc de logements nécessite un effort de production. De plus un décret peut exempter les communes de ces obligations en fonction du niveau de la demande en logements locatifs sociaux.

C'est également en s'appuyant sur les données du SNE que l'État a identifié l'existence d'un besoin important de petits logements sociaux (T1 et T2) dans toutes les régions, ce qui a conduit à l'attribution d'un bonus pour ces logements dans l'exercice de programmation 2016 (voir infra).

Enfin, la base de données du SNE est utilisée pour la répartition infra-régionale de l'enveloppe attribuée à chaque préfet de région.

Le SNE, si utile soit-il, ne saurait toutefois constituer l'unique moyen de connaître les besoins locaux .

Les demandes inscrites au SNE constituent une base statistique qui, comme toute donnée, demande à être qualifiée et interprétée. Certaines demandes sont incomplètes et toutes ne présentent pas le même caractère d'urgence, sans que cela soit apparent dans le système : à la fin de 2016, le nombre de demandes figurant dans le SNE était de près de 1,9 million, ce qui ne signifie pas que le besoin réel soit aussi important 44 ( * ) .

De plus il s'agit d'un système déclaratif : il ne permet donc de connaître que les besoins qui se concrétisent par une demande effective. Certaines personnes reçues par votre rapporteur spécial ont souligné qu'il serait utile de mesurer également la demande potentielle, qui ne s'exprime pas nécessairement mais pourrait faire l'objet d'études. Or le FNAP ne dispose pas de moyens en ce sens.

Recommandation n° 2 : améliorer la prise en compte des besoins locaux par un meilleur partage des différentes sources d'information et leur enrichissement par des études.

2. La question de l'aide à la réhabilitation

Le FNAP a défini en 2018 une enveloppe principale pour la programmation d'une offre de logement social neuve , principalement en zone tendue, ainsi qu'une enveloppe secondaire pour la démolition, plutôt en zone non tendue.

Lors de son déplacement dans les Hauts-de-France, région dans laquelle l'habitat social est plus ancien que dans d'autres régions, votre rapporteur spécial a pu constater qu'il y avait également un besoin de réhabilitation , pour lequel le FNAP ne propose actuellement pas de crédits.

La DHUP, dans les réponses obtenues dans le cadre du présent contrôle, fait observer que d'autres aides ciblent particulièrement la réhabilitation :

- la Caisse des dépôts et consignations propose le prêt à l'amélioration (PAM), allant jusqu'à 35 ans, pour des travaux d'amélioration ou de réhabilitation du patrimoine de logements conventionnés à l'APL ;

- les travaux de rénovation thermique peuvent bénéficier de l'éco-prêt logement social (Éco-PLS), également accordé par la Caisse des dépôts, dans la limite de 16 000 euros par logement en métropole et 18 000 euros en outre-mer, cumulable avec le prêt à l'amélioration ;

- les prêts de haut de bilan bonifiés permettent de réaliser aussi bien des travaux de rénovation thermique que de la construction neuve. Les remboursements ne commencent qu'à l'issue d'une période de 20 ans, ce qui permet d'apporter aux organismes HLM des quasi-fonds propres leur permettant d'obtenir plus facilement des prêts. La Caisse des dépôts, Action Logement et le Gouvernement ont ainsi signé le 5 juin 2018 dernier une nouvelle convention mettant en place une enveloppe de 2 milliards d'euros de prêts bonifiés sur trois ans, destinée à la production neuve pour 80 % et à la réhabilitation de logements sociaux pour 20 %. Toutefois la tranche 2018 porte entièrement sur la production neuve ;

- les investissements en efficacité énergétique et en énergies renouvelables dans le secteur du logement sont également éligibles au Fonds européen de développement régional (FEDER).

Votre rapporteur spécial considère que la réhabilitation de logements existants ne devrait pas être exclu du mécanisme de soutien, notamment dans des zones où le bâti existant est ancien et dégradé ou lorsque le foncier disponible est rare.

Recommandation n° 3 : inclure la réhabilitation de logements locatifs sociaux dégradés parmi les opérations soutenues par le FNAP, en fonction des besoins et des coûts observés localement.

3. L'incertitude sur l'enveloppe spécifique consacrée aux PLAI adaptés

Dans le cadre du plan pluriannuel de lutte contre la pauvreté et pour l'inclusion sociale, le ministère en charge du logement lance chaque année, depuis 2013, un appel à projets pour la réalisation de logements « très sociaux », dits « PLAI adaptés ».

S'agissant aussi bien de ses règles de distribution que de son alimentation, l'enveloppe « PLAI adaptés » se distingue profondément du « droit commun » des aides du FNAP.

a) Des demandes très inférieures aux crédits disponibles

En 2017, 22 861 220 euros en autorisations d'engagement étaient disponibles sur le programme 135 pour les PLAI adaptés, dont 10 861 220 euros issus de reports de l'année précédente et 12 000 000 euros ouverts en fin de gestion 2017 45 ( * ) . Sur ce montant :

- un montant de 6 857 098 euros d'autorisations d'engagements a été délégué dans les régions, où elles ont été consommées à hauteur de 94 % ;

- le solde des autorisations d'engagement non consommées ou non déléguées, soit 16 400 447 euros, a été reporté en 2018.

Le montant élevé des reports indique le faible succès des appels d'offres.

Le nombre de PLAI adaptés financés est passé de 181 en 2016 à 716 en 2017 , la moyenne étant de 489 par an sur les cinq appels à projets de 2013 à 2017. Toutefois cette augmentation du nombre de PLAI adaptés programmés est due pour l'essentiel à l'ouverture du programme aux résidences sociales et aux pensions de famille , dans le cadre de l'appel à projets 2017 : le nombre de logements ordinaires est inférieur aux premières années du programme.

b) Le remplacement des appels d'offres par une nouvelle procédure de territorialisation à l'automne 2018

L'année 2018 a ainsi été marquée par un manque de visibilité . Alors qu'un appel d'offres était lancé les années précédentes, les premiers mois se sont passés sans définition d'un nouveau cahier des charges.

Certaines des personnes auditionnées par votre rapporteur spécial ont indiqué que la non-publication d'un nouveau cahier des charges cette année soulevait des inquiétudes chez les bailleurs sur la pérennité du cahier des charges en cours, entrainant un attentisme de leur part. L'administration indiquait pourtant que le cahier des charges 2017 demeure en vigueur, ce qui ne devait donc pas bloquer le développement des opérations.

L'annulation du conseil d'administration du 27 juin, qui devait être consacré à l'adoption de mesures relatives aux PLAI adaptés, a été le résultat de la volonté du ministère, constatant le succès insuffisant des précédents appels d'offres, de prendre le temps de modifier la formule .

C'est ainsi que les nouvelles règles n'ont été soumises au conseil d'administration du FNAP que le 21 septembre 2018.

Le cahier des charges des années précédentes, qui demandait des contreparties importantes aux opérateurs, a été remplacé par une présentation plus succincte des orientations envoyées aux préfets de région. Ces orientations reposent sur deux principes : loyer maîtrisé et gestion locative adaptée.

La procédure est désormais déconcentrée et rapprochée de l'échelle locale , comme c'est le cas pour l'enveloppe principale du FNAP destinée aux opérations nouvelles. L'appel d'offres national est ainsi remplacé par une répartition entre les régions de l'enveloppe, en distinguant deux catégories de logements parmi les PLAI adaptés : logements ordinaires et résidences sociales (y compris pensions de famille).

Au total, une enveloppe de 10 millions d'euros est répartie entre les régions pour un objectif global de 979 logements PLAI adaptés. Les deux millions restants sont conservés au niveau central et pourront être sollicités par les DREAL, au fur et à mesure de l'instruction des projets.

Enfin, les modalités de sélection et de financement des projets sont explicitement pluriannuelles : le document de présentation prévoit qu'elles demeureront en vigueur jusqu'à une nouvelle décision du conseil d'administration du FNAP.

Votre rapporteur prend acte de la mise en place de cette nouvelle procédure et espère que la flexibilité des règles, leur garantie de stabilité et la déconcentration de la gestion de l'enveloppe permettront de favoriser le déploiement des PLAI adaptés .

4. L'intermédiation locative

L'intervention publique pour le développement de l'intermédiation locative prend plusieurs formes :

- l'État finance un dispositif d'intermédiation locative sur les crédits du programme 177 « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables », les personnes ou ménages étant orientées par le service d'accueil et d'orientation (SIAO). Le parc d'intermédiation locative financé par l'État comprend 31 274 places, au 31 décembre 2017, dont 80 % en location et sous-location et 20 % en mandat de gestion 46 ( * ) . Plus de la moitié des places sont mobilisées en région Île-de-France 47 ( * ) . Dans le cadre du plan Logement d'abord, l'objectif d'accroissement du parc d'intermédiation locative financée par l'État est de 40 000 places supplémentaires sur cinq ans, par rapport au 1 er janvier 2018 ;

- sur le même programme, des places d'intermédiation locative sont financées dans le cadre du dispositif de coordination thérapeutique « Un chez-soi d'abord » ;

- le FNAP, via le programme 135, finance un dispositif spécifique en vue du développement de l'offre de logements du parc privé en intermédiation locative dans les communes faisant l'objet d'un arrêté de carence au titre de la loi SRU. Le dispositif financé par le FNAP vise surtout les zones les plus tendues, où les communes ont le plus de difficultés à atteindre les objectifs SRU. Les logements ainsi financés ne sont pas comptabilisés dans l'objectif de 40 000 places supplémentaires rattaché au programme 177 ;

- les fonds de solidarité pour le logement (FSL), gérés au niveau départemental, et les collectivités territoriales contribuent également au développement de l'intermédiation locative.

Or le déploiement de l'intermédiation locative est entravé par le retard de publication d'un arrêté permettant le décompte SRU des logements placés en intermédiation locative. Cet arrêté, prévu depuis janvier 2017 par l'article L. 302-5 du code de la construction et de l'habitation 48 ( * ) , doit fixer le plafond de loyer applicable aux logements du parc privé confiés en intermédiation locative à un opérateur agréé en vue sa sous-location.

Une question écrite, posée à ce sujet le 12 juillet dernier par notre collègue Dominique Estrosi Sassone, sénatrice des Alpes-Maritimes, au ministre de la Cohésion des territoires, n'a pas reçu de réponse à ce jour 49 ( * ) .

Votre rapporteur spécial s'étonne du retard de publication de cet arrêté , alors que les objectifs du plan Logement d'abord sont particulièrement ambitieux.

Il soutient le développement de l'intermédiation locative afin de limiter le passage par les dispositifs d'hébergement d'urgence, avec un coût par place très inférieur. Le groupe de travail sur le financement et la fiscalité du logement, créé au sein de la commission des finances du Sénat, avait ainsi préconisé en octobre 2015 50 ( * ) de renforcer les avantages issus du dispositif d'incitation fiscale à l'investissement locatif dans l'ancien dit dispositif « Borloo » et avait été entendu puisque ce dernier dispositif a été remplacé par le dispositif « Cosse », qui améliore les taux d'abattement d'imposition des revenus locatifs applicables pour la location de ménages modestes, en particulier dans le cadre de l'intermédiation locative.

Cet objectif suppose toutefois, comme votre rapporteur spécial l'avait signé dans son rapport sur les dispositifs d'hébergement d'urgence 51 ( * ) , d'assurer une communication active à destination des bailleurs en s'appuyant sur les professionnels de l'immobilier, et d'instaurer un dispositif d'incitation efficace envers les bailleurs. Les services déconcentrés ont besoin d'un cadre et de lignes directrices leur permettant de développer ce type de dispositif innovant et il convient d'espérer que la circulaire diffusée le 4 juin dernier favorisera le développement du dispositif.

B. LE RÔLE DES COLLECTIVITÉS DEMEURE TROP EN RETRAIT

1. Une répartition des fonds infra-régionale réalisée par le préfet
a) Les principes de répartition infra-régionale

La répartition infra-régionale est assurée par les préfets de région .

Elle s'appuie sur l'analyse de la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL), qui est le responsable de budget opérationnel de programme (BOP) du programme 135 délégué au niveau régional.

Aux termes de la lettre de notification envoyée par le ministre après le conseil d'administration du FNAP qui arrête le budget et la répartition des crédits entre les régions, le préfet doit notamment :

- tenir compte de la nécessité d'inciter et d'accompagner l'effort de production dans les communes soumises à une obligation de production de logements sociaux en application de l'article 55 de la loi SRU 52 ( * ) ;

- limiter le développement de l'offre de logements sociaux dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville, déjà fortement pourvus ;

- s'abstenir en particulier de mobiliser les crédits d'aide à la pierre pour la reconstitution de logements démolis dans le cadre du nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU) ;

- de manière générale, favoriser le développement d'une offre nouvelle de logements sociaux, surtout dans les zones où l'accès au logement social est le plus difficile, mais également dans des zones où le marché est détendu si des besoins sont identifiés.

Outre ces règles générales, le préfet adapte et module les enveloppes et objectifs assignés aux territoires de gestion en tenant compte des particularités des besoins locaux, telles que la nature du parc de logement social, la localisation des opérations à financer ou la composition sociale de la population.

La lettre de notification prévoit également que le préfet doit mener une large concertation impliquant tous les partenaires de la chaîne de production : services de l'État, bailleurs sociaux, collectivités territoriales, délégataires. Cette concertation doit permettre de dégager des priorités régionales, dans le respect des orientations nationales. Le « dialogue de gestion » définit la feuille de route à suivre pour cette concertation.

En 2018, le Gouvernement met en particulier l'accent sur la mise en oeuvre au niveau régional du plan « logement d'abord et lutte contre le sans-abrisme », qui a pour objectif au niveau national le financement de plus de 40 000 PLAI, dont 10 000 places en pensions de famille à ouvrir d'ici à 2022. Ce plan vise à orienter les personnes sans domicile en priorité vers un logement durable, en évitant le passage par un hébergement provisoire. Suite à un appel à manifestation d'intérêt doté d'un budget de 10 millions d'euros, 24 territoires 53 ( * ) ont été choisis le 30 mars pour mettre en oeuvre ce plan de manière accélérée.

Le préfet élabore ensuite un projet de répartition détaillée entre les territoires de gestion, qui sont de deux sortes :

- des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) ou des départements qui ont signé une convention de délégation de gestion des aides la pierre ;

- des directions départementales des territoires (et, le cas échéant, de la mer), dans les territoires où une convention de délégation n'a pas été conclue.

Ce projet est soumis pour avis au comité régional de l'habitat et de l'hébergement (CRHH), qui remet un avis. Le préfet en rend ensuite compte au conseil d'administration du FNAP en transmettant, au plus tard à la fin du mois de février, un premier document de synthèse régional à la direction de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages (DHUP).

Lors de la présentation devant le CRHH, le préfet peut prévoir une tranche conditionnelle d'objectifs afin d'anticiper les redéploiements interrégionaux de crédits et d'objectifs réalisés en cours d'année, en fonction de l'avancement de la programmation sur les territoires.

L'exemple des Hauts-de-France et l'effet de la fusion des régions

Dans les Hauts-de-France, les services de l'État se sont notamment interrogés sur les niveaux de forfaits à retenir pour les PLAI. La formation des coûts a été étudiée en partant des zonages A, B et C et en cherchant à comprendre la structure des coûts globaux de production, au-delà des seuls logements sociaux.

Cet exercice a permis de constater l'existence, avant la fusion des régions Nord et Picardie, l'existence de différences importantes entre les forfaits de subvention PLAI d'un côté ou de l'autre de la limite entre les régions. La fusion a donc permis d'harmoniser les niveaux de subvention.

b) La gestion locale des aides à la pierre est distincte de celles provenant de l'Anah ou de l'Anru

Les aides à la pierre destinées au logement social suivent un circuit distinct de celui des aides au logement privé par l'Agence nationale de l'habitat (Anah) aussi bien que celles liées au programme national pour la rénovation urbaine géré par l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU) .

S'agissant des aides de l'Anah, les principes de gestion sont proches des crédits du FNAP, puisque le même principe de délégation est mis en place, avec la possibilité pour le délégataire d'instruire lui-même les dossiers ou de confier cette tâche à l'Anah, c'est-à-dire à l'administration déconcentrée. Le dialogue de gestion qui permet de suivre l'utilisation des crédits au niveau local et de faire remonter les besoins est également utilisé pour les crédits Anah. Toutefois les services en charge de l'instruction de ces aides distinguent en général en leur sein un pôle consacré au parc public et un pôle consacré au parc privé. Les objectifs sont en effet de nature différente, puisque les aides de l'Anah visent la réhabilitation du parc privé alors que les aides du FNAP sont destinées pour l'essentiel au développement d'une offre neuve de logements sociaux.

Les aides du FNAP se distinguent encore plus de celles consacrées aux programmes gérés par l'ANRU : programme national pour la rénovation urbaine (PNRU), prolongé depuis 2014 par le nouveau programme de renouvellement urbain (NPNRU), et programme national de requalification des quartiers anciens dégradés (PNRQAD). Les aides de l'ANRU se placent dans un cadre contractuel et contribuent au financement d'opérations globales d'aménagement (PNRU et NPNRU) ou de réhabilitation d'un quartier défavorisé (PNRQAD). Ces programmes financent par exemple des opérations de démolition et de reconstruction de logements PLUS ou PLAI. L'instruction des dossiers ne fait pas l'objet d'une délégation aux collectivités ou à leurs groupements.

Les aides à la pierre du FNAP, en revanche, ont un périmètre d'intervention plus large puisqu'elles s'intègrent dans les orientations fixées localement par les plans locaux de l'habitat. La programmation étant annuelle, elle peut s'adapter avec plus de flexibilité aux circonstances de marché locales que les aides de l'ANRU encadrées par le cadre contractuel. Elles visent également un public plus diversifié, avec notamment la prise en compte des populations les plus défavorisées pour lesquelles l'offre classique de logement social n'est pas adaptée. Enfin le FNAP ne finance pas la reconstruction.

La gestion des deux types d'aide est donc complètement séparée, y compris au niveau des outils informatiques de suivi : AGORA pour l'ANRU, GALION pour les aides à la pierre.

Les territoires d'action respectifs de l'ANRU et des aides à la pierre ne sont pourtant pas entièrement distincts . Le règlement général de l'ANRU relatif au NPNRU prévoit en effet que la reconstitution de l'offre de logements locatifs sociaux supprimée dans le cadre d'opérations de démolition a lieu prioritairement en dehors des quartiers prioritaires de la politique de la ville. De plus cette reconstitution se fait à 60 % sous forme de logements PLAI 54 ( * ) .

c) Le suivi local des aides

Le suivi local est nécessaire afin de rendre compte de l'utilisation des crédits au conseil d'administration du FNAP.

Au mois de janvier, une enquête est menée auprès des responsables de budget opérationnel de programme régionaux afin de préciser l'échéancier des restes à payer, le niveau de trésorerie des délégataires et la situation des retards de paiement, enfin l'engagement hors bilan des délégations de gestion des aides à la pierre.

Les organismes de logement social déposent leurs demandes d'aides à la pierre dans le portail web SPLS (suivi et programmation des logements sociaux), qui concourt à la connaissance des besoins en financement et assure également l'information des organismes sur le traitement de leur demande.

La DDT(M) ou les délégataires assurent l'instruction des dossiers de financement à l'aide du logiciel GALION, géré par la direction générale de l'aménagement, du logement et de la nature (DGALN). Ce logiciel permet de suivre une opération depuis son lancement jusqu'à son terme : financement, signature de la convention APL, mise en chantier, achèvement des travaux et mise en location.

L'ensemble des informations sont alors stockés quotidiennement dans l'infocentre SISAL, dont l'accès est ouvert à des tiers tels que l'ANRU. Une interface avec Chorus, le logiciel de comptabilité de l'État, permet de transmettre les engagements juridiques et le service fait liés aux opérations instruites par l'État. Une autre interface avec le système SITADEL permet de nourrir les analyses statistiques.

Les délégataires utilisent leurs propres outils pour instruire des dossiers, dotés de leurs propres interfaces avec le système SISAL.

Source : site Financement du logement social (ministère de la cohésion des territoires)

d) La question du soutien aux communes carencées

Votre rapporteur s'est demandé s'il ne convenait pas d' orienter les fonds du FNAP plus particulièrement vers les communes ayant fait l'objet d'un arrêté de carence parce qu'elles n'atteignent pas les objectifs de production de logement social qui leur sont assignés en application de l'« article 55 » de la loi SRU.

À cet égard, la DHUP lui a indiqué que le Fonds ne tient pas directement compte de ce critère dans l'établissement de la programmation nationale des aides à la pierre : il se fonde sur les critères de coût des opérations, de demande potentielle en logement PLAI et de cherté des loyers. Il ne donne pas d'orientations sur la modulation du montant de subvention alloué si l'opération est localisée en commune carencée. Il n'y a donc pas de lien direct entre le montant de subvention alloué à un territoire et le nombre de communes en carence sur ledit territoire.

Toutefois, la phase d'évaluation des besoins , dans le cadre du dialogue infra-régional, prend en compte les orientations imposées de la législation, au premier rang desquelles figurent les objectifs de rattrapage SRU . La programmation en logements PLUS/PLAI/PLS respecte donc nécessairement les obligations SRU.

Par ailleurs la lettre de notification adressée chaque année aux préfets de région souligne que les modalités de programmation infrarégionale « devront à la fois respecter la réglementation relative au financement du logement social, et plus particulièrement tenir compte de la nécessité d'inciter et d'accompagner l'effort de production dans les communes soumises à l'article 55 de la loi SRU, afin de garantir la mixité sociale en tout point du territoire, ce qui constitue une priorité du Gouvernement . » 55 ( * )

Une majoration de subvention dans les communes carencées peut donc être effectuée lors de la répartition infra-régionale des fonds.

Votre rapporteur approuve cette flexibilité qui, par son caractère mesuré, ne peut être suspectée de dispenser les « mauvais élèves » de tout effort. Elle se base en effet en premier lieu sur la constatation des besoins locaux et le montant relativement limité de la subvention ne saurait, à lui seul, suffire à faire sortir la commune de sa situation de carence. La première condition pour que la commune se rapproche du respect des obligations SRU est qu'elle parvienne à impulser le développement de projets.

2. Mener à son terme le processus de délégation des aides à la pierre aux collectivités territoriales ou à leurs groupements

La délégation de la gestion des aides à la pierre concernait en 2016 111 collectivités ou groupements, dont 12 métropoles, une collectivité à statut particulier (la métropole de Lyon), 8 communautés urbaines, 61 communautés d'agglomération, 3 communautés de commune et 25 conseils départementaux 56 ( * ) .

La convention de délégation concerne à la fois la délégation de la gestion des aides attribuées par l'Agence nationale de l'habitat (Anah) pour l'habitat privé et celle des aides attribuées par le FNAP pour le logement social.

Lors de la convention de délégation, les délégataires peuvent opter pour laisser l'instruction des dossiers à la charge des services de l'État, c'est-à-dire de la DDT(M). C'est le cas dans 71 des 110 délégations. Le paiement des aides relève dans tous les cas de la responsabilité du délégataire et de son comptable.

Votre rapporteur a ainsi rencontré, dans les Hauts-de-France, les services d'une collectivité, la métropole européenne de Lille, qui a confié l'instruction des dossiers d'aide à la pierre à la DDTM du Nord, et d'une autre, la communauté urbaine de Dunkerque, qui a été l'une des premières, en 2006, à prendre elle-même en charge cette tâche.

La délégation des aides de l'Anah prévoit pour sa part trois modalités, qui se réduisent en pratique à deux :

- la délégation de type 1, jamais utilisée, confie l'instruction au délégataire et le paiement à l'Anah ;

- dans la délégation de type 2, la plus répandue, l'Anah assure l'instruction des dossiers et le paiement ;

- la délégation de type 3 correspond à l'exercice par le délégataire de l'instruction et du paiement.

La Cour des comptes faisait observer dans son rapport de 2011 sur la délégation des aides à la pierre que « l'évolution de l'administration déconcentrée de l'État pèse sur l'avenir du dispositif » s'agissant des délégations ne comportant pas l'instruction des dossiers : elle notait que, avec la réorganisation des services, les questions du logement relèvent des directions du territoire (DDT) alors que, dans les grands départements, la demande de logement et les relations avec les demandeurs dépendent de la direction de la cohésion sociale (DDCS) 57 ( * ) .

La Cour faisait d'ailleurs observer que, si la délégation est un processus complexe, il est en pratique « largement irréversible : la refonte de l'administration déconcentrée et la réduction concomitante des moyens humains et des compétences techniques de l'État rendent difficilement envisageable le retour à la situation antérieure dans les zones où des délégations ont été conclues. L'ampleur de la réforme conduit d'ailleurs à s'interroger sur la capacité de l'État à continuer d'exercer, dans les zones qui restent sous sa gestion directe, les compétences ailleurs déléguées. »

Votre rapporteur a constaté que l'instruction des dossiers par l'État conduisait de fait à une double instruction , le délégataire assurant lui-même une « pré-instruction ». Cette organisation n'est donc rationnelle ni pour les services du délégataire, ni pour ceux de l'administration déconcentrée, même si leurs rapports peuvent être de qualité sur le terrain.

Outre le doublon au sein des administrations , il s'agit aussi d'un surcroît de travail pour les bailleurs , qui doivent porter leurs dossiers devant le délégataire d'une part, devant l'administration départementale d'autre part lorsque celle-ci assure l'instruction.

Votre rapporteur spécial est donc favorable à la généralisation de la délégation de gestion des aides à la pierre, avec instruction des dossiers par la collectivité territoriale ou le groupement délégataire.

Il est conscient toutefois des difficultés que ce schéma peut représenter pour certaines collectivités territoriales ou intercommunalités délégataires : il peut en effet s'agir en pratique d'un transfert de charges sans compensation de la part de l'État.

La question doit donc se poser dès lors du passage à un véritable transfert de compétence, et non d'une simple convention de délégation . C'est d'ailleurs ce que propose le rapport du comité CAP 2022, remis à votre commission par le Gouvernement par un courrier en date du 20 juillet dernier, qui suggère de « transférer la compétence en matière d'aide à la pierre au niveau régional ou métropolitain ». Une réflexion serait alors nécessaire afin de déterminer le niveau de transfert le plus approprié.

Recommandation n° 4 : généraliser la délégation des aides à la pierre aux collectivités locales, avec instruction par le délégataire.

3. Des différences importantes de consommation des crédits d'une région à l'autre

La gestion en cours d'année des crédits issus du FNAP est marquée par un important redéploiement entre régions , qui s'effectue à l'automne , lorsque les enquêtes dans les régions ont permis de dégager des perspectives sur la programmation des opérations.

Les chiffres de consommation des crédits montrent en effet une différence importance de capacité de programmation entre les régions.

Consommation des autorisations d'engagement selon les régions (2017)

Source : commission des finances, à partir des données DHUP

Le niveau de consommation est particulièrement faible , compte tenu de la taille de la région, dans la région Provence-Alpes-Côte d'Azur , ce qui indique une difficulté à programmer la réalisation de logements sociaux correspondant à des besoins pourtant bien identifiés.

Les échanges réguliers, en cours d'année, permettent au cours de l'automne de procéder, par décision du président du conseil d'administration du FNAP, à plusieurs réaffectations successives de crédits.

Ainsi, en 2017, plusieurs décisions successives ont-elles permis de réaffecter des crédits importants entre la région Provence-Alpes Côte d'Azur et les autres régions dans lesquelles les besoins se font sentir d'autre part.

Réaffectation des crédits entre régions fin 2017

(en millions d'euros)

Source : commission des finances, à partir du rapport de l'ordonnateur annexé au conseil d'administration du FNAP du 14 mars 2018

Cette situation se répète d'année en année, la réalisation en cours d'année venant contredire les objectifs régionaux fixés en début d'année. La répartition régionale continue pourtant à assigner des cibles de production fondées sur les besoins mesurés, en considérant qu'il faut encourager les collectivités à les atteindre.

Les administrations régionales s'adaptent certes à cette situation et préparent en cours d'année un « vivier » de projets qui pourront être engagés dans les dernières semaines de l'année.

Pour autant, votre rapporteur spécial ne considère pas que cette situation soit satisfaisante, car elle conduit à donner un caractère en partie illusoire à la répartition des crédits fixée par le conseil d'administration du fonds . Il propose que le conseil d'administration, lorsqu'il fixe les enveloppes régionales, prenne en compte, dans une certaine mesure, le niveau réel de consommation au cours des exercices passés.

Recommandation n° 5 : prendre en compte le niveau de consommation des crédits du FNAP par chaque région dans la définition des enveloppes budgétaires.

C. LE RÔLE DE L'ÉTAT N'EST PLUS PROPORTIONNÉ AUX MOYENS FINANCIERS ET HUMAINS LIMITÉS QU'IL APPORTE

1. Une tendance longue au désengagement de l'État, malgré un discours volontariste

Il convient de rappeler qu'en 2002, la subvention budgétaire de l'État était de 5 756 euros pour les logements PLUS et de 15 582 euros pour un logement PLAI 58 ( * ) .

En 2018, le FNAP n'attribue plus d'aide à la pierre directement pour les PLUS et le montant moyen de subvention pour les PLAI varie de 6 000 euros à moins de 10 000 euros par logement, sauf dans les régions Corse (17 324 euros) et Île-de-France (20 944 euros). Cette subvention provient essentiellement de la péréquation entre les bailleurs sociaux, la contribution de l'État ne comptant que pour 8 % des ressources du fonds.

Il s'agit donc d'un véritable retrait de l'État du financement de la construction de logements sociaux par les aides à la pierre.

Cela ne signifie pas pour autant que le coût du logement social sur les finances publiques est réduit : ce coût ne passe plus par des subventions directes mais par les prêts aidés et, hors zones traitées par le FNAP, des subventions à l'Anru, ainsi que par les aides personnelles au logement qui facilitent l'accès au logement.

Lors de la création du FNAP, la loi de finances pour 2016 avait prévu un financement à quasi-parité entre les crédits budgétaires de l'État , soit 250 millions d'euros en crédits de paiement. On peut rappeler que, à cette occasion, le montant prévu en loi de finances initiale, de 100 millions d'euros, a été abondé à hauteur de 150 millions d'euros par amendement lors de l'examen du texte à l'Assemblée nationale, afin de répondre à l'engagement du Président de la République d'une contribution substantielle de l'État à la constitution du Fonds national des aides à la pierre. Les contributions des bailleurs étaient d'un niveau comparable de 270 millions d'euros.

Or dès l'année suivante , en 2017, les crédits de l'État étaient programmés en loi de finances à seulement 200 millions d'euros, pour ensuite être annulés pour plus de la moitié d'entre eux par le décret du 20 juillet, tandis que la contribution des bailleurs demeurait à 270 millions d'euros.

En 2018, le financement de l'État diminue à 38,8 millions d'euros et celui des bailleurs sociaux augmente à 375 millions d'euros, auquel il faut ajouter une contribution d'Action logement de 50 millions d'euros.

Évolution des crédits budgétaires de l'État consacrés aux aides à la pierre

(en millions d'euros)

Source : commission des finances, à partir des documents budgétaires

La création du FNAP a ainsi accompagné, et non stoppé, le désengagement de l'État.

2. Un État qui continue à fixer des règles au niveau national

L'État joue en France un rôle qui, malgré le principe de libre administration des collectivités territoriales, demeure interventionniste.

En dépit du caractère local de la plupart des enjeux du logement, l'État fixe des règles très strictes , renforcées au cours des années, telles que l'emblématique « article 55 de la loi SRU » qui a progressivement crû en contrainte mais aussi en complexité.

Il pose également des objectifs nationaux chiffrés (cession de 40 000 logements sociaux par an, financement de 40 000 PLAI par an, création en cinq ans de 10 000 places en pensions de famille et une fois encore de 40 000 places dans le parc privé par des dispositifs d'intermédiation locative 59 ( * ) ...) qui, même s'ils peuvent résulter de l'agrégation de besoins locaux, prennent l'apparence de cibles qu'il conviendrait d'atteindre quelle que soit la localisation des logements construits. Or ces objectifs ne prennent un sens que dans l'adéquation entre besoin et offre au niveau d'une commune ou d'un bassin de vie.

Les désaccords entre acteurs : l'exemple des typologies

En 2015, les données du système national d'enregistrement (SNE) ont mis en évidence l'existence, dans toutes les régions, d'un manque de logements sociaux de petite taille. Ce déséquilibre concernait aussi bien le parc disponible que l'offre nouvelle financée.

En conséquence, un bonus a été accordé aux logements de type T1 et T2 dans le cadre de la programmation 2016 des aides à la pierre, prélevé sur l'enveloppe des aides à la pierre. Si ce bonus n'a pas été reconduit l'année suivante, le ministère du logement et de l'habitat durable a insisté auprès des préfets de région sur l'insuffisance de l'offre en logements de taille strictement inférieure au T3 60 ( * ) .

Votre rapporteur a pourtant constaté que certains acteurs de terrain remettaient en cause cette analyse en constatant une difficulté à commercialiser le surcroît de logements résultant de l'instauration du bonus. Il faut aussi noter que le choix des types de logement n'est pas neutre pour les collectivités : les logements de petite taille, dont le taux de rotation est plus élevé, n'ont pas le même effet sur le développement local que les logements familiaux.

Sur un tel enjeu, étroitement lié à la demande locale et à l'offre disponible au niveau d'un bassin de vie, des directives au niveau national sont certainement moins efficaces qu'une action locale en fonction d'un diagnostic partagé, même s'il est important de fournir des logements à toutes les catégories de la population.

Or la diminution des financements de l'État , ainsi que la perte progressive de moyens des administrations déconcentrées, incite à redéfinir le rôle de l'État .

La montée en puissance d'intercommunalités ayant compétence pour l'élaboration des plans locaux de l'habitat leur donne désormais vocation à reprendre, dans bien des cas, les responsabilités auparavant assumées par les services de l'État .

Il convient d'ailleurs de rappeler que, comme l'indique l'article 17 de la LOLF, « l'emploi des fonds [de concours] doit être conforme à l'intention de la partie versante ». Si le montant versé par l'État devient résiduel par rapport à celui versé par les organismes du secteur, il devient difficile de justifier le rôle prépondérant de l'État dans la fixation de leurs modalités d'utilisation.

Si la communication de l'administration présente le « dialogue de gestion » comme un mouvement « bottom-up », qui passe par le recensement des besoins sur les différents territoires de gestion, force est de constater que le pilote demeure l'État, à travers le rôle central qu'il joue au sein du FNAP, et à travers l'administration déconcentrée dans les territoires.

De nombreuses personnes auditionnées par votre rapporteur spécial ont ainsi fait état du rôle limité joué par le comité régional de l'habitat et de l'hébergement (CRHH). La phase de l'avis donné par le CRHH, vers la fin du mois de février ou le début du mois de mars, au projet de répartition des aides élaboré par le DREAL et soumis par le préfet, présente l'avantage d'apporter une information sur l'état du logement locatif social. Toutefois elle paraît constituer une étape formelle plus qu'une véritable possibilité pour les acteurs locaux d'impulsion et d'orientation dans la gestion et la répartition des aides infra-régionales.

Votre rapporteur souligne que l'État ne construit pas : les maîtres d'ouvrage sont les bailleurs sociaux, et bien souvent l'impulsion vient du maire et d'un porteur de projet local .

Le groupe de travail de la commission des finances sur le financement et la fiscalité du logement, déjà cité, avait fait valoir en octobre 2015, au sujet du pilotage de la politique du logement par les objectifs, que « c'est l'idée même qu'il est possible de fixer un objectif unique au niveau national qui doit certainement être remise en cause ». On peut se demander en effet s'il est nécessaire de fixer des objectifs nationaux sur des éléments tels que la typologie des logements, dont le besoin dépend surtout des conditions du marché local de l'habitat.

D. AU TOTAL, LE FNAP N'A PAS ENCORE ATTEINT L'OBJECTIF DE SÉCURISATION DES RESSOURCES

Le FNAP ne peut certainement pas, à lui seul, assurer l'atteinte des objectifs de production de logement fixés par le Gouvernement.

1. Une simplification et une stabilisation des règles inachevées

Si le regroupement des crédits budgétaires de l'État et des contributions des acteurs du logement social au sein d'un fonds à la gouvernance paritaire a constitué un progrès indéniable , cette transformation de gestion au niveau national ne s'est pas accompagnée d'une réforme des procédures de répartition au niveau local .

Votre rapporteur retient des auditions qu'il a conduites le sentiment que l'application des procédures consomme une grande énergie au point de limiter la créativité des agents, alors que l'expérimentation dans une région pourrait aussi profiter aux autres régions.

La simplification des procédures devrait donc être un objectif en soi , dans un esprit de recherche d'efficacité, mais aussi de réduction des coûts : la complexité des règles et la persistance de doublons administratifs constituent un facteur de coût en soi pour l'ensemble des acteurs.

De même l'instabilité des règles et des objectifs , qui sont modifiés chaque année, constituent une véritable difficulté pour les organismes qui souscrivent à des aides comme pour les services instructeurs, qui ont légitimement des difficultés à comprendre ce qui justifie des modifications aussi fréquentes des priorités de la politique de développement des logements sociaux.

Votre rapporteur souligne la nécessité d'éviter la « suradministration » et de favoriser la simplification et la stabilisation des règles et des objectifs en matière de logement social, surtout lorsque ceux-ci sont décidés au niveau national, donc loin du terrain.

2. Sécuriser la gestion des fonds en introduisant une pluriannualité

Votre rapporteur note également que l'objectif de sécurisation des fonds , promise lors de la création du FNAP, n'a pas été atteint .

L'année 2017 en a constitué un exemple avec l'annulation en cours d'année de plus de la moitié des crédits budgétaires promis en loi de finances.

Au-delà de cet épisode, plusieurs personnes auditionnées par votre rapporteur spécial ont fait part de la difficulté que représente le principe d'annualité des décisions d'attribution des fonds du FNAP.

Cette annualité résulte bien entendu du principe d'annualité budgétaire, les fonds transitant par le budget de l'État et le programme 135, mais les crédits d'État sont devenus minoritaires, voire résiduels, et la plus grande partie des ressources du fonds proviennent dorénavant des acteurs du monde du logement.

Votre commission défend régulièrement le principe d'annualité budgétaire, qui prévoit que « les lois de finances déterminent, pour un exercice, la nature, le montant et l'affectation des ressources et des charges de l'État, ainsi que l'équilibre budgétaire et financier qui en résulte » 61 ( * ) . Le respect de cette règle est indispensable pour le contrôle périodique et démocratique de l'usage des deniers publics, tel que l'effectue le Parlement et notamment la commission des finances tout au long de l'année.

La Cour des comptes 62 ( * ) fait toutefois observer que le principe d'annualité est « peu pertinent » pour le programme 135. En effet, l'exécution porte pour une partie significative sur la consommation des fonds de concours attribués l'année précédente et reportés en début de gestion. 123,71 millions d'euros de fonds de concours ont ainsi été reportés, en crédits de paiement, entre 2016 et 2017, de manière à assurer en début d'exercice le financement des opérations d'aides à la pierre.

En effet, les subventions portent pour l'essentiel sur des opérations de construction neuve, dont la durée totale atteint couramment six ans et plus. La perspective pluriannuelle s'impose d'ailleurs dans la gestion moderne où la conduite des projets ne peut reposer sur les ressources d'un seul acteur, mais requièrent un cofinancement de plusieurs acteurs, dans un esprit de contractualisation.

Sans remettre en cause le principe d'annualité qui s'applique au budget de l'État, une programmation des crédits du FNAP dans un cadre triennal permettrait de visibilité aux acteurs et les responsabiliserait. Elle permettrait de conclure les conventions de délégation, dont la durée est de six ans, en associant les moyens nécessaires pour la moitié de la durée de la délégation. La visibilité apportée aux programmes permettrait de renforcer leur soutenabilité.

Les aides à la pierre offrent d'ailleurs un terrain favorable à une démarche de pluriannualisation dans la mesure où elles viennent à l'appui de projets décidés en fonction des besoins de la population plus que de la conjoncture et qui sont donc peu susceptibles d'être remis en cause par un retournement de la situation économique à court terme. Les dépenses sociales, à l'inverse, varient considérablement selon la situation économique et ne pourraient donc pas être ainsi prévues à l'avance.

Votre rapporteur défend l'idée d'une programmation pluriannuelle de l'attribution des aides à la pierre, qui entrerait dans l'objectif de sécurisation des fonds poursuivi lors de la création du FNAP. Cette sécurisation pourrait passer par l'élaboration d'un document engageant l'État et les bailleurs sociaux vis-à-vis du FNAP, portant sur une période de trois ans.

Recommandation n° 6 : sécuriser les fonds sur le plan pluriannuel, simplifier et stabiliser les règles de répartition et d'utilisation.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 3 octobre 2018, sous la présidence de M. Vincent Éblé, président, la commission a entendu une communication de M. Philippe Dallier, rapporteur spécial, sur la répartition et l'utilisation des aides à la pierre .

M. Vincent Éblé , président . - Nous en venons maintenant à la présentation par Philippe Dallier, rapporteur spécial des crédits du logement de la mission « Cohésion des territoires », des résultats de son contrôle sur la répartition et l'utilisation des aides à la pierre.

M. Philippe Dallier , rapporteur spécial (mission « Cohésion des territoires ») . - Le Fonds national des aides à la pierre (FNAP) a été créé en 2016 avec un double objectif.

D'une part, il s'agissait de donner une vision plus synthétique des sommes consacrées aux aides à la pierre en une période où les crédits budgétaires s'amenuisaient déjà et où les bailleurs étaient appelés à se substituer de plus en plus à l'État. La contribution des bailleurs sociaux passait alors par un fonds de péréquation distinct des crédits budgétaires, méthode d'ailleurs contestée par la Cour des comptes.

D'autre part, dans ce contexte de désengagement de l'État, la création du FNAP répondait également à une demande des élus nationaux et locaux qui souhaitaient être mieux associés à la territorialisation et à l'emploi de ces crédits.

Ce fonds est géré par un conseil d'administration où les bailleurs sont représentés au même titre que l'État et où figurent également des représentants des collectivités territoriales et des parlementaires.

Il m'a donc semblé utile, après une année pleine de fonctionnement du FNAP en 2017, de regarder comment s'est passée sa mise en place et si des progrès ont été faits en termes tant de répartition que d'utilisation des crédits.

Ce contrôle a porté sur les deux niveaux : d'une part national, puisque le conseil d'administration du FNAP décide en fin d'année de la répartition entre les régions des crédits et fixe les principales orientations relatives à leur utilisation ; d'autre part régional et local, puisque chaque préfet de région répartit l'enveloppe entre les territoires de gestion. Ces derniers sont de deux sortes : soit une collectivité ou une intercommunalité lorsqu'elle a obtenu la délégation de gestion des aides à la pierre ; soit la direction départementale des territoires (DDT), là où aucune délégation n'a été mise en place. Les aides sont ensuite attribuées aux projets de construction de logements sociaux portés par les territoires et les bailleurs.

Aussi intéressant que soit le nouveau dispositif, les sommes qu'il répartit ne vont pas à elles seules relancer le logement social, dans le contexte budgétaire que vous connaissez. Dans le bleu budgétaire pour 2019, il n'y a plus un euro de crédit pour les aides à la pierre ; c'est l'aboutissement d'une tendance lourde.

Alors qu'en 2002, la subvention budgétaire de l'État était de 5 700 euros pour un logement PLUS (prêt locatif à usage social) et de plus de 15 000 euros pour un logement PLAI (prêt locatif aidé d'intégration), aujourd'hui, les aides du FNAP sont limitées à moins de 10 000 euros par logement PLAI, sauf en Corse et en Île-de-France, en raison des coûts de construction.

Or le marché du logement semble se retourner en 2018. Le nombre des permis de construire est en baisse de 5 %, aussi bien dans le logement individuel que dans le collectif. Le logement social a été affecté dès le second semestre 2017, suite à l'annonce de la diminution des aides personnelles au logement (APL) et de la mise en place de la réduction de loyer de solidarité (RLS) financée par les bailleurs.

Le montant des aides à la pierre passant par le FNAP s'élève à 475 millions d'euros en 2018, dont 460 millions d'euros pour la construction de logements sociaux neufs, 10 millions d'euros pour des projets de démolition en zone détendue et près de 5 millions d'euros pour le financement d'actions annexes, auxquels s'ajoutent 12 millions d'euros pour favoriser la réalisation de logements très sociaux et l'intermédiation locative.

Pour alimenter ce budget, les crédits de l'État sont en baisse constante : prévus à près de 200 millions d'euros en 2017, ils ont été annulés à 55 % en cours d'année ; en 2018, seulement 38,8 millions d'euros de crédits de l'État ont été inscrits au budget. Dans le même temps, la contribution des bailleurs est de 375 millions d'euros et Action logement est appelé à participer au tour de table pour un montant de 50 millions d'euros. Les autres ressources proviennent notamment de la majoration des prélèvements SRU dans les communes carencées.

On constate un véritable retrait de l'État des aides à la pierre, ce qui a conduit depuis un an le FNAP à une situation difficile et l'empêche même de fonctionner correctement : en effet son président, qui représente les collectivités territoriales au sein du conseil d'administration, a démissionné à l'automne dernier et n'a toujours pas été remplacé. Les collectivités territoriales doivent se mettre d'accord pour désigner un nouveau président.

Or, dans un organisme qui n'a pas de moyen de fonctionnement propre, le conseil d'administration dépend de l'administration de la Direction de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages (DHUP) et le président joue donc un rôle d'impulsion important.

La programmation élaborée par le FNAP se fonde sur une remontée des besoins réalisée par l'intermédiaire des administrations régionales. Des documents de synthèse sont alors présentés dans des groupes de travail et au conseil d'administration.

Or j'ai pu constater lors d'un déplacement à Lille, dans la région des Hauts-de-France, que le diagnostic sur les besoins n'est pas toujours partagé : par exemple, l'État a le souci de favoriser les logements de petite taille, mais certains bailleurs ou certaines administrations locales sur le terrain constatent la difficulté à mettre sur le marché ce type de logement. Et il faut aussi prendre en compte le fait que tous les besoins ne figurent pas nécessairement dans le système national d'enregistrement. Il me semble donc nécessaire de mieux fonder l'analyse des besoins en croisant les sources de données établies par l'État, mais aussi par les collectivités locales et les bailleurs et en enrichissant les données statistiques par des études plus qualitatives.

Autre besoin que j'ai constaté sur le terrain : les réhabilitations. Le FNAP ne finance effectivement que des constructions neuves, et dans une certaine mesure des démolitions. Or lorsqu'une région dispose d'un parc ancien dégradé, ou lorsque le foncier est rare, la réhabilitation pourrait également faire l'objet des interventions soutenues par le FNAP, même si cela se ferait probablement à enveloppe constante.

D'une manière générale, il faut s'interroger sur la méthode qui consiste à fixer des objectifs au niveau national. On prévoit par exemple de créer 40 000 logements de type PLAI par an. Or un objectif global n'a pas véritablement de sens, puisque les besoins, aussi bien que les conditions de marché, sont essentiellement locaux. Ce n'est pas en construisant des logements là où il n'y a pas de besoin qu'on va résoudre la crise du logement. Des objectifs encore plus précis sont fixés par catégorie de logements et ne sont pas du tout atteints. M. Denormandie a reconnu voilà quelques jours que seulement 2 600 places ont été réalisées en intermédiation locative pour un objectif de 40 000 places sur le quinquennat, et qu'il y a eu 619 places de pension de famille sur les 10 000 prévues.

Les objectifs devraient d'abord être fixés au niveau local, ainsi que leur décomposition en fonction du type de logement ou du public visé. La volonté de l'État de conserver un rôle de pilote de la politique du logement se heurte d'ailleurs à la diminution de ses moyens non seulement financiers, mais aussi humains.

Je l'ai constaté dans la mise en oeuvre de la délégation des aides à la pierre, qui peut prendre deux modalités : soit le délégataire assure lui-même l'instruction des dossiers, parce qu'il estime en avoir les moyens ; soit l'instruction est assurée par la DDT. Mais, dans ce dernier cas, il y a en réalité une double instruction, car les services du délégataire examinent déjà les dossiers avant de les transmettre à la DDT. C'est donc un doublon pour l'administration, mais aussi une double tâche pour les porteurs de projet, qui devront présenter le dossier plusieurs fois. Je suis donc favorable à la généralisation de la délégation des aides à la pierre, avec instruction des dossiers par le délégataire. Je pense qu'il faut en finir avec la double instruction.

Cette délégation est l'un des éléments qui permettent aux collectivités locales de mener à bien une politique de l'habitat. Il s'agit toutefois d'une charge qui n'est pas compensée. On peut donc réfléchir à la possibilité d'aller plus loin et d'organiser un véritable transfert de compétence de la gestion des aides à la pierre, qui serait plus complexe, car il faudrait déterminer vers quel niveau de collectivité se fait le transfert et de quelle manière les crédits du FNAP sont répartis entre les collectivités dans une région. L'État doit accepter de lâcher la main, mais, à partir du moment où il n'y a plus un euro venant de lui, ce serait logique.

La répartition des fonds entre les régions suit une clé de répartition calculée à partir des besoins constatés, ainsi que des coûts de construction. Il s'agit d'une vision un peu théorique, car le lancement des projets ne dépend pas seulement de cette subvention, d'ailleurs assez limitée. Il faut d'abord que des projets soient portés localement, souvent par le maire.

La consommation des crédits est ainsi très variable selon les territoires, et on constate chaque année, au cours de l'été, que dans certaines régions, plus précisément en Provence-Alpes-Côte d'Azur (PACA), les projets ne seront pas assez nombreux pour consommer les crédits. L'automne voit donc se mettre en place un grand exercice de réallocation des crédits vers des régions, qui, pendant ce temps, avaient gardé sous la main des projets prêts à démarrer. Je crois qu'il vaudrait mieux, au moins partiellement, ajuster les enveloppes dès le début de l'année.

Au total, le FNAP constitue un progrès indéniable. Les groupes de travail permettent aux différents acteurs du logement social de travailler ensemble sur des questions aussi concrètes que les logements très sociaux (PLAI adaptés), l'intermédiation locative ou la nécessité de soutenir les démolitions. De plus, le regroupement des crédits donne au Parlement une visibilité bien meilleure sur les montants consacrés aux aides à la pierre.

L'État conserve toutefois un rôle disproportionné et le FNAP n'a pas rempli toutes ses promesses. D'une part, les acteurs continuent à se plaindre sur le terrain de la complexité des règles et, surtout, de leur modification chaque année ; ces changements sont d'autant moins compréhensibles qu'ils sont décidés au niveau national. D'autre part, le FNAP n'a pas permis de sécuriser les fonds accordés aux aides à la pierre. Le responsable en est évidemment l'État, qui réduit ses engagements lorsqu'il n'annule pas purement et simplement les crédits en cours d'année, comme en 2017.

C'est pourquoi je crois que le principe d'annualité budgétaire devrait être concilié avec une programmation pluriannuelle des crédits attribués aux aides à la pierre. Une prévision sur trois ans, associée à une stabilisation des règles d'utilisation des crédits, apporterait une meilleure visibilité à des projets dont la réalisation prend plusieurs années. Elle serait cohérente par exemple avec la conclusion des conventions de délégation des aides à la pierre, dont la durée est de six ans.

La territorialisation de la gestion des aides à la pierre accroît les chances de succès des opérations. L'État l'a compris pour l'enveloppe de 12 millions d'euros destinée aux PLAI adaptés et à l'intermédiation locative ; alors qu'elle était consacrée jusqu'en 2017 à des appels à projets peu fructueux, le conseil d'administration du FNAP a décidé vendredi dernier de la répartir désormais entre les régions, comme pour les crédits de l'enveloppe principale.

Il reste donc à parachever cette territorialisation en laissant plus de marge de manoeuvre aux politiques locales de l'habitat.

M. Michel Canévet . - En tant qu'élu local, j'ai observé la même chose que notre collègue sur la double instruction. Le problème se pose aussi à propos des fonds européens.

Je suis surpris d'entendre que l'État n'a pas une bonne connaissance des besoins en logements. En Bretagne, les relations entre les services de l'État et les délégataires des aides à la pierre sont plutôt bonnes.

Il y a toutefois des absurdités. Dans l'agglomération de Lorient, un maire est obligé de construire 200 logements sociaux au titre de la loi SRU alors que cela ne correspond pas aux besoins de commune et qu'il n'a pas les crédits pour le faire.

M. Thierry Carcenac . - Lors de la mise en place des délégations, des départements ont souhaité récupérer les aides à la pierre, et d'autres ne l'ont pas souhaité. A-t-on une idée de la répartition actuelle entre les EPCI et les départements ? Et quelle est votre position sur le sujet, monsieur le rapporteur spécial ?

M. Jérôme Bascher . - Je partage les conclusions de notre collègue. Il y a là un sujet de décentralisation, et peut-être même de décentralisation à la carte. Je ne suis pas sûr qu'il y ait un seul modèle. Les zones tendues ne sont pas représentatives de l'ensemble de la France. Une politique nationale du logement a-t-elle encore un sens ?

Sur l'utilisation des crédits, j'ai l'impression qu'on change de politique à chaque ministre. Certains préfèrent l'entretien et la réhabilitation quand d'autres optent pour des investissements nouveaux. Y a-t-il un bon ratio à fixer entre ces différents usages ?

M. Sébastien Meurant . - À quel échelon territorial devraient se concentrer les aides ? Comment la rénovation et la mise à niveau d'ici à 2020 doivent-elles s'effectuer concrètement sur le terrain ?

M. Philippe Dallier , rapporteur spécial . - Le délégataire choisit d'instruire ou pas. Certains ont décidé de faire l'instruction ; d'autres ne la font pas, considérant que l'État ne leur donne pas les moyens. À mon avis, il faudrait généraliser la prise de l'instruction par le délégataire et réfléchir à des transferts de compétences. Mais je me garderai bien de choisir entre les départements et les EPCI. Il appartient aux élus locaux de se mettre d'accord. Comme il n'y a plus du tout de crédit budgétaire, je pense qu'il faut en finir avec la politique nationale en matière d'aide à la pierre et aller vers une vraie décentralisation.

En 2016, il y avait parmi les délégataires 111 collectivités ou groupements, dont 12 métropoles, une collectivité à statut particulier qui est la métropole de Lyon, 8 communautés urbaines, 61 communautés d'agglomération, 3 communautés de communes et 25 départements. Je laisse à chacun le soin d'apprécier si cette répartition est judicieuse.

En matière de connaissance des besoins, la Bretagne est un cas à part. Dans d'autres régions, le système fonctionne moins bien. La première connaissance qu'il faudrait avoir est celle du nombre de dossiers finançables dans une année. Aujourd'hui, on s'appuie trop sur les besoins exprimés dans les demandes de logements sociaux, et pas assez sur ce que les territoires peuvent faire... L'État pilote en fonction des grands objectifs affichés.

En 2017, le FNAP a fait mieux que l'État précédemment, en déléguant les crédits dès le mois de janvier. Mais il doit à présent, me semble-t-il, mieux analyser les besoins.

Nombre de bailleurs craignent de devoir arbitrer entre les constructions nouvelles et les réhabilitations lourdes. Aujourd'hui, ce sont les crédits pour la rénovation lourde qui manquent. Mais comme l'enveloppe se réduit globalement, on est dans une impasse budgétaire.

La commission a donné acte de sa communication à M. Philippe Dallier, rapporteur spécial, et en a autorisé la publication sous la forme d'un rapport d'information.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Administration centrale

Direction de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages

- Mme Clémentine PESRET, sous-directrice du financement et de l'économie du logement et de l'aménagement ;

- M. Louis de FRANCLIEU, chef du bureau budget, logement, aménagement ;

- M. Arnaud LONGE, adjoint au sous-directeur des politiques de l'habitat.

Direction du budget

- M. Alban HAUTIER, chef du bureau du logement, de la ville et des territoires ;

- M. Colin THOMAS, adjoint au chef du bureau du logement, de la ville et des territoires.

Organismes représentés au conseil d'administration du FNAP

Au titre de la fédération des entreprises publiques locales

- M. Serge CONTAT, membre du conseil d'administration du FNAP, directeur général de la Régie immobilière de la Ville de Paris ;

- M. Fabien GUEGAN, responsable adjoint du département immobilier et développement économique à la fédération des entreprises publiques locales.

Au titre des organismes agréés pour la maîtrise d'ouvrage d'insertion

- M. Christian NICOL, membre du conseil d'administration du FNAP, président délégué de SOLIHA ;

- M. Gilles DESRUMAUX, délégué général de l'Union professionnelle du logement accompagné (Unafo) ;

- M. Sébastien CUNY, délégué général de la Fédération des associations et des acteurs pour la promotion et l'insertion par le logement (FAPIL).

Au titre de l'Union sociale pour l'habitat (USH)

- M. Laurent GOYARD, directeur de la Fédération nationale des Offices publics de l'habitat (OPH) ;

- M. Didier POUSSOU, directeur de la Fédération des entreprises sociales pour l'habitat (ESH) ;

- M. François SALZGEBER, directeur de la Fédération nationale des associations régionales d'organismes HLM ;

- M. Dominique HOORENS, directeur des études économiques et financières de l'USH.

France urbaine

- M. Emmanuel HEYRAUD, directeur cohésion sociale et développement urbain ;

- Mme Chloé MATHIEU, responsable des relations avec le Parlement.

Assemblée des communautés de France (AdCF)

- Mme Jean-Paul BRET, membre du conseil d'administration du FNAP, président de la communauté du Pays Voironnais (Auvergne-Rhône-Alpes), membre du conseil d'administration de l'AdCF ;

- Mme Claire DELPECH, responsable des finances, de la fiscalité, de l'habitat et du logement ;

- Mme Montaine BLONSARD, responsable des relations parlementaires.

Assemblée des départements de France (ADF)

- Mme Martine JARDINÉ, vice-présidente du Conseil départemental de la Gironde ;

- M. Augustin ROSSI, conseiller en charge du logement ;

- Mme Marylène JOUVIEN, attachée parlementaire.

Région Île-de-France

Direction régionale et interdépartementale de l'hébergement et du logement (DRIHL) d'Île-de-France

- M. Jean-Martin DELORME, directeur ;

- M. Anthony BRIANT, directeur adjoint ;

- M. Cédric LORET, chef du service du développement et de l'amélioration de l'offre de logement et d'hébergement.

Région Hauts-de-France

Direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL) des Hauts-de-France

- M. Julien LABIT, sous-directeur ;

- M. Pierre BRANGER, chef du service « énergie, climat, logement et aménagement du territoire » (ECLAT) ;

- Mme Sophie HUCHETTE, cheffe du pôle « habitat, construction » du service ECLAT.

Direction départementale des territoires et de la mer (DDTM) du Nord

- Mme Amale BENHIMA, cheffe du service habitat.

Communauté urbaine de Dunkerque

- M. Sylvain SIMONET, chef du service « Habitat social », direction Habitat et Logement.

Métropole européenne de Lille

- Mme Claire BRUHAT, directrice de l'habitat.

Lille Métropole Habitat

- Mme Amélie DEBRABANDERE, directrice générale.

SIA Habitat

- Mme Marie-Hélène FOUBET, directrice générale.

Vilogia

- Mme Dong NGUYEN, directrice de la maîtrise d'ouvrage Nord ;

- Mme François COLTELLONI, directeur régional.

Union régionale de l'habitat des Hauts-de-France

- Mme Sylvie RUIN, directrice régionale.

ANNEXES

I. ANNEXE 1 : PROGRAMMATION RÉGIONALE DU FNAP POUR 2018

Montants moyens de subvention par région notifiés

Région

Montant moyen de subvention notifié

Nouvelle Aquitaine

6 931 €

Auvergne-Rhône-Alpes

8 699 €

Bourgogne-Franche-Comté

6 001 €

Bretagne

6 548 €

Centre-Val de Loire

6 350 €

Corse

17 324 €

Grand Est

7 212 €

Hauts-de-France

7 898 €

Île-de-France

20 944 €

Normandie

5 907 €

Occitanie

7 520 €

Pays de la Loire

7 241 €

Provence-Alpes-Côte d'Azur

9 850 €

Source : réponses du Gouvernement au rapporteur spécial

Répartition des montants affectés aux aides à la pierre et objectifs par région, actualisés au 14 mars 2018

Région

Montant prévisionnel affecté aux aides à la pierre (€)

Objectifs par catégorie de financement en nombre de logements

Montant prévisionnel affecté au financement des logements très sociaux et au dispositif d'IML dans les communes carencées (€)

Montant prévisionnel affecté au financement des MOUS (€)

Montant pour les actions diverses (€)

PLAI

PLUS

PLS

Nouvelle Aquitaine

24 668 903

3 623

6 052

1 809

456 169

Auvergne-Rhône-Alpes

43 940 636

5 051

7 500

4 300

632 903

Bourgogne-Franche-Comté

3 786 547

631

1 204

800

39 805

Bretagne

10 915 452

1 679

2 918

1 732

102 698

Centre-Val de Loire

3 727 204

614

1 244

627

187 085

Corse

3 984 428

230

223

6

-

Grand Est

13 963 371

1 939

2 826

1 421

268 288

Hauts-de-France

20 486 338

2 775

5 747

1 715

27 864

Île-de-France

224 683 842

11 051

16 007

11 434

1 809 188

Normandie

6 190 861

1 054

2 609

1 244

113 843

Occitanie

29 356 201

3 962

8 328

3 347

520 653

Pays de la Loire

14 228 698

1 989

3 665

1 743

95 533

Provence-Alpes-Côte d'Azur

60 082 303

6 239

9 448

5 280

145 971

Actions ou opérations exécutées au niveau national ou sélectionnées au niveau national ou non programmées

10 000 000

12 000 000

350 000

Total

470 014 784

40 837

67 771

35 458

12 000 000

4 400 000

350 000

Source : annexe n° 2 au compte rendu du conseil d'administration du 14 mars 2018

II. ANNEXE 2 : OBJECTIFS ET ORIENTATIONS METTANT EN oeUVRE LA PROGRAMMATION DES AIDES À LA PIERRE

Source : conseil d'administration du FNAP du 15 décembre 2018, annexe n° 3 « Principes à insérer dans la lettre de notification des des objectifs et orientations mettant en oeuvre la programmation des aides à la pierre »


* 1 Compte du logement 2017, p. 42.

* 2 Allocation de logement familiale (ALF), aide personnalisée au logement (APL), et allocation de logement sociale (ALS).

* 3 Duflot-Pinel, Scellier, Besson, Périssol... (Cour des comptes, Les dépenses fiscales en faveur de l'investissement locatif des ménages, référé publié le 10 avril 2018.) .

* 4 Voir Délégation des aides à la pierre - Regards croisés des acteurs de l'habitat , étude de Jean-Claude Driant, Centre de recherche sur l'espace, les transports, l'environnement et les institutions locales de l'Université de Paris 12, réalisée pour l'Union sociale de l'habitat, juin 2007.

* 5 Voir le rapport d'information n° 399 (2017-2018), fait par M. Philippe Dallier au nom de la commission des finances sur l'enquête de la Cour des comptes relative au programme « Habiter mieux », déposé le 4 avril 2018.

* 6 Projet de loi de finances pour 2016, annexe n° 12 « Égalité des territoires et logement » au tome III du rapport général fait par M. Albéric de Montgolfier au nom de la commission des finances.

* 7 Article 22 de la loi n° 2009-431 du 20 avril 2009 de finances rectificative pour 2009.

* 8 Articles L. 452-4 et L. 452-4-1 du code de la construction et de l'habitation.

* 9 Article 1609 nonies G du code général des impôts, version antérieure au 1 er janvier 2016.

* 10 Article 144 de la loi n° 2015-1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2016.

* 11 Note d'analyse de l'exécution budgétaire, Mission Égalité des Territoires et Logement, 2015.

* 12 Article 17 précité de la LOLF et décision n° 2005-528 DC du Conseil constitutionnel « Loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 » du 15 décembre 2005.

* 13 Note d'analyse de l'exécution budgétaire, Mission Égalité des Territoires et Logement, 2016.

* 14 Articles L. 435-1 du code de la construction et de l'habitation.

* 15 Article R. 435-2 du code de la construction et de l'habitation.

* 16 Articles L. 452-4 et L. 452-4-1 du code de la construction et de l'habitation.

* 17 Article L. 443-14-1 du code de la construction et de l'habitation, créé par l'article 130 de la loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018.

* 18 Article 99 de la loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 relative à l'égalité et à la citoyenneté.

* 19 Article L. 435-1 du code de la construction et de l'habitation.

* 20 Fraction des cotisations et taxes versées à la CGLLS : 375 000 000 euros ; contribution de l'État : 38 800 000 euros ; contribution d'Action logement : 50 000 000 euros ; crédits issus des fonds d'aménagement urbain : 6 660 440 euros ; produit des prélèvements SRU : 4 314  344 euros ; majoration du prélèvement SRU : 12 000 000 euros.

* 21 Article R. 435-3 du code de la construction et de l'habitation.

* 22 Ce compte rendu est prévu, pour les ouvertures de crédit réalisées par fonds de concours, par l'article 6 du décret n ° 2007-44 du 11 janvier 2007 pris pour l'application du II de l'article 17 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances.

* 23 Le montant total des reliquats disponibles constatés fin 2017 était de 12 249 784,98 euros. Le montant des autorisations d'engagement mobilisables est inférieur parce que la fin de certaines conventions de délégation, comme chaque année, bloque la mobilisation des autorisations d'engagement déléguées mais non consommées. Seules les conventions de délégation en cours peuvent consommer l'année suivante les autorisations d'engagement non utilisées l'année précédente.

* 24 Article R. 331-25-1 du code de la construction et de l'habitation a été créé par le décret n° 2013-670 du 24 juillet 2013 pris pour l'application du titre II de la loi n° 2013-61 du 18 janvier 2013 relative à la mobilisation du foncier public en faveur du logement et au renforcement des obligations de production de logement social.

* 25 Ministère de la cohésion des territoires, Appel à projets « PLAI adaptés » 2017, 28 juin 2017.

* 26 Une résidence sociale est une habitation d'hébergement destinée aux personnes rencontrant des difficultés d'accès à un logement de droit commun, en raison de difficultés à la fois sociales et financières. Il s'agit par exemple des maisons-relais (ou pensions de famille) et des foyers de jeunes travailleurs.

* 27 Voir le B du o du 1° du I de l'article 31 du code général des impôts.

* 28 Article L. 302-9-1, dixième alinéa, du code de la construction et de l'habitation.

* 29 Articles L. 302-7, quatrième alinéa, et R. 302-16-2 du code de la construction et de l'habitation.

* 30 Article L. 302-9-1 du code de la construction et de l'habitation, renforcé par la loi précitée loi n° 2013-61 du 18 janvier 2013.

* 31 Le taux d'effort est la part des ressources consacrées au paiement du loyer.

* 32 La lettre de notification envoyée aux régions indique toutefois que la priorité accordée à ces quatre territoires n'a pas conduit à accorder des objectifs ou des enveloppes supplémentaires à la métropole d'Aix-Marseille, « ceux qui lui sont alloués en dehors de l'enveloppe spécifique étant déjà très ambitieux, compte tenu des capacités de réalisation du territoire ». Sur cette question, voir infra les développements relatifs à l'inégale consommation des aides à la pierre selon les régions.

* 33 Cour des comptes, note d'exécution budgétaire 2017 de la mission « Égalité des territoires et logement », p. 10.

* 34 Entrent également dans la catégorie des fonds de concours les produits de legs et donations attribués à l'État.

* 35 Intermédiation locative.

* 36 Rapport de l'ordonnateur, conseil d'administration du 14 mars 2018.

* 37 Communiqué de presse de M. Emmanuel Couet, 6 octobre 2017.

* 38 Article R. 435-6 du code de la construction et de l'habitation.

* 39 Article R. 435-6 précité du code de la construction et de l'habitation.

* 40 Article R. 435-8 du code de la construction et de l'habitation.

* 41 Article 117 de la loi n° 2009-323 du 25 mars 2009 de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion et décret, mis en oeuvre par l'article R. 441-2-5 du code de la construction et de l'habitation.

* 42 Loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 relative à l'égalité et à la citoyenneté.

* 43 Article L. 302-5 du code de la construction et de l'habitation.

* 44 Le logement social face au défi de l'accès des publics modestes et défavorisés, rapport public thématique de la Cour des comptes, février 2017.

* 45 Rapport de l'ordonnateur, annexé au compte rendu du conseil d'administration du FNAP du 14 mars 2018.

* 46 Le mandat de gestion consiste pour un propriétaire bailleur à louer son logement directement à un ménage tout en faisant appel à un tiers social pour qu'il assure la gestion du bien (gestion locative comptable et technique, dont la perception des loyers et des charges pour le compte du bailleur). Dans le cas de la location/sous-location, le logement est mis en location auprès d'un organisme agréé par le préfet en vue de sa sous-location ; c'est une solution plus temporaire que le mandat de gestion, formule privilégiée par le plan Logement d'abord.

* 47 Instruction du 4 juin 2018 relative à la mise en oeuvre du plan de relance de l'intermédiation locative dans le cadre du plan Logement d'abord, circulaire envoyée aux préfets de région et de département.

* 48 6° du IV de l'article L. 302-5 du code de la construction et de l'habitation, dans sa rédaction issue de l'article 97 de la loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 relative à l'égalité et à la citoyenneté.

* 49 Question écrite n° 06081 de Mme Dominique Estrosi Sassone, parue au Journal officiel du Sénat du 12 juillet 2018, page 3416.

* 50 Financement et fiscalité du logement : reconstruire sans démolir, rapport d'information n° 99 (2015-2016), fait au nom de la commission des finances, déposé le 21 octobre 2015.

* 51 L'hébergement d'urgence sous forte tension : sortir de la gestion dans l'urgence, rapport d'information n° 193 (2016-2017) de M. Philippe Dallier, fait au nom de la commission des finances, 7 décembre 2016

* 52 Articles L. 302-5 et suivants du code de la construction et de l'habitation.

* 53 Les territoires choisis sont en majorité des métropoles, mais comprennent aussi des départements que des métropoles, d'autres établissements publics de coopération intercommunale et de simples communes.

* 54 Règlement général relatif au nouveau programme de renouvellement urbain, validé par le conseil d'administration du 16 juillet 2015, section 2.3.1 « La reconstitution de l'offre de logements locatifs sociaux ».

* 55 Ministère de la Cohésion des territoires, lettre de programmation 2018 des aides à la pierre au logement social, adressée le 21 décembre 2017 aux préfets de région.

* 56 Ministère de la Cohésion des territoires, Liste des délégations de compétence 2016, calculs commission des finances.

* 57 Cour des comptes, Les aides à la pierre : l'expérience des délégations de l'État aux intercommunalités et aux départements , mai 2011, p. 33.

* 58 Voir l'avis n° 111 (2011-2012) de MM. Claude Dilain et Thierry Repentin, fait au nom de la commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire, déposé le 17 novembre 2011.

* 59 Stratégie logement du Gouvernement, présentée le 20 septembre 2017.

* 60 Lettre de notification relative à la programmation 2017 des aides à la pierre pour le logement locatif social, adressée aux préfets de région, 16 décembre 2016.

* 61 Article 1 er de la loi organique n° 2001-692 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF).

* 62 Note d'exécution budgétaire précitée de la mission « Égalité des territoires et logement » pour l'exercice 2017, p. 71.

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