B. LA RÉFORME DES NATIONS UNIES : UNE NÉCESSITÉ POUR L'AVENIR

1. La réforme portée par le Secrétaire général

Depuis son arrivée en 2017, le Secrétaire Général des Nations Unies (SGNU), M. Antonio Guterres, promeut un ambitieux projet de réforme de l'ONU, que la France soutient. Il comporte trois piliers :

- la réforme du pilier paix et sécurité

Ses priorités sont la prévention des crises, l'amélioration des opérations de maintien de la paix et des missions politiques spéciales, ainsi qu'une meilleure intégration des logiques de développement dans le règlement des crises (« continuum paix-sécurité »).

La réforme se concrétise par une refonte de l'organigramme du Secrétariat , avec la transformation du Département des affaires politiques en un Département des Affaires politiques et de consolidation de la paix (DPPA), et celle du département des opérations de maintien de la paix (DOMP) en un département des opérations de paix (DPO).

Le SGNU souhaite par ailleurs renforcer les relations avec les organisations régionales (UA, UE, l'ASEAN, Ligue arabe, etc), notamment pour améliorer la planification et la communication stratégiques.

- la réforme du système de développement

Il s'agit d'améliorer la coordination sur le terrain des entités onusiennes intervenant dans le champ du développement et d'améliorer la contribution du système onusien à la mise en oeuvre du Programme de développement durable à l'horizon 2030.

L'ONU et l'Agenda 2030 en faveur du développement durable

Le 25 septembre 2015, l'Assemblée générale des Nations Unies a adopté un « programme de développement durable à l'horizon 2030 », qui définit 17 objectifs de développement durable (ODD) déclinés en 169 cibles et 232 indicateurs à atteindre en 2030.

Cet Agenda 2030 ambitionne de transformer en profondeur les trajectoires et les modalités de développement en vue d'éradiquer la pauvreté . Objectifs non contraignants, les ODD représentent un véritable changement de paradigme dans la mesure où ils visent à approfondir coopération entre pays du Sud et du Nord en matière de développement, alors celui-ci était jusqu'à présent perçu comme un transfert de ressources, de technologies et de compétences du Nord vers le Sud. L'un des principaux engagements pris par les 193 Etats membres qui ont adopté l'Agenda 2030 est de « ne laisser personne derrière » (« leaving no one behind »). Il est impératif d'atteindre les personnes les plus vulnérables.

Le Forum de Politique de Haut Niveau est l'instance de suivi de la mise en oeuvre des ODD, qui sont entrés en vigueur le 1er janvier 2016. En septembre 2019, l'une des sessions a pris la forme d'un Sommet ODD afin de faire le point sur leur mise en oeuvre quatre ans après leur adoption et de leur donner une nouvelle impulsion. Le SGNU a l'intention de faire de la décennie 2020 la décennie de l'action en faveur du développement durable.

La réforme du système de développement des Nations Unies a pour objectif principal de le rendre mieux à même d'accompagner les Etats dans la mise en oeuvre de l'Agenda 2030. Le renforcement du rôle du coordonnateur résident et la nouvelle génération d'équipes pays sur le terrain permettent d'assurer une action intégrée et coordonnée des entités du système de développement des Nations Unies (SDNU) présentes à l'échelle nationale, pour accompagner les Etats vers l'atteinte de leurs priorités en matière de développement économique et social.

Plusieurs institutions onusiennes oeuvrent en faveur du développement économique et social. C'est particulièrement le cas de la deuxième Commission de l'Assemblée générale . Le Conseil économique et social , ou ECOSOC, est l'un des six organes principaux de l'Organisation des Nations Unies. Il est placé sous l'égide de l'Assemblée Générale des Nations Unies et a un rôle consultatif concernant les questions de coopération économique et sociale internationale. Il promeut les trois dimensions - économique, sociale et environnementale - du développement durable. Il établit un lien entre des entités très diverses du système des Nations Unies qui oeuvrent en faveur du développement durable, auxquelles il communique des orientations générales et dont il coordonne l'action.

Le Département des affaires économiques et sociales (DAES) constitue, quant à lui, le pilier du développement du Secrétariat de l'ONU et travaille, avec ses neuf divisions, à la promotion du développement durable. Le DAES promeut et soutient la coopération internationale dans la poursuite du développement durable. Il aborde une série de questions transversales qui affectent la vie et les moyens de subsistance des populations, en particulier les plus vulnérables.

Par ailleurs, les organismes des Nations Unies oeuvrent de diverses manières à la promotion d'objectifs économiques et sociaux. Les mandats des institutions spécialisées, des agences, fonds et programmes des Nations unies couvrent pratiquement tous les domaines de l'activité économique et sociale. Ces institutions offrent une assistance technique et d'autres formes d'aides pratiques aux pays du monde entier. En coopération avec l'ONU, elles aident à formuler des politiques, à définir des normes et des directives, à promouvoir l'appui nécessaire et à mobiliser des fonds.

Le renforcement du rôle du coordonnateur résidant et le réaménagement de l'approche régionale sont deux mesures clés de la réforme du développement. Comme l'a expliqué Mme Bintou Keïta, Secrétaire général adjoint pour l'Afrique, lors de son entretien avec la délégation, elles doivent notamment permettre de répondre au besoin d'une approche plus intégrée des opérations de maintien de la paix, combinant sécurité, développement et appui aux Etats (« capacity building »).

Dans le cadre de la réforme, le Pacte de financement, instrument non contraignant visant à améliorer la qualité du financement du SDNU, a été adopté à l'été 2019.

- la réforme de la gestion

Elle vise à soutenir les autres piliers de la réforme et se fonde sur le constat d'un déficit de confiance entre les Etats membres et le Secrétariat.

Cette réforme repose sur un changement de culture au sein du Secrétariat, visant à passer d'une culture du processus à une culture du résultat.

Les trois objectifs fixés sont : donner aux agents les moyens de remplir leurs mandats, réorganiser les structures et rendre l'organisation plus transparente, notamment pour la budgétisation.

2. La réforme du Conseil de sécurité

Un autre enjeu pour l'avenir de l'ONU est la réforme du Conseil de sécurité . Cette réforme est surtout portée par les Etats dits du G4 (Allemagne, Brésil, Inde, Japon) qui briguent un siège de membre permanent.

Il existe cependant des revendications concurrentes de la part d'autres groupes d'Etats (groupe « Unis pour le consensus » ou « UfC », groupe des Etats africains, groupe des Etats arabes) 2 ( * ) qui, ajoutées aux réticences de certains membres du P5 (Etats-Unis, Russie et surtout Chine), bloquent toute avancée.

Les débats portent également sur la méthode à retenir. Certains groupes (UfC mais aussi Chine) privilégient la recherche du « consensus » qui est pourtant hors d'atteinte et entretient le blocage. La dernière - et seule - réforme du Conseil de sécurité en 1963 était passée par un vote.

Lors de son déplacement, la délégation a pu assister à un débat en séance plénière à l'Assemblée générale sur ce sujet, à l'occasion duquel la France - qui soutient l'Allemagne - a estimé qu'il était temps de passer aux actes et a appelé à négocier sur la base d'un texte ( cf. l'intervention de notre représentant permanent reproduite en annexe ) . C'est aussi le souhait de l'Allemagne, qui espère des progrès sur ce dossier à l'occasion du 75 e anniversaire des Nations Unies en 2020.

Face à la paralysie du Conseil de sécurité dans la crise syrienne, la France a proposé, en 2013, un encadrement du recours au veto en cas d'atrocités de masse sous la forme d'un engagement collectif et volontaire des membres permanents. À l'occasion du 70 è anniversaire des Nations Unies en 2015, le Président de la République a annoncé que la France appliquerait unilatéralement cette proposition.

Notre initiative, introduite conjointement avec le Mexique, est aujourd'hui soutenue par 102 pays, qui ont signé une déclaration politique de soutien à nos efforts. La dynamique s'est toutefois ralentie (8 soutiens depuis mai 2016, les derniers étant le Koweït, l'Afrique du Sud en 2018 et l'Argentine en août 2019).


* 2 Le groupe « Unis pour le Consensus » réunit, entre autres, l'Italie, le Pakistan, le Mexique et l'Argentine, qui sont favorables à un élargissement du Conseil de Sécurité en faveur de nouveaux membres non-permanents uniquement. Les Etats africains , y compris l'Afrique du nord, défendent le « Consensus d'Ezulwini », position de l'Union africaine arrêtée en 200. Ils souhaitent une meilleure présence de l'Afrique au Conseil par la création de deux sièges permanents avec droit de veto et de deux sièges non-permanents supplémentaires (en plus des trois actuels). Les Etats arabes sont actuellement représentés avec un siège attribué alternativement au sein du groupe Afrique et du groupe Asie, en l'absence d'un groupe régional spécifique. La Ligue arabe revendique l'attribution d'un siège permanent à un Etat arabe, mais cette position, surtout défendue par l'Egypte, ne fait pas consensus.

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