B. UNE DIFFUSION DES MACHINES INTELLIGENTES DANS TOUTES LES SPHÈRES D'ACTIVITÉ

1. Les robots industriels : une réalité ancienne en plein renouvellement
a) De l'outil à l'automate et au robot : brève histoire de la robotique industrielle

L'usine est le monde privilégié de la robotisation car la production de grandes séries standardisées offre un cadre propice à l'automatisation.

Les robots s'inscrivent d'abord dans le prolongement des automates de production : conçus pour effectuer des tâches basiques et répétitives, ces automates deviennent de plus en plus nombreux et complexifient le processus technique de production. Ils doivent être réglés avec une grande précision et n'ont aucune capacité d'adaptation : les ingénieurs, concepteurs des machines, doivent ainsi prévoir tous les cas de figure pour éviter l'arrêt des lignes de production.

Une brique technologique supplémentaire a été apportée par l'installation de robots dans les usines , qui constitue une tendance somme toute récente. Le premier robot industriel destiné à manipuler des pièces de fonderie à haute température a été installé dans une usine de General Motors du New Jersey en 1961. Les premières lignes de production robotisées ne sont apparues qu'au début des années 1970, pour des activités comme la soudure ou la peinture.

Les robots sont utilisés pour intervenir dans des milieux à risque où l'intervention humaine est difficile voire impossible , comme dans certaines zones des centrales nucléaires, ou pour la réalisation de tâches difficiles à réaliser par l'homme (manipulation d'objets lourds, assemblage d'objets très petits). Mais, comme les automates, ils sont aussi utilisés pour simplement remplacer l'ouvrier sur des lignes de production : ainsi, les robots de peinture dans l'industrie automobile effectuent le travail qui était celui des ouvriers de l'atelier peinture de l'usine.

Les robots présentent un avantage sur les automates : ils sont capables de s'adapter sur les lignes de production : ainsi, un robot de peinture pourra être programmé pour peindre une porte, puis programmé ensuite pour peindre un capot, et sera capable de prendre en compte des variations dans la manière dont lui sera présentée la porte en question pour ne pas peindre à côté.

Selon la fédération internationale de robotique (IFR) 16 ( * ) , les deux secteurs industriels les plus utilisateurs de robots aujourd'hui sont l'automobile et les industries électriques et électroniques qui totalisent chacune environ 30 % des nouvelles installations de robots chaque année. La métallurgie et la plasturgie sont aussi des secteurs consommateurs de robots mais dans des proportions moindres. Sans surprise, l'Asie est le plus gros consommateur de robots industriels avec 260 000 des 384 000 nouvelles unités installées en 2018, dont 133 000 en Chine. Le marché des robots industriels est estimé à 16,5 milliards d'euros par an et le stock de robots installés est évalué à 2,4 millions d'unités dans le monde et ce chiffre est appelé à croître. Il n'était que de 1,5 million en 2015.

b) Diffusion et perfectionnement des robots industriels : la France en retard ?

Les possibilités de développement de la robotique industrielle ont été renforcées par l'incorporation des technologies d'intelligence artificielle. Les robots sont ainsi capables d'analyser leur environnement et de comprendre par eux-mêmes les tâches à accomplir. De plus en plus flexibles, adaptables, les robots offrent la possibilité de personnaliser les travaux industriels, parfois même de faire du travail à façon , là où l'industrie reposait sur la standardisation à outrance. Ainsi, l'entreprise Adidas a ouvert en 2017 en Allemagne à Ansbach une usine baptisée « speed factory » totalement robotisée, équipée de robots très facilement reconfigurables, visant à adapter la production aux besoins spécifiques des clients qui lui passent commande.

Les experts considèrent que la France est en retard sur ses voisins et concurrents en matière de robotique industrielle Le rapport du député Bruno Bonnell et de Catherine Simon « Robotique et systèmes intelligents » publié en avril 2019 17 ( * ) déplore ce retard. La France est classée au 18 ème rang mondial de la densité robotique avec seulement 132 robots pour 10 000 ouvriers dans l'industrie en 2017, contre 309 en Allemagne et très loin du leader mondial, la Corée du Sud avec 631 unités pour 10 000 ouvriers.

Or, les robots sont sources de gains de productivité mais aussi de réduction de la pénibilité de certaines tâches. Les retards pris dans la robotisation des processus industriels sont aussi source de pertes de compétitivité dans des secteurs-clefs. En 2015, un rapport du Boston Consulting Group intitulé « The robotics revolution » 18 ( * ) estimait que la robotisation allait à terme générer des gains de productivité par salarié de l'ordre de 30 % et que les pays qui adopteraient rapidement ces technologies verraient leur compétitivité prix s'améliorer par rapport aux autres pays n'ayant pas choisi la même stratégie. La robotisation constitue donc un enjeu économique majeur.

L'introduction de robots dans l'industrie ne se résume pas au remplacement de tâches humaines par des machines. En réalité, la révolution robotique est aussi une révolution qualitative : de plus en plus de robots utilisés dans l'industrie sont des « cobots » , qui travaillent avec des humains. Une nouvelle division du travail s'instaure entre l'homme et la machine dans le but d'améliorer la performance globale du processus de production, sans pour autant conduire à une totale suppression de l'intervention humaine sur les lignes de production ou encore dans les activités de contrôle.

La robotique industrielle permet d'optimiser les processus, mais aussi de les renforcer, par exemple en amélorant les contrôles, des robots de contrôle pouvant effectuer une multitude de tests très rapidement, ce qui décharge les agents chargés de la supervision de tâches répétitives et usantes.

Qu'est-ce-qu'un cobot ?

Le terme de « cobot » est apparu en 1996. Il combine les mots « coopération » et « robotique ».

Il désigne une catégorie particulière de robots, non autonomes, qui sont destinés à accomplir des tâches en collaboration avec un opérateur humain. Ces robots sont dits passifs, appelés aussi parfois « robots assistants », car ils sont conçus pour aider des humains dans la réalisation de leurs missions dans le cadre d'un processus de production.

Un robot chirurgical, par exemple, constitue un cobot, dans la mesure où le geste chirurgical reste effectué par un chirurgien, mais il est rendu plus précis ou plus facile par le robot.

Les cobots constituent ainsi une forme d'outillage plus perfectionné, capable d'augmenter les capacités des travailleurs.

Le cobot peut être chargé de tâches pénibles ou répétitives, à faible valeur ajoutée. Il peut aussi intervenir là où un opérateur humain ne le pourrait pas tout seul, par exemple pour porter des charges.

Ils présentent l'avantage d'être en général moins coûteux, moins lourds et moins volumineux que les robots d'usine classiques.

2. Le large spectre de diffusion des robots intelligents
a) L'exemple de l'agriculture

Fortement mécanisée depuis les années 1950, l'agriculture semblait ne pas devoir être concernée par la robotisation et par l'intelligence artificielle. En réalité il n'en est rien.

Les métiers agricoles ont un fort potentiel d'automatisation pour la bonne et simple raison qu'ils sont très physiques et souvent répétitifs . La robotisation de certaines activités s'est largement diffusée ces dernières années, par exemple à travers les robots de traite des vaches, qui représentent 90 % des robots commercialisés en agriculture.

Mais les robots et l'intelligence artificielle peuvent être mis à contribution pour aller vers une agriculture de précision : mieux surveiller les cultures ou les troupeaux, analyser l'état des sols, conduire automatiquement les véhicules lors des phases de labour, de semis, d'épandage ou de moissons. Cela passe par l'observation satellite ou encore par des drones permettant d'estimer la biomasse sur une parcelle, le stress hydrique des plantes, ou encore la surveillance des animaux.

La transition vers l'agro-écologie peut aussi nécessiter la mise en place de robots intelligents, par exemple pour effectuer un désherbage mécanique destiné à remplacer le désherbage chimique.

Dans le rapport Villani sur l'intelligence artificielle précité, l'agriculture est identifiée comme l'un des terrains privilégiés d'application de l'IA, avec l'ambition de faire de la France un leader de « l'agriculture augmentée ». Concrètement, l'une des pistes proposées consiste à multiplier les capteurs connectés, postes avancés de l'observation des données utiles à l'activité agricole : météorologie, état des sols, etc...

Publié en 2015, le rapport Agriculture Innovation 2025 19 ( * ) qui avait été commandé par le ministre de l'agriculture à quatre experts avait souligné le fait que l'agriculture n'était pas à l'écart des innovations technologiques. Simplement, celles-ci se mettent en oeuvre de manière très décentralisée et parfois peu visible, car les exploitations agricoles sont marquées par une grande hétérogénéité et restent avant tout des petites entreprises, voire des très petites entreprises. Le processus d'innovation est donc plus saccadé et peu spectaculaire .

b) La logistique et les transports

Le secteur des transports et de la logistique est également un terrain de déploiement des robots intelligents. Se déplacer de manière autonome est en effet désormais une perspective proche, voire en univers fermé une réalité déjà palpable.

Les entrepôts automatisés se sont rapidement développés en utilisant les dernières technologies disponibles : marquage des objets par des puces RFID, robots de transport et logiciels de gestion d'entrepôt (WMS). L'intelligence artificielle est mise à contribution pour optimiser le stockage, le déplacement ou encore la composition des chargements. Cette automatisation présente un certain nombre d'avantages : possibilité de stocker en hauteur et donc d'économiser de la surface au sol et réduction de la taille des couloirs de circulation, possibilité de fonctionner 24 heures sur 24, diminution des erreurs et meilleur contrôle des opérations, réduction de la pénibilité des tâches transférées de l'homme à la machine : la robotisation des entrepôts évite aussi d'employer des opérateurs dans des environnements peu accueillants, par exemple dans un entrepôt frigorifique. L'automatisation de la collecte d'objets stockés en masse pour en faire des lots individuels est aussi mise en oeuvre à des échelles plus petites que les grands entrepôts industriels : ainsi, des robots assurent désormais la composition des piluliers dans les pharmacies hospitalières.

Le déplacement autonome à l'aide de robots intelligents fournit un nouvel horizon en matière de transports en milieu ouvert : c'est le défi du véhicule autonome. Lancée en mai 2018 par le Gouvernement, la stratégie nationale de développement des véhicules autonomes prévoit d'encourager l'expérimentation et de soutenir des projets-pilote. Des bus autonomes ont été testés (Navya, Easy Mile) mais ne sont pas encore déployés. Des géants de la nouvelle économie numérique comme Google depuis 2005 (avec Waymo) et Tesla (fonction autopilot) testent un pilotage totalement autonome des véhicules automobiles. Les constructeurs automobiles traditionnels se sont aussi lancés sur cette voie, qui transformerait la voiture en robot et modifierait totalement les habitudes et l'économie du secteur. En 2014, le cabinet américain IHS Automative avait affirmé que l'immense majorité du parc automobile en 2050 serait constitué de voitures 100 % autonomes. La mise au point de ces véhicules paraît cependant plus difficile techniquement qu'envisagé et le rythme de leur diffusion est encore très incertain.

c) La sécurité et la défense

D'importantes innovations sont apportées dans le secteur de la sécurité avec les robots intelligents et avec les progrès de l'intelligence artificielle.

En septembre 2019, un rapport de la « task force IA » du ministère de la défense 20 ( * ) identifiait l'IA comme un outil devant jouer un rôle majeur dans la recherche d'une « supériorité opérationnelle » des armées . L'IA permet de comprendre plus vite des situations, d'anticiper pour décider plus rapidement, mais aussi de mieux protéger le soldat ou le matériel, de libérer le soldat de tâches routinières, ce qui limite aussi le risque d'erreurs (le rapport pointe que 80 % des erreurs humaines surviennent lors de tâches routinières) ou encore d'optimiser les flux et les ressources. L'IA est aussi très utile en matière de cyberdéfense, par exemple dans la détection des cyberattaques. Les États-Unis ne s'y sont pas trompés : la DARPA 21 ( * ) finance depuis plusieurs années des projets consacrés à des applications militaires de l'IA (2 milliards de dollars en 5 ans annoncés en septembre 2018).

Mais l'IA et les robots intelligents sont aussi en plein développement dans le domaine de la sécurité hors du champ militaire . Une application particulièrement spectaculaire est celle de la reconnaissance faciale. Une note courte de l'OPECST publiée en juillet 2019 22 ( * ) et signée par le député Didier Baichère souligne que la reconnaissance faciale s'est diffusée rapidement et est désormais massivement utilisée (sécurisation des smartphones, paiement automatique, contrôle d'identité aux frontières). La note rappelle le principe de base de la reconnaissance faciale automatisée : « l'algorithme extrait d'une photo un gabarit, sorte de signature propre à chaque visage, puis il compare les gabarits issus d'autres images afin de déterminer si elles correspondent à une même personne ». Ces technologies se perfectionnent, en allant aujourd'hui vers une analyse en temps réel d'images de vidéoprotection, permettant aux forces de l'ordre une surveillance plus efficace de la voie publique. La reconnaissance faciale rencontre cependant certaines limites : il demeure certaines erreurs d'identification (même si le taux de succès est supérieur à 99,5 %) et il existe des écarts de performance des algorithmes de reconnaissance faciale entre différentes catégories de population. Par ailleurs, la reconnaissance faciale pose des questions éthiques. Il n'en reste pas moins que cette technologie est appelée à être massivement utilisée et remplacer les autres méthodes d'identification, ouvrant la voie à l'automatisation de processus, comme par exemple les contrôles physiques aux frontières dans les aéroports.

d) Les services financiers

L'IA s'est développée aussi massivement dans le domaine des services financiers, de la banque ou de l'assurance. Le rapport du PIPAME précité estime que « les services financiers sont aujourd'hui l'un des secteurs les plus matures dans l'usage des technologies de Machine Learning ». Les banques investissent massivement dans l'automatisation des processus, ce qui n'est pas surprenant car les activités de banque et d'assurance étaient déjà très normées. L'IA est mise à contribution pour faire l'évaluation des clients ( scoring ) lors d'une demande de crédit. Elle l'est aussi dans le domaine des placements financiers de manière tout à fait spectaculaire : en quelques années, les traders, personnes physiques chargées de gérer les portefeuilles, sont remplacés par des machines qui effectuent automatiquement des analyses et donnent des ordres sur les marchés au moyen d'algorithmes sans cesse plus perfectionnés. Ainsi, la banque d'affaires Goldman Sachs est passée entre 2000 et 2017 de 600 à 2 « equity traders » (traders sur le marché actions). Les transactions à haute fréquence (THF) représentent aujourd'hui une très large majorité des ordres passés sur les marchés boursiers mondiaux.

Cette automatisation extrêmement forte des activités dans le secteur des services financiers a permis l'émergence de banques à distance, sans guichet, élargissant les services et réduisant les coûts pour les clients. L'automatisation de processus de contrôle a aussi conduit à réduire les fraudes et à détecter mieux les erreurs.

e) La santé et le soin

La santé et le soin paraissent, à l'inverse des services financiers, bien peu automatisables, puisqu'il s'agit à chaque fois de cas particuliers et que la personnalisation doit être forte en la matière.

Or , le secteur de la santé connaît une digitalisation rapide à travers un foisonnement d'initiatives : bio-informatique, applications de e-santé, télémédecine. Un ouvrage collectif intitulé « Santé et intelligence artificielle » publié en octobre 2018 et dirigé par Bernard Nordlinger et Cédric Villani met en évidence des avancées essentielles permises par l'IA et le traitement en masse de données dans des domaines divers : dans l'interprétation des images en radiologie, anatomo-pathologie, cancérologie, dermatologie ; dans la modélisation de la croissance des tumeurs en cancérologie ; dans la génomique ou encore dans la recherche pharmaceutique ou la conduite d'essais cliniques. Des algorithmes sont mis à contribution pour aider aux diagnostics et aux choix thérapeutiques. L'ouvrage fournit un exemple précis : le risque de fracture d'origine ostéoporotique peut désormais être prédit en calculant de façon automatique la densité osseuse à partir de scanners abdominaux. L'IA permet aussi de repérer les associations médicamenteuses à risque.

La perspective d'une médecine totalement robotisée et de soins effectués par des machines est cependant aussi effrayante qu'illusoire. L'IA intervient surtout comme un outil d'aide à la décision. Par ailleurs, le déploiement d'outils d'IA en santé se heurte aux difficultés d'accès aux données de santé aujourd'hui très éclatées.

En outre, dans le domaine de la santé et du soin, il existe une préférence sociale forte pour une prise en charge par des humains : le rapport du PIPAME précité rappelait une étude récente d'OpinionWay qui indiquait que 51 % des personnes interrogées n'envisageaient pas de se fier à un diagnostic médical établi sans intervention humaine.

f) L'énergie et l'environnement

Les services liés à l'énergie ou l'environnement peuvent eux aussi être optimisés par l'utilisation de robots intelligents automatisant certaines tâches.

Une première tâche compliquée à gérer car elle nécessite des calculs incessants est celle de l'optimisation de l'approvisionnement en énergie. Les « smartgrids » sont littéralement des réseaux intelligents destinés à ajuster les flux d'électricité entre fournisseurs et consommateurs. Ils constituent une réponse possible au difficile stockage de l'électricité en optimisant le rendement des installations afin de répondre aux variations inévitables de la demande. Les smartgrids constituent aussi un outil utile pour intégrer aux réseaux des énergies propres très décentralisées comme le solaire ou l'éolien. L'automatisation de la gestion des réseaux d'approvisionnement électrique évite la surproduction électrique et parfois même la surconsommation, et contribue à une gestion plus efficace des réseaux de distribution.

Il en va de même en matière de distribution d'eau : la mise en place de compteurs intelligents qui renvoient régulièrement des données offre la possibilité de mieux surveiller le réseau et de repérer les éventuelles fuites.

Dans le domaine des risques environnementaux, l'IA permet d'élaborer des modèles précis qui s'appuient sur des masses de données. Dans la gestion de déchets, l'IA est aussi désormais utilisée pour le pilotage des unités de traitement.

g) Le commerce, les loisirs, le tourisme

Si ces secteurs sont marqués par l'importance des relations humaines et la recherche de personnalisation, le commerce, les loisirs et le tourisme n'échappent pas non plus à la tendance générale à la robotisation et à l'automatisation des tâches. Dans le commerce, les caissières sont remplacées par des automates qui déplacent les tâches de passage des articles et de paiement vers le client final. Toujours dans le commerce, des écrans interactifs sont capables de renseigner les clients sur la disponibilité d'articles, leur emplacement dans un magasin ou encore sur la disponibilité de tel ou tel service dans un centre commercial.

Le secteur des loisirs est aussi fortement impacté par l'irruption des technologies d'intelligence artificielle. En matière de jeux vidéo, il est possible de se mesurer à des adversaires physiquement présents ou connectés mais aussi directement à des machines programmées pour simuler un adversaire. Des robots permettent aussi d'entraîner des sportifs, comme le fait Forpheus, machine de tennis de table.

Ce sont aussi des algorithmes qui nous font des suggestions sur les plateformes de vidéo à la demande, en fonction de notre profil et de nos choix passés. La télévision et les médias connaissent un bouleversement d'ampleur avec les contenus à la demande : la consommation de contenus devient très personnalisée et rend obsolètes le « film du dimanche soir » ou le « JT de 20 heures », puisque l'on peut désormais visionner un film à toute heure et regarder le journal télévisé à la demande.

En matière de tourisme, Internet a déjà révolutionné les réservations d'hôtels, de billets d'avions ou de trains. L'IA est utilisée pour ajuster les prix en fonction des variations de l'offre et de la demande. Comme dans le commerce ou les autres formes de loisir, l'IA peut aussi faire de la publicité ciblée en fonction de notre profil et de nos destinations passées.

Des robots, enfin, peuvent remplacer des tâches d'accueil dans des hôtels ou des restaurants.

h) D'autres exemples encore

Comme toutes les technologies transversales, l'IA irrigue tous les secteurs d'activité , à des rythmes plus ou moins soutenus et avec une intensité plus ou moins forte, mais sans qu'aucun doute ne soit possible sur les tendances en cours et de manière inexorable, sans retour en arrière possible.

Sans prétendre à l'exhaustivité, on peut noter encore de nombreux domaines qui connaissent une automatisation des tâches à travers des algorithmes qui sont capables de réaliser des actions complexes, y compris d'analyse, dans des temps très courts.

On peut citer ici l'analyse juridique. La numérisation des décisions de justice et des dossiers de procédure combinée aux progrès des algorithmes de reconnaissance de textes permet d'effectuer des analyses de jurisprudence sans avoir à lire des milliers de page, simplement en interrogeant des assistants juridiques virtuels qui effectuent ensuite automatiquement des recherches. Se basant sur les données des contentieux passés, des sociétés comme LEGALIST aux États-Unis permettent aussi de prévoir les chances de réussite des procès et d'en évaluer les coûts probables. Les Legal techs proposent aussi d'automatiser la rédaction de contrats et de dématérialiser leur gestion, ce qui améliore la performance des cabinets chargés de ces tâches fastidieuses.

3. Les formes diverses des robots intelligents

La forme que prennent les robots intelligents est très variable : robot physique, mais aussi robot virtuel peuvent se côtoyer. Multitâches, les robots peuvent aussi être très spécialisés et ne répondre qu'à des besoins très limités. Finalement, le paysage des robots est aujourd'hui marqué par une fragmentation et s'avère très mouvant, du fait d'innovations technologiques permanentes et de l'imagination foisonnante d'une myriade de start-up.

Les compétitions de robots et les défis scientifiques contribuent à faire émerger de nombreuses initiatives dont certaines peuvent être reprises ensuite à l'échelle industrielle.

a) Le robot-humanoïde multitâches

Le robot-humanoïde autonome et capable de réaliser de nombreuses actions est le nec plus ultra des robots intelligents. Les propriétés mécaniques de ces robots sont particulièrement poussées, pour leur permettre de se déplacer et d'agir de manière autonome, en reproduisant autant que possible des gestes effectués par les humains.

Le robot humanoïde n'est plus un objet de science-fiction, symbolisé par C-3PO, le droïde de protocole imaginé en 1977 dans le premier film de la saga Star Wars. Plusieurs acteurs du monde de la robotique ont d'ores et déjà réalisé des robots humanoïdes : le robot Atlas de l'entreprise Boston Dynamics est capable de se déplacer avec aisance, de courir, de grimper ; le robot Fiodor, de conception russe, a été envoyé en août 2019 dans la station spatiale internationale pour aider les cosmonautes à réaliser des réparations ; les robots Nao, lancé en 2006 par la société Aldebaran (rachetée ensuite par SoftBank Robotics), puis Pepper, lancé en 2014 par la société SoftBank Robotics ont été conçus respectivement pour interagir en fonction des émotions perçues (Pepper). Ils sont déployés pour assurer des fonctions d'accueil commercial, ou encore pour des applications éducatives (interactions avec des enfants).

Ces robots ont cependant des capacités limitées . S'ils sont programmables, ils ne sont pas capables d'une infinité de tâches mais n'effectuent que celles qui leur sont affectées : un robot d'accueil saura reconnaître les émotions des clients et engager la conversation pour leur donner des informations, mais sera incapable de crier « au feu » si un incendie se déclenche à proximité, sauf à avoir été programmé spécialement pour cela. Les robots sont dépourvus de capacité d'initiative et d'innovation.

Certains robots humanoïdes sont encore plus simples et, n'embarquant pas d'intelligence artificielle, constituent en réalité de simples automates. Le robot Zora, doté aussi d'un aspect humanoïde, est ainsi utilisé dans quelques maisons de retraite pour donner des cours d'exercice physique, lire des documents. Mais il est dépourvu de capacités d'adaptation à son environnement.

b) Les assistants vocaux

Les assistants vocaux constituent une autre forme de robot, peut-être plus simple que le robot humanoïde . Ces assistants vocaux ont pu se développer grâce aux progrès des technologies de reconnaissance vocale numérique. Ils ont d'abord été intégrés aux smartphones pour permettre de commander des actions par la voix (assistant Siri installé en 2011 sur les produits Apple). Le marché des assistants virtuels s'est peu à peu diversifié avec aujourd'hui plusieurs produits et plusieurs plateformes techniques disponibles : Siri (Apple), Google Assistant (Google), Alexa (Amazon), Cortana (Microsoft), Djingo (Orange), Bixby (Samsung). Ces assistants vocaux se retrouvent aussi dans les voitures. Récemment, des assistants vocaux domestiques (Amazon Echo, Google Home, etc...) ont été commercialisés : ils permettent de faire des recherches sur Internet, commander des appareils domestiques (lumières, volets électriques), lancer des musiques, indiquer la météo, etc...

Ces assistants vocaux se perfectionnent en cours d'utilisation : dotés d'IA, ils repèrent les préférences des utilisateurs et s'adaptent à celles-ci. Ils introduisent une interactivité homme/objet jusque dans la vie quotidienne, et ont été adoptés très rapidement.

c) Les chatbots ou robots conversationnels

Les « chatbots » sont des machines destinées à dialoguer avec des personnes réelles en leur donnant l'impression qu'elles discutent avec des personnes physiques. Ils ne comprennent pas la conversation mais visent à imiter un interlocuteur humain dans un dialogue. C'est en cela qu'on classe les chatbots dans la catégorie des applications « d'IA faible ». La programmation des chatbots nécessite d'entrer un très grand nombre de données pour répondre à la diversité des conversations possibles.

Ils peuvent être utilisés dans différentes applications, notamment le télémarketing, ou encore pour guider un voyageur dans son choix de trajet, ou pour finaliser des transactions de e-commerce. En général, les chatbots sont spécialisés dans un domaine particulier, et ne sont pas capables de soutenir tout type de conversation.

Les chatbots présentent l'avantage d'être rapides, disponibles tout le temps (y compris en dehors des horaires d'ouverture habituels d'un service) et assez faciles d'utilisation. Ils peuvent cependant aussi être piégés et ne pas être capables de répondre à toutes les questions. C'est pourquoi un transfert sur des interlocuteurs humains peut être nécessaire en second niveau.

d) L'intelligence artificielle embarquée sur ordinateur

Dépourvu d'enveloppe physique, ne se manifestant qu'à travers un terminal informatique quelconque (ordinateur, tablette, smartphone), un robot virtuel n'en reste pas moins un puissant outil pour automatiser certaines tâches et les réaliser de manière plus rapide et plus fiable qu'un humain.

Les programmes d'IA sont ainsi capables d'optimiser un trajet en fonction de la connaissance des flux habituels de circulation et des flux constatés par d'autres utilisateurs connectés : l'application Waze, par exemple, est dépourvue d'enveloppe physique autre qu'un affichage cartographique sur un terminal (smartphone ou tablette). Pour autant, cette application effectue des calculs d'itinéraire plus performants que ceux qui peuvent être effectués par des humains.


* 16 Source : https://ifr.org/

* 17 https://www.brunobonnell-villeurbanne.fr/robotique/

* 18 https://www.bcg.com/fr-fr/publications/2015/lean-manufacturing-innovation-robotics-revolution-next-great-leap-manufacturing.aspx

* 19 https://inra-dam-front-resources-cdn.wedia-group.com/ressources/afile/308989-6b234-resource-rapport-agriculture-innovation-2025.html

* 20 https://www.defense.gouv.fr/content/download/566257/9754780/Strate%CC%81gie%20de%20l%27Intelligence%20artificielle%20au%20service%20de%20la%20D%C3%A9fense.pdf

* 21 Defense Advanced Research Projects Agency

* 22 http://www.senat.fr/fileadmin/Fichiers/Images/opecst/quatre_pages/OPECST_2019_0068_note_reconnaissance_faciale.pdf

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